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Collection « Les auteur(e)s classiques »
Une édition électronique sera réalisée à partir du texte d'Édouard CHAVANNES (1865-1918), Le dieu du sol dans la Chine antique **. Appendice au T’ai chan, Paris : Éditions Ernest LEROUX, 1910, pages 437 à 526. Reprise en fac-simile par Phénix éditions, Paris, 2004. Une édition numérique réalisée par Pierre Palpant, bénévole, Paris. Introduction C07. Édouard CHAVANNES : Le dieu du sol dans la Chine antique (1910). Quelques mots d’introduction… Le culte du dieu du sol est extrêmement ancien en Chine. Je voudrais essayer de montrer comment il s’est constitué ; cette recherche n’est pas sans importance, car elle nous permettra d’apercevoir quelques uns des aspects les plus primitifs des croyances religieuses de l’Extrême-Orient. Le dieu du sol est la personnification des énergies qui résident dans le sol. Chaque parcelle de sol a son dieu qui lui appartient en propre ; mais la division du sol, étant déterminée par les groupements humains qui l’occupent, varie suivant l’extension de ces groupements ; à ces répartitions diverses du territoire correspond toute une hiérarchie de dieux du sol. A la base est le dieu du sol familial. Il était constitué autrefois par l’emplacement situé au-dessous d’un orifice qu’on ménageait au milieu de l’habitation ; cet emplacement s’appelait le tchong lieou. Les caractères qui forment son nom indiquent d’une part qu’il était au centre, c’est-à-dire qu’il concentrait en lui toutes les forces inhérentes au sol familial, d’autre part, qu’il était exposé à la pluie c’est-à-dire qu’il était à ciel ouvert pour permettre à la terre de participer au mouvement d’échanges qui constitue la vie universelle. Le tchong lieou était l’une des cinq divinités familiales auxquelles on rendait un culte dans l’antiquité, les quatre autres étant : le fourneau dans lequel brûle le feu domestique, le puits où réside le génie de l’eau, la porte extérieure et les portes intérieures dont les dieux veillent aux rites de passage qui protègent toute enceinte. De nos jours, le tchong lieou n’existe plus sous ce nom ; mais il a son équivalent dans le petit génie local t’ou ti chen auquel chaque famille sacrifie ; dans les rues de toute cité chinoise, vers le soir, s’allument en plein air à l’entrée des boutiques les bâtonnets d’encens qui fument devant sa tablette ; si on l’honore de telle façon c’est que, la terre étant en dernière analyse l’origine de tous les biens dont l’homme peut jouir, les petits dieux locaux ont fini par n’être plus considérés que comme des dieux de la prospérité familiale ; on les vénère aujourd’hui, non plus comme des puissances naturistes, mais comme de bons génies qui font gagner beaucoup d’argent. … et de conclusion. Cependant, à côté de ces divinités colossales qui éclipsent toutes les autres par leur éclat, continuent à subsister les antiques dieux du sol et des moissons et le temple ancestral, témoins des croyances les plus invétérées de la race. Ils représentent les sentiments primitifs du laboureur qui, dans sa rude tâche journalière, comptait sur l’appui surnaturel de ses ancêtres comme un enfant se confie en son père, et qui implorait la clémence du sol natal pour que des cataclysmes imprévus ne vinssent pas ruiner l’espoir de ses jeunes moissons. Ce culte local et familial est le substratum le plus profond de la pensée religieuse en Chine : rien n’est plus près des origines que le dieu du sol et le temple ancestral.
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