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Collection « Les auteur(e)s classiques »
Une édition électronique sera réalisée à partir du texte d'Édouard CHAVANNES (1865-1918), “La divination par l’écaille de tortue dans la haute antiquité chinoise” *. Article paru dans Le Journal Asiatique, 1911, Sér.10, T. 17, pp. 127-137. Une édition numérique réalisée par Pierre Palpant, bénévole, Paris. Introduction C09. Édouard CHAVANNES : La divination par l’écaille de tortue, dans la haute antiquité chinoise (1911). Quelques mots d’introduction… Les premiers siècles de l’histoire de Chine sont fort obscurs ; la raison principale de cette imperfection de nos connais-sances est que l’archéologie n’a pas jusqu’ici apporté aux textes littéraires le complément d’informations dont ils ont besoin. Cet état de choses changera sans doute lorsqu’on aura entrepris de faire des fouilles dans le vieux sol où gisent enterrés les vestiges des époques disparues. A défaut de ces recherches méthodiques qui n’ont pas encore été pratiquées, un hasard heureux a fait découvrir, il y a une dizaine d’années, tout un ensemble de documents qui méritent au plus haut point de retenir notre attention, car ils paraissent être antérieurs au premier millénaire avant notre ère. En l’année 1899, on exhuma, dans des conditions que nous ignorons, plusieurs milliers de fragments d’écaille de tortue et d’os, couverts de caractères d’écriture, dans une localité située à à l’ouest de la sous-préfecture de Ngan-yang, qui constitue la ville préfectorale de Tchang-tö, dans le nord de la province de Ho-nan. … et de conclusion. En conclusion ces documents, malgré leur aspect fragmentaire, présentent un grand intérêt. Tout d’abord, ils paraissent bien être les plus anciens monuments écrits de la Chine et ils permettent de remonter à un stade de l’écriture que nous ne pouvions atteindre jusqu’ici ; Pour suivre les évolutions des formes graphiques des caractères, ils apportent des indications toutes nouvelles. D’autre part, ils sont gravés au couteau et on peut se demander si c’était là une pratique réservée aux écailles de tortue et aux os, ou si on écrivait de la même manière quand on écrivait sur bois ; la question sera peut-être insoluble, car il y a peu de chances pour qu’on retrouve jamais des fiches en bois datant du deuxième millénaire avant notre ère. A un autre point de vue, ces débris d’écaille et d’os ont une haute importance : jusqu’ici la dynastie des Yin était à demi légendaire ; sans doute, Confucius était un descendant des Yin et il déclarait vouloir se conformer aux rites que pratiquaient ses lointains ancêtres ; cependant, quand nous lisions le chapitre de Sseu-ma Ts’ien sur les Yin, nous constations qu’il était, comme le chapitre sur les Hia, presque exclusivement composé de citations du Chou king insérées dans une liste généalogique et suivies des traditions relatives au dernier souverain qui perdit la dynastie par ses fautes ; c’est à peine si les brèves inscriptions des vases de bronze nous permettaient de tracer quelques linéaments fermes dans l’imprécision des légendes ; les textes exhumés à Ngan-yang marquent mieux la personnalité historique des Yin ; ils nous font assister à la vie de ces anciens souverains qui partageaient leur temps entre l’agriculture et la chasse et qui consultaient leurs ancêétres sur toutes les questions qui leur importaient ; l’histoire réelle de la Chine se trouve ainsi reculée de plusieurs siècles. Enfin, quand ces débris des plus anciens âges n’auraient eu d’autre mérite que de nous renseigner sur les procédés de la divination, ils seraient déjà par là même dignes d’attirer notre attention ; c’est grâce à eux en effet que nous savons maintenant avec quelque précision quelles manipulations on faisait subir à l’écaille de tortue pour la consulter ; nous comprenons mieux des textes qui étaient restés ambigus et nous pouvons reconstituer des cérémonies qui jouèrent un rôle considérable dans les préoccupations des hommes d’autrefois.
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