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Collection « Les auteur(e)s classiques »
Une édition électronique sera réalisée à partir du texte de Pierre Commelin (1837- ), Mythologie grecque et romaine. Édition illustrée de nombreuses reproductions. Paris: Éditions Garnier et Frères, 1960, 516 pages. 65 illustrations. Une édition numérique réalisée par Pierre Palpant, pré-retraité, bénévole. Introduction par Pierre Commelin Cet ouvrage sadresse surtout aux personnes désireuses de connaître la Mythologie traditionnelle des Grecs et des Latins. Il ne saurait entrer dans nos vues de faire ici uvre dérudition, chose dailleurs plus fastidieuse quutile, si lon considère les différents ouvrages de ce genre parus depuis quelques années. Mais hâtons-nous dajouter que ces ouvrages ne se lisent guère ; et nous nous proposons au contraire de nous faire lire, en donnant à ce travail un caractère dutilité. La Mythologie est évidemment une série de mensonges. Mais ces mensonges ont été, durant de longs siècles, des sujets de croyance. Ils ont eu, dans lesprit des Grecs et des Latins, la valeur de dogmes et de réalités. À ce titre, ils ont inspiré les hommes, soutenu des institutions parfois très respectables, suggéré aux artistes, aux poètes, aux littérateurs lidée de créations et même dadmirables chefs-duvre. Cest donc, croyons-nous, un devoir de les respecter ici, et de les reproduire dans leur entière simplicité, sans pédantisme et sans commentaire, avec leurs étranges, leurs merveilleux détails, sans nous préoccuper de leur invraisemblance ou de leurs contradictions. En fait de croyances, lhumanité se laisse guider non par sa raison, mais par le désir, le besoin de connaître la raison des êtres et des choses. Les doctrines philosophiques ne sauraient la satisfaire : il y a trop de merveilles sous ses yeux pour quelle nen recherche pas la cause. Elle sadresse dabord à la science ; mais, si la science est incapable de linstruire, comme il lui faut une explication suffisante ou satisfaisante, elle sadresse à son propre cur et à son imagination. Dans lenfance des peuples, dit-on, tout nest que croyances, articles de foi. Cest entendu. Mais dans lâge mûr des peuples, lors même que la science a dévoilé, lui semble-t-il, un grand nombre des mystères de la nature, lHumanité peut-elle se flatter dévoluer en pleine lumière ? Dans le monde ne reste-t-il pas encore une infinité de coins ténébreux ? En admettant même que tous les secrets de la nature visible et palpable fussent révélés, ne restera-t-il pas toujours ce monde métaphysique, invisible et insaisissable, sur lequel la science a si peu de prise, et que la philosophie, malgré ses efforts, na pu jusquici ni éclaircir ni pénétrer ? Lantiquité, dont les connaissances scientifiques étaient si imparfaites, si rudimentaires, plaça une divinité partout où, pour elle, il ny avait que mystère. Cest là, en partie, ce qui explique le grand nombre des dieux. Mais il y a plus. Tout ce qui frappa dadmiration, détonnement, de crainte ou dhorreur les premiers hommes prit à leurs yeux un caractère divin. Pour lhumanité primitive, la divinité représente tout ce qui dépasse la conception humaine. Dieu nest pas seulement lêtre absolu, parfait, tout-puissant, souverainement généreux et bon, cest aussi lêtre extraordinaire, monstrueux, prodige à la fois de force, de malveillance et de méchanceté. Et ce ne sont pas seulement les êtres animés qui se trouvent revêtus de ce caractère divin, aux yeux de lhumanité des premiers âges : les choses elles-mêmes sont divines. En un mot, ce nest pas la divinité qui pénètre les choses, ce sont les choses elles-mêmes qui sont réellement la divinité. Une âme divine, répandue partout, dans ce monde, se divise en une infinité dâmes également divines, réparties de tous côtés entre la diversité des créatures, si bien que les vertus, les passions les plus abstraites de lhomme ont aussi ce privilège dêtre empreintes dune marque surnaturelle, de porter le sceau divin, et de revêtir, avec une physionomie particulière, les insignes et les attributs de la divinité. Étudier la Mythologie, cest sinitier à la conception dun monde primitif, aperçu dans un demi-jour, ou plutôt dans une pénombre mystérieuse, pendant de longues années. Ny voir que les aberrations desprits frustes et superstitieux, cest nen juger sans doute que daprès les apparences ; mais, dautre part, ny voir que des allégories transparentes, chercher lexplication de tous ces mythes, de toutes ces fables, de toutes ces légendes, dans lobservation du monde physique, cest outrepasser gratuitement les limites de la réalité. Dans cette longue énumération de croyances mythologiques, acceptées par les peuples anciens, limagination, la fantaisie ont une large part. Chaque siècle, chaque génération sest plu à augmenter le nombre de ses dieux, de ses héros, de ses merveilles et de ses miracles. Aux données lointaines, même de lÉgypte ou de lAsie, la Grèce et Rome ont ajouté les produits de leur imagination. Les images des dieux soffrent à nous sous des aspects si divers quil est parfois dune extrême difficulté den décrire le type le plus universellement reconnu. Leurs traits se sont modifiés entre les mains de tant dartistes, et par le caprice de tant décrivains qui sen sont occupés ! Depuis quelques années, il est de mise, en littérature, de désigner les divinités grecques par leur dénomination hellénique. Est-ce simplement par un scrupule dexactitude mythologique, ou pour faire montre dérudition ? Nous nosons nous prononcer. Mais, de quelque nom que lon désigne les dieux de la fable, il nen est pas un seul qui exprime luniversalité de leurs attributs, pas un seul qui donne une idée exacte de ce quétait la même divinité en Grèce et à Rome. Sans doute lappellation grecque a lavantage dêtre assez précise lorsquil ne sagit que dinterpréter les uvres artistiques et littéraires des Grecs ; sans doute les noms tels que Zeus, Hèra, Hèphæstos, Arès, Héraclès, etc.., ne sauraient surprendre, ni dérouter le lecteur ou lauditeur averti, mais il faut bien reconnaître et avouer que ces noms ne disent pas grandchose au public français, et ne devaient pas en dire davantage au peuple romain. Ajoutons même que, pour loreille française, sils ne sont pas barbares, ils semblent parfois dépourvus dharmonie. Lérudition ou le pédantisme aura beau faire, le public français sobstinera toujours à employer, dans le langage usuel, les noms romains de Jupiter, Junon, Apollon, Mars, Hercule, etc.., qui nous sont familiers. Est-ce notre faute à nous, si la Gaule a été conquise, non par la Grèce, mais par Rome ? Nous sommes un peuple latin de langue, sinon dorigine ; ce sont, malgré nous, et en dépit des savants, les mots latins qui reviennent sur nos lèvres, et cest Rome qui dabord nous a enseigné le nom et les attributs de ses dieux. Il est vrai quelle-même sétait approprié la plupart des divinités de la Grèce. Mais, en les introduisant chez elle, dans son culte et dans ses murs, elle les désigna par des noms qui leur sont restés. Quelle ait confondu ses divinités nationales ou traditionnelles avec celles des Grecs, en se les appropriant, cest une autre question. Dailleurs, en Grèce même, chaque divinité navait pas dans toutes les villes, dans toutes les régions, le même caractère ni les mêmes attributs. Ainsi donc, ce nest pas, à proprement parler, commettre une hérésie mythologique que de désigner les dieux dHomère et dHésiode, à la façon de Virgile et dHorace, par des noms purement et essentiellement latins. Nous nous sommes arrêté à ce dernier parti. Est-ce à dire que lon ne doive faire aucune distinction entre la Mythologie grecque et la Mythologie romaine ? Telle nest pas notre pensée. Mais la Mythologie dont nous nous occupons ici est celle qui permet de comprendre, dinterpréter les uvres, les monuments, les écrits de deux civilisations dont linfluence sest fait et se fait encore heureusement sentir dans nos travaux artistiques et littéraires. Pour expliquer et apprécier le génie dAthènes et celui de Rome, il est nécessaire de posséder au moins quelques notions de Mythologie. Que de passages resteraient inexplicables dans les auteurs les plus répandus, sans la connaissance de ces notions ! Que de jeunes gens se trouvent arrêtés, nous ne dirons pas dans Homère, Hésiode, Pindare, mais dans Ovide, Virgile, Horace, même dans un grand nombre dauteurs français, par des difficultés qui résident dans une allusion, une comparaison, une réminiscence mythologique ! Nous nignorons pas que, en littérature, la Mythologie est quelque peu délaissée. Mais elle a eu sa période de renaissance et de faveur ; elle a marqué notre langage de son empreinte ; elle reste toujours un trésor didées séduisantes et de splendides tableaux. Aujourdhui, si nous nous en rapportons aux expositions annuelles de la peinture et de la sculpture, les divinités anciennes comptent encore dans le monde des artistes beaucoup dadeptes ou de fidèles prosélytes. Longtemps encore le pinceau et le burin sefforceront de reproduire, sous linspiration des Muses et des Grâces, les actions, les attitudes, la physionomie, la démarche des dieux et des héros. Dans le domaine de lart, lhistoire ne saurait lemporter sur la fable : la réalité, si merveilleuse, si sublime, si inspiratrice quelle soit, est cependant limitée dans sa sphère ; tandis quil ny a ni bornes ni mesure dans les données de limagination et du sentiment. Ainsi donc, si grande que lon fasse la part de la vérité historique, jamais, aux yeux de lartiste et du poète, elle naura lamplitude, la fécondité et le prestige de la fiction. Quon nous pardonne ces considérations. Elles nétaient pas sans doute indispensables, comme exorde à cet ouvrage ; elles ne laisseront pas toutefois dindiquer nos intentions et notre but. En publiant cette Mythologie, nous navons pas oublié quelle est destinée aux études de la jeunesse autant quaux artistes et aux gens du monde. On reconnaîtra que nous nous sommes efforcé, non seulement dédifier le lecteur sur tout ce que comporte la Fable, mais encore de ne jamais le surprendre ou le blesser par lindiscrétion dune image ou linconvenance dune expression. La difficulté de notre travail ne consistait pas évidemment dans la recherche de documents nouveaux. Il ne sagissait pour nous ni de compulser les archives, ni de remuer le sol pour exhumer des divinités inconnues. La Mythologie de la Grèce et de Rome se compose de faits et de légendes qui font partie du domaine public, on les trouve partout épars dans des livres que tout le monde a sous la main. Les savantes investigations de lantiquaire pourront éclaircir, modifier quelque détail ; elles ne changeront rien à lensemble des traditions fondées par les poètes et désormais consacrées par le temps. Nous nous sommes donc appliqué à coordonner des matériaux qui abondent, à disposer les différentes parties de notre ouvrage de manière à présenter au lecteur une sorte de tableau. Tout dabord, nous exposons les croyances relatives à la genèse du monde et des dieux. Ensuite, après avoir passé en revue successivement les divinités de lOlympe, celles de lAir, de la Terre, de la Mer, et des Enfers, nous racontons les légendes héroïques, en les classant, autant que possible, par régions, ou en les groupant autour dexpéditions fabuleuses dune grande célébrité. On nous pardonnera de nous être laissé entraîner à quelques redites. Toutes ces légendes mythologiques sont liées les unes aux autres, et il est difficile de les détacher, de les raconter isolément, sans reproduire des particularités communes. Du reste, nous avons pensé que, si une Mythologie, comme une Histoire, peut être lobjet dune lecture suivie, elle reste, après cette lecture, un véritable répertoire où chaque article doit fournir de complets éclaircissements. Cest dans ce but que nous avons placé, après la table des matières, un index analytique, à la fin du volume. On reconnaîtra que les nombreuses gravures et les dessins dont cet ouvrage est illustré et enrichi, ont tous un caractère dauthenticité. Les uns, empruntés aux monuments antiques, ont la valeur dindiscutables documents ; les autres, reproductions dadmirables chefs-duvre, donneront un aperçu de ce que la sculpture et lart en général trouvent de ressources dans les inspirations des poètes et les religieuses conceptions de la Mythologie.
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