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Collection « Les auteur(e)s classiques »
Une édition électronique réalisée à partir du texte de Henri PIRENNE (1862-1935), historien belge [professeur à l'Université de Liège et à l'Université de Gand], Mahomet et Charlemagne. 1re édition, 1937. Paris: Les Presses universitaires de France, 1992, 224 pp. Collection Quadrige. Une édition numérique réalisée par Pierre Palpant, bénévole, Paris. Conclusion De tout ce qui précède se dégagent, semble-t-il, deux constata-tions essentielles : 1° Les invasions germaniques n’ont mis fin ni à l’unité méditerranéenne du monde antique, ni à ce que l’on peut constater d’essentiel dans la culture romaine, telle qu’elle se conservait encore au Ve siècle, à l’époque où il n’y a plus d’empereur en Occident. Malgré les troubles et les pertes qui en ont résulté, il n’apparaît de principes nouveaux, ni dans l’ordre économique, ni dans l’ordre social, ni dans la situation linguistique, ni dans les institutions. Ce qui subsiste de civilisation est méditerranéen. C’est aux bords de la mer que se conserve la culture et c’est de là que sortent les nouveautés : monachisme, conversion des Anglo‑Saxons, art barbare, etc. L’Orient est le facteur fécondant ; Constantinople, le centre du monde. En 600, le monde n’a pas pris une physionomie qualitativement différente de celle qu’il avait en 400. 2° La rupture de la tradition antique a eu pour instrument l’avance rapide et imprévue de l’Islam. Elle a eu pour conséquence de séparer définitivement l’Orient de l’Occident, en mettant fin à l’unité méditerranéenne. Des pays comme l’Afrique et l’Espagne, qui avaient continué à participer à la communauté occidentale, gravitent désormais dans l’orbite de Bagdad. C’est une autre religion, une autre culture dans tous les domaines, qui y apparaît. La Méditerranée occidentale, devenue un lac musulman, cesse d’être la voie des échanges et des idées qu’elle n’avait cessé d’être jusqu’alors. L’Occident est embouteillé et forcé de vivre sur lui-même, en vase clos. Pour la première fois depuis toujours, l’axe de la vie historique est repoussé de la Méditerranée vers le nord. La décadence, où tombe à la suite de cela le royaume mérovingien, fait apparaître une nouvelle dynastie, originaire des régions germaniques du Nord, la Carolingienne. Le pape s’allie à elle, rompant avec l’empereur qui, absorbé par la lutte contre les Musulmans, ne peut plus le défendre. Ainsi l’Église s’allie au nouveau cours des choses. Dans Rome, dans le nouvel Empire qu’elle fonde, il n’y a plus qu’elle. Et son emprise est d’autant plus grande que l’État, incapable de conserver son administration, se laisse absorber par la féodalité, suite fatale de la régression économique. Toutes les conséquences de ceci apparaissent éclatantes après Charlemagne. Avec des nuances différentes suivant les régions, l’Europe, dominée par l’Église et la féodalité, prend alors une physio-nomie nouvelle. Le Moyen Age, pour conserver la locution tradi-tionnelle, commence. La transition a été longue. On peut dire qu’elle occupe tout le siècle, qui va de 650 à 750. C’est pendant cette période d’anarchie que la tradition antique se perd et que les éléments nou-veaux prennent le dessus. L’évolution s’achève en 800, par la constitution du nouvel Empire, qui consacre la rupture de l’Occident et de l’Orient par cela même qu’il donne à l’Occident un nouvel Empire romain ; c’est la preuve évidente qu’il a rompu avec l’ancien qui se continue à Constantinople.
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