Feu le Comintern
Présentation
Par Charles Jacquier
Mort à paris le 1er novembre 1884, Boris Souvarine connaissait, après de longues années d’oubli, un regain d’intérêt à la suite de la réédition, en 1977, par les éditions Champ libre de son maître-livre, Staline, aperçu historique du bolchevisme, paru pour la première fois en 1935. La même année, l’éditeur de Guy Debord republiait également Dix ans au pays du mensonge déconcertant d’Ante Cigila, inscrivant à son catalogue un autre livre fondamental pour la critique de gauche du stalinisme.
Depuis la parution en 1973 du premier tome de L’archipel du Goulag d’Alexandre Soljenitsyne, le landernau intellectuel était agité par un faux débat sur la nature de l’URSS et des autres formations capitalistes bureaucratique d’État. Après avoir calomnié, ignoré ou nié les analyses ou les témoignages des auteurs qui tentaient d’éclairer l’opinion sur le caractère totalitaire et contre-révolutionnaire des régimes indûment qualifiés de « socialistes », les mêmes chiens de garde, sentant le vent tourner, s’apprêtaient à retourner leur veste avec plus ou moins d’aplomb, brûlant aujourd’hui ce qu’ils avaient adoré hier. Mais, dans les deux cas, c’était, tout à la fois, la simple vérité et la décence ordinaire qui devaient en pâtir.
Au moment où Camp libre reprenait les livres de Souvarine et de Cigila, on était en effet à un tournant : soit la prise de conscience de ce qu’était l’URSS libérait la voix étouffée des révolutionnaires antistaliniens et permettait la refondation d’un projet émancipateur libéré des mensonges déconcertants qui l’avaient trop longtemps entravé ; soit elle ne servait que de cache-sexe à la restructuration idéologique d’un système capitaliste en crise qui devait, pour perdurer, en finir avec le compromis social issu de la deuxième guerre mondiale. D’où, on l’aura compris, l’importance de Boris Souvarine, à ce moment pour savoir quelle direction prendra la critique de l’URSS. C’est, comme on le sait, le second terme qui l’emportera ; les horreurs passées du stalinisme et de ses dérivés faisant utilement diversion aux crimes présents d’un hyper-capitalisme mortifère. Pour Souvarine, après quelques parutions au début des années 1980, notamment l’indispensable reprint de la revue La Critique sociale (1931-1934), son œuvre est retombée dans l’oubli. Cependant, l’alternative évoquée ci-dessus n’a en rien perdu de sa pertinence. Faut-il se contenter de la doxa commune et accepter que nous soyons condamnés à vivre dans ce monde, alors même que ses méfaits comme ses impasses apparaissent chaque jour au plus grand nombre ? Quel usage de l’histoire des révolutions manquées du siècle passé doit-on faire ? Et comment les comprendre en ignorant le témoignage d’acteurs de premier plan ?
Durant ses dernières années, malgré la fatigue et la maladie, Boris Souvarine s’était attelé à la rédaction de ses Mémoires. Retrouvant la possibilité de publier ou de republier ses textes et celle d’écrire des articles pour un large public, il voulait livrer un témoignage direct qui aurait rectifié les erreurs, les contresens, les approximations qui touchaient à cette période essentielle de l’histoire du xxe siècle et dont il avait été un acteur de premier plan. Avec la guerre de 1914-1918, le capitalisme avait déchainé une brutalisation industrielle jamais atteinte auparavant, tout en laissant ses opposants se rallier piteusement ou assister impuissants, à l’horreur. Peu après, les espoirs d’une reconstruction rapide d’un mouvement révolutionnaire exsangue avec la « grande lueur à l’Est » de la Révolution russe aboutissaient à un régime autoritaire et dictatorial qui n’avait rien à envier au fascisme.
La mort de Souvarine nous a privés d’un document exceptionnel sur les débuts de l’Internationale communiste (IC) et les raisons de sa rapide dégénérescence, mais les premières pages de ce manuscrit, déjà écrites, étaient là. En les publiant aujourd’hui pour la première fois, augmentées de quelques articles peu connus, on éclaire les premiers engagements politiques de son auteur durant la première guerre mondiale. Alors que son centenaire occupe l’espace des commémorations, il y a peu de chances que l’on s’intéresse aux oppositions à l’Union sacrée, cet unanimisme étatique qui, de l’extrême gauche à l’extrême droite, dominé les esprits, avec un seul but : l’anéantissement de l’adversaire. C’est pourtant de ces minorités opposées à la guerre que surgit l’Octobre russe et l’Internationale communiste dont l’objectif était la révolution mondiale pour en finir avec les horreurs d’un conflit aux dimensions inédites [1].
Afin d’éclairer les pages écrites par Souvarine sur cette période, rappelons quel fut son itinéraire jusqu’en 1924. Boris Lifschitz naquit le 24 octobre 1895 à Kiev, selon le calendrier grégorien. Il était le second fils de Kalman Lifschitz, né le 15 mars 1868, et de Mina Steinberg, née le 22 mars 1971. La famille Lifschitz était d’origine juive et habitait à Kiev, où le père était ouvrier joaillier. Après avoir travaillé pour le célèbre atelier Marchak, il s’installa à son compte, puis décida de quitter la Russie en 1897 pour venir en France, considérée par de nombreux juifs russes, victimes des mesures discriminatoires du tsarisme, comme la patrie de la Déclaration des droits de l’homme. Au début, un ami de la famille déjà installé à Paris avait loué un petit appartement dans le quartier du Marais et trouvé un premier travail à Kalman. La famille Lifschitz ne connut pas véritablement la misère, mais pendant un certain temps vécut pauvrement, ces premières années parisiennes étant endeuillées par la mort de deux enfants, Jacques, emporté par la diphtérie, et Lucie par la méningite.
Kalman Lifschitz fit l’acquisition à crédit, en 1907, d’un fonds de commerce et d’un appartement situé au 9 de la rue Cadet (IXe arrondissement). Le 15 mars de la même année naissait un nouvel enfant dans la famille, Jeanne. En 1906, la famille Lifschitz demanda la nationalité française en date 22 avril. C’est à la présentation de documents russes manuscrits que la date de naissance de Boris fut mal retranscrite, 1895 se transformant en 1893. La naturalisation fut obtenue quelques mois plus tard, le 26 août.
Le jeune Boris entra à l’École primaire supérieure Colbert, mais à la suite d’un incident disciplinaire, fut renvoyé de l’établissement et en éprouva un fort sentiment d’injustice. Il entra ensuite, grâce à son père, comme apprenti dans une usine d’aviation de Levallois-Perret, puis dans un atelier d’art décoratif, cité du Paradis, et, enfin, à la revue mensuelle Art et Joaillerie, dirigée par un vieil anarchiste qui lui fit connaître les titres de la célèbre « Bibliothèque sociologique » publiée chez Stock, où l’on trouvait les livres de Michel Bakounine, Christian Cornelissen, Georges Darien, Jean Grave, Augustin Hamon, Pierre Kropotkine, Louise Michel, Ferdinand Domela Nieuwenhuis, Élisée Reclus, Adhémar Schwitzguébel, Max Stirner, Laurent Tailhade, Léon Tolstoï, etc. À la fin de sa vie, il évoquait encore l’influence de Autour d’une vie de Kropotkine qu’il avait recommandé sa vie durant, et précisait : « C’est dire que les idées politiques et sociales que je partageais alors n’aveint rien de dogmatiques, soumises qu’elles étaient à des considérations morales, personnelles en ma conscience » [2]. Il lisait également les Cahiers de la Quinzaine de Charles Péguy, qui le captivaient jusqu’à ce que les violentes attaques de la revue contre Jaurès, à l’occasion de l’adoption de la loi de trois ans sur le service militaire contre les dangers du militarisme allemand, à laquelle s’opposèrent les socialistes, jette un sérieux trouble sur cette admiration.
C’est à partir de la grande grève des cheminots de 1910 que le jeune homme commença à s’intéresser à la politique et à lire les journaux socialistes et anarchistes, comme La Bataille syndicaliste, La Guerre sociale, les Hommes du jour, L’Humanité, etc. En même temps que son frère aîné et deux amis, René Apercé (dit René Raynaud) et Henri Suchet, il suivait les cours de l’Université populaire « La Coopération des idées », fondée le 9 octobre 1899 par Georges Deherme dans le quartier du faubourg Saint-Antoine. Parmi ses lectures, citons notamment Kant Leibniz, Schopenhauer, Spencer, Stuart Mill, et parmi les théoriciens socialistes Engels, Guesde, Jaurès et Marx, grâce aux résumés du Capital de l’avocat guesdiste Gabriel Deville et de l’anarchiste italien Carlo Cafiero [3].
Muni d’un solide savoir d’autodidacte, Boris Lifschitz apparaissait à la veille du premier conflit mondial comme « nourri d’une culture politique à la fois libertaire et socialiste », penchant « sous l’influence de Jaurès vers un socialisme pragmatique », avec cependant les références au guesdisme, en particulier à Paul Lafargue, signe de son intérêt pour l’œuvre de Marx, dont les guesdistes avaient été, pour le meilleur et pour le pire, les principaux introducteurs en France.
Appelé sous les drapeaux, les états de service du jeune Lifschitz sont les suivants : incorporé au 155e régiment d’infanterie le 28 septembre 1913, il est affecté le 10 septembre suivant à la 22e section des commis et ouvriers d’administration, puis muté à Paris dans une section de l’intendance et enfin réformé n° 2, le 28 mars 1916, à la suite du décès de son frère Léon, l’année précédente.
Sa dernière affectation lui permit de rencontrer par l’intermédiaire d’Alexandre Lavigne, fils d’un célèbre militant socialiste de la Gironde, les animateurs de l’hebdomadaire socialiste Le Populaire, notamment Paul Faure et Jean Longuet. Ceux-ci s’opposaient à la majorité de la SFIO ralliée à l’Union sacrée. Cette minorité composée majoritairement d’anciens guesdistes s’appuyait sur la fédération de la Haute-Vienne et, après la seconde conférence socialiste internationale à Kienthal (Suisse) d’avril 1916, se structurera autour du Comité de défense du socialisme international (CDSI). Le jeune militant n’avait toutefois pas attendu sa démobilisation pour publier son premier article politique dans un petit journal pacifiste anglais de l’Independent Labour Party, le Labour Leader, sous la signature de Robert Dell, correspondant à Paris du Manchester Guardian, pour rendre compte d’un Conseil national du Parti socialiste.
Le signe de son entrée dans le journalisme révolutionnaire et le militantisme politique fut, sans doute, l’adoption de son pseudonyme, Boris Lifschitz devenant Boris Souvarine, en reprenant le nom d’un des principaux personnages du Germinal d’Émile Zola. Ce choix affirmait « son attachement à la culture russe et à la réminiscence de son ancien attrait pour les théories anarchistes », mais pouvait aussi signifier « la difficulté à porter un nom juif (à consonance quelque peu germanique), en pleine guerre, dans une France profondément imprégnée par l’antisémitisme, et cela en dépit du fait que lui-même et sa famille étaient dégagés de toute culture religieuse juive et se considéraient uniquement comme citoyens, religieusement affranchis » [4].
Souvarine adhéra à la IXe section du parti socialiste et au CDSI, tout en fréquentant les réunions de la Société d’études documentaires et critiques sur la guerre et le petit bureau d’Alphonse Merrheim, rue de la Grange-aux-Belles à la Maison des syndicats, premier foyer syndicaliste d’opposition à la guerre. À propos de cette période, il écrivit : « L’essentiel était l’opposition à la poursuite “jusqu’au bout” (et quel bout ?) de cette guerre devenue insensée, la renonciation aux appétits impérialistes, la reprise des relations internationales entre socialistes fidèles aux principes » [5]. À la suite de son article dans le Populaire (n° 31, 27 novembre 1916), « À nos amis qui sont en Suisse », Lénine lui répondit par une lettre ouverte » qui constitua, selon lui, « un commencement d’initiation au léninisme » [6].
En novembre 1917, malgré son enthousiasme pour la révolution, il publia dans l’hebdomadaire anarchiste de Sébastien Faure. Ce qu’il faut dire (n° 78, samedi 17 novembre 1917) un article sur « La commune maximaliste », dans lequel il écrivait : « Il est à craindre que pour Lénine et ses amis, la “dictature du prolétariat” doive être la dictature des bolcheviki et de leur chef. Ce pourrait devenir un malheur pour la classe ouvrière russe et, par suite, pour le prolétariat mondial » [7]. Il analysait donc très lucidement la logique d’une situation où le pouvoir d’un homme, ou d’une secte, se substituerait au pouvoir du peuple. Il était donc alors loin d’un ralliement au bolchevisme…
Rédacteur au Journal du peuple d’Henri Fabre et secrétaire de rédaction au Populaire, Souvarine devint en mars 1917, l’un des vingt-cinq responsables du CDSI, puis, en octobre, membre du comité exécutif de la Fédération dans les mois suivants cette position critique sur l’action des bolcheviks sous l’influence de Kemerer (Victor Taratouta), très influent dans l’équipe qui publiait Le Populaire.
Il affirma son soutien aux bolcheviks au cours des séances de la commission d’enquête sur la situation en Russie convoquée par la Ligue des droits de l’homme en décembre 1918, les comptes rendus des débats étant publiés dans le Bulletin des droits de l’homme l’année suivante (n° 3, 1er février et n° 4, 15 février 1919). Souvarine s’y livrait à une vigoureuse défense de « la thèse bolcheviste », sur les principaux points soulevés par ses contradicteurs, extrêmement critiques sur la paix de Brest-Litovsk et la « dictature du prolétariat ».
Après la fondation de la IIIe Internationale le Comintern , à Moscou (2-6 mars 1919), Souvarine s’engagea, avec toujours plus de passion, pour le ralliement des révolutionnaires français à celle-ci. Ainsi, dans un article de L’Avenir international (n° 25, janvier 1920), significativement intitulé « Brûlons les vieilles étiquettes », Souvarine demandait aux « pionniers de la Révolution sociale » désireux de mettre les masses en mouvement « qu’ils dégagent, du fatras des vieilles formules et des vieux groupes, des conceptions fraîches et une organisation neuve, qui rassembleront les forces éparses du prolétariat révolutionnaire à la IIIe Internationale » [8].
Cependant, la rédaction du Populaire n’avait pas approuvé la constitution de la IIIe Internationale, et Souvarine cessa d’y collaborer, tandis que ses rapports avec Jean Longuet et le Comité de reconstruction de l’Internationale (l’ancien CDSI) se détérioraient rapidement. Désormais opposé à ses anciens camarades de la minorité socialiste non ralliée au bolchevisme, il adhéra au Comité de la IIIe Internationale, dont il devait devenir l’un des trois secrétaires aux côtés de Fernand Loriot et Pierre Monatte, tout en créant la revue de ce comité, le Bulletin communiste, en mars 1920. Celle-ci devint peu après la revue théorique de la Section française de l’Internationale communiste, le premier nom du Parti communiste français.
En contact avec Henriette Roland-Holst du bureau auxiliaire de la IIIe Internationale à Amsterdam à partir de février 1920, Souvarine joua un rôle de premier plan dans le ralliement de la majorité du parti Socialiste à la IIIe Internationale. Mais son arrestation, avec les deux secrétaires du Comité, au moment de la grève des cheminots de mai 1920, laissa le champ libre aux initiatives des « reconstructeurs » qui envisageaient un ralliement aux conditions de l’Internationale par opportunisme. Après son procès, terminé par une relaxe, Souvarine reprit sa place à la direction du nouveau parti né au congrès du Comintern (22 juin-12 juillet 1921). Resté à Moscou, il fut coopté, sur décision de Lénine, au secrétariat de l’Internationale communiste. Demeurant en URSS, et membre des plus hautes instances de l’Internationale, Souvarine cristallisa sur son nom la plupart des conflits qui secouèrent le nouveau parti, symbolisant l’autoritarisme de l’IC au congrès de Marseille (2-31 décembre 1921), où la droite et le centre s’opposèrent avec succès à sa réélection au comité directeur [9].
Après cette première période de l’histoire du PCF, dominée par la lutte entre la « gauche », soutenue par l’IC, et la « droite », plus sociale-démocrate, va commencer un nouveau type de conflits à l’intérieur de l’ancienne « gauche », surdéterminé par les déchirements pour la succession de Lénine. Symboliquement, Souvarine sera le premier exclu de ces affrontements dans le parti français et dans l’Internationale.
Avant la mort de Lénine, les conséquences de l’échec de l’insurrection allemande d’octobre 1923 et le débat dans le parti russe sur le devenir économique et politique de l’URSS montraient à Souvarine que de nouveaux problèmes se posaient où, derrière les questions de stratégie et de tactique, se trouvaient des enjeux de pouvoir. Ces conflits se doublaient de conflits dans le parti français où, en juin 1923, le représentant de l’IC auprès des partis latins, Jules Humbert-Droz, s’inquiétait des méthodes autoritaires d’Albert Treint, soutenu par Zinoviev et la direction de l’IC. Le 21 janvier 1924, le décès de Lénine aggrava ces luttes dont l’objectif était d’écarter Léon Trotski. Dans une lettre ouverte, « Cours nouveau » (Pravda, 11 décembre 1923), celui-ci avait en effet préconisé la démocratie dans le Parti et fustigé le bureaucratisme comme une « déviation malsaine ». Il se forma une alliance autour de Staline, Kamenev et Zinoviev, la troïka : comme secrétaire général, le premier « tenait » déjà l’appareil du Parti, tandis que le dernier, dirigeant de l’IC, se chargeait de la mise sous tutelle des différentes sections nationales sous prétexte de « bolchevisation ». Derrière d’obscurs débats d’organisation, de stratégie ou de tactique, il s’agissait de mettre au pas les partis communistes étrangers. En URSS même, l’enjeu se résumait à une lutte acharnée pour le contrôle de l’appareil du Parti-État sur une société asservie.
Boris Souvarine réclama en vain un véritable débat dans le parti russe et tenta d’en donner des éléments dans le parti français, en traduisant notamment « Cours nouveau » [10]. Après plusieurs mois de luttes internes, il fut exclu de manière « temporaire » de toutes ses responsabilités nationales et internationales au cours du Ve Congrès de l’IC (17 juin-8 juillet 1924). Tenté un instant de s’installer en URSS, il en fut dissuadé par la tournure de plus en plus autoritaire du régime et revint en France en janvier 1925. Il entama alors une nouvelle période de sa vie, celle du communiste dissident, sans doute la plus riche intellectuellement et politiquement, mais c’est déjà une autre histoire…
Laissons là l’itinéraire de Souvarine qui s’est lui-même exprimé sur cette période et y revient ici même [11]. Et terminons, en laissant le lecteur découvrir ces pages qui éclairent les prémices d’un engagement dans ce qui reste encore aujourd’hui la plus terrible tragédie du xxe siècle. Non que celui-ci fût avare, bien au contraire, mais les autres drames affichaient la couleur sur fond de guerre, de réaction et de racisme. Dans ce cas, au contraire, bien qu’elle soit une contre-révolution, elle se dissimule sous les oripeaux fallacieux du socialisme et barre l’horizon de ceux qui veulent en finir avec le monde comme il va. Raison de plus pour remonter à la source et en comprendre les causes sans renoncer à l’essentiel : l’émancipation sociale et la sortie du capitalisme !
Charles Jacquier
Janvier 2015
[1] Lire Julien Chuzeville, Militants contre la guerre 1914-1918, Spartacus, 2014.
[2] Citation tirée d’extraits d’une note biographique inédite de Boris Souvarine (Archives personnelles) correspondant à la première partie non retrouvée de 17 feuillets du manuscrit original de « Feu le Comintern ».
[3] Carlo Cafiero, Abrégé du Capital [1910], Marseille, Le Chien rouge, 2013.
[4] Jean-Louis Panné, Boris Souvarine : prémices d’un itinéraire politique (1895-1919), Mémoire de maîtrise sous la direction de J.-L. Robert, Université de Paris I, 1991-1992, p. 68. Lire également, Pierre Aubéry, « quelques sources du thème de l’action directe dans Germinal », in Pour une lecture ouvrière de la littérature, Éditions syndicalistes, 1970, p. 31-44.
[5] Boris Souvarine, « Une controverse avec Lénine 1916-1917 », in Lénine, Lettre ouverte à Boris Souvarine, avant-propos, article, notes et post-scriptum par B. Souvarine, Spartacus, série A, n° 38, juin 1970, p. 3.
[6] Boris Souvarine, Souvenirs sur Panaït Istrati, Isaac Babel, Pierre Pascal, suivi de Lettre à Alexandre Solenitsyne, Éditions Gérard Lebocivi, 1985, p. 137.
[7] Lire infra « La commune maximaliste », p. 49.
[8] Sur la crise qui voit la « greffe du bolchevisme sur le tronc de la gauche ouvrière française » après la première guerre mondiale, lire Annie Kriegel, Aux origines du communisme français, Paris, Flammarion/Sciences, 1970.
[9] Sur cette période, lire Philippe Robrieux, Histoire intérieure du Parti communiste français 1920-1945, t. I, Paris, Fayard, 1982.
[10] Nous reproduisons des extraits de sa préface à ce texte infra, p. 56-58.
[11] En dehors des textes reproduits dans ce volume, lire : Boris Souvarine, Autour du congrès de Tours, Paris, Éditions Champ libre, 1981 ; Sur Lénine, Trotsky et Staline, paris, Éditions Allia, 1990.
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