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Collection « Les auteur(e)s classiques »
Une édition électronique, notamment de “L’art de la guerre”, réalisée à partir de SUN TSE et les anciens Chinois OU TSE et SE MA FA. (Ve au IIIe siècles avant J.-C.). Textes traduits par le P. Amiot, présentés et annotés par Lucien NACHIN (1885-1952). Paris: Collection Les Classiques de l’art militaire, Éditions Berger-Levrault, 1948, XIX+184 pages. Une édition réalisée par Pierre Palpant, bénévole, Paris. Avant-propos B24. SUN TSE et les anciens Chinois OU TSE et SE MA FA. Le plus ancien des traités chinois connus est intitulé Sun Tse ping fa, c’est-àdire : Règles de l’Art militaire de Sun Tse [css : souvent traduit aujourd’hui : L’art de la guerre]. Soun ou, connu sous le nom de Sun Tse ou Sun Tzu, vivait dans la deuxième moitié du VIe siècle av. J.-C. A cette époque, la Chine n’était pas encore unifée ; néanmoins, au prix de luttes incessantes, les États les plus puissants avaient aggloméré les plus faibles dans des sortes de ligues, plus voisines du système féodal que du régime fédératif. La ligue de Tsinn (à laquelle Sun Tse paraît avoir été attaché), groupait les territoires actuels du Chann-Si, sauf la vallée de la Oé (Torinn) ; la ligue de Tchrou dominait dans les États du Ho-nann d’aujourd’hui ; Tsri, enfin, réunissait les principautés du bas Yang-tse Kiang et du Tché-tsiang. Chacune de ces ligues avait une frontière en contact avec des peuples non‑Chinois, belliqueux, pillards et toujours prêts à entreprendre de fructueuses razzias à la moindre apparence de faiblesse des paisibles populations agricoles qui habitaient les riches vallées de l’est et du sud. Aussi, l’état d’alerte était-il permanent dans la Chine ancienne ; à côté d’une armée professionnelle, les États avaient organisé un système de conscription. Des tours de guet pour signaler les incursions, des places fortes pour retenir les envahisseurs constituaient la base de la défense, mais une longue expérience avait enseigné aux généraux chinois que, dans la lutte des armées régulières contre les nomades, l’initiative dans les opérations, la hardiesse et la vigueur dans l’exécution constituent les meilleurs garants du succès. Il n’est donc pas surprenant de trouver, dès cette époque, tous les éléments d’une doctrine de guerre complète, et c’est cette doctrine que Sun Tse expose dans son Art de la Guerre. La personnalité historique de Sun Tse est à peu près inconnue. Dans le recul du temps, elle se confond avec celle des penseurs, des guerriers, des administrateurs qui pullulent à la cour des grands vassaux ou des principicules dont les noms et les hauts faits sont, depuis longtemps, tombés dans l’oubli. Le perpétuel mouvement brownien qui agite le peuple chinois, sans altérer sa masse, n’est pas un fait récent. Il s’observe aussi loin que les annales consignent les événements qui perturbent la vie normale de ces populations laborieuses et retracent leur lutte incessante contre les fléaux dévastateurs : inondations gigantesques, invasions des barbares, guerres intestines, brigandages, pillages, incendies, épidémies, famines, rien en somme, question d’échelle mise à part, qui différencierait le sort des populations chinoises de celles des autres contrées du monde s’il n’y avait cette extraordinaire continuité, unique dans l’histoire contemporaine, d’un peuple parlant la même langue, vivant sur le même sol et pénétré des mêmes traditions depuis plus de quatre mille ans. Les quelques traits légendaires dont les scoliastes ont cru devoir orner la vie de Sun Tse sont, en fait, négligeables parce que invérifiables, mais ce qui importe le plus, c’est que la doctrine dont il s’est fait le propagateur répond si bien, non seulement à la mentalité chinoise, mais à la conception humaine de la lutte, qu’elle a conservé toute son actualité. C’est sans étonnement que nous voyons Sun Tse se référer à des pratiques usitées par des généraux chinois qui vivaient un millénaire avant lui, mais nous ne serons pas davantage surpris de voir, dès le Ve siècle après J.-C., ses préceptes devenir le bréviaire obligatoire de tous ceux qui prétendaient exercer un commandement et cette tradition fut si bien implantée que le parti Tche li, constitué en 1916, ne voulut connaître d’autre doctrine militaire que celle énoncée par les vieux stratèges, en sorte que Ou Prei fou, chef d’état-major de Tsrao Koun et son lieutenant Fong lu-siang revendiquent le titre de disciples authentiques de Sun Tse. Les luttes que ces deux généraux poursuivent en 1922 contre Tchang Tso-linn, vice-roi de Mandchourie, puis, en 1923, contre les Sudistes, en 1924 autour de Péking, s’éclairent d’un jour tout particulier après une lecture de l’Art de la Guerre. Les Nippons ont également largement puisé à cette source et ils ont tenté l’adaptation à leurs méthodes des maximes du vieux Sun Tse. Ignorer celles-ci, c’est donc s’exposer à méconnaître les principes qui ont inspiré toutes les opérations de la guerre d’Extrême-Orient. Le conflit qui opposa Nippons et Chinois et qui vient de se terminer par la victoire de ces derniers, marque aussi la précellence des maximes de Sun Tse, correctement interprétées, sur des théories adultérées par des emprunts faits aux doctrines européennes. Entendons bien que Sun Tse n’eut jamais la prétention d’apporter la recette du succès, ni d’apprendre à faire la guerre. Il n’a pas tenté de mettre la victoire en équation, mais seulement de faire toucher du doigt l’extraordinaire variété des éléments qui interviennent dans un problème de guerre. Tout ce qu’il énonce est facile à comprendre, mais reste inassimilable pour quiconque n’a pas l’instinct de la lutte. En fait, l’analyse des éléments à combiner et l’appréciation de l’efficacité des moyens à mettre en œuvre constituent des spéculations qui peuvent, après coup, tenter les historiens, mais n’effleurent jamais la pensée d’un véritable homme de guerre. C’est l’intuition qui donne à ce dernier la perception directe de la réalité, telle qu’elle se présente à un moment donné et c’est le génie militaire qui suggère la solution la mieux appropriée, compromis inévitable entre des exigences contradictoires. L’étude fait les savants, a dit Napoléon, la nature seule fait les grands capitaines. Mais cette intuition, ce génie ne prennent toute leur ampleur, n’acquièrent toute leur originalité et ne réalisent des combinaisons fructueuses que si l’intelligence dont le génie émane condense toute l’évolution sociale contemporaine, embrasse tous les problèmes et saisit toutes les relations. Et c’est là ce que Sun Tse a voulu faire toucher du doigt à ses disciples lorsqu’il les invite à réfléchir longtemps à l’avance, à toujours observer, à concentrer leur pensée et à n’avoir jamais l’esprit en repos. Ces qualités sont si rares que Sun Tse ne s’abuse pas sur la fréquence de leur apparition, mais il a la sagesse de prémunir ses élèves contre deux défauts fréquents, nuisibles l’un et l’autre : l’imitation et la réaction. L’imitation conduit à ériger en système un ensemble de procédés qui, dans une circonstance déterminée, ont abouti aux résultats attendus. Pratique fâcheuse, pense Sun Tse, car les circonstances ne sont jamais les mêmes, et ainsi le système joue toujours à faux. La réaction consiste à prendre le contre-pied de ce qui se pratique sans peser si les usages adoptés ne correspondent pas à une certaine permanence des causes qui les ont engendrés. Prétention orgueilleuse, selon Sun Tse, que de méconnaître les enseignements des grands capitaines dont les hauts faits doivent rester un objet de constante méditation pour tous ceux qui veulent suivre les traces de ces illustres devanciers ! L’enseignement de Sun Tse est ainsi un perpétuel balancement entre des notions exactes mais contradictoires, des vérités expérimentales mais de sens contraire, des constatations justes mais qui s’opposent. N’être ni imitateur, ni contempteur définissent négativement la position intellectuelle de l’homme de guerre. Il faut aussi que ce dernier ait conscience de l’objet positif de l’action. Sur ce point, Sun Tse s’élève notablement au-dessus de la plupart des penseurs militaires. Il reflète les conceptions des philosophes dont il fut le contemporain et qui tentèrent d’enseigner à la nature humaine les plus nobles idéaux. Éloigné de tout mysticisme, Sun Tse ne se fait aucune illusion sur les mobiles qui font agir les individus. Il prend ces derniers et en particulier les guerriers, tels qu’ils sont et il suggère les moyens propres à faire concourir leurs qualités et leurs défauts à la réalisation des fins pour lesquelles ils sont rassemblés. Or, la guerre n’est pas une fin pour Sun Tse : c’est un moyen d’acquérir la paix que souhaitent tous les hommes. La victoire n’est pas une fin si le prix dont elle a été payée est plus ruineux que le combat indécis. La bataille n’est pas une fin si elle n’a pas pour effet de convaincre l’ennemi que la lutte est désormais impossible. La destruction de l’ennemi n’est pas davantage une fin que l’anéantissement des richesses et l’incendie des lieux, car les sentiments de haine que déchaîne une telle méthode sont générateurs de conflits perpétuels. Il ne faut donc faire la guerre que si on ne peut l’éviter ; on ne recherchera la victoire que si aucun compromis ne peut être trouvé et la bataille ne sera engagée que si les ruses et les stratagèmes, les marches et les manœuvres n’ont pu réussir à acculer l’ennemi dans une situation telle que l’impossibilité de vaincre soit devenue évidente pour lui. Dans tout ennemi, il faut voir un allié de demain comme dans tout allié un ennemi éventuel. Cette sagesse n’a pas encore été départie aux Occidentaux. Non moins remarquables semblent les recommandations d’aimer le soldat, de sentir l’âme des subordonnés, de se préparer à la guerre par l’étude et la réflexion, de connaître l’ennemi aussi bien, sinon mieux que ses propres forces, de ménager les populations vaincues comme de traiter humainement les prisonniers de guerre. Tels sont les préceptes que la tradition, du moins, fait remonter à Sun Tse sans qu’il y ait certitude qu’il soit bien l’auteur de tous. Ce que l’on peut présumer, c’est que nous ne possédons que des fragments de son œuvre, laquelle comprenait, dit-on, quatre-vingt-deux articles alors que treize seulement ont été conservés. Et encore, ne sommes-nous pas assurés que certains n’aient pas été tronqués. L’article 12 : Emploi du feu à la guerre est manifestement dans ce cas. Il est surprenant de ne rien trouver concernant la tactique des marches, la guerre de siège, les opérations amphibies, les différentes sortes de combat, la lutte contre les cavaliers nomades, les opérations de montagne où Sun Tse a dû exposer les fruits de son exceptionnelle expérience. Non seulement nous ignorons la pensée originale de Sun Tse, puisqu’il est visible que son enseignement a été purement verbal (Sun Tse dit...), mais nous savons que le premier texte écrit n’a été rédigé que plus de trois siècles après la mort du général. Il faut croire, de plus, que cette version écrite fut rapidement inintelligible puisque, au Ve siècle ap. J.-C., l’empereur Tao Ou Ti, du royaume d’Oé, en fit un commentaire pour expliquer certains passages déjà obscurs. D’autres commentaires parurent sous les dynasties Trong (VIIIe siècle) et Song (Xe au XIIIe siècle). Rédigé en chinois, l’Art de la Guerre fut transcrit en mandchou lorsque la dynastie des Tsring eut anéanti les derniers représentants des Ming. L’empereur K’ang hi entreprit, en 1683, de publier une nouvelle édition des œuvres classiques, et fit traduire, en 1710, tout le Vou King (Livres classiques des militaires) qui comprenait : Sun Tse Ou tse Se ma fa Lou tao Leao tse Tai tsoung avec des commentaires. Son fils, Tong Tcheng y ajouta un chapitre préliminaire en dix préceptes adressés aux gens de guerre.
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