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Collection « Histoire du Saguenay—Lac-Saint-Jean »
François-Xavier Gosselin [protonotaire, district de Chicoutimi], Inauguration du monument érigé à Chicoutimi à la mémoire de William Evan Price, 24 juin 1882, 23 pages. Québec: Imprimerie de Léger Brousseau, 9 rue Buade, 1882. [Une édition numérique réalisée par Michel Fortin, adjoint] Une édition numérique réalisée par Michel Fortin, bénévole, adjoint à la mairie de Ville de Saguenay.
INAUGURATION DU MONUMENT Érigé à Chicoutimi À la mémoire de WILLIAM EVAN PRICE
Le samedi, 24 juin 1882, après la messe célébrée en l'honneur du patron des canadiens-français, les citoyens de Chicoutimi se sont rendus en foule auprès du monument élevé à la mémoire de deux membres de la famille Price, dont la vie s'est écoulée au milieu des colons du Saguenay et dont les oeuvres ont tant contribué au développement de cette partie du pays. La reconnaissance est un signe de vitalité chez un peuple; nulle époque ne pouvait donc être mieux choisie pour payer ce tribut de reconnaissance à ceux que la population du Saguenay considère à juste titre comme ses bienfaiteurs.
Le monument Price est situé sur une élévation d'où lil embrasse, sur une étendue d'au delà de neuf milles, la rivière Saguenay, la ville de Chicoutimi, les paroisses de Chicoutimi, Ste-Anne et St-Fulgence. Il a cinquante pieds de haut et porte sur des tablettes de marbre blanc les inscriptions suivantes:
Sur un côté :
Erected by the inhabitants of the Counties of Chicoutimi and Saguenay and other sorrowing friends in memory of
WILLIAM-EVAN PRICE, M. P. P.
Died in Quebec, 12th June 1880, Aged 53 years ln Iife respected and heloved. In death lamented
M. O. Bossé, N. P., président du comité du monument et les autres membres de ce comité, le président de la société Saint-Jean-Baptiste et les autres officiers de cette société, messieurs les maires de la ville et de la paroisse, ayant pris place près du monument, sur un signal du président, les draperies qui couvraient le monument du sommet à la base se détachèrent et le laissèrent voir aux yeux des spectateurs.
Alors M. Bossé déclara, dans les termes suivants, le monument dûment inauguré:
Mesdames et Messieurs,
Aussitôt que le décès du regretté feu William Price, arrivé en juin 1880, fut connu ici, un des amis les plus dévoués à la famille de ce Monsieur, se laissant guider par les meilleurs sentiments du cur, suggéra l'idée d'élever un monument à la mémoire de cet homme de bien si universellement estimé pendant les nombreuses années qu'il a conduit les affaires de la maison Price, à Chicoutimi. Cette suggestion fut reçue et adoptée avec empressement. Un comité nombreux fut formé pour propager cette heureuse idée et recueillir des souscriptions; et après quelques mois seulement, le comité se trouvait en possession d'une somme considérable, dépassant toutes ses espérances, et qui lui permettait de faire commencer de suite les travaux par l'ouvrier qui les avait entrepris. Maintenant ce beau monument est terminé et nous en faisons l'inauguration solennelle.
Mais, Mesdames et Messieurs, ce monument que nous appelons et que l'histoire appellera le «Monument Price» n'est pas seulement destiné à perpétuer le souvenir du regretté Monsieur William Price, mais il est encore et surtout destiné à être le témoin durable de l'estime et de la reconnaissance des souscripteurs envers la famille Price; vous en avez pour preuve, Mesdames et Messieurs, les deux marbres qui se trouvent sur deux faces différentes du monument. L'un d'eux est destiné à rappeler et à perpétuer le souvenir du chef de la famille Price, Monsieur William Price, père, décédé en 1867, appelé à juste titre «le père du Saguenay», car c'est lui qui a le premier encouragé la colonisation dans cette partie reculée et alors si isolée de la Province de Québec, en y faisant construire les premiers moulins, et l'autre est destiné à conserver et à perpétuer la mémoire de Monsieur William Price, fils, que vous avez tous connu et dont Ies messieurs qui doivent vous adresser la parole vous feront connaître les mérites.
Mesdames et Messieurs, le monument Price, est m'assure-t-on un des plus beaux monuments élevés par souscriptions d'amis, qui existe dans la Province et les membres du comité, de même que les souscripteurs ont raison d'être satisfaits de cet oeuvre; mais, Mesdames et Messieurs, il y a ici une personne qui doit être particulièrement heureuse de la fête de ce jour, car ce monument que vous admirez est en grande partie son oeuvre, et je croirais manquer à mon devoir et me rendre coupable d'injustice si je ne proclamais pas ici publiquement que le mérite presque tout entier de l'érection de ce monument appartient à Monsieur Scott, le digne et zélé représentant de la maison Price, à Chicoutimi, cest lui qui en a suggéré l'idée, qui en a dirigé et surveillé les travaux et qui a mis à la réussite de son projet beaucoup de travail et d'énergie. Aussi je pense être l'interprète des souscripteurs et des membres du comité en lui disant qu'il a conduit à bonne fin la noble tâche qu'il s'était imposée et au nom de tous, je l'en remercie.
On tira alors sur les hauteurs plusieurs coups de canon auxquels répondirent quatre navires qui se trouvaient dans la rade pavoisés et décorés. La fanfare du Séminaire, placée sous un kiosque spécialement érigé pour elle, joua alors un morceau approprié à la circonstance.
M. Ernest Cimon, C. R., prononça ensuite le discours suivant :
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes réunis ici pour célébrer l'inauguration de ce splendide monument qui nous rappelle et dira à ceux qui nous suivront, le nom de William Evan Price.
Qui de nous peut entendre prononcer ce nom sans sentir son cur s'émouvoir profondément!
William Evan Price! quel est celui d'entre nous qui n'a pas une dette de reconnaissance à acquitter à sa mémoire!
Vous l'avez vu, messieurs, pendant les années qu'il a passées au milieu de vous. Vous avez connu son cur, son amitié, sa générosité!
Vous vous rappelez ce printemps de 1872, où les colons du Lac Saint-Jean, dénués de grains de semence et de farine, étaient descendus à Chicoutimi pour y recevoir les grains que le gouvernement leur envoyait. Les goélettes qui portaient ces grains étaient en retard de plusieurs jours. Tous ces colons, au nombre de plus de cent, étaient à attendre. William Evan Price s'empressa de les inviter, les fit loger dans ses maisons, leur donna la nourriture, eut soin de leurs chevaux; et lorsqu'ils eurent à retourner chez eux, il leur fit servir les provisions pour le voyage.
Vous vous rappelez encore, messieurs, le grand incendie de 1870. Comme il en soulagea les malheureuses victimes! Et les pauvres! que de familles bénissent son nom! que de secours il a envoyés aux malades indigents!
L'amitié qu'il nous portait était profonde. Mais, pourquoi énumérerai-je ses actes de charité et d'amitié? N'en étiez-vous pas les témoins et les objets? Ne les avez-vous pas encore tout vivaces dans votre mémoire et dans votre cur? Et, dites-le-moi, cet homme n'était-il pas l'ami et le bienfaiteur de chacun de nous? Vous le rencontriez chez lui où il vous recevait à toute heure; vous pouviez, lorsqu'il passait dans la rue, l'arrêter et lui parler; et, en toute circonstance, que vous fussiez pauvre ou riche, ignorant ou instruit, il s'empressait de vous rendre le service que vous lui demandiez. Bien plus, combien de services il a rendus par prévenance, sans qu'ils fussent sollicités? Et, j'en appelle à vous tous: par votre présence ici, vous témoignez de la vérité de ce que j'avance.
Donc, messieurs, ce monument nous l'avons érigé pour célébrer l'amitié et la générosité qui ont débordé de ce cur privilégié.
Mais nous avons de plus, par là, voulu rendre un hommage mérité aux autres membres de la maison Price, qui est si identifiée avec l'histoire du Saguenay. Voilà la raison pour laquelle un des marbres porte l'inscription suivante: William Price, le père du Saguenay. Et c'est ainsi que ce monument ira racontant l'histoire du Saguenay jusqu'à nos jours, car le père Price en est la première page.
Ici, messieurs, laissez-moi vous tracer, en peu de mots, quelques traits de cette histoire. Il y a juste quarante ans aujourd'hui car notre histoire ne date pas de loin si quelqu'un se fût trouvé à l'endroit où nous sommes actuellement, au lieu de pouvoir admirer notre jeune et florissante ville de Chicoutimi, au lieu de pouvoir contempler ces riches et populeuses paroisses qui nous environnent, il n'aurait vu partout autour de lui qu'une immense forêt dans l'état le plus sauvage possible. En effet, ce n'était que cette année là qu'expirait le dernier bail que la compagnie de la Baie d'Hudson avait de tout ce territoire, et elle sétait bien gardé d'y laisser pénétrer un seul colon. Mais le Père Price, cet entreprenant citoyen qui avait déjà ouvert à l'industrie du commerce de bois les vallées de l'Ottawa et du St-Maurice, était alors venu étendre ses opérations commerciales à l'embouchure de la Rivière Saguenay; puis de là, il vint à la Grande Baie jusqu'à Chicoutimi. Il eût une lutte terrible à soutenir contre la compagnie de la Baie d'Hudson qui, bien que son bail fut expiré, n'en faisait pas moins tous les efforts possibles pour empêcher le Père Price de porter la civilisation dans ce pays. Pour mettre fin à ces luttes déplorables, il eût une forte somme d'argent à payer à la compagnie. C'était en 1842, le Père Price venait d'ouvrir ses chantiers à la Grande Baie. Tout en y exploitant le bois, il y encouragea la colonisation; il y construisit un moulin à farine, dont il n'avait nullement besoin pour son commerce, mais uniquement pour l'utilité des colons. Déjà un grand nombre de personnes y avaient fait des défrichements considérables. Pour les engager à s'y fixer d'une manière permanente, le Père Price obtint cette année là que Monseigneur l'Évêque de Québec envoyât le révérend M. Pouliot résider à St Alexis de la Grande Baie, comme premier curé du Saguenay. Les deux paroisses de St-Alphonse et de St-Alexis, qui sont les plus anciennes du Saguenay, doivent donc leur naissance au Père Price.
Puis en 1844, ou vers ce temps là, eût lieu la construction des premières scieries de Chicoutimi. Le Père Price dirigea de suite à cet endroit un bon nombre de personnes qui, d'abord, travaillèrent aux scieries et aux chantiers, et ensuite, petit à petit, défrichèrent les terres; et ici, comme à la Grande Baie, pour favoriser les colons, M. Price y fit de suite construire un moulin à farine. Ainsi, la paroisse de Chicoutimi, comme celles de St-Alexis et de St-Alphonse, doit également sa naissance au Père Price.
De Chicoutimi, la colonisation gagna Jonquière, puis ensuite le Lac St-Jean. Partout où elle se dirigeait, on voyait les MM. Price en accélérer les progrès. Pendant de nombreuses années, les colons n'eurent pour les soutenir que la maison Price, mais jamais elle ne leur a fait défaut.
Et, colons qui m'écoutez, parlez, et dites si ce n'est pas là la vérité, parlez et dites combien d'entre vous, dans ces temps là, n'auraient pu ensemencer leurs terres, s'ils n'eussent tenu leurs grains de semence de la générosité de la maison Price
M. le Père Price était donc un grand commerçant. Mais l'idée qui paraît dominer son commerce est de créer et de développer la colonisation dans le Saguenay, de rendre service à ses concitoyens et à son pays. Heureux et bénis sont ces bons et grands industriels qui sont animés d'un esprit si large et si éminemment patriotique.
Et le Père Price, pour atteindre ce but si louable, la création et le développement de la colonisation du Saguenay se fit l'ami de notre clergé, car il savait que le prêtre catholique attire le colon. Il souscrivait donc largement pour l'entretien des prêtres et leur permettre d'exercer leur ministère; il aidait à construire les presbytères, les églises et les maisons d'écoles, et contribuait au paiement des instituteurs.
Ajoutons ici, messieurs, que le Père Price a été heureusement, dans ces oeuvres, secondé par ses deux fils, William Evan Price et l'honorable David Edward Price, qui ont hérité de son bon cur, de ses belles quali-tés et continué ses oeuvres et ses bienfaits.
William Evan Price, plus modeste que son frère aîné, n'était pas homme de lutte comme lui. Il faisait le bien tranquillement en gérant les affaires de la maison Price à Chicoutimi. Mais M. David Price était de plus l'homme d'action, l'homme d'initiative. De 1855, époque où il fût élu pour la première fois député, il a tenu entre ses mains jusqu'à ce jour les destinées du Saguenay; c'est lui qui y a dirigé pendant ce temps le mouvement de la colonisation, et avec tant de zèle et d'une manière si efficace qu'elle est devenue en grande partie son oeuvre et il peut en être fier.
Il a toujours correspondu aux vues et aux désirs de notre clergé, et a agi en tout avec droiture, prévoyance, pour le plus grand bien du Saguenay. Jamais il n'a fait défaut à ses amis. Nous lui devons un grand tribut d'éloges!
La colonisation que les MM. Price ont faite au Saguenay est exclusivement canadienne-française. C'est pourquoi en ce jour du 24 juin, notre fête nationale, je suis heureux d'être l'interprète de la société Saint Jean-Baptiste de Chicoutimi, pour rappeler ces faits et exprimer toute notre gratitude.
Et, permettez-moi, messieurs, de vous dire que l'honorable David Edward Price celui des trois que j'ai le mieux connu et avec qui j'ai été le plus en contact a été, après mon père, mon plus grand ami. Je l'en remercie en présence de vous tous, et vous vous empresserez d'associer vos prières aux miennes pour le rétablissement à la santé de cet ami commun.
Les messieurs Price auraient bien pu, s'ils n'eussent eu en vue que leurs intérêts pécuniaires, mettre dès le commencement, comme aujourd'hui, l'administration de leurs affaires au Saguenay entre les mains d'agents actifs et intelligents; mais ils ont voulu vivre avec les colons; ils éprouvaient un grand bonheur à leur rendre service, à présider à leurs progrès! Gloire donc à ces hommes d'élite! Honneur à la population du Saguenay pour l'érection de ce monument! Et, j'ajouterai, messieurs, heureux les hommes reconnaissants!
Et, vous, William Evan Price, ce monument vous est spécialement destiné. Agréez par là l'expression de nos sentiments de regrets et d'affections! Oh! s'il vous était donné de revenir an milieu de nous, comme vous seriez acclamé par nous tous! Comme les pauvres se réjouiraient! Et, vous, comme vous vous sentiriez content et joyeux d'être encore une fois avec ceux que vous aimiez tant de votre vivant! Mais puisque vous n'êtes plus, votre souvenir est et restera toujours gravé dans nos curs.
Je termine, messieurs, par ces mots de l'inscription:
«William Evan Price, pendant sa vie il fut aimé et respecté à sa mort, nous l'avons pleuré et nous le pleurons encore.»
M. Ernest Cimon fut suivi de M. A. A. Hudon, magistrat de district, qui prononça le discours suivant:
Mesdames et Messieurs,
On ne pouvait mieux choisir une circonstance pour inaugurer ce beau monument élevé par des curs amis à la mémoire de feu M. William Price, que ce beau jour de notre fête nationale. Ce jour est pour nous, une fête toute du cur, et personne mieux que lui, ne sut se gagner les curs de nous tous, qui l'avons connu, aimé et respecté, et qui le regrettons vivement.
Il convient qu'en ce jour, pendant lequel nous nous rappelons avec tant de bonheur, ceux qui furent nos ancêtres, nos gloires nationales, et les bienfaiteurs de notre patrie, il convient, dis-je, que nous venions auprès de ce monument, raviver en nous le souvenir de deux bienfaiteurs du Saguenay qui ne sont plus, mais dont le souvenir doit vivre éternellement parmi les enfants du Saguenay.
Dans tous les temps, et dans tons les lieux, on a eu la pieuse habitude d'élever des monuments à la mémoire de ceux qui se sont illustrés, soit par les armes, soit dans les sciences, les lettres et les arts, ou comme hommes d'état ; mais les monuments qu'on élève à ceux-là sont des monuments de pure convention élevés à la gloire, et par l'orgueil national et jamais, non jamais, ils ne parlent au cur, comme ceux que la patrie reconnaissante élève à ceux qui furent ses bienfaiteurs, et ce beau monument est du nombre de. ces derniers.
En effet, Mesdames et Messieurs, on peut par dévouement, poussé par. au devoir impérieux, dans un moment de bravoure souvent frénétique, se distinguer sur un champ de bataille, et accomplir de hauts faits d'armes; on peut par le génie et la persévérance, s'illustrer dans les sciences et les lettres, atteindre et planer dans les plus hautes sphères de la pensée. On peut encore par les talents et les intrigues monter bien haut dans l'échelle sociale et politique; et il est beau et grand de s'illustrer ainsi. Beaucoup plus beau, plus grand, plus noble il est, toutefois, et plus méritoire de consacrer toute sa vie, ses talents, ses facultés et sa fortune, à travailler pour la prospérité de sa patrie, et le bien-être de ses concitoyens.
La mémoire des premiers se grave sur la pierre, et se transmet par l'histoire. La mémoire des derniers se grave surtout profondément dans les curs, et se transmet du cur au cur, de génération en génération. Au souvenir des premiers on s'étonne, on admire, au souvenir des derniers, on admire, on s'émeut, on aime!
Deux mots de l'inscription sur ce monument, résument quelle fut la vie de M. W. Price, et sont l'écho sincère et fidèle, des sentiments que nous entretenons pour lui :
«In life beloved and respected, in death lamented.» Nous l'avons aimé, respecté pendant sa vie, et nous le regrettons vivement.
Oui, Mesdames et Messieurs, nous l'avons aimé et respecté pendant sa vie, parce qu'il fut bon, grand, noble, et généreux par le cur, et j'en atteste vous tous qui assistez à cette belle cérémonie. Ce n'est pas à vous, que j'ai besoin de rappeler à quels titres notre regretté ami M. W. Price, mérite le nom de Bienfaiteur du Saguenay!
Ce qu'il fit en 1870, alors qu'un incendie désastreux avait dévoré les maisons et les habitations de tant de pauvres colons du Saguenay. La générosité de la maison Price, en s'inscrivant pour un montant très élevé en tête de la souscription ouverte au bénéfice des incendiés, en ouvrant ses hangars et mettant leur contenu à la disposition de tant de familles, sans ressources et manquant de pain.
Ce qu'il fit en cette année de disette, alors que le grain de semence manqua complètement aux colons du Saguenay, en nous obtenant du gouvernement, par son travail et son influence, les grains de semence nécessaires, et en les transportant à ses frais, de Québec jusqu'à nous. Dans cette circonstance, il poussa la générosité jusqu'à cautionner pour nous pour un montant très considérable.
Puis ce qu'il fit en cette autre année de disette, alors que la famine, la hideuse famine était aux portes, avait pénétré même dans les maisons de tant de pauvres colons, le don généreux de son indemnité parlementaire, et même de bien au-delà, qui fut distribué en farine aux nécessiteux.
Voilà quelques unes des nobles actions, entre un plus grand nombre d'autres, que lui dictèrent son cur généreux!
Toutes les fois qu'il s'est agi du bien public, la libéralité de la maison Price ne nous a jamais fait défaut. S'agissait-il d'élever un temple à Dieu, ils contribuaient toujours avec largesse. Des églises catholiques romaines, ont été construites dans le Saguenay, entièrement avec du bois donné par la maison Price. Avec quelle libéralité n'ont ils pas aidé à l'érection de nos maisons d'école en beaucoup d'endroits? Sans sortir de l'enceinte même de cette ville, je trouve la preuve de ce que je viens d'avancer! Cette belle bâtisse connue sous le nom de «Vieux Séminaire» et où notre belle institution le «Séminaire de Chicoutimi» a vu ses premiers jours, et notre beau couvent, où nos jeunes filles vont puiser une éducation supérieure et religieuse, ont été construits en grande partie avec des dons de la maison Price. Et si j'entre dans notre temple, je vois suspendus aux murailles de notre cathédrale, deux magnifiques tableaux que nous tenons de la générosité de M. W. E. Price.
Quant à nous, Canadiens-Français, fut-il jamais ami plus sincère, fidèle et dévoué des Canadiens-Français et des Catholiques Romains? Quoique d'une origine et d'une religion étrangères à la nôtre, il aima de tout son cur les canadiens-français, notre clergé et nos institutions, ne laissa échapper aucune occasion, se fit un devoir toujours de nous faire du bien!
Rappelez-vous, Canadiens-Français et Catholiques Romains du Saguenay, ces belles paroles de M. W. E. Price dans son adresse aux électeurs du Saguenay, alors qu'à votre demande il briguait vos suffrages pour la chambre fédérale :
Je n'hésite pas à le déclarer publiquement, et je vous en donne ma parole, que je serai toujours en faveur de toutes les demandes que Messeigneurs vos Évêques feront dans lintérêt de la religion catholique romaine. Je vous déclare de plus publiquement, que je suivrai toujours et avant tout, en politique, les conseils de vos Évêques et prêtres. Quant aux écoles catholiques, je les soutiendrai de toute mon influence, et je les protégerai de toutes manières. Je travaillerai pour tous vos intérêts! Je protégerai en tout et partout votre religion et votre nationalité canadienne-française.
De ce beau programme, il a fait la ligne de conduite de toute sa vie, et y est resté fidèle jusqu'à ses derniers moments. Et que vous dirai-je, maintenant, de sa vie privée, de ses rapports avec un chacun de nous! Il me semble encore voir ces traits nobles et dignes, sur lesquels, la bonté, et toutes les belles qualités de son grand cur venaient se refléter. Vous n'avez pas oublié, la bonté, l'affabilité quasi proverbiale, de notre regretté ami, affabilité qui s'étendait aux plus pauvres et aux plus humbles, comme aux plus riches et aux plus grands. Et son cur compatissant! Que de misères, que d'infortunes particulières n'a-t-il pas soulagées? Dans combien de familles, n'a-t-il, pas par ses conseils et sa générosité fait entrer le bonheur qui en avaient été bannis depuis longtemps? Vous le savez, colons du Saguenay, jamais la main d'un infortuné ne se tendit en vain vers M. William E. Price. Mais pouvait-il en être autrement, s'il est vrai de dire tel père tel fils, puisqu'il fut le digne fils de son noble père.
Fut un de ces hommes de bien, semant la prospérité et le bonheur sur ses pas, tel qu'on n'en rencontre que rarement sur le chemin de la vie. Il vécut plus d'un demi siècle dans notre Province de Québec.
Doué d'une intelligence vaste, d'un esprit entreprenant et d'une grande persévérance, la fortune devait lui sourire; et on le compta bientôt parmi nos hommes d'affaires les plus riches et les plus entreprenants. Il comprit en arrivant dans ce pays, les immenses richesses renfermées dans nos forêts, et il se mit hardiment à luvre. Il n'est pas peut-être un seul pouvoir d'eau depuis Québec jusqu'à Matane où il n'ait placé des scieries considérables.
Il fut un de ces hommes à vues larges et dévoués pour le bien public. Il sut faire marcher de pair ses intérêts particuliers et le bien public, la colonisation et son commerce de bois. Son nom a été associé à toutes les plus grandes entreprises qui contribuèrent le plus au progrès matériel et à la prospérité de notre Province.
Mais là où son nom restera le plus intimement lié à l'histoire de notre pays, c'est en ce qui regarde les progrès qu'il a fait faire à la colonisation dans le Saguenay, dont il a été en si juste titre surnommé «Le Père.» Des milliers de familles accourues sur ses pas dans le Saguenay, trouvèrent à son emploi de larges moyens de subsistance, et purent grâce aux avances généreuses qu'il leur fit, aux crédits prolongés qu'il leur donna, s'établir les unes dans un état voisin de l'aisance, et les autres parvenir même à une grande aisance.
À sa mort survenue en 1867, tous ses compatriotes lui décernèrent les plus beaux témoignages d'estime et de reconnaissance. Il fut au dire de tous un des citoyens les plus intègres, les plus honorables, et les plus marquants de son temps. Les colons du Saguenay, eux, ressentirent vivement la perte qu'ils venaient de faire dans la personne de M. W. Price, leur Père, leur Bienfaiteur. Des résolutions unanimes furent passées dans toutes les municipalités témoignant de leurs regrets et de leur vive reconnaissance.
Peu de temps après sa mort, dans une circonstance bien solennelle, attendu que ce fut en pleine chambre d'assemblée, un semblable témoignage d'estime et de reconnaissance lui fut rendu par feu M. Pitre Tremblay, alors député des comtés de Chicoutimi et Saguenay. Il prononçait un discours sur la colonisation. Après avoir parlé de la force, du courage, et la persévérance du colon canadien; des progrès, des merveilles mêmes opérées par la colonisation dans cette partie de la Province en deçà des Laurentides, et ce malgré les difficultés de communication, et les faibles ressources mises par le gouvernement à la disposition des colons, il prononça à l'adresse de M. W. Price, père, ces belles paroles qui font l'honneur de M. P. Tremblay et la gloire de M. Price :
Je serais ingrat si je ne mentionnais les services rendus à la colonisation par la compagnie Price. La libéralité de cette compagnie dans ses avances et ses crédits prolongés a puissamment contribué au progrès du Saguenay. Et je renouvelle devant cette chambre, avec satisfaction, les sentiments de reconnaissance exprimés par mes compatriotes canadiens-français, sur la tombe de ce noble vieillard qui fut leur ami, leur bienfaiteur, et qui a laissé l'accomplissement de sa tâche à des fils dignes de lui.
Tel fut M. William Price, père, ami sincère et dévoué du bien public, un vrai père pour les colons du Saguenay. Son nom sera inscrit parmi ceux des bienfaiteurs de la patrie, et son souvenir ne périra jamais dans les curs reconnaissants des enfants du Saguenay.
Maintenant que nous avons payé un juste tribut d'hommages et de reconnaissance à ces deux bienfaiteurs du Saguenay, il faudrait être ingrat, Mesdames et Messieurs, pour ne pas associer à leur nom et à notre reconnaissance, un autre membre de cette famille privilégiée, qui lui aussi a aimé le Saguenay d'un amour de prédilection, et nous a fait beaucoup de bien. Vous m'avez deviné, je veux parler de lHonorable David E. Price.
Lui aussi a été un digne fils de son noble père, un ami sincère et dévoué des colons du Saguenay, et n'a cessé de travailler pour eux d'une manière efficace depuis sa jeunesse. Par ses talents, son énergie et sa persévérance incomparables, il a pu parvenir au faite des honneurs, d'où son immense influence et sa fortune se sont déversées en une rosée bienfaisante sur ceux qui furent ses amis. Bien plus, avec cette générosité de cur qui tenait de son père, il a toujours été prêt à oublier le passé, et a souvent comblé de biens ceux qui furent ses adversaires. De tous côtés, partout autour de moi, je vois les bienfaisants effets de son influence et de sa générosité. Si je jette mes regards, sur cette belle assemblée, depuis les plus riches et les plus élevés en dignité, jusqu'aux plus pauvres et aux plus humbles, j'y vois des gens auxquels il a fait du bien.
La sollicitude pour nous ne s'est jamais ralentie, pas même durant cette cruelle maladie qui le tient cloué sur un lit de douleurs, et en ce moment même ses plus grands regrets sont de ne pas être au milieu de nous, ses concitoyens, ses amis.
Heureux les comtés qui possèdent de tels hommes à leur tête. Heureux aussi ces hommes, que la Providence a si heureusement dotés par le cur, l'intelligence et la fortune, quand ils comprennent comme eux, la noble mission que la Providence leur a assignée sur la terre. Ils passent en faisant le bien, sur leur tombe on inscrit les noms de Pères, de bienfaiteurs de leurs compatriotes, ils sont aimés, respectés pendant leur vie, et vivement regrettés après leur mort
Quant à eux, leur tâche est parachevée, elle a été grande et patriotique, et ils l'ont généreusement accomplie. La nôtre est noble et douce, elle nous est dictée par le cur, c'est celle de la reconnaissance. Nous l'avons généreusement commencée en élevant ce beau monument à la mémoire de ces hommes! La reconnaissance honore les populations comme les individus! Ne craignons pas de nous montrer reconnaissants, quand eux ne reculaient devant rien pour nous faire du bien! Aimons-les, transmettons religieusement leur souvenir! Soyons fiers de ce beau monument! Montrons-le avec orgueil aux étranges qui visiteront les rives de notre Saguenay! Ah! il est bien placé ce monument à la mémoire des Price, sur la plus haute élévation de Chicoutimi, qu'ils ont tant aimé, et où ils ont fait tant de bien! Que ce monument nous serve de phare lumineux! Qu'il nous montre la route que ces hommes nous ont tracée!
Qu'il soit pour nous un encouragement à bien aimer notre beau Saguenay, à aimer ceux qui nous font du bien, à nous aimer les uns les autres, et à travailler tous ensemble, à continuer avec persévérance à faire progresser la grande uvre de la colonisation du Saguenay, à laquelle ils ont donné un si généreux essor.
En terminant, Mesdames et Messieurs, permettez-moi de vous redire ici ces vers d'un poète canadien, déjà lus une fois en semblable circonstance :
Après tout, ce n'est pas un vain mot que la gloire ; ceux qui sont morts pour nous revivent dans lhistoire, et l'histoire est la vie et l'honneur des nations. Les hommes dévoués dont on garde les noms, sur le marbre ou I'airain, même sur une page, presque toujours vivants, sont un héritage, pour tout peuple qui croit à de grands avenirs. Seulement nous devons parmi nos souvenirs, recueillir les bons noms, les poser comme exemple, pour les grandir encore, les loger dans un temple, y sacrifier tout l'or, l'art et le talent, pour que l'esprit du peuple y voit un monument. Chicoutimi, 24 juin 1882.
Après le discours de M. Hudon, discours écouté par l'auditoire avec une attention soutenue, la fanfare exécuta avec beaucoup de goût un nouvel air de musique. Enfin, le révérend M. Fafard termina la cérémonie par le discours suivant:
Mesdames et Messieurs,
Il me semble qu'après les pompeux discours qui viennent d'être prononcés par les orateurs qui m'ont précédé, il ne me resterait plus qu'à me taire, en applaudissant avec vous tous à tout ce qui vient d'être dit. Ce silence de ma part serait d'autant plus justifiable que je n'ai pas eu l'honneur de connaître personnellement ces honorables citoyens dont tous voulez aujourd'hui célébrer la mémoire. Lorsque je suis arrivé à Chicoutimi, leur trop courte carrière s'était déjà terminée, et je n'ai pas eu l'avantage, comme la plupart d'entre vous, de lier amitié avec eux, de les voir à luvre, et d'apprécier par moi-même tout leur mérite.
Mais si je considère la position officielle que j'occupe aujourd'hui comme curé de Chicoutimi, et supé-rieur du Séminaire, je me trouve en cette double qualité, comme l'héritier et le représentant de mes prédécesseurs, et surtout de Monseigneur l'Évêque de Chicoutimi, qui ont puisé, à pleines mains, dans le trésor de leur amitié. Et, comme tel, je me sens pressé, j'éprouve le besoin, et je considère comme un devoir impérieux, d'élever ma faible voix sur la tombe de ces deux illustres citoyens qui furent monsieur Price, père, et son fils, monsieur William E. Price, afin de rendre hommage â leur mérite.
Messieurs, ce qui manque souvent à une colonie naissante comme celle du Saguenay, éloigné des grands centres commerciaux, privée de voies ferrées, composée surtout de pauvres colons dont l'unique capital consiste dans un courage invincible servi par des bras vigoureux, ce qui manque surtout à une telle colonie, dis-je, ce sont des capitalistes entreprenants, disposés à employer leur fortune au développement industriel d'une colonie semblable, capables d'établir au centre même de cette colonie un marché facile où ces nouveaux colons pourront vendre leurs produits, et réaliser l'argent qui leur est indispensable pour faire honneur à leurs affaires.
C'est un principe d'économie sociale que pour compléter la prospérité d'une nation, ou d'un pays, il faut le concours de deux éléments : 1o l'agriculture, 2o l'industrie. En effet, sans agriculture point de pain. Supposons pour un moment que toute une population soit exclusivement livrée au commerce, aux arts, à l'industrie, et que personne, dans ce pays, ne veuille se livrer à l'agriculture, qu'arrive-t-il? Les moissons cessent de croître, les champs deviennent sauvages; par conséquent plus de nourriture à vendre. Croyez-vous que ce peuple pourra assouvir sa faim avec des pièces d'or, ou des billets de banque? Mille fois non. Cette nation mourra de faim au sein de la richesse. Il s'ensuit donc que l'agriculture est de première nécessité pour la prospérité générale d'un pays.
Mais supposez aussi pour un moment que tout un peuple soit exclusivement composé d'agriculteurs riches et éclairés. Chacune de leurs fermes produit le double, je suppose, de ce que le propriétaire peut dépenser. Il s'ensuivra que tous les habitants de ce pays auront à vendre, des céréales, du foin, des produits de toute nature, et que personne n'aura besoin d'en acheter, puisque, dans mon hypothèse, je suppose que tous sont des agriculteurs riches. Il faut donc pour qu'il y ait un bon fonctionnement de la société, et pour faciliter la fortune publique, le concours de l'agriculture et de l'industrie. Il faut donc qu'un peuple soit composé de deux classes différentes : 1o une classe qui produise les fruits de la terre, etc., 2o une autre classe qui ait besoin d'acheter ces mêmes produits. De la sorte les premiers fournissent la nourriture aux seconds, et ceux-ci en retour donnent leur argent aux premiers. Or dans mon idée, la famille Price a eu pour principal mérite de venir réaliser sur cette terre du Saguenay ce grand problème d'économie sociale.
En choisissant cette partie du pays pour le théâtre de leurs immenses opérations commerciales, ils travaillaient sans doute, en premier lieu, à augmenter leur fortune personnelle; mais pour exploiter ces immenses forêts du Saguenay, pour amener jusqu'à Chicoutimi ces im-menses quantités de billots, pour scier cette formidable masse de bois, pour expédier outre mer chaque année 50 on 60 navires chargés de madriers, combien d'hommes et de chevaux ne fallait-il pas employer? Et ces ouvriers, à leur tour, combien de marchands, combien de médecins, combien de professions ou métiers divers ne soutenaient-ils pas.
Cultivateurs de Chicoutimi! combien de fois n'êtes-vous pas venus an bureau de M. Price vendre des centaines de minots de grain, des milliers de tonneaux de foin? Combien d'entre vous n'ont-ils pas vendu à tous ses employés ou ouvriers, et cela depuis de longues années, des produits de toute nature qu'ils auraient pu écouler bien difficilement autrement. Si vous admettez que cette maison ait fait ici, depuis 40 ans et au-delà, des affaires pour une moyenne annuelle de deux cent mille piastres, vous arriverez à constater qu'elle aura répandu ou fait circuler dans le Saguenay une somme s'élevant au chiffre formidable de huit millions! Je vous le demande, messieurs, que serait aujourd'hui le Saguenay si ce secours lui eut fait défaut? Que serait devenu le Saguenay, éloigné comme il l'est des grands centres commerciaux, privé de toute autre industrie considérable, si la famille Price n'eut pas choisi ce territoire pour y déployer son énergie commerciale, et y lancer d'immenses capitaux dans des entreprises toujours hasardeuses? Je ne crains pas de le dire, le Saguenay serait encore aujourd'hui dans les langes de l'enfance; la colonie aurait progressé bien moins vite. Et à ce point de vue on a justement nommé M. Price: Le Père du Saguenay.
Et avec quelle intelligence, quelle énergie, cette immense spéculation commerciale a été conduite pendant quarante ans! Quel esprit d'ordre, d'honnêteté, de justice a toujours présidé à toutes les démarches et transactions de cette maison! Comme la famille Price a su s'identifier avec ce peuple du Saguenay! Il a toujours paru que c'était pour elle un bonheur, une jouissance, de répandre ses bienfaits parmi cette population du Saguenay :
Messieurs, si je vous interroge uns après les autres, il me semble vous entendre vous écrier tous ensemble, à l'unanimité : oui! moi en particulier, j'ai bénéficié de la générosité de celle famille si respectable. Ici c'est un cultivateur qui me dit : si je n'avais pas eu le magasin on les ouvriers de la maison Price pour vendre les produits de ma terre depuis 25 ou 30 ans, je ne sais pas vraiment ce que j'aurais fait de mes grains, éloigné comme je l'étais des marchés des villes. Là c'est un ouvrier qui répond: depuis 25 ans que je demeure à Chicoutimi, le pain qui nourrit ma famille, je l'ai gagné de tout temps à l'établissement Price. Ici c'est un marchand qui semble me répondre: des quelques milliers de piastres que j'ai amassée à Chicoutimi, une bonne partie est sortie soit directement soit indirectement des bureaux du la maison Price. Là c'est un malheureux qui s'écrie: j'étais perdu avec toute ma famille si M. Price n'était venu à mon secours en m'avançant l'argent nécessaire pour m'arracher des mains d'un créancier impitoyable.
Combien de fois n'avez-vous pas vu ces illustres citoyens suspendre leurs hautes occupations pour goûter avec vous les douceurs de l'amitié, pour savourer les agréments d'une conversation intime! pour secourir les malheureux, pour visiter les pau-vres et les malades jusque dans leurs chaumières!
Lorsqu'en 1870 une immense conflagration fit un brasier ardent de tout le pays qui s'étend depuis le Lac Saint-Jean jusqu'à Chicoutimi, détruisant maisons, granges, moissons, clôtures, animaux, anéantissant, pour ainsi dire, en un seul jour toutes les espérances que le Canada avait fondées sur cette colonie pour l'avenir, au lendemain de ce jour néfaste où le découragement était entré dans tous les curs, où les plus riches n'avaient pas été épargnés, ne vous souvient-il pas d'avoir vu MM. W. E. Price et David Price debout sur les ruines fumantes de vos demeures, Tous encourageant de leurs paroles et par leurs exemples? Ne vous semble-t-il pas voir encore les MM Price ouvrant leurs magasins, en sortir gratuitement des centaines de barils de flour, mettre leurs boulangers à luvre pour cuire la nuit comme le jour des énormes quantités de pain qu'ils distribuent aux incendiés, afin de subvenir aux besoins les plus pressants! Et puis, comme il vient d'être dit par l'orateur qui m'a précédé, n'a-t-on pas vu M. William Price orner la cathédrale de Chicoutimi de deux superbes tableaux forts coûteux apportés d'Europe par lui-même, et qui sont une preuve de son bon goût artistique en même temps qu'ils sont un témoignage de sa générosité.
Et ce beau séminaire qui se dresse sous nos yeux, vous savez au prix de quels sacrifices il a pris naissance; cette institution qui, fait aujourd'hui la gloire de Chicoutimi a toujours été entourée de respect et de la vénération de la famille Price qui l'a aidé et encouragée lors de sa naissance, surtout en fournissant des lots de bois qui sont entrés dans sa construction.
Or, Mesdames et Messieurs, de semblables preuves d'amitié et de générosité de la part de ces honorables citoyens ne sauraient être oubliées car l'ingratitude est un vice qui ne saurait habiter sous la soutane. Aussi lorsque le comité qui a été nommé pour prélever des souscriptions afin d'élever un monument à la mémoire de feu messieurs Price, s'est mis à l'ouvre pour exécuter cette noble entreprise, le séminaire a été heureux de mettre à sa disposition ce beau site exceptionnellement adapté à cette fin. Et moi, en ma qualité de curé de cette paroisse et de supérieur du séminaire, je m'estime heureux de profiter de cette circonstance pour prononcer quelques paroles de reconnaissance et de remerciement; et de déposer aussi ma couronne pour orner ce monument élevé par vos propres mains.
Oui, messieurs, ce magnifique monument, qui domine aujourd'hui la paroisse, est destiné à transmettre aux générations futures le souvenir d'une famille illustre qui a puissamment aidé au développement du Saguenay; et en même temps, il sera un témoignage durable de votre reconnaissance envers ceux qui vous ont aidés et assistés dans les pénibles épreuves de votre établissement dans le Saguenay. Ce monument, en un mot, redira à la postérité et le mérite de ceux pour qui il a été élevé, et la générosité de ceux qui l'ont construit. Puisse ce souvenir être aussi durable dans la mémoire de vos neveux que le roc sur lequel il repose. Et puisse-t-il en même temps servir d'aiguillon pour exciter l'émulation des générations futures à marcher dans les voies du progrès et de l'honneur.
* * *
Après cet éloquent discours digne de la renommée de M. l'abbé Fafard comme orateur de la chaire sacrée, la foule se dispersa pendant que la musique jouait le God save the Queen.
* * *
Comité de direction nommé par le comité général pour l'érection du Monument Price à Chicoutimi
Président : Ovide Bossé, Ecr., N. P., shérif de Chicoutimi
Vice-Président : Olivier Lachance, Ecr., maire de la paroisse de Chicoutimi
Secrétaire : Édouard Savard, Ecr., Inspecteur décole
Trésorier : Benjamin Scott, Ecr.
Comité daction
Ernest Cimon, Ecr., C. R., M. J.G. Scott, Gérant des scieries de MM. Price. & Frères
Architecte François Godin, Ecr., de la maison Godin & DeVarennes
Dernière mise à jour de cette page le samedi 24 février 200719:27
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
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