LANCEMENT DE LA NOUVELLE COLLECTION :
LES SCIENCES DU DÉVELOPPEMENT
dirigée par M. Michel Maldague, professeur émérite, Université Laval.
Courriel: [email protected]
Introduction
“À l’occasion du 73e Congrès de l’Association francophone pour le savoir (Acfas) et dans le cadre de la Bibliothèque numérique francophone, il a été décidé de lancer une nouvelle collection, dans la bibliothèque numérique, Les classiques des sciences sociales, fondée et dirigée par M. Jean-Marie Tremblay, professeur au Cégep de Chicoutimi (Québec), collection qui connaît un développement fulgurant.
La nouvelle collection - Les Sciences du développement - est essentiellement dédiée aux pays en développement. Elle a pour vocation d’être un outil en mesure de promouvoir le développement et de lutter contre la pauvreté humaine qui affecte plusieurs milliards d’individus dans le monde. La Bibliothèque numérique francophone, qui met à profit les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) illustre un aspect positif de la mondialisation qui connaît, par ailleurs, d’innombrables faiblesses.
Le développement est appréhendé ici suivant trois paradigmes : le développement écologiquement viable ; le développement humain ; et le développement durable.
Le développement écologiquement viable
Il n’y a pas de développement possible en l’absence d’un environnement biophysique de qualité ; de celui-ci dépendent le maintien des systèmes entretenant la vie et la poursuite des processus écologiques essentiels. Grâce à lui, il est possible d’assurer , à la fois, la protection de la biodiversité et la création de systèmes de production durable. Cette obligation de prendre en compte la durabilité fait l’objet du second paradigme du développement.
Le développement durable
Les décennies de développement, lancées en 1961, n’ont pas été en mesure d’apporter une solution ni aux problèmes environnementaux ni à la nécessité d’améliorer les conditions de vie dans les pays en développement et ce, par suite d’erreurs d’appréciation des situations, de mauvais choix conceptuels et stratégiques et du manque de méthode appropriée à la mise en oeuvre des projets. Durant ces décennies, tant dans les pays en développement, qu’ailleurs dans le monde, on a assisté à une dégradation thermodynamique sans précédent de la Planète qui s’est manifestée de façon de plus en plus aigu, et dont l’examen a fait l’objet primordial de la Conférence des Nations Unies sur le développement et l’environnement (CNUED), à Rio de Janeiro (Brésil), en 1992.
On a compris alors, le besoin de poursuivre le développement de manière durable. Les preuves du dépassement des capacités de la biosphère, tant en ce qui concerne la production des ressources que l’assimilation des déchets, étaient patentes : changements climatiques, avec en particulier le réchauffement de la Terre et les atteintes la couche protectrice d’ozone; la destruction des forts tropicales et l’érosion des sols subséquente ; les pollutions de tous les milieux de vie ; l’extension de la désertification et de ses manifestations ; le déclin de l’autonomie alimentaire ; etc. Tout ceci se soldant par une dégradation continue de la situation économique et sociale des pays en développement.
Ce concept fait l’objet de multiples interprétations qui en rend l’application difficile et aélatoire.
Le développement humain
Ce troisième paradigme est le fruit des apports du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) qui la lancé en 1990. À partir de ce moment, l’évaluation du progrès humain a pris un virage décisif. Il ne s’agissait plus de mesurer celui-ci à l’aune des seuls progrès économiques, en se basant sur le PIB, mais bien de tenir compte, en outre, d’une série d’autres indicateurs, liés notamment à la santé, à l’éducation, à la liberté, à la gestion des ressources naturelles, etc.
Ce virage est singulièrement marqué par une réflexion éthique. Il s’agit en effet de tenir compte des hommes et de tout l’homme, et pas simplement des ressources humaines, vision réductionniste qui traduit le rendement de cette ressource dans un contexte essentiellement économique. En réalité, ce qu’il faut, c’est tenir compte de l’homme et de ses vrais besoins, à la fois d’ordres matériel et spirituel (intellectuel et mental).
Dans une approche pragmatique, le PNUD a mis au point l’Indice de développement humain (IDH) à l’aide duquel sont rangés tous les pays.
L’approche systémique
La Collection des Sciences du développement aborde toutes les questions relatives au développement suivant ces trois paradigmes. Mais cela ne suffit par, car, pour réaliser un développement qui s’inscrive dans cette vision pluridimensionnelle, il y a lieu, de toute évidence, de disposer d’une méthode valable. L’analyse des échecs, non seulement des différentes décennies de développement, mais encore ceux de nombreux projets de développement montre que ceux-ci sont la conséquence de l’attachement à des méthodes périmées et conséquemment inappropriées. Depuis plus de quarante ans, nous n’avons cessé de critiquer les approches courantes, à savoir disciplinaires, sectorielles, parcellaires, ponctuelles ; toutes relèvent d’un âge révolu.
La Collection des Sciences du développement retient comme approche fondamentale l’approche systémique qui repose sur la science de l’analyse des systèmes ; c’est une approche "interdisciplinaire, multisectorielle, globale et intégrée". Il s’agit, non plus de découper le réel en une série de compartiments distincts, mais bien de l’appréhender dans sa globalité et sa complexité. Le Discours de la méthode (Descartes, 1637) n’est plus d’application dans les sciences du développement. La simplification, dans ce domaine, est source d’échecs.
L’UNESCO, pour sa part, a adopté l’approche systémique dans le cas du projet de formation de cadres supérieurs, mis en oeuvre, à l’Université de Kinshasa, en 1999. Je me réfère ici à l’École régionale post-universitaire d’aménagement et de gestion intégrés des forêts et territoires tropicaux (RAIFT). L’UNESCO avait déjà, dès la fin des années 1960, montré "l’importance de l’interdisciplinarité en l’appliquant à son Programme l’homme et la biosphère", lancé en 1971.
D’autres programmes importants, lancés sous l’égide de l’UNESCO, ont adopté l’approche systémique. Citons le projet de Formation en aménagement pastoral intgré au Sahel (FAPIS) qui a fonctionné à l’université de Dakar (Sénégal), durant une décennie (1980-1989), programme axé sur les pays sahéliens. Citons là encore le programme de DEA
(Développement rural intégré de l’université Laval (Québec) qui a formé, grâce à l’appui de l’Agence canadienne de développement international (ACDI), 130 cadres supérieurs, au cours de ses dix années de fonctionnement (1987-1998). On pourrait citer encore de nombreux exemples de cours universitaires qui ont adopté l’approche systémique, comme, p.ex., l’université de Rennes I (1984-1997), la Fondation universitaire luxembourgeoise, à Arlon (Belgique), l’école supérieure des Sciences agronomiques (ESSA) de l’université d’Antananarivo (Madagascar) ; etc.
La Collection des Sciences du développement se propose de faire écho aux travaux et réalisations des cadres formés dans ces différents programmes. Elle fera, pour ce faire, appel au réseau international des spécialistes en développement intégré.
La Collection diffusera les travaux de l’Académie nationale des sciences du développement de la République Démocratique du Congo (ANSD), crée en 1999, et qui publie un Bulletin.
Les sciences du développement
Qu’est-ce que les Sciences du développement ? J’ai fait une communication sur ce thème lors de la cérémonie soulignant le cinquième anniversaire de l’ANSD, à Kinshasa, le 16 décembre 2004.
On peut consulter ce travail sur le site WWW de la Bibliothèque numérique francophone (Les classiques des sciences sociales).
En bref, les sciences du développement, ce sont toutes les sciences, tant il est vrai que le développement est tributaire des sciences humaines, des sciences de la nature et des biotechnologies, des sciences bio-médicales et des sciences de l’ingénieur. En fait, dans le cadre de l’approche systémique retenue, toutes les sciences apportent leur contribution ; et pour améliorer les conditions de vie de milliards de personnes et éradiquer la pauvreté sur la terre, l’accent doit être mis sur la notion-clé des besoins essentiels de l’homme. Or, ces besoins forment un tout, et toutes les sciences y ont leur place. Le champ des sciences du développement est donc extrêmement vaste, et seule l’approche systémique est en mesure de fournir les stratégies et les méthodes adéquates, capables d’apporter au développement la méthode qui lui a tant fait défaut depuis 45 ans et plus.
Grâce aux NTIC et en particulier grâce à la Bibliothèque numérique francophone (Les classiques des sciences sociales), il deviendra possible de diffuser, à l’échelle plantaire, des informations qui, hélas, jusqu’ici ne parvenaient guère qu’à quelques groupes d’étudiants, dispersés, dans l’espace et le temps.
La Collection des Sciences du développement diffusera dans les jours qui viennent le premier tome du Traité de Gestion de l’environnement tropical du Professeur Michel Maldague. Les quatre tomes suivants seront régulièrement diffusés dans les mois à venir. Dès à présent, les travaux de l’ANSD peuvent être consultés sur le site web.
Je tiens exprimer ici ma profonde satisfaction, car, avec cette ouverture sur le monde, il devient possible de rompre l’isolement qui empêchait jusqu’ici de nombreux professeurs, chercheurs, spécialistes, etc., des pays francophones en développement de diffuser leurs travaux grande échelle et de prendre pleinement part au mouvement scientifique contemporain. C’est là un ct tout fait positif de la mondialisation.
Cette nouvelle collection devrait jouer un rôle de catalyseur en mesure de dynamiser les responsables du développement ; celui-ci pourrait alors, non seulement s’accélérer, mais encore se réaliser dans de meilleures conditions du fait de l’application de l’approche systémique à la solution des problèmes.
La nouvelle collection est ouverte à quiconque désire faire connaître son expérience et ses réalisations à propos des questions d’environnement, d’aménagement intégré du territoire, de développement, de lutte contre la pauvreté, de gestion des ressources naturelles, etc. Nous souhaitons aussi que les responsables du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) trouvent dans cette collection des sources d’inspiration grâce à quoi ils pourraient assurer le développement africain d’un avenir plus harmonieux, plus équitable et durable.
Je remercie très chaleureusement les principaux artisans qui sont à l’origine de cette nouvelle Collection : Monsieur Jean-Marie Tremblay, déjà cité, fondateur et directeur de la bibliothèque Les classiques des sciences sociales, et travailleur infatigable, M. Gilles Caron, directeur de la bibliothèque Paul-Émile Boulet de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) et M. Adophe Leschevin d’Ère pour ses initiatives, toujours chargées de signification et d’intérêt.”
Michel Maldague
Professeur émérite de l’Université Laval
Directeur de la Collection des Sciences du développement
(Les classiques des sciences sociales),
Cap-aux-Oies, province de Québec, Canada, le 30 mai 2005
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