[9]
L’ÉTAT SORCIER.
Santé publique et société au Cameroun.
Avant-propos
L’ouvrage de Bernard Hours illustre l’importance d’une nouvelle discipline, l’anthropologie médicale qui s’intègre aujourd’hui à toute discussion sur les soins de santé primaires dans les pays en développement.
Après avoir décrit les manques dans un dispensaire public de Douala, puis les conditions parfois sordides dans lesquelles fonctionne un service hospitalier, B. Hours évoque une maternité rurale où les mêmes manques ne provoquent pas les mêmes effets. Ici, sans matériel ni médecins, les rapports avec les patients sont satisfaisants, en particulier grâce à l’accueil digne qui leur est réservé par les sages-femmes.
« Les cent médicaments de Dieu » montrent l’importance d’une pharmacie villageoise efficace et appréciée par la population, dans un dispensaire privé baptiste. La notion d’« État sorcier » permet enfin une analyse sociale des insuffisances relevées dans le secteur public.
Pour dispenser les soins primaires prônés par l’O.M.S., les para-médicaux s’avèrent finalement la pierre de touche des soins dans les pays du tiers monde. La démarche de B. Hours est originale et nouvelle. En outre, tout en soulignant les problèmes du secteur public urbain, et certains avantages du secteur privé rural, il se refuse à une vision simplificatrice et renvoie le débat à un choix de société qui passe par une « modernisation » politique de la santé.
Une phrase de conclusion me paraît importante : « L’État apparaît ici comme un multiplicateur de la sorcellerie latente [10] dans la société et la méconnaissance qui entoure ce rôle amène les investissements à être peu productifs. »
Bernard Hours est anthropologue et il observe dans le cadre de sa discipline. Plus que jamais, cette approche se présente comme indispensable, tant pour les responsables médicaux des Etats que pour les organisations non gouvernementales afin que le développement sanitaire s’effectue en partenariat entre soignants et soignés.
A. Minkowski
|