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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Rachad ANTONIUS, “Le Journal de Montréal et les frontières symboliques avec les musulmans.” Montréal: Département de sociologie, UQAM, juin 2009, 17 pp. Un article publié dans l’ouvrage sous la direction de Aline Gohard-Radenkovic et Dunya Acklin Muji, Entre médias et médiations : mi-ses en scène du rapport à l’altérité, pp. 55-78. Paris: L’Harmattan, 2010, 274 pp. [Autorisation accordée par l'auteur le 23 mai 2014 de diffuser cet article dans Les Classiques des sciences sociales.]

Rachad ANTONIUS

sociologue, professeur, Département de sociologie, UQÀM.

Le Journal de Montréal
et les frontières symboliques
avec les musulmans
.”

Montréal : Département de sociologie, UQAM, juin 2009, 17 pp. Un article publié dans l’ouvrage sous la direction de Aline Gohard-Radenkovic et Dunya Acklin Muji, Entre médias et médiations : mises en scène du rapport à l’altérité, pp. 55-78. Paris : L’Harmattan, 2010, 274 pp.

Introduction
Considérations générales

Deux rôles spécifiques que jouent les médias
Les Arabes et les musulmans diffèrent-ils des autres groupes minoritaires ?
Comprendre la logique du discours

Le Journal de Montréal

Tendances générales

La structure de l’information et de l’opinion au Journal de Montréal
Les Arabes et les musulmans dans le Journal de Montréal

Pratiques journalistiques au Journal de Montréal

L’usage systématique de symboles religieux pour dénoter l’altérité
Un usage réducteur des figures de l’altérité
Un traitement rédactionnel anecdotique porté sur le « fait divers» et très personnalisé
Une mise en narration selon un modèle simplifié
Le Journal de Montréal comme modérateur et comme contre-pouvoir 
L’iconographie dans le Journal de Montréal 
La dimension « genre » dans les photos du Journal de Montréal
Quelques « bonnes » pratiques
Deux moments forts
Le sondage sur le racisme
L’affaire des cabanes à sucre

En guise de conclusion

1. Tendances générales
2. L’impact de la couverture médiatique sur les musulmans et les Arabes

Bibliographie
Résumé

INTRODUCTION

Les relations entre les communautés arabes et musulmanes et les autres groupes dans la société d'accueil (tant les groupes majoritaires que les autres groupes minoritaires) ont été marquées, au cours des dernières années, par deux grands facteurs. Le premier relève de la situation internationale et de ce qu'on désigne par la « guerre au terrorisme », et le second, sans doute le plus important, découle des transformations démographiques de la société québécoise, qui est confrontée à une diversité religieuse dont elle n’avait pas anticipé les conséquences, entraînant ainsi des questionnements identitaires déchirants. Dans les deux cas, les médias ont joué un rôle majeur dans le tracé des frontières symboliques entre le eux et le nous. Ce chapitre a pour objectif d’explorer les contours de cette médiation parfois conflictuelle, en particulier celle du Journal de Montréal, et de poser quelques hypothèses sur ses conséquences.

La « guerre au terrorisme », et tout ce qui découle de la logique de l’Empire [1], a eu pour conséquence le développement de stéréotypes négatifs à l’égard des musulmans ainsi que des Arabes (qu'ils soient ou non musulmans). Ces stéréotypes prennent pour ancrage dans le réel les formes violentes de résistance à l’Empire, surtout quand elles sont aberrantes, en les décontextualisant et en les généralisant. Le second facteur, qui découle des transformations démographiques et culturelles de la société québécoise ainsi que du processus de laïcisation qui opère au sein du groupe majoritaire, a exacerbé les débats relatifs à la gestion de la diversité religieuse, et il a provoqué des malaises, des craintes et des prises de position hostiles face aux échos, en terre d’immigration, de ce qu’on appelé le ‘renouveau islamique’ dans les pays arabes et musulmans. Ce renouveau a pris la forme d’une revitalisation des pratiques religieuses ainsi que de la composante religieuse des identités, entraînant parfois un renforcement des tendances religieuses conservatrices. Ceci s’est traduit, en situation de migration, par l’augmentation des demandes d’accommodement des pratiques religieuses minoritaires dans l’espace public, ainsi que par certains comportements effectivement problématiques, mais marginaux, localisés et susceptibles d’être résolus au cas par cas. Les réactions à ces situations ont pris une ampleur démesurée dans la population majoritaire, exprimant un sentiment de peur frôlant la panique. Une illustration anecdotique de cette situation a été fournie durant les audiences télévisées de la Commission Bouchard-Taylor, formée par le gouver­nement pour sonder la population sur les modalités souhaitées de l’aménagement de la diversité religieuse au Québec. Voulant rassurer un membre du public qui estimait que les pratiques religieuses des musulmans constituaient un danger pour l’identité québécoise, un des co-présidents de la commission lui a gentiment rappelé que les musulmans ne formaient qu’un peu plus de 1% de la population du Québec. Cette personne a alors rétorqué : «  Mais ce 1% occupe 100% de l’espace ! ». Comment cette perception d’envahissement est-elle née ?

Il nous semble clair à présent que les médias ont joué, de façons très diverses et inégales d’ailleurs, un grand rôle dans la propagation de ce sentiment, et dans la transformation de questions mineures en interrogations existentielles. En ce sens, les grands journaux et les chaînes de télévision ont eu une influence importante sur la relation entre les groupes religieux minoritaires et la majorité. Nous estimons que leur influence est suffisamment importante pour affirmer que la médiatisation est devenue médiation, dans le sens de rôle d’intermé­diaire et non de conciliation, car cette médiation a été hostile et conflictuelle. Elle a contribué à ériger des frontières symboliques et à contribuer à les rendre un peu plus étanches et difficiles à franchir. Ce sont les processus à l’œuvre dans cette médiation que nous allons tenter de décortiquer.

Or, lorsqu’on évalue l’influence des médias, il n’est pas aisé de départager ce qui est un reflet de rapports sociaux existants, de ce qui est un effet propre au mode de fonctionnement des médias. Les quelques considérations générales qui suivent nous permettront de mieux analyser l’apport spécifique du Journal de Montréal à l’établissement de ces frontières symboliques.

CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

Deux rôles spécifiques que jouent les médias

Les médias jouent deux rôles spécifiques qui sont étroitement en lien avec notre problématique. Premièrement, ils contribuent en partie à déterminer des grands enjeux de société, (ou agenda setting en anglais) [2]. Ces enjeux incluent celui du « vivre-ensemble ». Par les sujets qu’ils couvrent, par leur interpellation de la classe politique, par leur pouvoir de répéter une information ou de la mettre en valeur à un moment précis (par exemple, les rediffusions en boucle de certains événements), par le fait que certains événements sont discutés et mis en exergue alors que d’autres ne le sont pas, les médias contribuent dans une large part à déterminer ce qui est – ou n’est pas – à l’ordre du jour. Sur la scène internationale, par exemple, la violence exercée par ‘nos ennemis’ est bien plus présente dans les médias que celle qui est exercée par des forces amies. Dans la situation actuelle au Proche-Orient et en Asie centrale, ceci a pour conséquence que les Arabes et les musulmans seront fréquemment associés à la violence, davantage comme agresseurs que comme victimes, même si cela s’avère être contraire à la réalité du terrain.  Sur ce point, les différences entre les  journaux sont moins perceptibles que pour les affaires locales.

Deuxièmement, ils jouent un grand rôle dans la détermination de la façon dont on aborde ces grands enjeux (framing[3]. Ainsi, une fois que la violence est mise en lien avec l’image des Arabes ou des musulmans, sera-t-elle présentée comme découlant de facteurs politiques, ou de la culture profonde, ou encore de la religion ? La façon dont elle est abordée aura une incidence sur les attitudes des gens face aux musulmans ou aux Arabes.

Les médias électroniques ont sans doute un impact plus étendu que les médias écrits, mais les mêmes rapports de pouvoir, les mêmes tendances idéologiques dominantes sont à l’œuvre dans tous les médias. Nous partons de la prémisse que c’est au niveau de l’impact que la différence est la plus grande, et pas tellement au niveau de la logique sous-jacente qui structure le discours.

Les Arabes et les musulmans
diffèrent-ils des autres groupes minoritaires ?


Les musulmans ne forment que 1,5% des habitants du Québec et sont essentiellement concentrés à Montréal. Une grande majorité de Québécois ne connaissent donc leurs concitoyens musulmans que par l’image qui leur est transmise par les médias, et qui comporte deux aspects spécifiques aux Arabes et aux musulmans. D’abord, la conjoncture internationale y est pour beaucoup dans les images qui leur sont associées. Ces images découlent autant de la nécessité de justifier les politiques occidentales au Moyen-Orient, que des formes de résistance violente à ces politiques, qui prennent parfois des formes aberrantes. Ensuite, les « renouveau islamique » mentionné plus haut se manifeste aussi en situation de migration, et ces manifestations colorent le débat sur les accommodements. Deux thèmes se dégagent de façon claire : celui de la violence, et celui de la soumission des femmes. Nous n’analyserons pas en détail la couverture médiatique des événements internationaux, que nous faisons ailleurs [4].

Comprendre la logique du discours

Dans un pays où la démocratie et les droits humains constituent des valeurs affichées tant par les gouvernements que par la société civile, le racisme ouvert n’est plus de mise. Mais il existe cependant des processus discursifs qui ont pour effet de stigmatiser des groupes minoritaires et de les marginaliser, possiblement de façon non intentionnelle. La première étape de cette stigmatisation est l’érection de frontières symboliques qui démarquent l’altérité presque absolue de ceux que l’on considère étrangers. Mais pour pouvoir faire une critique crédible du discours médiatique sur les Arabes et les musulmans, il ne suffit plus de voir si on les associe à des images négatives. Il faut comprendre comment s’articule le discours produit sur eux. Cette approche a l’avantage de permettre de mieux comprendre les préoccupations et les peurs – quelquefois légitimes – qui sous-tendent ce discours. Ceci pourrait permettre un dialogue rationnel par opposition à des accusations mutuelles qui ne permettent pas le dépassement des tensions créées autour de ce discours stigmatisant.  C’est pour cette raison que nous avons accordé une certaine importance à la structure argumentative des opinions exprimées dans les journaux.

LE JOURNAL DE MONTRÉAL

Le corpus du Journal de Montréal a dû être constitué manuellement, en consultant les microfiches, puisque il n’est pas disponible en format numérique. Nous avons sélectionné une période s’étendant sur 6 mois (novembre 2006 - avril 2007), qui est assez significative pour observer la façon dont on parle des Arabes et des musulmans. Nous avons essayé d’aller au-delà du descriptif, et d’identifier les logiques à l’œuvre dans la sélection et la présentation des nouvelles et des opinions, ainsi que dans la formulation de ces opinions [5]. Nous avons essayé de dégager les grands thèmes abordés et surtout les types d’arguments qui structuraient les discours. Cette recherche est donc interprétative.

Nous avons accordé une grande importance au Journal de Montréal pour deux raisons. Premièrement, puisqu’il n’est pas disponible en format numérique, nous ne croyons pas qu’il ait fait l’objet d’études similaires [6]. Deuxièmement, nous avons conclu qu’il avait joué un rôle plus important que les autres titres dans le débat sur les accommodements et dans la construction de l’image populaire sur l’islam et les musulmans, à cause de sa politique éditoriale et de son partenariat avec d’autres composantes du groupe Quebecor, dont il est la propriété. Les mêmes nouvelles sont diffusées dans le Journal de Montréal, les stations de télévision TVA et LCN, le site Canoe.ca et la station 98,5 FM. Elles sont ensuite reprises par un certain nombre de radios ou de périodiques dans les régions, et même la télévision d’État, Radio-Canada, se voit contrainte d’y faire référence. Par ailleurs, le Journal de Montréal est le plus distribué et le plus lu au Québec (39 % de plus que La Presse, selon le journal); il est disponible dans beaucoup de petits restaurants et casse-croûtes, ce qui multiplie son audience. Nous illustrerons comment le Journal de Montréal et les médias associés jouent un rôle d’« agenda setting » bien plus grand  que les autres journaux du Québec.

Tendances générales

La structure de l’information
et de l’opinion au Journal de Montréal


Le Journal de Montréal se présente comme un journal populaire qui ne prétend pas brasser d’idées abstraites, mais qui veut composer avec des situations concrètes. Les titres, les photos, la mise en forme visuelle du texte occupent une très grande place. La Une, qui annonce «la» nouvelle et renvoie à des articles intérieurs, contient uniquement des gros titres en applique sur un fond formé par une photo quasi pleine page et quelques photos secondaires. Le sensationnalisme est inscrit dans la facture même de la maquette. Le Journal de Montréal a des chroniqueurs, mais pas d’éditorialistes. Le Journal de Montréal fait un large écho aux réactions de ses lecteurs, qui sont reproduites à l’occasion avec leur photo. 

À l’opposé des autres journaux, c’est par l’énoncé iconographique (les titres, la mise en page et les photos) que le Journal de Montréal crée son impact, beaucoup plus que par le texte proprement dit. L’iconographie, si elle a parfois une vie indépendante du texte, est rarement en rupture avec celui-ci : elle prolonge sa portée et en amplifie le sens. Le sensationnalisme dans le Journal de Montréal exprime – et suscite – souvent un sentiment d’indignation ou de révolte contre des excès commis par d’autres citoyens ou des élus : la révolte du « gros bon sens »... Le traitement de l’actualité est surtout anecdotique, avec peu de contextualisation des faits rapportés, et un usage systématique de stéréotypes dans l’iconographie. Il ne s’agit pas ici de stéréotypes nécessairement négatifs, mais d’images dites typiques et qui évoquent à coup sûr leur sujet, le réduisant ainsi à ses aspects spécifiques les plus frappants et les plus visibles.

Les Arabes et les musulmans
dans le Journal de Montréal


Dans le cas des musulmans, cette tendance à mettre de l’avant des images qui évoquent de façon immédiate l’islamité du sujet signifie qu’on préfère davantage souligner l’altérité et la différence que les aspects « invisibles » des musulmans. Le résultat est une impression très forte que tous les musulmans sont et veulent rester fondamentalement différents, ce qui ne correspond pas vraiment à la réalité.

Les musulmans sont très souvent mentionnés dans un contexte présenté comme problématique pour la majorité, sinon dangereux pour sa culture ou sa sécurité. Dans ces cas, c’est la différence qui est mise en exergue plutôt que les aspects communs d’humanité. En général, le journal puise sa substance dans la nouvelle à sensation ou autour des figures radicales (ex. : Ahmed Ressam, le terroriste montréalais pris en flagrant délit de transport d’explosifs) ou controversées. Les sources d’information connues sont si arpentées et si réduites que même ses proches collaborateurs ou chroniqueurs se demandent pourquoi les « médias » s’adressent toujours aux mêmes et font d’un fondamentaliste comme l’imam Saïd Jaziri un porte-voix quasi officiel de toute une communauté !

Nous avons analysé 471 éléments du Journal de Montréal où il était directement question de musulmans ou d’Arabes. Ces éléments incluent des textes, des caricatures, mais aussi des titres de la Une, des photos et des annonces invitant le lectorat à réagir à des questions portant sur les accommodements ou sur la gestion de la diversité. Nous les avons regroupés en quatre catégories : la première comprend ce qui relève des choix éditoriaux et de mise en page : la UNE, les titres, les caricatures, les photos; les chroniques font partie de la 2e catégorie; les lettres et opinions des lecteurs forment la troisième catégorie, et enfin les nouvelles la quatrième. 

La représentation des musulmans est fortement genrée : les hommes sont associés à la violence et au terrorisme, et les femmes au voile et à la soumission. On parlera beaucoup des présumés terroristes et du discours fondamentaliste à Montréal, et ce sont les porteurs des discours les plus conservateurs qui auront l’honneur des Unes et des grandes photos dans le Journal de Montréal. Les musulmans sont vus surtout à travers le prisme du ‘Montréalistan’, titre du livre de Fabrice de Pierrebourg, journaliste au Journal de Montréal, qui sous-entend que Montréal héberge des réseaux islamiques radicaux qui s’y meuvent aussi facilement que dans une république islamique d’Asie centrale. On peut dire que le contexte international est prédominant pour ces images. Mais même lorsqu’il essaie de faire œuvre de pédagogie, le Journal de Montréal propage les stéréotypes. Témoin, ce texte de Benoît Aubin en date du 14 mai 2008 (en dehors de la période étudiée, mais symptomatique), intitulé Comprendre le Liban. Le journaliste écrit : « On peut affirmer avec certitude que chaque homme adulte y a déjà tenu une arme et a fait feu sur un voisin - ou a été blessé par un voisin » ! Remarquer les termes « chaque homme » et « avec certitude ». Le journaliste voulait expliquer qu’au Liban « c'est très rare qu'on voit des gens sauter une coche et s'engueuler » et qu’une certaine civilité est de mise. L’équilibre de la terreur, en quelque sorte, mais au niveau individuel.

La femme musulmane voilée revient le plus souvent comme symbole de l’altérité, de la résurgence du religieux dans l’espace public sécularisé et de l’inégalité entre hommes et femmes. Elle constitue une menace au principe chèrement acquis de l’égalité des sexes. Dans une grande majorité de cas, ce sont des photos de femmes voilées qui accompagnent les articles qui évoquent les musulmans. Le Journal de Montréal a repris dans ses bandeaux promotionnels des photos de femmes portant la burqa (ce que portent les femmes afghanes) ou le niqab (le voile qui couvre tout le visage, sauf peut-être les yeux), comme si les musulmanes qui les portent étaient légion au Québec. Pour illustrer un texte portant sur la décision du directeur des élections du Canada de permettre le vote dans les bureaux de scrutin avec le visage caché, Le Journal de Montréal a choisi de reproduire la photo de deux femmes afghanes sous leur burqa, accroupies, quelque part en Afghanistan.

Ces représentations des Arabes et des musulmans sont, croyons-nous, le résultat de deux facteurs : d’une part la conception de l’information comme produit médiatique rentable, et d’autre part la conception de ce qu’est la société québécoise, conception généralement partagée entre les gestionnaires du journal et une partie des lecteurs.

Pratiques journalistiques au Journal de Montréal

Nous avons identifié les pratiques suivantes qui caractérisent le Journal de Montréal.

L’usage systématique de symboles religieux
pour dénoter l’altérité

Cet usage est frappant dès lors qu’il est question d’accommo­dements : on montre des femmes voilées ou des juifs hassidims portant chapeau et boudins. Dans le corpus, le stéréotype de la musulmane comme femme voilée est prédominant (43 représentations iconographiques sur 46). Les musulmanes non voilées ne sont représentées que trois fois : le 4 novembre 2006, le 10 février 2007, et le 9 avril 2007. La communauté québécoise de souche n’est pas affublée de tels symboles. Son évocation est davantage portée par le texte que l’image et on la caractérise souvent par son attachement à un groupe de valeurs communes. L’usage de critères religieux comme symboles de l’altérité a comme effet de focaliser l’antagonisme sur les porteurs de ces symboles. Cette altérité agit alors comme un repoussoir : ceci se manifeste par les courriers des lecteurs qui ne cessent de faire valoir la laïcité parmi d’autres « valeurs fondamentales » de la culture québécoise.

Illustrations :

Les exemples sont bien plus nombreux que ceux présentés ici. Les Juifs sont le plus souvent représentés par le Juif hassidim. Même remarque pour les musulmanes, qu’elles soient voilées ou non dans la vie réelle, elles sont sujettes à essentialisation et leur représentation iconographique se réduit principalement au voile islamique.

— Tenue hassidim masculine :

1) 15 janvier 2007, p. 1 : Titre principal de la Une : « 59% des Québécois se disent racistes » - Iconographie : Juifs hassidims

2) 12 janvier 2007, p. 4 : autopromotion : « Super Samedi. Êtes-vous racistes? » - Texte : « Demain, dans le Journal de Montréal, participez à la plus grande enquête sur le racisme, les préjugés et les accommodements raisonnables jamais réalisée au Québec… comparez votre niveau de tolérance à celui des Québécois francophones, anglophones et des communautés culturelles » - Iconographie : Juifs hassidims, femme voilée et mosquée.

— Chandelier juif, tenue masculine juive, prière musulmane, mosquée, femme musulmane voilée :

1) Le tout dans le sondage Léger (en 36 questions) sur les Accommodements raisonnables du 13 janvier 2007, p. 2 et 111. Titre : « Mesurez votre niveau de tolérance ».

— Voile islamique, hidjab, niqab, burqa :

1) 13 janvier 2007, p. 1 : Titre principal de la Une : « La plus grande enquête jamais réalisée au Québec. Êtes-vous devenu intolérant? Faites le test aujourd'hui 36 questions » - Iconographie : musulman, femme musulmane voilée (burqa), juif hassidim, femme noire.

2) 16 janvier 2007, p. 5 : autopromotion : « Grande enquête sur la tolérance des Québécois. Selon vous, les Québécois sont-ils vraiment racistes? » - Iconographie : musulman, femme musulmane voilée (niqab), juif hassidim.

3) 17 janvier 2007, p. 2 : annonce TVA : « Tout le monde parle d'accommodements raisonnables. Ce soir 21h à TVA Les Québécois participent enfin au grand débat » - Iconographie : femme musulmane voilée.



Un usage réducteur des figures de l’altérité

Une grille commune selon des critères très réducteurs de la réalité est souvent appliquée à une situation donnée. Elle a pour conséquence d’essentialiser les autres. Le stéréotype s’applique à l’Autre pour tenter de l’appréhender sans avoir à se perdre dans sa complexité. Il s’applique souvent à des personnes selon des critères visibles ou assez immédiatement saisissables : la race, le sexe, l’âge, la nationalité…

Les figures mises en scène tombent dans les catégories suivantes, qui se dégagent du corpus de façon implicite. Il y a une dimension interprétative dans cette description, mais elle nous semble utile pour comprendre comment le discours sur l’altérité est structuré.

Le Québécois/ la Québécoise : citoyen, juste, sensé et simple. Ses réactions premières sont parfois impulsives face à des situations paradoxales du monde moderne et globalisé ; il peut parfois être perçu comme assez fermé, peu accueillant, modérément mais tendanciellement raciste, mais son fond est bon (les bons sentiments qui peuvent se fondre dans le bon sens) ; il n’admet pas l’incohérence d’un système ou l’extrême de certaines positions au regard de sa culture.

L’Autre assimilé : qui à son niveau a réussi en termes économiques ou d’intégration à la société d’accueil et qui, à ce titre, suscite l’admiration (et confirme ainsi la validité d’un modèle sociétal où globalement tout le monde a un jour été un migrant). Le Journal de Montréal présente le parcours de cet Autre comme une épreuve (« le parcours mythique du héros », avec une situation initiale insatisfaisante, une quête difficile, des obstacles à affronter, mais finalement surmontés, une victoire finale et la reconnaissance de la part des Québécois). C’est une vision plus assimilatrice qu’intégrationniste.

Illustration : 15 janvier 2007, p. 4 : Titres : « Amadouer la belle-famille. Le député du Bloc Maka Kotto, Camerounais d'origine, fréquente depuis deux ans sa collègue Caroline St-Hilaire » - Iconographie : photo avec titrage « Jean-Clément St-Hilaire ne changerait de gendre pour rien au monde, tant Maka Kotto rend sa femme, sa femme et lui-même heureux ». Dans le corpus, il n’existe pas d’exemple de ce type en ce qui concerne les arabo-musulmans.

L’Autre qui arrive et dont la migration est difficile : (comme « nous » à travers nos ancêtres) et qui malgré son altérité, sa distinction « négative » suscite d’abord la distance, l’interrogation et puis finalement la compassion (l’humain se dévoile en lui derrière sa différence). Il est moral de lui accorder l’asile, de reconnaître sa différence culturelle pour peu qu’il témoigne des signes d’un respect minimal des règles de la société (vision intégrationniste). Son statut au sein de la société politique n’est cependant pas pleinement acquis. Son altérité est tolérée dans la mesure où elle ne perturbe pas les règles fondamentales du fonctionnement de la société québécoise.

Illustrations : 1)  14 janvier 2007, p. 8 : Titres : « Réfugié à l'église. Il retarde sa déportation jusqu'à l'accouchement de sa conjointe » - Iconographie : photo du couple avec titrage « Sivaruban Ratnam a trouvé refuge dans une église pour éviter l'ordre de déportation d'Immigration Canada et pour rester avec sa femme qui est sur le point d'accoucher ». 2) 8 janvier 2007, p. 9 : Martin Bisaillon : Titres : « Témoignage. Pour un couple évacué du Liban. Une naissance coûteuse. Reçue au Canada avec un visa de visiteur, la future maman n'a pas droit aux soins gratuits ».

L’Autre collectif qui perpétue ostensiblement sa différence radicale, et dont le système social devient concurrent du système national. Il est inquiétant parce qu’il refuse les lois du pays et ses valeurs fondatrices. Il n’est pas à exclure, mais à soumettre. Il convient, à défaut de le renvoyer (lois de l’hospitalité obligent), de faire en sorte que ceux qui lui ressemblent n’entrent plus dans le foyer québécois. On ne peut espérer de lui que la rédemption (ou que son altérité soit relativement compatible avec le fonctionnement correct de notre système : travailler, produire de la richesse, respecter les valeurs familiales et ne pas tuer…).

Illustrations :1) 17 février 2007, dans le Cahier « Comprendre no 3 » : la maquette présentée a comme titres : « Islam et Christianisme. Deux religions face à face ». Deux thèmes écrits noir sur blanc ressortent qui concernent les musulmans : « sécurité » et « violence ». Cette maquette du cahier Comprendre no 3 permet d’illustrer l’arrière-plan international de la représentation de l’arabo-musulman. Les illustrations de cet Autre sont nombreuses dans le courrier des lecteurs. 2) L’imam Jaziri incarne à lui seul cet Autre indésiré. Cf. 16 mars 2007, p. 1 : Titre principal de la Une : « 30 islamistes sous haute surveillance à Montréal ». Présence de Saïd Jaziri dans le photo-montage en Une.

Enfin, le monstre : C’est le criminel, le fraudeur, le fondamentaliste islamiste, le terroriste. Ce n’est pas un groupe ou une communauté dans son entièreté : c’est avant tout un individu, extrême, mais qui, à lui seul, peut mettre en danger ou désorganiser l’ensemble de notre système (Imam Saïd Jaziri par exemple).

Illustrations : 1) 16 mars 2007, p. 1 : Titre principal de la Une : « 30 islamistes sous haute surveillance à Montréal ». 2) 16 mars 2007, p. 3 : Titre : « Bienvenue à Montréalistan ».

La position du chroniqueur-vedette du Journal de Montréal, Richard Martineau, sur la représentation stéréotypée de l’« autre » peut paraître paradoxale. Pour commenter le sondage sur le racisme de janvier 2007 dans sa chronique du 16 janvier (p. 6), il commence par constater, maints exemples à l’appui, que les représentations stéréotypées sont monnaie courante, qu’elles sont comprises par tous : « Les Asiatiques sont forts en science, les femmes latinos sont chaudes, les Juifs aiment l’argent, les Arabes sont bons pour négocier… », précisant que les stéréotypes sont parfois positifs, parfois négatifs. Puis, les condamnant, il ajoute qu’il vaut mieux guérir de cette maladie parce que nous sommes tous contraints d’apprendre à vivre ensemble. Cette condamnation des stéréotypes tranche avec les pratiques du journal, et a peu de chance de créer une attitude d’ouverture compte tenu d’une part de la banalisation et de la normalisation des stéréotypes qui l’accompagne, et compte tenu de la structuration de l’information qui renforce de tels stéréotypes. Il n’est pas étonnant dès lors que des attitudes extrêmement hostiles s’expriment dans les blogs.

Un traitement rédactionnel anecdotique
porté sur le « fait divers» et très personnalisé


C’est une tendance lourde du Journal de Montréal : faire la démonstration de l’existence d’un fait par l’exemple personnalisé, mais sans recherche systématique d’un complément d’information ou du contexte qui permet de mieux comprendre la situation. Cette tendance est bien illustrée par la question de la discrimination dans l’emploi : il y a rarement une analyse globale du phénomène ou de sa portée, mais des cas d’individus, souvent des immigrants qui sont aussi musulmans, qui vivent une situation de non emploi présentée comme injuste.

À côté d’un traitement rédactionnel très porté sur les personnes, le Journal de Montréal privilégie aussi l’histoire, le fait de société vécu, sensé refléter une réalité plus large et plus difficilement appréhensible par le commun des lecteurs.

Le mode dominant de représentation de l’actualité telle que proposée par le journal est une sorte de triangulation : une histoire, une personne, une morale. Ce choix de traitement opéré par le Journal de Montréal, outre le sentiment de proximité aux faits qu’il peut susciter chez le lecteur, facilite aussi la mise en narration de l’actualité. Il permet de raconter des histoires, de jouer des sentiments, tantôt d’identification, tantôt de répulsion chez le destinataire de l’information.

Illustrations :

1) 27 janvier 2007, p. 30 : PC : « Victoire pour Arar. Des excuses et une indemnité du Fédéral » - Iconographie : photo de Maher Arar, avec titrage « Maher Arar a remercié le peuple canadien de l'avoir soutenu dans sa lutte ». Le combat de Maher Arar pour la justice.

2) 26 janvier 2007, p. 7 : Fabrice de Pierrebourg : Titres : « Lassé de recevoir des refus. Mohamed veut s'appeler Alex » - Mohamed, Tunisien d'origine arrivé en 2002, a un bac en mathématiques, un bac en actuariat (UQAM), et comme seuls emplois du travail dans des stations-service et des entrepôts de briques. Veut changer son nom à consonance arabe pour un nom plus occidental, à cause des préjugés et du racisme dans le monde du travail.



Une mise en narration selon un modèle simplifié

Le Journal de Montréal a une manière bien à lui de gérer sa prise de parole et de mettre en valeur sa ligne éditoriale. Elle repose sur une logique et une mise en scène toute particulière par rapport à l’actualité et aux faits. Cette mise en scène répond à un déroulé particulier : a) une ouverture dramatique, b) un développement paradoxal et individualisé, et c) une conclusion morale où la compassion pour l’autre n’altère en rien l’identité québécoise. La dimension morale est perceptible dans les chroniques et dans les nouvelles, avec la conséquence que les propos tenus in fine ne sont jamais extrémistes. La conclusion d’un article n’est jamais véritablement véhémente à l’égard des personnes ou des groupes humains. On revient toujours à un bon sens laïc teinté d’un fond de culture catholique québécoise dans le sens de l’ouverture et de la bonté. Par contre, les commentaires sur les blogs du journal sont fréquemment très acerbes, hostiles aux immigrants, et quelquefois ouvertement racistes. On pourrait dire que les bloggeurs mènent la logique de la polarisation du Eux et du Nous, promue par le Journal de Montréal, jusqu’à sa conclusion logique.

Le Journal de Montréal comme modérateur
et comme contre-pouvoir


L’existence de ce discours des bloggeurs fait apparaître, par contraste, celui du quotidien comme un discours modéré. On laisse s’exprimer les extrêmes, pour ensuite se donner la figure du modérateur, de celui qui raisonne l’émotion légitime du bon citoyen. Le véritable populisme du Journal de Montréal repose sur son rapport aux pouvoirs politiques institués et à l’administration. Le plus souvent, c’est la faute aux politiques ou aux décideurs qui se sont éloignés du pays réel et des gens. Ceci est vrai de bien des sujets, pas seulement de la question des accommodements. Le Journal de Montréal incarne une certaine nostalgie d’une société québécoise dotée d’un modèle social fort et d’une identité culturelle vive et populaire. Il développe une critique diffuse des autorités (canadiennes et québécoises). L’influence anglo-saxonne tant politique que culturelle passe pour le cheval de Troie d’une société globalisée et ultralibérale qui n’exempte plus aujourd’hui la classe politique québécoise de critiques car celle-ci semble, avec ses divisions et son jeu politique complexe, avoir abandonné son peuple.

En ce sens, le Journal de Montréal se présente comme le relais de la parole des gens ordinaires et du gros bon sens. D’où les verbatim, la parole « donnée » aux lecteurs. Cette parole du lecteur est moins une réalité qu’une mise en scène : l’expression de la vox populi est médiatisée par le journal et, somme toute, plus invoquée que réellement mise en scène.

En janvier 2007, le lancement d’un sondage et la présentation de ses résultats constituent un des moments forts de l’impact du Journal de Montréal, dont nous parlerons plus loin. L’objectif est certes de faire réagir les lecteurs et plus largement le public québécois, mais il nous semble qu’il est surtout d’obliger les milieux politiques et institutionnels à réagir à l’enquête. Le Journal de Montréal se trouve aussi au centre du débat, il devient maître de l’agenda médiatique et peut espérer prétendre incarner la parole du peuple au regard des institutions représentatives. C’est cela, la fonction d’agenda setting dont nous avons parlé plus haut, qui se vérifie par le fait que d’autres médias ont fini par accorder de l’importance aux sujets mis de l’avant par le Journal de Montréal.

L’iconographie dans le Journal de Montréal 

Le journal se caractérise par une forte production iconographique qui repose quasi essentiellement sur la photo, qui donne une forte impression d’« effet de réel ». Il n’est pas non plus très porté sur les chiffres, les statistiques (sauf dans quelques cas, comme pour la présentation du sondage sur le racisme en janvier 2007).

Dans son traitement photographique, le Journal de Montréal ne fait guère dans la photo artistique, esthétique ou allégorique. La photo est « réaliste », démonstrative. Sa fonction est d’illustrer (souvent de manière un peu caricaturale) le propos développé dans l’article et un moyen d’attirer le lecteur. Elle permet soit de visualiser la personne qui parle ou que l’on fait parler, accréditant ainsi la réalité de ses propos, ou elle vise à apporter une illustration de ce qui est énoncé dans l’article, considérée alors comme étant une preuve. Exemples : Couples avec femmes enceintes (8 janvier, p. 9 et 14 janvier, p. 8); Papiers authentiques comme preuve de citoyenneté ou de légalité;  « Emploi Ségrégation : Dédommagement de 15000$ ». Photo de Kamal El Batal, victime de discrimination en emploi, montrant ses papiers (23 février, p.11).

Contrairement au Devoir et à La Presse qui font largement usage de photos très esthétisantes, le Journal de Montréal recourt à des photos dont l’esthétique n’est pas la première caractéristique, mais qui ont néanmoins un grand impact par leur simplicité ou leur dimension interpellatrice (regards forts, documents brandis, objets « pointés » par le cadrage de la photo). En cela, la photographie est le pendant des titres : vocabulaire simple, interpellation brute. Ce n’est que dans le corps de l’article qu’on trouve plus de nuances et de complexité dans le propos du journal.

Une page en particulier mérite qu’on s’y arrête. C’est la Une du 17 novembre 2006. Un premier titre déclare : Il faut revoir la notion d’accommodement raisonnable. Mais le gros titre, entre guillemets, cite le chef du parti Action Démocratique du Québec, Mario Dumont, qui dit : « Ça n’a plus de bon sens ». Il est juxtaposé au visage d’un Mario Dumont sévère, ainsi qu’à trois photos plus petites : une femme voilée, un juif hassidim, et une femme noire. Le message associe ces visages à ce qui n’a pas de bon sens.



La dimension « genre »
dans les photos du Journal de Montréal


Globalement, les hommes des minorités visibles sont inquiétants par leurs visages, leurs regards, leurs attributs et leurs accessoires, en particulier les Arabes (4 février 2007, p. 6 : les deux photos présentées de Saïd Jaziri et de Steven Slimovitch (B’nai Brith) n’avantagent pas ces personnes présentées comme des « représentants » de leur communauté), les Sikhs, voire les Juifs hassidims avec leurs dos tournés (Une, 15 janvier) ou leurs refus de regarder l’objectif. Seuls les Asiatiques qui sourient en Une et qui trouvent les Québécois accueillants, et parfois les Noirs, échappent à cette règle. A l’opposé, les femmes rassurent essentiellement par le biais de trois éléments : beauté, sourire (17 janvier, p. 5), maternité. Par contre, totalement inaccessible, la femme en burqa fait peur.

Quelques « bonnes » pratiques

Dans la période couverte du corpus, on peut aussi identifier des pratiques que l’ont peut qualifier de « bonnes » puisqu’elles permettent de déconstruire les stéréotypes concernant les arabo-musulmans. Notons cet article du 15 février, p. 49, sur la « Conciliation - Travail-Famille » et intitulé « La galère! Cinq semaines de moins passées en famille chaque année ». Pour iconographie, une photo de famille où chacun des membres semble à l’aise et enjoué. Son titrage : « Comme bien des parents, Monia et Hassen Magri essaient de passer du temps avec leur quatre enfants ».

Notons également l’article du 9 avril, p. 45, sur Myriam Tazy-Marzak qui est un portrait qui concerne non pas le Québec, mais le Maroc : « La seule détective arabe veut devenir agent secret » (deux photos d’elle pour cet article). Là aussi, on propose une image qui contredit les stéréotypes.

Occasionnellement, on donne aussi la parole à des immigrants qui sont victimes de discrimination dans l’emploi. Par exemple, le journal a parlé du combat de Kamal El Batal contre la discrimination, et a montré les figures rassurantes du Dr Nasreddine Haddoud et de sa femme Nadia (personnes d’un certain âge et pour lesquelles on peut éprouver une certaine sympathie), mais qui perdent leur combat pour travailler au Québec et qui finissent par migrer à Ottawa. Ces quelques figures d’immigrants à qui il est porté préjudice mettent en exergue la situation vécue de discrimination des arabo-musulmans au Québec et de la non-reconnaissance de leurs diplômes, mais de façon individualisée.

Deux moments forts

Deux moments forts caractérisent l’impact du journal : il s’agit du sondage sur le racisme du mois de janvier 2007, et de l’affaire des cabanes à sucre de mars 2007. Le dossier des cabanes à sucre a souvent été évoqué durant les audiences de la Commission Bouchard-Taylor, alors que ni La Presse ni Le Devoir ne l’ont couvert. La Presse s’est contentée d’un éditorial pour dire que cela ne valait pas la peine d’en faire une histoire. Ceci démontre la capacité du Journal de Montréal et des médias associés du groupe Quebecor d’imposer des enjeux centraux dans le débat public. 

LE SONDAGE SUR LE RACISME

Le Journal de Montréal s’est associé avec la firme Léger-Marketing pour faire un sondage sur le racisme dont les résultats sont publiés sur plusieurs jours à la mi-janvier 2006. L’enquête en elle-même, qui comporte des questions fort intéressantes, est sujette à certaines critiques méthodologiques. Le journal l’a présentée de façon très élogieuse : « La plus grande enquête sur le racisme jamais réalisée au Québec », « La plus vaste enquête sur le racisme jamais réalisée au Québec », « La plus grande enquête de l’histoire dès demain ».

Trois aspects nous intéressent dans ce sondage. Le premier est l’annonce que 59% des Québécois se disent racistes. L’erreur, c’est d’avoir mis ensemble ceux qui assument clairement une position qui est consciemment et volontairement raciste (14% des répondants) avec ceux qui se disent « moyennement » ou « légèrement » racistes (45 % des répondants). Or que veulent dire ces deux dernières catégories ? Nous proposons l’interprétation alternative suivante : quelqu’un qui se dit un peu raciste est quelqu’un qui reconnaît que ses comportements avec des membres des minorités n’est pas aussi correct qu’il l’aurait souhaité. Il s’est peut-être surpris à se méfier spontanément, ou à attribuer des caractéristiques négatives à des gens de cultures différentes, sachant que ce comportement n’est pas justifiable moralement. Si ceci est vrai, cette attitude est fondamentalement différente de celle des personnes qui se revendiquent racistes. Mais quel est l’effet de les mettre ensemble ? Si 59 % des gens se disent racistes, il y a là une légitimation du racisme, puisqu’il est si commun. C’est un encouragement à exprimer tout haut sa méfiance et son hostilité envers les « autres »[7].

L’autre aspect du sondage qui a eu un impact négatif sur le débat, c’est l’opposition entre le respect des lois et règlements du Québec d’une part, et les accommodements, présentés comme étant des entorses aux lois. En effet, la Question 41 est libellée comme suit :

Q41. Quel énoncé correspond le mieux à votre opinion ?

1. Tous les immigrants devraient respecter les lois et règlements du Québec même si cela va à l'encontre de certaines croyances religieuses ou pratiques culturelles

2. Il est nécessaire d'adopter des accommodements à nos lois et règlements pour ne pas obliger les immigrants à aller à l'encontre de leurs croyances religieuses ou pratiques culturelles.

Alors que la notion d’accommodement raisonnable s’inscrit, au contraire, parfaitement dans la loi, cette question donne l’impression que les accommodements forcent le Québec à modifier ses lois (et donc un peu son identité) pour accommoder les nouveaux venus.

Le troisième aspect du sondage explique l’effet énorme des deux premiers : c’est sa médiatisation à travers le Journal de Montréal, les chaînes TVA et LCN, la station de radio 98,5 FM, et le site Canoe.ca, médiatisation qui a forcé les autres médias à en parler eux aussi, multipliant du même coup l’effet médiatique. Ainsi, le Journal de Montréal a joué, avec ses partenaires, un double rôle de « agenda setting » (en réussissant à mettre les résultats du sondage au centre de l’actualité pendant au moins deux semaines) et de « framing » (en redéfinissant la notion d’accommodement).

L’AFFAIRE DES CABANES À SUCRE

L’affaire des cabanes à sucre illustre de façon frappante comment les musulmans ont été représentés comme un danger pour l’identité québécoise dans l’imagination populaire. Il s’agit au départ d’une affaire privée sans conséquence : une association musulmane loue une salle dans une cabane à sucre pour un repas, et s’entend avec le propriétaire pour que le menu lui convienne, et elle demande d’utiliser la salle louée, durant une dizaine de minutes, pour la prière. Le Journal de Montréal consacrera pas moins de 8 pages à cette question et à celle d’une autre cabane à sucre qui avait servi des fèves sans lard à des clients musulmans : trois pages le 19 mars, et cinq pages le 20 mars, plus une invitation à aller exprimer son opinion sur le site canoe.ca dans une sixième page. La Une du 19 mars consiste en une photo de musulmans accroupis en prière dans la cabane à sucre, avec comme titre en très gros caractères : Cabanes à sucre accommodantes (ce dernier mot prenant à lui seul toute la largeur de la page) et comme sous-titre : Soupe aux poids sans porc et prières sur la piste de danse. Cette photo sera publiée trois fois durant ces deux jours. Page après page, le journal crie au scandale. Il appelle ses lecteurs à réagir sur son site internet. Le titre du dossier, « Pas d’chicane dans ma cabane » est aussi significatif : il sous-entend que certains, pour ne pas avoir de chicanes chez eux, préfèrent courber l’échine. Tout l’imaginaire associé à « l’aplat-ventrisme » mentionné par Mario Dumont est donc présent ici, et il est suffisamment diffusé pour que tout le monde au Québec en ait entendu parler. L’association du mot « accommodement » avec cette menace à un symbole fort de l’identité québécoise a eu un impact significatif, croyons-nous, sur l’ensemble de la question des accommodements. Il s’agit ici d’un exemple parfait de « framing ».

Le jour même, la cabane à sucre dans laquelle des clients avaient prié reçoit des menaces d’être incendiée. Le lendemain, le chroniqueur Richard Martineau délaisse la question du budget fédéral et des élections, que tous les autres journaux abordent, car il y a quelque chose de plus important pour la nation québécoise : il y a des immigrants qui veulent manger des fèves préparées de façon traditionnelle québécoise, mais sans lard, et cela semble être très grave pour lui. Nous reproduisons ici les neuf pages consacrées à la question.

Il est important de souligner que la signification « intégratrice » de l’événement a été passée sous silence. Une association qui regroupe des immigrants récents les initie à une pratique qui symbolise l’identité québécoise : c’est plutôt une manifestation de volonté de s’intégrer.

Cet épisode est, selon nous, structurant. La répétition de la nouvelle dans tout le réseau de médias associés en a fait un sujet important sur la place publique, qui a été souvent mentionné dans les tribunes téléphoniques et dans les audiences de la Commission Bouchard-Taylor, alors qu’un journal important comme La Presse n’a pas couvert l’événement. Cependant, il a fait suffisamment de bruit pour que La Presse se sente obligée de faire un éditorial, sous la plume d’Ariane Krol (20 mars) pour contester l’importance qu’on lui donne. En d’autres termes, cet épisode illustre aussi la capacité d’un réseau de médias concentrés dans la même entreprise de « déterminer l’agenda ».

Pages du Journal de Montréal

19 mars 2008, Une.

19 mars p.4

19 mars p.5

20 mars p.6

20 mars, p.8
20 mars p.9
20 mars p.26
20 mars p.27


EN GUISE DE CONCLUSION

1. Tendances générales

Des pages précédentes, nous retiendrons que les pratiques journalistiques du Journal de Montréal, fondées sur le sensationnalisme, ont pour conséquence une stigmatisation des immigrants, une focalisation de l’altérité sur les signes religieux, et une représentation de l’islam comme altérité absolue et comme un danger qui est en train d’envahir l’espace public et de menacer l’identité nationale. Mais il n’y a pas de discours systématique anti-arabe ou antimusulman. De plus, en dépit des quelques textes où les immigrants étaient regardés avec une certaine empathie, le Journal de Montréal a contribué à transformer des questions locales d’accommodements en crise. C’est dans ce sens que l’on peut dire que le Journal de Montréal a contribué à renforcer les frontières qui séparent les musulmans du reste de la société. C’est la composante religieuse (l’islam), plutôt que la dimension ethnique (arabe), qui est liée, dans le discours médiatique, à la notion de danger, car les musulmans sont vus surtout à travers le prisme de la remise en question de la laïcité de la société québécoise. Or il y a une vive conscience, parmi les élites politiques et parmi les intellectuels, de la diversité à l’intérieur des communautés musulmanes. Dans ce sens, c’est leur comportement, par opposition à l’essence de leur culture, ou de la religion, qui est perçue comme problématique.  Dans le discours populaire (lettres) ces nuances sont moins présentes.

Le fait que les journalistes et chroniqueurs du Journal de Montréal prennent la défense des immigrants (de façon individualisée) quand il s’agit de discrimination en emploi, comme nous l’avons illustré plus haut, légitimise à leurs yeux, semble-t-il, le fait de se montrer hostile aux demandes d’accommodements. Ce qui est sous-jacent, c’est un rejet de l’autre dans la mesure où il est réellement différent, mais une acceptation s’il veut bien devenir « comme nous ».

Le contexte international est rarement invoqué dans les débats locaux, mais quand la référence est faite, deux thèmes reviennent : le terrorisme et la violence irrationnelle, thèmes qui ne sont pas liés à un conflit particulier mais au Moyen-Orient en général et à l’islam, et la soumission des femmes, qui est soutenue par un courant orientaliste ancien, nourri et ravivé par la situation en Afghanistan. Nous croyons que, si les stéréotypes et représentations découlant de la couverture internationale ont un impact sur les débats concernant l’intégration des Arabes et des musulmans, ce sont plutôt les demandes d’accommodements, raisonnables ou pas, qui est majeur dans la formation des stéréotypes. En d’autres termes, la conjoncture internationale fournit les images et les mots, mais c’est la situation locale qui fournit les enjeux.

2. L’impact de la couverture médiatique
sur les musulmans et les Arabes


Les représentations médiatiques ont été largement étudiées du point de vue de la perception dominante des musulmans et des Arabes, de leur logique interne, du racisme qu’elles reflètent, des rapports de pouvoir qui les sous-tendent, et de la dichotomie du nous versus eux qu’elles introduisent dans l’espace publique (Said (1997), Poole (2002), Poole and Richardson (2006), Karim (2003), Antonius (2002) et (2008), Geisser (2003), Deltombe (2006)). Quant à l’impact de telles représentations, il a été étudié du point de vue de la psychologie sociale, avec beaucoup d’études examinant spécifiquement l’impact sur les femmes (Bendriss (2006), Hadj-Moussa (2000), Mahtani (2001)).

Ainsi, si la signification de ces représentations médiatiques a fait l’objet de nombreuses études, les conséquences politiques des ces représentations, soit la façon dont elles sont mobilisées pour maintenir ou contester des rapports de pouvoir, n’ont pas reçu l’attention qu’elles méritent. Nous croyons que ces représentations médiatiques sont au cœur de processus politiques dans lesquels le pouvoir s’exerce et qu’il est négocié, et elles méritent d’être étudiées à ce titre et non seulement en tant que processus socio-psychologiques, ou que processus culturels. Ils entraînent un sentiment de marginalisation, parmi les groupes musulmans et Arabes, dont de nombreux signes existent, mais qui n’a pas été étudié de façon systématique. Nous proposons quelques hypothèses dans cette direction.

Nous croyons que les discours médiatiques n’auraient pas eu l’impact qu’ils semblent avoir s’ils n’étaient en lien avec un discours politique hostile qui occupe une position centrale au Canada et au Québec, mais pour des raisons différentes. Dans le Canada anglais c’est la politique internationale qui fournit le contexte de ce discours, alors qu’au Québec c’est plutôt la question identitaire qui fournit ce contexte. Le « réveil islamique » que vivent les sociétés arabes et musulmanes et  ses aspects les plus conservateurs ont un écho au Québec par le biais de l’immigration, et ils sont perçus comme une menace à cette identité.

Le discours dominant dans les médias joue un rôle fondamental dans les processus que nous avons évoqués, en tant que reflet du discours dominant, mais aussi à cause du fonctionnement même des médias. La brièveté des nouvelles télévisées, par exemple, ainsi que les impératifs du marché qui promeut le sensationnalisme, favorisent la propagation d’amalgames réducteurs qui ne permettent pas de comprendre la complexité des processus politiques qui secouent les sociétés arabes et musulmanes. Elles contribuent ainsi à la reproduction de stéréotypes négatifs et de discours hostiles, renforçant le sentiment de marginalisation et d’exclusions des groupes arabes et musulmans. Ces derniers reçoivent eux aussi une image stéréotypée de la société québécoise, qui est beaucoup plus nuancée dans ses rapports quotidiens avec l’altérité que ne le laissent entendre les représentations médiatiques dominantes.

Ainsi, la relation entre les individus et les groupes se réclamant d’une identité arabe ou musulmane d’une part, et de la société québécoise majoritaire d’autre part relève moins de l’interaction directe entre eux que des images réciproques retransmises par les médias. Une telle situation ne peut avoir que des conséquences fâcheuses si les médias n’intensifient pas leurs efforts pour contrecarrer ces conséquences, comme ils l’ont fait, avec plus ou moins de succès, pour d’autres groupes marginalisés.

BIBLIOGRAPHIE

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Version abrégée du 21 juillet 2009

Mots-clefs

Représentations, arabes, musulmans, frontières symboliques, Journal de Montréal


RÉSUMÉ

Les demandes d’accommodement religieux venant des minorités issues de l’immigration récente a préoccupé la société québécoise au courant des dernières années. Les médias ont joué, de façons diverses, un rôle important dans le débat sur ces questions et dans la propagation, chez le groupe majoritaire, d’un sentiment d’envahissement par les minorités religieuses issues de l’immigration, transformant des questions mineures en interrogations existentielles. Dans ce sens, les grands journaux et les chaînes de télévision ont eu une influence importante sur la relation entre les groupes religieux minoritaires et la majorité, et dans le tracé des frontières symboliques entre le eux et le nous. La médiatisation est devenue médiation et elle a contribué à rendre les frontières symboliques un peu plus étanches. Ce chapitre a pour objectif d’explorer les processus à l’œuvre dans cette médiation, en particulier celle du Journal de Montréal, et de poser quelques hypothèses sur ses conséquences.



[1] Nous avons caractérisé, dans une publication récente (Antonius, 2008), ce que nous considérons être la logique de l’Empire, que nous avons contrastée avec la logique de la République, dans la gestion des revendications religieuses émanant des groupes musulmans d’immigration récente au Canada et au Québec.

[2] Concept proposé d’abord par McCombs, M.E., and D.L. Shaw. (1972) « The Agenda-Setting Function of Mass Media », in Public Opinion Quarterly, Vol. 36 p.176-187.  Voir aussi : Weaver, D.H. (2007) « Thoughts on Agenda Setting, Framing, and Priming », in  Journal of Communication. Vol. 57 No. 1, p. 142-147.

[3] Voir par exemple : Reese, S., Gandy, O. & Grant A. (ed.), 2001. Framing Public Life: Perspectives on Media and our Understanding of the Social World, Mahwah, N.J.: Lawrence Erlbaum.

[4] Voir par exemple Antonius, R. (2002) « Un racisme ‘respectable’ », in Jean Renaud, Linda Pietrantonio, Guy Bourgeault (dir.) (2002) Les relations ethniques en question. Ce qui a changé depuis le 11 septembre 2001, Les Presses de l'Université de Montréal.

[5] Une étude très détaillée de la couverture médiatique des accommodements a été réalisée par Mme Maryse Potvin pour la Commission Bouchard-Taylor et publiée en janvier 2008. Intitulée Les médias écrits et les accommodements raisonnables. L’invention d’un débat. Analyse du traitement médiatique et des discours d’opinion dans les grands médias (écrits) du Québec sur les situations reliées aux accommodements raisonnables, du 1er mars 2006 au 30 avril 2007, cette étude examine de façon exhaustive et détaillée la façon dont la question des accommodements a été  traitée dans la presse écrite, en adoptant une approche par sujet, ventilée pour les divers journaux, et fournit des statistiques sur les orientations des divers textes, pour ou contre, etc. Nous avons choisi une stratégie complémentaire, qui est moins systématique, mais qui vise à saisir la logique sous-jacente des discours, étant entendu que notre objet était la représentation des Arabes et des musulmans, et non le débat sur les accommodements, même si ces deux objets ont beaucoup de points en commun.

[6] Ibid.

[7] Nous avons, avec nos collègues J.C. Icart et M. Labelle,  développé ces arguments dans une lettre publiée dans La Presse en date du 19 janvier 2007.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le mardi 12 août 2014 6:09
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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