Quatrième de couverture
Jean-François Baré est directeur de recherche à l'ORSTOM (anthropologie). Ses premières recherches ont porté sur l'organisation politique et l'histoire d'une société malgache, à partir de longs travaux « de terrain ». Ce livre, qui est aussi le résultat d'enquêtes directes à Tahiti et de recherches documentaires en Europe, constitue l'une des premières tentatives de synthèse sur l'histoire tahitienne post-européenne. Il a constitué sa thèse de doctorat d'État.
Dans le prolongement de ces travaux et dans le cadre du département « conditions d'un développement indépendant » il s'intéresse à la nature des adaptations et des « inventions » des sociétés du Tiers Monde devant l'expansion des formes politico-économiques occidentales, aux situations ainsi créées et à leurs conséquences pour les enjeux du développement. Il souhaite donc contribuer, au-delà, à la mise en oeuvre d'une anthropologie des sociétés « modernes ».
La complexité et les paradoxes du Tahiti actuel, les transformations répétées et souvent brutales subies par la communauté ma'ohi, pourraient décourager toute recherche historique un tant soit peu extensive. C'est sans doute pour cette raison que voici encore quelques années, l'histoire de la communauté tahitienne se confondait avec une masse désordonnée et lacunaire d'historiographie. Pourtant, on y parlait beaucoup d'histoire, des missionnaires anglais, de la colonisation française.
Ce livre s'emploie d'abord à renouer ces fils, à combler ces lacunes. Utilisant les méthodes conjointes de l'anthropologie et de l'histoire, brassant de nombreux documents inédits, alternant l'analyse et le récit, il veut d'abord rendre compte d'un trajet, celui suivi dans le temps par la communauté ma'ohi de la fin du XVIIIe siècle, jusqu'à nos jours : des « conversions » au protestantisme de la période missionnaire, le « pouvoir anglais », de celui-ci à l'intervention militaire française, de cette intervention aux rebellions du XIXe siècle, aux raisons de leurs échecs, enfin à la colonisation française. Il en émerge une histoire bien différente des stéréotypes en vigueur, plus complexe mais peut-être plus vraisemblable, où le malentendu constitue parfois la loi de la communication. Au début du XIXe siècle, alors qu'avec les « conversions » s'ouvre cette histoire souvent tragique, les ma'ohi auraient-ils été touchés par « la grâce » ? Auraient-ils au contraire été « réprimés » par une quinzaine de missionnaires faméliques ?
Ce livre s'attache, en tout cas, à une lecture aussi rigoureuse que possible des processus historiques de rencontre des sociétés polynésiennes et de celles de l'Occident.
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