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ROLAND HOUDE, UN PHILOSOPHE
ET SA CIRCONSTANCE.
Itinéraire intellectuel d'un philosophe québécois
de 1945 à aujourd'hui.
Avant-propos
Il n'y a pas d'exploration attentive d'un itinéraire intellectuel sans surprises et sans la découverte d'une multitude de petits faits bruts qui laissent au chercheur le plaisir et le soin de rapprocher, d'associer, de combiner, de lier, d'entrelacer, de joindre, de conjuguer, de composer et de proposer. Ici, la pratique des mises en rapports (des faits et des repères chronologiques, biographiques et bibliographiques) opère par associations plutôt que par déduction, se préoccupe des faits de préférence aux raisonnements, reste plus près de l'expérience vécue que de la théorie et se livre, enfin, à la manière d'un essai.
Il y a (c'est mon hypothèse de travail) un récit de l'histoire des idées et de la philosophie au Québec déjà écrit par les témoins et les acteurs mêmes de cette histoire. Chacun d'eux a écrit son fragment. Mon travail de lecture consiste à retrouver ces fragments, à les rassembler et ainsi à rendre manifeste le texte collectif, l'architexte de cette histoire. Cela demande, comme le travail bibliographique, un grand effacement de la part du chercheur.
On raconte rarement l'histoire d'un livre. On n'expose pas plus souvent les pièces qui gardent les traces de ses péripéties. En pensant à l'histoire de ce livre, je pense donc à ces notes, ces matériaux, ces plans, ces manuscrits, ces documents de toutes sortes qui sont autant d'instantanés des circonstances variées qui ont marqué, d'une façon ou d'une autre, plus ou moins, cette histoire ; je pense aussi à l'inquiétude et à la provocation méthodologique qui y sont désormais inscrites en filigrane.
À ce propos, j'ai choisi, dans la pratique de la recherche qui est, ici, pour moi, essentiellement un travail de lecture de n'accepter qu'un simple a priori méthodologique minimal : l'attention. Être attentif d'abord, commencer le travail de la lecture en étant simplement attentif.
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C'est la recherche elle-même qui, dans son déroulement, a été pratiquement une provocation méthodologique ; plutôt que de s'en rapporter à une méthode antérieure à son mouvement, elle a donc comporté une méthodologie d'accompagnement. L'archilecture, la méthode des repères croisés, la révélation de l'architexte par un usage pertinent de la citation et un certain effacement du chercheur tout cela fait partie d'une méthodologie d'accompagnement d'une pratique (la mienne) de la recherche en histoire des idées et de la philosophie au Québec.
Dans la pratique de la recherche, il devrait y avoir, il me semble, à la fois, de l'audace par exemple, l'audace d'y fonder une indépendance de méthode et de la simplicité, celle, entre autres, d'y reconnaître, au fond, le sentiment qui nous anime. Je veux exprimer à Roland Houde mon amitié et remercier ceux et celles qui, en s'associant à la publication de ce livre, le saluent cordialement en leur offrant ce nouveau fragment de mes recherches en philosophie québécoise.
J.B.
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