- Présentation
- Sélection de citations.
Présentation
Par Laurent Potvin,
frère mariste, décembre 2009.
« Le journal est le genre littéraire qui garantit
la plus grande proximité entre l'auteur et le lecteur. »
Jean-Paul Desbiens.
« Les Années novembre. »
Le volume « Les Années novembre, Journal des années 1993, 1994 et 1995 » paraissait en 1996 aux Éditions Logiques.
Jean-Paul Desbiens y livre sa pensée selon sa propre conception d’un Journal personnel. C’est dire qu’il a effectué un choix dans ses écrits d’alors pour ne faire paraître dans ce volume que des données sélectionnées.
Dans cette Sélection de citations, nous conserverons le même procédé adopté dans les cinq précédentes collections. Il reste que les lecteurs ont tout avantage à se référer au volume lui-même afin de mieux connaître toute la pensée de Jean-Paul Desbiens sur les problèmes de son temps, sur ses auteurs préférés, sur ses principales rencontres et ses activités dans le monde littéraire et politique.
Tout Journal personnel ne peut pas ne pas révéler certains aspects profonds de la personnalité et des choix de l’auteur. Quand l’auteur d’un tel Journal intime voudra le livrer au grand public en le publiant, il aura effectué d’abord une certaine sélection qui pourrait fort bien laisser filtrer des éléments qu’il aurait été mieux de laisser de côté…Le lecteur de Les années novembre pourra facilement identifier certains passages que l’auteur aurait mieux fait de ne pas livrer, surtout quand de telles mentions se répètent. Le lecteur n’aura pas de peine à identifier ces passages qui finissent par lasser. Mais, passons…
Malgré cette simple restriction, le Journal de ces trois années met en valeur certains aspects révélateurs de la personnalité et des choix de l’auteur. Je voudrais signaler ici deux constatations intéressantes.
1- Jean-Paul Desbiens se révèle un lecteur averti
L’auteur est un grand lecteur qui sait sélectionner avec soin ses auteurs et leurs ouvrages, comme les journaux et revues, et dont il a su faire son miel. Il nous fait part de façon souvent critique des points de vue qu’il y a rencontrés. Il relève pour nous de courts passages choisis de ses lectures. Cet aspect se présente à nous comme l’un des plus intéressants et enrichissants de la lecture de ce Journal personnel. Si bien qu’un chercheur passionné pourrait un jour avoir l’idée de récolter une mine d’or dans tous les Journaux de Jean-Paul Desbiens : des citations choisies provenant de ses d’auteurs-fétiches.
2- Jean-Paul Desbiens cultive les valeurs religieuses
Dans la sélection qu’il a effectuée en vue de la publication des éléments de ce Journal, comme dans les précédents d’ailleurs, il a tenu à mentionner des aspects de sa vie personnelle comme religieux-éducateur. Le trait d’union que j’emploie ici n’est pas innocent…Parlons clairement. Son choix de vocation et de profession a fait de lui un religieux dont la mission spécifique était l’éducation, surtout celle de la jeunesse. Si vous parcourez son curriculum vitae, vous vous rendrez facilement compte qu’il avait, comme on dit, de la suite dans les idées. Ses thèses de maîtrise et de doctorat, ses premiers écrits qui seront bientôt publiés dans Les classiques des sciences sociales, sa présence à La Presse comme rédacteur en chef, sa présence et son rôle au Ministère de l’éducation, sa prestation important dans la création des CÉGEPS, ses ouvrages comme écrivain…tout cela s’inscrit dans la ligne de son état de vie, celui qu’il avait choisi vers l’âge de 14 ans et qui s’est précisé par la suite au cours des années.
Je souhaite que vous puissiez parcourir la présente sélection avec le même intérêt et le même plaisir qui vous auront poussé à lire les précédents numéros de « Sélection de citations » de Jean-Paul Desbiens.
Laurent Potvin, frère mariste, Château-Richer,
décembre 2009
Les Classiques des sciences sociales
SÉLECTION DE CITATIONS
LES ANNÉES NOVEMBRE
Journal 1993-1994-1995 (1996)
(Jean-Paul Desbiens)
Une sélection de Laurent Potvin, frère mariste,
janvier 2010.
« Le journal est le genre littéraire qui garantit
la plus grande proximité entre l'auteur et le lecteur. »
Jean-Paul Desbiens
« Les Années novembre »
A
Achat-chez-nous
« Quand ça coûte cinq fois plus cher de pratiquer l'achat-chez-nous, on cesse d'être patriote. »
Agnosticisme
« La « position » agnostique est une attitude aseptique. C'est une façon de « se laver les mains ». Le problème, c'est qu'on ne peut pas se laver les mains devant la mort. La sienne, bien sûr. Le problème du mal exige une réponse. On a le choix entre la foi ou la révolte. Entre l'absurde ou le mystère, comme dit Jean Guitton. »
Amour du prochain
« Commandement nous est fait d'aimer notre prochain comme nous-mêmes. Mais il arrive que l'on ne s'aime guère soi-même. Parvenu à un certain âge et à un certain degré de connaissance de soi, il n'est pas facile de s'aimer. Or, le ravagé devient vite ravageur. C'est une loi de la psychologie. Dans ces conditions, pour s'aimer, il faut se croire aimé. C'est toute la révélation chrétienne. »
Architecture et inculture
« On serait bien en peine de parler de la « maison des années 1980 ou 1990 », au sens où l'on peut parler de la maison québécoise du XVIIIe siècle. Il n'y a pas d'architecture quand il n'y a pas de culture. »
Argent, sa création
« Vendre ou acheter une compagnie, je sais que cela se passe. Mais cela ne crée pas d'argent neuf. Qu'est-ce qui crée de l'argent neuf ? Réponse : le courage et la détermination. »
Auteurs les plus cités
Jean-Paul Desbiens avait pris soin de noter ce renseignement qui, comme lecteur et écrivain, l’intéressait particulièrement : « Les dix auteurs le plus souvent cités dans les programmes, les études, les recherches dans le secteur des humanités sont (par ordre) : Marx, Lénine, Shakespeare, la Bible, Aristote, Platon, Noam Chomsky, Freud, Hegel, Cicéron. (The Economist, 9 avril 1994). »
Auteurs préférés
« Je ne me lasse pas de fréquenter Montaigne, Pascal, Guitton, Thibon, Légaut, Jünger, etc. Par contre, je ne retourne pas souvent à Mauriac, par exemple. Ce dernier disait d'ailleurs « que l'on n'est jamais que le romancier de sa génération ». Pourtant, romanciers ou pas, je retourne fréquemment à Bernanos (Journal d'un curé de campagne) ou à Céline (Voyage au bout de la nuit) ou encore, à Vol de nuit, de Saint-Exupéry. Question d'affinité, sans doute ; question de densité, aussi. Voyage au bout de la nuit, ce n'est pas l'histoire d'un médecin de banlieue parisienne des années 30 ; c'est la description de la condition humaine. »
Autochtones
« Les belles âmes qui ont épousé la cause des Autochtones nuisent aux Autochtones en les enfermant dans leur rêve, dans leur nostalgie, dans leur ressentiment entretenu. Se sentant faussement coupables des torts historiques envers les Autochtones, elles enfoncent les victimes dans leur état au lieu de les élever vers leurs responsabilités actuelles. Elles prennent les péchés des Blancs, mais elles sont bien incapables de les racheter. »
B
Bêtise
« La bêtise est inexpugnable, par définition, car elle exclut le doute sur elle-même, la conscience d'elle-même. »
Bien commun à poursuivre. Comment?
« L'adhésion à une transcendance permet seule de surmonter longuement les affrontements des intérêts particuliers ou, ce qui revient au même, de fonder les nécessaires sacrifices qu'exige la poursuite du bien commun. Quand plus aucune transcendance n'exerce son influence, seule la force ou la ruse peut introduire une forme quelconque de rationalité. »
C
Catastrophe
« La perte du concept même de péché est la grande catastrophe contemporaine. »
Cause perdue
« La cause de l'orthographe et de la syntaxe est perdue. La civilisation de l'audiovisuel engendre un nouveau modèle de fonctionnement mental. Des intelligences mosaïques. »
Changer le monde
« Pour changer le monde, il faut changer le cœur de l'homme. Remplacer son cœur de pierre par un cœur de chair, comme disait le prophète Ézéchiel. Il va de soi qu'il faudrait commencer par le mien. »
Chansons.
« Les chansons de Trenet n'étaient pas des chansons engagées, des chansons à message ; c'était des chansons naïves, populaires et c'est pour cette raison qu'elles ont duré et qu'elles durent encore. La mer, Douce France, Y a d'la joie, L'âme des poètes, etc. seront toujours reprises par quelqu'un, quelque part. Je pense à la remarque de Péguy : « Rien n'est aussi profond que la chanson populaire. Et il n'y a point d'homme aussi sot que celui qui traiterait légèrement une chanson comme Malbrouck. »
Chômage, ses causes
« Dans les pays développés, trop d'esclaves mécaniques ou électroniques exécutent du travail qui, il y a peu, exigeait des bras et des cerveaux humains ; dans les pays du tiers monde, trop de bras humains produisent, à moindre coût, ce que le reste du monde consomme. »
Claudel et ses personnages
« Les personnages de Claudel dépassent l'homme Claudel. Leurs sentiments, leur noblesse, leur vie sont plus admirables que certains aspects de la vie de Claudel. »
Compétence
« J'aime voir travailler des hommes compétents ; des hommes qui savent ce qu'ils font. Qui mesurent les risques. Qui n'en prennent d'ailleurs aucun « juste pour voir », comme on fait si régulièrement en affaires sociales. Des hommes sans cesse et immédiatement en contact avec le réel : les lois de la pesanteur, la résistance des matériaux, etc. »
Conférencier devant des religieux
« Hier et aujourd'hui, j'ai donné trois conférences par jour à une cinquantaine de Servites de Marie, dans le cadre d'une session capitulaire de l'Ordre. Parmi eux se trouvait l'ancien supérieur général, mais je l'ai appris après coup ! »
Conférence et traitement des mots
« Je ne démêle pas clairement ce qui me pousse à hypothéquer mon temps de cette façon. Obscurément, il y a l'idée qu'il faut assurer un certain service. Dans mon cas, mon seul outil, ma seule compétence, c'est le traitement des mots. »
Conférencier, ses réflexions
« La conférence passe bien, du moins je le pense. Mais comment savoir pour de vrai ? Comment savoir si l'on a été de quelque utilité ? Quand on sait ce que coûte ce genre de rassemblement, on se sent obligé de contribuer à sa rentabilité. »
Conseils pour parler ou écrire
« D'abord, savoir ce que l'on dit, ce que l'on entend. C'est pas facile. Mais, faut commencer par ce bout-là. Sinon, on touche ou bien on tire. Je dis ça cavalièrement. Hegel et Pascal, entre mille, ont dit la même chose. Je suis documenté. »
Couple et famille
« Au fait, qu'est-ce qu'une famille, en 1993 ? Un homme et une femme se marient, c'est un couple, selon la loi. Ils ont un enfant : c'est une famille. Deux homosexuels vivent ensemble. Ce n'est pas un couple ; c'est une couple. »
D
Défunt
« Qu'est-ce qu'un défunt ? Selon l'étymologie, c'est quelqu'un qui s'est « acquitté de la vie ». La racine indo-européenne mentionne : accomplir. C'est quelqu'un qui a accompli, comme il a pu, sa fonction. Il n'a plus de fonction. Il est dé-fonctionnalisé. »
Démocratie
« Jean-Paul II répète inlassablement que l'Église catholique n'est pas une démocratie. Au grand scandale des théologiens de pointe. Mon Dieu ! J'espère bien que l'Église ne sera jamais une démocratie. Je ne connais aucun démocrate. Absolument aucun. Chaque conscience veut la mort de l'autre, comme disait Hegel. Chacun vérifie la chose dix fois par jour. Mais personne ne se le dit sérieusement. »
Dieu, se mettre à son abri
« Il faut se mettre à l'abri de Dieu, non pas au sens où l'on dit : se mettre à l'abri de la pluie ou du froid, c'est-à-dire se protéger contre Dieu. Il faut se mettre à l'abri de Dieu comme un enfant se met à l'abri de sa mère. Dans la confiance totale, en deçà et au-delà de tout raisonnement, de toute « critique ». Je dis « critique » ; je veux dire : raisonnement. « Il n'y a rien de si conforme à la raison que ce désaveu de la raison. » (Pascal) »
Divisions entre amis
« Toute fêlure prophétise l'éclatement. »
E
Échos.
« Ce qui me frappe, c'est que je n'ai pratiquement jamais aucun écho des livres ou des articles que je publie (fût-ce dans La Presse, dont le tirage n'est pas précisément confidentiel). Or, il y a autrement plus de contenu dans un article que dans une entrevue télévisée. »
Écrire. Pour qui?
« Ce qui est en cause, c'est la qualité des échos que j'ai reçus à la suite de la publication du Journal d'un homme farouche : une trentaine, une quarantaine de lettres, toutes très longues et de haute qualité humaine. Avoir rejoint une seule âme serait une récompense suffisante. La Bruyère écrivait : « Quand on ne serait, pendant sa vie, que l'apôtre d'un seul homme, ce ne serait pas être en vain sur terre, ni lui être un fardeau. »
Écrire. Pourquoi?
« On n'écrit pas pour les arbres. On écrit pour être lu. »
Écrivain et conscience
« Qu'est-ce qu'un écrivain ? Quelqu'un qui écrit ? La belle affaire ! Un écrivain, c'est une conscience, un amuseur, ou un prétentieux. Il faut des amuseurs. Ce sont des bienfaiteurs. J'en consomme ma part. San Antonio, par exemple. Mais Céline, mais Bernanos, mais Pascal, mais Jünger, mais Marie Noël, sont un peu des écrivains, mettons. Ils sont surtout des consciences. »
Élite. Pour ou contre?
« Les mots « élite », « élitisme » continuent de faire peur aux belles âmes et aux beaux esprits. Pourtant, la vie est élitiste. Être en santé, c'est faire partie d'une élite, par rapport aux infirmes, aux malades. De même, être instruit, par rapport aux analphabètes ; être physiquement fort, par rapport aux faibles, etc. Mais dès qu'il s'agit, par exemple, du système scolaire, on rejette systématiquement toute disposition qui pourrait favoriser l'émergence d'une élite. »
Enseigner les principes
« Les principes fondamentaux ne vieillissent pas, tandis que le progrès dévore le progrès. Voilà bien pourquoi, du primaire jusqu'à l'université, il faut enseigner longuement les fondements. Les recherches pointues aussi bien que les découvertes inattendues reposent sur les fondements solides. »
Erreur politique
« L'erreur (politique) ou la faute (morale), c'est de faire porter le poids de son échec sur le dos des autres : les vieux, les peureux, les vendus et, maintenant, les ethnies. »
Esprit du temps
« Je rappelle la réflexion de Peter Berger : « Il sera bientôt veuf, celui qui épouse l'esprit de l'époque ». J'aurais pu ajouter : « car elle passe, la figure de ce monde ». Nul n'a moins épousé l'esprit de son époque que Notre-Seigneur. Dira-t-on qu'il était anachronique ou nostalgique ? »
État
« L'État est la forme ultime de la rationalité politique. Il suppose un territoire déterminé, le monopole de la force, la reconnaissance (formelle ou tacite) des autres États. Bref, l'État frappe monnaie, émet les passeports et fourre en prison tous ceux qui ne sont pas d'accord avec lui. »
État devant sa disparition
« De nos jours, la disparition d'un État n'est pas une hypothèse gratuite. Supposons donc qu'une tourmente politique entraîne la disparition de l'État du Vatican. Le pape devient un réfugié politique. Il administre l'Église par correspondance. »
Ethnique, ethnie…
« Par rapport aux ethniques, il y a deux solutions : la solution du melting-pot ; la solution de l'intégration. »
Étiquette
« Récemment, un jeune chercheur (32 ans) de Laval m'a longuement interviewé sur la réforme scolaire. À la fin de la rencontre, il m'a qualifié d'intellectuel. J'ai protesté. Il a voulu remplacer par lettré. J'ai protesté davantage. Au bout du compte, nous sommes convenus que la seule étiquette que je revendique, c'est chrétien. »
Êtres humains
« Les êtres humains ne sont pas tous contemporains et il devient difficile de croire qu'ils ont tous la même nature. »
Euthanasie avortement-soins de santé
« D'un côté, les États s'occupent de notre santé avec vigilance (lutte contre le tabac, la pollution de l'air et de l'eau, contre les excès de vitesse, contre l'abus d'alcool, etc.) ; de l'autre côté, on légalise l'avortement et l'euthanasie. Les êtres du milieu (les législateurs) se protègent et ils sacrifient les êtres faisant partie des extrémités de la vie.
Expo-sciences
Je visite l'Expo-Sciences qui a lieu au Campus Notre-Dame-de-Foy, cette année. C'est merveille de voir l'application et l'ardeur que ces jeunes du secondaire, pour la plupart, mettent à expliquer leurs montages, leurs expériences, leurs anticipations. Je remarque le nombre important de visages asiatiques. Je note aussi que trois thèmes principaux reviennent : l'informatique, la santé, l'écologie. En vérité, l'informatique est presque partout comme support, sinon comme objet même des montages ou des expériences. Il est rafraîchissant de prendre contact avec l'effort et la conscience de ces jeunes.
F
Félicitations…
« Dans le métro, un jeune inconnu m'aborde pour me dire que mes écrits l'ont beaucoup marqué. Ce genre de témoignage me réjouit, évidemment, mais il me laisse un peu interloqué. »
Foi [1]
« La foi musulmane est raide ; la foi catholique ne s'impose pas : elle se propose. »
Foi [2]
« La foi qui inspire est aussi la foi qui édifie. La foi vit de la foi. »
Foi [3]
« La foi n'est pas un savoir ; elle n'est évidemment pas une évidence ; elle est une certitude. »
G
Genèse d’une vocation
« Un professeur de philosophie me dit : « Je vous dois ma vocation. » C'est son mot. Il m'explique qu'il m'avait entendu, à Québec, lors d'une visite d'école que j'avais faite, du temps où, fonctionnaire au ministère de l'Éducation, j'étais responsable du cours préparatoire aux études supérieures. Il avait 16 ans. C'est alors qu'il avait conçu l'idée de s'inscrire à la faculté de philosophie. »
Glad to be happy
“Ai lu : Glad to be happy. J'aime ce genre d'humour distrait. La distraction, l'apparence de la distraction, est un des traits de l'humour. Autrement dit, la distance vis-à-vis de soi ou des événements. »
Guerre
« Pour ma part, je ne parlerai jamais contre la guerre. Être contre la guerre, c'est comme être contre le cancer ou la pituite. Je ne parlerai jamais pour la guerre, pour la raison que je ne suis pas d'âge à être mobilisé, ni même à être accepté dans l'année. Il reste que je préfère un soldat, peu importe son bord, à un bavard ou à une belle âme. »
Guiton, Jean
« Je suis en train de lire L'Absurde et le Mystère de Guiton, Desclée, 1985. Cet homme, maintenant âgé de 92 ans, est en train de nous donner le miel de sa vie d'étude et de réflexion. »
H
Hommes au travail
« J'aime voir travailler des hommes compétents ; des hommes qui savent ce qu'ils font. Qui mesurent les risques. Qui n'en prennent d'ailleurs aucun « juste pour voir », comme on fait si régulièrement en affaires sociales. Des hommes sans cesse et immédiatement en contact avec le réel : les lois de la pesanteur, la résistance des matériaux, etc. »
Humour ou ironie
« L'ironie, c'est pour les hommes sérieux, les notables ; l'humour, pour les gens tragiques. ».
I
Ignorance religieuse, sa cause
« Mais d'où vient (chez nous) cette ignorance religieuse ? Elle vient de ce que l'Église du Québec n'annonce plus l'Évangile ; elle vient de la nullité de la prédication. Depuis une génération, on fait dans le socio-pastoral. On ne répond plus à la question du Seigneur : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? » Durant le Carême où nous entrons, quel sera le thème des prédications à la basilique de Québec ? L'économie. »
Improvisation à la télévision
« Émission de télévision avec Denise Bombardier, dans la série Raison passion. L'émission est en direct. Acrobatie sans filet. Je sors toujours frustré de ce genre d'expérience. La faute n'est pas aux animateurs ; elle tient à ma faiblesse à improviser ; elle tient aussi aux exigences même de la télévision, qui est l'impitoyable médium de la fugacité. »
Incohérence devant santé-avortement-euthanasie
« D'un côté, les États s'occupent de notre santé avec vigilance (lutte contre le tabac, la pollution de l'air et de l'eau, contre les excès de vitesse, contre l'abus d'alcool, etc.) ; de l'autre côté, on légalise l'avortement et l'euthanasie. Les êtres du milieu (les législateurs) se protègent et ils sacrifient les êtres faisant partie des extrémités de la vie. »
Indignation
« L'indignation est la face noire de l'espoir. On est indigné parce que l'on est capable d'imaginer, parce que l'on sait qu'il pourrait, qu'il devrait exister quelque chose d'autre. On ne s'indigne pas du froid en février, quand on est normalement normal. On ne s'indigne pas de la fatalité. »
J
Jargon
« Je me plais à penser, contre l'étymologie, que jargon vient de jars, le mâle de l'oie, volailles qui se déplacent en groupe, comme les catastrophes. Le jargon du ministère de l'Éducation forme une belle troupe. C'est toujours enquête scientifique, quantité et qualité des services, critères, standards, objectifs. Ou bien : objectifs, compétence, standard, ou quoi encore ? »
Jean-Paul II
« Jean-Paul Il récapitule le XXe siècle : occupation nazie, occupation soviétique, attentat terroriste, multiples interventions chirurgicales. Et il court encore, en 20 langues, et c'est encore lui qui dit : « Entrez dans l'espérance ! ». C'est quand même pas gênant d'être membre d'un club avec un tel président. Quand je dis club, humanum dico. Le président de l'Église et de l'humanité, c'est Notre-Seigneur. »
Jeunes et expo-sciences
« Ce matin, je visite l'Expo-sciences, qui se tient, pour la deuxième année consécutive, au Campus Notre-Dame-de-Foy. Des élèves de deuxième secondaire m'apprennent des choses. Il n'est pas difficile d'apprendre quoi que ce soit, s'il s'agit d'apprendre quelque chose de « pointu ». Je me réjouis du travail de l'esprit. Du travail de l'amour des jeunes. »
Journal. Avantages de ce genre littéraire.
« Le journal est le genre littéraire qui garantit la plus grande proximité entre l'auteur et le lecteur. Dans un roman, l'auteur utilise des personnages pour communiquer sa pensée, sa vision du monde, ses jugements sur l'actualité. Dans un journal il n'y a pas d'intermédiaires. Ni, non plus, de « grammaire » ou de « syntaxe » propres à un art, ou à une école, à un moment donné, au sens où les critiques parlent de grammaire ou de syntaxe cinématographique, par exemple. »
Joueurs achetés, échangés
« Ces semaines-ci, on échange et on achète, à coups de millions de dollars, les vedettes sportives. Il y a là un scandale autrement plus grand que celui des « garçons de Saint-Vincent ». Il y a là une des manifestations de la « structure de péché » (pour reprendre une expression de Jean-Paul II) qui mine la société. »
Journaux. Divers genres.
« Il existe autant de types de journaux qu'il y a d'auteurs qui en publient. Je suis un grand amateur de journaux d'écrivains, de scientifiques, d'hommes politiques. Partout, on trouve en vrac des notes de lecture et des réflexions sur l'actualité. Que ces notes soient « en vrac » n'est pas une infirmité du genre journal. »
Journal. Qui en rédige un?
« Mallon classe les diaristes sous les catégories suivantes : les chroniqueurs, les voyageurs, les pèlerins, les créateurs, les apologistes, les confesseurs, les prisonniers. Parmi les apologistes, il faut comprendre bon nombre de politiciens et d'hommes d'État, c'est-à-dire des hommes qui avaient intérêt à présenter eux-mêmes leur point de vue, leur vie, leurs pompes et leurs œuvres. »
Journal. Sa nature
« Par définition, un journal fait état des pensées, des lectures, des sentiments de son auteur, des événements de sa vie, de l'actualité telle qu'il la perçoit. Cela dit, il convient de distinguer quand même le journal d'autres genres littéraires apparentés. Ainsi, une autobiographie n'est pas un journal, même si elle est construite selon une ligne chronologique stricte. »
Journaux du passé. Existent-ils?
« À supposer que le genre journal ait été pratiqué dans l'Antiquité, quel chercheur, quel humaniste ne serait pas heureux de mettre la main sur le journal d'Aristote ou de Platon ? Quel chrétien, dans mon hypothèse, n'aimerait pas lire le journal de Joseph : trente ans dans l'intimité quotidienne de Jésus et Marie? »
Journaux. Grande variété.
« Ce n'est pas une lapalissade d'ajouter qu'il y a autant de journaux que de diaristes. Le journal de Julien Green n'est pas celui de Léon Bloy ; celui d'André Gide n'est pas celui de Paul Claudel. La mention de Claudel m'amène à distinguer les journaux publiés du vivant de leur auteur (Green, Bloy) et ceux publiés après leur mort. »
Journal modèle
« Le Journal de Jules Renard me paraît un modèle du genre. Lui-même, d'ailleurs, bien qu'il ait été un homme de théâtre, et qu'il enviât le succès et la gloire d'Edmond Rostand, écrivait, à propos de son Journal : « C'est tout de même ce que j'aurai fait de mieux et de plus utile dans ma vie. »
L
Liberté de l’homme respectée par Jésus
« Laissant à l'homme sa liberté, Jésus n'a pas transformé la politique de son temps. Il ne transforme toujours pas la politique contemporaine. Il n'a pas aboli la bêtise. Il a laissé César faire son César, Hitler faire son Hitler, Staline faire son Staline. Il a laissé son Église proposer misérablement son message. »
Lien à faire entre mal, souffrance, liberté
« Ce qui m'étonne toujours, c'est de voir que personne dans le groupe que nous formons, ne fait le lien entre le mal, la souffrance et la liberté. »
Livre dérangeant
« Les Années Novembre est un livre à la fois sérieux et rafraîchissant, un livre d'impatience et aussi d'humour, envers les autres et envers soi-même. Un livre qui exhale la joie de vivre. À cent lieues du politically correct. Jean-Paul Desbiens sait se faire « dérangeant » et ébranler nos certitudes. »
Loisir ou chômage
« Loisir il y a, en effet, mais il prend la forme du chômage ! Les progrès technologiques, d'une part, la nouvelle redistribution mondiale du travail, d'autre part, engendrent le chômage dans les pays développés. En fait, pour un temps, les pays développés exportent le travail ailleurs. Cet « ailleurs » s'appelle Corée, Chine, Japon, Mexique, etc. Cet « ailleurs », d'ici à un quart de siècle, nous aura rejoints. Rejoints, je veux dire : aura connu ses « Trente glorieuses », lui aussi. Et alors, la planète entière sera confrontée au problème du travail partagé. »
Loisir prédit
« Au début des années 60, on nous prédisait la civilisation du loisir, Dumazedier en tête. Le loisir n'est pas au rendez-vous, un demi-siècle plus tard. Ni ici ni ailleurs. À sa place, on a la course pour payer la seconde voiture, le chalet, la garderie, le golf, etc. Et puis, on a le chômage, baptisé récession. Il faudrait plutôt parler de la civilisation du chômage, car le chômage est là pour y rester. »
Lucidité, aveuglement
« Françoise Chauvin écrit : « La lucidité est le pire des aveuglements quand on ne voit rien au-delà de ce qu'on voit. » Tout à fait d'accord. Mais encore faut-il voir. Rude besogne, insoutenable même pour quiconque ne s'est pas protégé par un extrême détachement. Sous lequel on ne discute plus de grand-chose. »
M
Marie
“La vie de Marie peut se résumer en trois mots, et dans cet ordre : fiat, magnificat, stabat. Un confrère, Robert Tremblay, me faisait remarquer un jour que les trois premières lettres de ces trois mots forment le sigle de la communauté des Frères Maristes : fins. »
Marché aux insectes
« Il tombe une pluie fine. Trois hirondelles sortent malgré tout faire leur marché aux insectes. »
Médailles
« Les médailles sont rarement accrochées à la clavicule des vrais héros. »
Méditation
« Je pense au dialogue de Jésus avec le Bon Larron. Je pense à Pascal : « Jésus a versé telle goutte de sang pour moi. Jésus sera en agonie jusqu'à la fin du monde ; il ne faut pas dormir pendant ce temps-là. » Je me redis ces phrases. Je les berce dans mon esprit, sinon dans mon cœur. »
Mode
«Quand on est affranchi des modes, on ne court pas le risque de se démoder. »
Mort. Avant et après...
« Je sais qu'il y avait quelque chose avant ma naissance ; j'en ai des témoignages écrits, photographiques, vivants même. Je sais aussi qu'il y aura quelque chose après ma mort. Ce que j'ignore, c'est ce que je deviendrai, moi, après ma mort. Les animaux ne se posent pas cette question. Le fait que je me la pose ne m'assure pas qu'il y a une réponse : la soif ne crée pas la fontaine. La seule réponse, c'est Jésus, premier-né d'entre les morts. Certitude et action de grâce pour les chrétiens, mais non pas évidence. La foi n'est ni un savoir ni une évidence. »
O
Opération en attente
« Je rencontre longuement X, en attente d'une opération chirurgicale depuis 14 mois. Dans le Québec de 1993, on n'attend plus par manque d'argent ; on attend par incurie administrative, chicanes de spécialistes et autres bêtises corporatistes. »
P
Pardon
“Les péchés sont objets de miséricorde et de pardon. Mais nul ne peut se pardonner à soi-même. Il faut un tiers. Dans une blessure d'amour-propre, personne ne peut s'interposer entre vous et vous-même. »
Pays
« Quand on demande à quelqu'un de quel pays il est, il répond en nommant le pays dont il est citoyen. Il sort son passeport. Certes, c'est un État qui reconnaît ses citoyens, mais il ne vient pas à l'idée de demander à un homme de quel État il est. »
Péché
« La perte du concept même de péché est la grande catastrophe contemporaine. »
Permissivité
« À Montréal, ces derniers jours, 5 000 gais et lesbiennes ont paradé. Tant mieux pour eux ! Les fins de civilisation sont extrêmement permissives, accueillantes. Le christianisme, d'ailleurs, s'est introduit à la fin du paganisme. Au moment où celui-ci était à bout de souffle et à bout de piste. »
Peuple et démocratie
« Peuple conduit à démocratie : le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. Le mot peuple comprend tous les citoyens d'un État donné, toutes ethnies, sexes et couleurs confondus. »
Pied
« Le pied, c'est la liberté : la première de l'enfant ; la dernière du vieillard. Pour célébrer un vieux, on dit (on disait) : « Bon pied, bon œil ». J'ajouterais bien, pour ma part : « Bons concepts » !
Pierre tombale modeste
“Je me rends au cimetière pour me recueillir quelques instants sur la tombe de mon père et de ma mère. Modeste pierre tombale. Deux noms, quatre dates :
- - Adélard Desbiens, 1884-1971 ;
- - Alberta Bouchard, 1893-1985. »
Police internationale
« Une police internationale est en train de prendre forme. Des discussions ont lieu présentement à l'ONU : la création d'un tribunal international qui jugerait les criminels de guerre de l'ex-Yougoslavie. Et pourquoi ne pas en faire autant pour Mobutu et Saddam Hussein ? Il s'agit là de phénomènes convergents. L'homme ne renonce pas à se prendre en main. Et il continue de prétendre y arriver sans Dieu. On recommence sans cesse la construction de la tour de Babel. »
Préjugés
« Paradoxe : Accrochez-vous à vos préjugés : ce sont peut-être les seules opinions personnelles que vous avez et que vous aurez jamais. Le reste vient ou viendra de la mode, c'est-à-dire de la télévision. »
Prier
« Ces jours-ci, je prie pour une amie atteinte du cancer. Mais qu'est-ce que prier pour quelqu'un ? Si l'on peut faire autre chose que prier, il faut d'abord faire cette autre chose : le visiter, l'accompagner, lui écrire, lui parler, etc. Il faut aussi prier, si l'on a la foi. La prière est l'acte le plus radical de la foi. »
Principes et leur vieillissement
« Les principes fondamentaux ne vieillissent pas, tandis que le progrès dévore le progrès. Voilà bien pourquoi, du primaire jusqu'à l'université, il faut enseigner longuement les fondements. Les recherches pointues aussi bien que les découvertes inattendues reposent sur les fondements solides. »
Problème, le vrai
« Le vrai, le terrible problème où nous sommes, c'est que la Planète est habitée, en même temps, par des hommes qui ne sont, d'aucune façon, des contemporains. Nous sommes tous contemporains parce que nous vivons tous en 1994, mais les trois quarts de l'humanité sont quelque part entre l'âge de fer et l'Internet. »
Prophètes
« Les faux prophètes disent au peuple ce qu'ils savent que le peuple veut entendre. Les vrais prophètes ne prédisent pas l'avenir ; ils sont le battant de la cloche qui indique l'heure qu'il est, car l'avenir est inscrit dans le présent. »
Progrès
« Il y a un monde entre le Québec de 1960 et le Québec de maintenant. Le 23 mars 1994, je participais à un colloque organisé par l'ENAP. Arthur Tremblay et moi, nous nous faisions la réflexion : « On a peine à croire que nous avons vécu, dans notre âge adulte, ces énormes transformations ».
Pyramide et solidité
« La pyramide est une construction éternelle en ceci qu'elle est en forme de ruine ; elle est déjà « tas ». Quand on marche sur un chemin glacé, on doit marcher « tombé » : les bras écartés du corps, les genoux légèrement pliés. On doit marcher comme une pyramide, et bravo pour la métaphore ! »
R
Race
« Le terme race fait référence au sang, à la biologie. Sauf dans des expressions plus ou moins coléreuses (exemple : la race des mécontents ; la race des musiciens ; race de monde) ou bien en un sens très large et discutable (la race blanche, la race jaune). »
Référendum [I]
“Référendum. La Presse du jour rapporte les propos suivants de Guy Bouthillier : « Dans l'instantané d'un vote référendaire, il y a l'éternité qui nous interpelle. » Tu parles !»
Référendum [II]
“Le présent référendum nous demande de faire ou de défaire un pays en comptant des sous et des emplois. »
République. À qui confier son sort?
« Faut pas confier le sort de la république aux poètes ou aux écrivains. À qui faut-il le confier ? Aux journalistes ? Aux essayistes ? Aux sociologues ? Aux politologues ? À Vincent Lemieux ? À Fernand Dumont ? Réponse : faut le confier à tout le monde. Les intellectuels, pour ce que ce mot veut dire, ne sont jamais contents du peuple. Faudrait qu'ils démissionnent le peuple, et qu'ils s'en élisent un, à leur goût. Ça serait beau ! À défaut de mieux, il faut confier le sort du peuple aux urnes. »
Regards
« Si tu t'aperçois que tu regardes un être avec convoitise, ferme les yeux ; si tu t'aperçois que tu regardes un être sans amour, ferme les yeux. »
Révolution tranquille et monument historique
« Entrevue avec Jean Gould, intrépide chercheur en sociologie. Il termine un doctorat sur la Révolution tranquille. À titre de monument historique, comme il dit lui-même, je faisais partie de la liste de ceux qu'il voulait rencontrer. »
Rideau et rideau…
« Plusieurs rideaux culturels ont remplacé le rideau de fer, depuis que ce dernier est tombé. »
S
Savoir lire et prononcer
“Les futurs prêtres, moi, je leur apprendrais d'abord à lire et à prononcer comme du monde. Ils vont parler toute leur vie à des fidèles captifs. »
Société
« Le Québec est-il une société ? Le mot société est polyvalent. Il possède des acceptions commerciales, juridiques, culturelles, religieuses, politiques. Il possède surtout une acception sociologique. Nous voulons dire : définie par les sociologues. Dumont distingue trois niveaux, trois paliers dans la genèse d'une société : l'appartenance, l'intégration, la référence. »
Société riche, société pauvre
« Bruno me disait, l'autre soir : « Les sociétés spirituellement riches créent de la richesse matérielle ; les sociétés matériellement riches engendrent des sociétés spirituellement pauvres ; les sociétés spirituellement pauvres engendrent des sociétés matériellement pauvres. » Il appliquait cette grille d'analyse au Québec. On pourrait l'étendre à l'Occident. Au fond, il s'agit d'une application de la remarque de Notre-Seigneur : « Cherchez d'abord le Royaume et sa justice ; le reste vous sera donné par surcroît ». (Mt 6, 33) »
Sondages
“Si l'on avait sondé le monde sur le profil souhaitable du Messie, on n'aurait pas eu l'Évangile. »
Souffrances des humains
« Je ne pense pas que les êtres souffrent plus ou moins maintenant que jadis. Barabbas et les deux Larrons, et Judas ont porté le poids de la condition humaine. De même que le réfugié de Somalie ou de l'Ouganda. De même que ma mère et mon père. Proust disait : « Il en est de la vieillesse comme de la mort. Quelques-uns les affrontent avec indifférence, non pas parce qu'ils ont plus de courage que les autres, mais parce qu'ils ont moins d'imagination. »
Sources des souffrances et des maladies
« L'immense majorité des souffrances des hommes vient des hommes. Y compris la plupart des maladies. »
Symbole
« Ce n'est pas pour rien que l'on dit : « symbole des apôtres », pour désigner le résumé de la foi. Cela revient à dire : « Dis-moi ton symbole ; dis-moi ce qui te rassemble. Dis-moi ta conscience. »
T
Table ronde. Comment y participer?
« Participation à une table ronde, dans le cadre de la célébration des 25 ans de l'ENAP. Le thème était : la modernisation du Québec dans les domaines de la santé, de l'économie, de la culture, de l'éducation. La table ronde était présidée par Arthur Tremblay. Je m'applique d'abord, et longuement, à préciser les termes, sous l'idée d'Alain « qu'une analyse directe des mots usuels permet toujours de traiter honorablement n'importe quelle question ».
Témoignages émouvants
« Séances de signature au Salon du livre de Montréal. Je rencontre évidemment bon nombre de personnes connues, quelques chers collègues, mais aussi beaucoup d'inconnus qui réussissent à me glisser des témoignages émouvants. »
Thibon Gustave
« L'homme (Gustave Thibon) a présentement 93 ans. Il est détaché de son détachement même. Il est catholique à part entière et libre comme un vieux chêne. Il ne s'embarrasse guère des querelles de théologiens. Moi non plus, faut dire ! Il n'est d'ailleurs pas délivré de l'angoisse devant la mort. Ben ! Ça serait un manque d'imagination, avant d'être une infirmité intellectuelle. »
Traumatisme et lucidité
« Je me demande s'il existe des enfances sans traumatismes. Ce que je vois bien, par contre, c'est des êtres sans lucidité sur eux-mêmes. »
V
Vérité
« Ces jours-ci, je travaille longuement à rédiger le dossier que la Revue Notre-Dame m'a demandé pour septembre prochain, et qui portera sur la vérité. Rien que ça ! Il s'agit, pour moi, d'une longue méditation sur la vérité. »
Vie
« Telle est la vie. Ce n'est pas la distance qui crée l'éloignement. Ce n'est surtout pas la promiscuité qui crée la proximité. »
Vie, gagner sa vie
« J'ai toujours pensé que le premier devoir, la première dignité, c'est de gagner sa vie à soi, d'abord, avant de planifier la distribution de l'argent des autres. Il y a des gouvernements pour ça ! »
Vieillesse [1]
« La vieillesse comblée est fonction de la fécondité biologique ou spirituelle. »
Vieillesse [2]
« La vieillesse est vue avec réalisme et sans hypocrisie glorifiée. Ce n'est pas dans la Bible que l'on trouve l'expression âge d'or ! Saint Paul dit en effet : « Nous ne perdons pas courage. Au contraire, même si notre homme extérieur se détruit, notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour. » (2 Co. 4,16) »
Vieillesse [3]
« La vieillesse, c'est l'âge privilégié de l'amour. À ce sujet, les vieux ont un avantage : ils sont les mieux placés pour aimer sans rien attendre en retour. Il arrive cependant que, dans l'extrême vieillesse, le vieillard ne semble plus en condition de ne rien attendre. Il ne fait que manifester l'humble requête de la reconnaissance. Par reconnaissance, je n'entends pas gratitude ; je veux dire le besoin d'être reconnu, proclamé. Il faut un détachement surhumain pour ne rien attendre d'autre que la proclamation par Dieu même. »
Vieillesse [4]
« Le plus beau témoignage et la plus grande valeur des vieux, c'est la sérénité. Le mot le dit bien : sérénité vient de soir. Le dernier volume de Gustave Thibon s'intitule : Au soir de ma vie. Thibon a 93 ans. Mais l'âge ne compte pas devant l'éternel. »
Vie, son rendement
« La vie rend. Je dis : rend, au sens où l'on dit qu'une terre (un potager) rend, rapporte. La vie rend. La vie, non pas la nostalgie, la magie, le cynisme, le blasement, l'utopie. »
Vie, son sens
« Légaut distingue : « donner un sens à sa vie » et « trouver un sens à sa vie. » Donner un sens peut être une opération « volontariste », plus ou moins artificielle, plus ou moins fausse et faussée ; trouver un sens, c'est découvrir lentement sa mission. »
F I N
|