Note de l'éditeur
par Nicole Jetté-Soucy
En 1983, Guy Brouillet, alors rédacteur en chef de la revue L'Analyste, décidait de publier des fragments du journal de Jean-Paul Desbiens et d'en faire l'objet d'une rubrique sous le titre (choisi par l'auteur) : « Se dire, c'est toute dire ». Six ans après, voilà que les Éditions L'Analyste rassemblent tous ces extraits en un seul volume. Les cinq chapitres : Instantanés - Écriture - Balises - Reflets - Foi, correspondent aux grands thèmes qui jalonnent le journal.
Journal de bord de Jean-Paul Desbiens, Se dire, c'est tout dire fait partager au lecteur l'écoulement des jours d'un capitaine qui réfléchit à sa navigation et à son but. Tout le long du voyage, par temps calme ou par tempête, le capitaine note, çà et là, ses observations, ses impressions et ses réflexions. À l'occasion d'un événement ou d'un simple fait de la vie quotidienne, en marge d'un travail, au hasard d'une lecture, à la suite d'une conversation ou d'une promenade, il nous fait part de ses certitudes et de ses doutes, de ses espoirs et de ses angoisses, de ses joies et de ses peines. Il nous révèle les disciplines qu'il a conquises, les règles de vie qu'il s'est données. S'il nous parle du navire, de sa cargaison et de ses passagers, il nous entretient aussi du vaste monde dont les bruits parviennent jusqu'à lui.
D'un bout à l'autre du voyage, jamais ne se perd l'orientation spirituelle, car le capitaine est d'abord un homme de foi. D'un bout à l'autre du journal de bord, jamais ne se relâche le fil littéraire, car le capitaine est aussi un homme d'écriture.
Un journal est le reflet d'un auteur. Les notes qu'il contient constituent à la fois l'armature de ses souvenirs et le germe de son œuvre. Aussi, un journal est-il, comme dit Jean Guitton, toujours quelque chose de plus qu'un livre. C'est la présence d'un homme qui s'offre à tous en toute amitié. Au lecteur d'aller à la rencontre de Jean-Paul Desbiens et d'auréoler les pensées de cet homme de sa lumière propre.
Ernst Jünger, dans son Journal de guerre, raconte l'anecdote suivante : « Un jeune homme était accusé d'avoir volé des livres. Parmi ceux-ci, une édition rare de Verlaine ; le juge avait demandé : "Saviez-vous le prix de ce livre ?" L'accusé : "Je n'en connaissais pas le prix, mais j'en savais la valeur." » Les Éditions L'Analyste publient Se dire, c'est tout dire, parce qu'elles en savent la valeur et sont fières de pouvoir l'attester.
Nicole Jetté-Soucy
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