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Collection « Les sciences sociales contemporaines »
Une réflexion sur l'historicité de la foi chrétienne (1996) Introduction
Une édition électronique réalisée à partir de l'article de M. Alfred Dumais, Une réflexion sur l'historicité de la foi chrétienne . Un article publié dans l'ouvrage sous la direction de Simon Langlois et Yves Martin, L'horizon de la culture. Hommage à Fernand Dumont, pp. 435-448. Québec: Les Presses de l'Université Laval et l'Institut québécois de recherche sur la culture, 1996, 556 pp.
Introduction
On ne peut le nier: le christianisme traverse une crise profonde. En Occident, ces dernières années, les pronostics les plus sombres ont été émis sur son avenir. On a l'impression que, si l'élan de la modernité et de ses forces séculières se poursuit, il sera mis à l'écart du cours de l'histoire, du moins il n'aura pas d'influence sur la conduite de nos concitoyens. Certains signes ne mentent pas, en effet: la pratique religieuse ne connaît pas de regain; la culture proprement chrétienne est à peu près ignorée; la question religieuse ne suscite plus l'intérêt de jadis. Sommes-nous en train d'assister à un autre crépuscule des dieux?
En tout cela, il faut le dire, le christianisme a sa part de responsabilité. C'est à lui qu'a été confiée la mission de convertir le monde, c'est-à-dire de le sensibiliser à la réalité de Dieu et à sa Révélation à travers l'histoire. Qu'est-il advenu? Il s'est institutionnalisé, il s'est replié sur des modes de régulation, où la fixation des normes et des doctrines a pris la place de l'expression de l'expérience religieuse. Trop souvent, il s'est distancé de l'histoire profane, situant, comme en marge, son propre développement. Il est donc temps, de nos jours, de revoir en son entier le rapport de la foi chrétienne à l'histoire. La question n'est pas simple et prend effectivement diverses formes. Pour les chrétiens, cela peut vouloir dire de penser leur foi dans le cadre de l'historicité moderne. Ils se situent dans une longue tradition de communautés croyantes avec lesquelles ils doivent entrer en dialogue. Ultimement, ils s'interrogent sur les origines du christianisme, problème, comme on sait, qui a fasciné la recherche historique au XIXe siècle et qui a donné lieu à bien des excès de critique. Mais c'était le prix à payer pour la modernité. Au-delà de cet examen des sources de la foi chrétienne, la question se pose aussi du point de vue d'une théologie de l'histoire. Quelle conception le christianisme se fait-il de l'histoire? quel sens nouveau lui confère-t-il? Ici, dira Troeltsch, la foi apporte un surplus et permet de «voir dans l'histoire une Révélation de Dieu (1)». Foi et histoire, voilà un thème qui est au cur de l'uvre religieuse de Fernand Dumont. Déjà dans un de ses premiers écrits, intitulé Pour la conversion de la pensée chrétienne (2), il n'hésite pas à diagnostiquer la crise que connaît le christianisme en notre temps. Par la suite, ses travaux à la Commission d'étude sur les laïcs et l'Église lui permettront d'étudier de plus près le cas de l'Église du Québec (3). Mais c'est vraiment dans son ouvrage L'institution de la théologie (4) qu'il approfondit ce thème. Dumont croit à l'avenir du christianisme, à la capacité qu'il a toujours eue de se régénérer. Le christianisme devra, cependant, retrouver le sens de la tradition qui le porte, se remettre en mémoire l'ampleur de l'héritage qui a été à la source de tous ses projets au cours des âges. La foi chrétienne entretient avec l'histoire au moins un double rapport: d'un côté, elle a tendance à s'en éloigner, prise de distance, comme on le verra, qui tient de sa nature même; de l'autre, elle lui apporte un éclairage et, à ce titre, lui est intimement liée, ce que Dumont appelle fort justement «la conscience historique de la foi (5)».
Notes: 1. C'est une réflexion que le théologien TroeItsch fait à la fin de son ouvrage monumental sur l'historicisme, où il passe en revue les différentes théories de l'histoire qui ont marqué l'Occident. Voir : Ernst Troeltsch, Der Historismus und seine Probleme, Gesaminelte Schriften III, Aalen, Scientia Verlag, 1961, p. 692. 2. Fernand Dumont Pour la conversion de la pensée chrétienne. Essai, Tours, Maison Mame, 1966. 3. Voir, en particulier, le premier tome : Commission d'étude sur les laïcs et l'Église, L'Église du Québec : un héritage, un projet, Montréal, Édifions Fides, 1971. 4. Fernand Dumont L'institution de la théologie. Essai sur la situation du théologien, Montréal, Édifions Fides, 1987. « Cet ouvrage a eu pour origine une thèse de doctorat en théologie soutenue en 1987 » (p. 7). 5. Ibid., p. 125.
Dernière mise à jour de cette page le samedi 20 janvier 20077:05
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
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