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Collection « Les sciences sociales contemporaines »
La société. Tome 2: Les structures économiques (1977) Présentation
Une édition électronique réalisée à partir du livre de M. Robert Fossaert, sociologue, La société. Tome 2: Les structures économiques. (1977). Paris: Les Éditions du Seuil, 1977, 524 pages. [Autorisation de l'auteur accordée le 20 juillet 2003 de diffuser sur ce site]. Une édition numérique réalisée par Marcelle Bergeron, bénévole, professeure retraitée de l'enseignement à l'École polyvalente Dominique-Racine de Chicoutimi.
Présentation
par Robert Fossaert, économiste-sociologue (macro-sociologique)
Le tome 1 a esquissé une théorie générale de la société, mais il n'a rien démontré. Il s'agit maintenant d'entreprendre un examen détaillé de ce lacis d'hypothèses, en commençant par celles qui concernent les structures économiques des sociétés.
Pourquoi commencer par là? Quels risques prendra-t-on, à spécialiser, de la sorte, une investigation économique? Et, avant tout, que va-t-on désigner par le mot société tant que l'ignorance des structures économiques - comme des autres structures sociales
nous empêchera d'attacher un sens précis à ce mot? La société nous submerge de son évidence immédiate, mais « toute science serait superflue si l'apparence et l'essence des choses se confondaient » (103-VIII, 196) (1) : la société est, à la fois, évidente et inconnue. Deux axiomes permettent de rompre provisoirement l'enchantement des apparences :
- LAsociété désignera les relations de toute sorte qui existent entre les hommes, partout où il y a des hommes.
- UNEsociété désignera l'ensemble des relations sociales observables dans le domaine régi par un État donné.
Le premier de ces axiomes est, pour le moment, de caractère négatif. Il fait trois parts de tout ce qui existe dans l'univers - de l'ensemble du réel - à savoir: la nature, l'homme et la société. La société dénote tout ce qui ne ressortit ni à la nature, ni à l'homme, tout ce qui opère entre les hommes, tout ce qui les relie. Distinction délicate, assurément, mais il ne s'agit pas de la justifier à présent, c'est un axiome.
Le second axiome est, lui, de caractère politique. Pour découper l'énorme tapis de relations sociales dont le monde est couvert, il privilégie le partage territorial que les États ont effectué au cours de l'histoire. Mais c'est là un critère qui peut être employé de façon souple : rien n'interdit de considérer telle partie d'un État comme une micro-société, ni tel ensemble d'États comme une macro-société - et d'analyser l'une ou l'autre.
A tout prendre, les deux axiomes procèdent des méthodes en vigueur dans les sciences de la nature. Le premier définit a priori un champ de recherche, dans l'énorme confusion du réel, mais par une définition qui s'affinera à mesure que la recherche progressera. Le second gradue un instrument de mesure: il dit que ce qui se passe dans un peuple soumis à un État constitue une société, comme l'on dit du thermomètre qu'il marque zéro quand l'eau prend en glace.
En commençant par soumettre les sociétés - c'est-à-dire les morceaux de l'espace social, régis par des États distincts - à une investigation économique, je suis fidèle au conseil de Marx selon qui « c'est toujours dans le rapport immédiat entre le propriétaire des moyens de production et le producteur direct... qu'il faut chercher le secret le plus profond, le fondement caché de tout l'édifice social » (103-VIII, 172). Rien n'est plus fondamental, en effet, que de comprendre de quoi les hommes vivent et que d'observer comment ils sont organisés pour assurer leur subsistance. Mais, pour mener à bien ce premier examen, il faut se rendre aveugle à tous les autres aspects du réel social. La structure économique d'une société ne nous apprendra rien sur l'État qui régit cette société, ni sur la culture ou la civilisation qui sont les siennes, rien non plus - ou presque - sur les rapports internationaux où elle est inscrite. Dans certaines sociétés, on verra des États figurer comme les principaux propriétaires de moyens de production. Leur rôle comme propriétaires deviendra intelligible, mais leur nature en tant qu'États demeurera, provisoirement, incompréhensible. La production pourra être analysée, mais les besoins des hommes qui orientent - ou semblent orienter - cette production resteront hermétiques, car l'investigation économique peut les constater, mais non les expliquer. Ainsi, au terme du présent volume, on saura repérer les structures économiques des sociétés, mais on ne possédera pas pour autant une image complète des structures sociales : l'investigation économique donne, du réel social, une représentation nécessairement partielle.
Pour établir cette représentation, on parcourra trois étapes progressives. La première aura pour objet d'identifier les divers modes de production de la vie matérielle dont Marx affirme qu'ils conditionnent, de façon générale, « le processus de vie social, politique et intellectuel » (101, 4). Mais ces objets que la théorie peut isoler n'existent jamais à l'état pur, dans le réel social. Toute société est, on le verra, un assemblage complexe de plusieurs modes de production. Comprendre comment leur pluralité peut être agencée sera l'affaire de la seconde étape, au cours de laquelle seront étudiées les articulations économiques. Il ne restera plus alors qu'à observer la gamme des structures ou formations économiques que les modes de production, reliés par des articulations économiques convenables, peuvent effectivement composer ce sera l'objet de la troisième étape.
Le départ de cette étude est évidemment donné par Marx. Le premier des concepts dont il sera fait usage - celui de mode de production - est sa plus subtile invention. On pourrait donc s'attendre à ce que la visite de l'édifice social, à la recherche de son fondement caché, en soit grandement facilitée. Pourtant, il faudra bien se rendre à l'évidence : les guides marxistes vont se disputer, à l'entrée, non pour accueillir le visiteur, mais pour savoir où le conduire; ils sont tous persuadés que la visite doit commencer par le mode de production, mais ils sont loin d'être d'accord sur ce qu'est un mode de production. Aussi surprenante que puisse être leur querelle, pour qui n'est pas familier de leur langage, il faudra néanmoins prêter attention à leurs arguments : avant de suivre le guide dans une longue visite, il faut s'assurer de sa qualité.
Note:
1. Les références données entre parenthèses, dans le texte, ont des significations diverses qui sont explicitées par l'annexe bibliographique, p. 509.
Dernière mise à jour de cette page le Dimanche 03 juillet 2005 19:38 Par Jean-Marie Tremblay, sociologue.
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