“Le paradigme de la mobilité
propose-t-il une perspective adéquate
de l’immigration internationale ?”
In revue Éthique publique, vol 17, no 1, 2015. Numéro intitulé : “Penser la liberté de circulation à l’échelle mondiale : quelles difficultés conceptuelles ?”
- Résumés : Français English
- Introduction
- D’où vient le paradigme de la mobilité dans les études migratoires ?
- Le nationalisme méthodologique remis en question
- De nouvelles thèses sur les inégalités en matière de mobilité internationale
- Pour une perspective critique et intégrée dans le champ de l’immigration
- Bibliographie
- Auteure
RÉSUMÉS
-
- Français
Dans l’opinion publique, la mondialisation a ouvert les vannes de l’immigration internationale, les migrants circulant désormais aussi facilement que les capitaux et les marchandises. En phase avec cette représentation relevant du sens commun, le domaine de la migration internationale tend à subir l’influence des théories de la mobilité qui jouissent d’un véritable effet de mode. Cette pensée emprunte à des courants d’idées privilégiant l’effacement des frontières. Le concept de « mobilité » repose sur deux visions contradictoires. La première suppose que les populations se déplacent à travers les frontières pour vendre et négocier leurs « capital social » (éducation, formation professionnelle, expérience de travail), là où les avantages économiques et sociaux sont les plus grands. La seconde considère que les obstacles à la mobilité sont la cause de nouvelles inégalités et de nouvelles hiérarchies dans le système mondial. Critiques de ces visions, certains spécialistes de l’immigration internationale estiment que les facteurs historico-structurels à l’œuvre dans les pays d’émigration et d’immigration ont une plus grande pertinence explicative que le recours à la question de la circulation.
Mots-clés :
inégalités, frontières, mobilité, immigration internationale, réseaux
- English
In public opinion, globalization has considerably increased international immigration, migrants now circulating as easily as capital and goods. In line with this representation, the field of international migration tends to be influenced by the theories of mobility which have proved very popular. The idea is inspired from the schools of thoughts favoring the disappearance of borders. The concept of "mobility" is based on two conflicting visions. The first assumes that people move across borders to sell and trade their "social capital" (education, vocational training, work experience), where the economic and social benefits are greatest. The second vision considers that barriers to mobility are causing new inequalities and new hierarchies within the global system. Some experts of international immigration don’t share these visions and believe that historical-structural factors at work in the countries of emigration and immigration offer a better explanatory relevance than the arguments relating to mobility.
Keywords :
inequalities, international migration, mobility, frontières, réseaux
Texte intégral
En 2013, on évaluait à 232 millions le nombre de migrants internationaux, soit 3,2 % de la population mondiale. Environ 6 migrants sur 10 vivent dans les régions développées et bien que la population globale ait crû au cours de la même période, la part des migrants n’a pas beaucoup changé (2,9 % en 1990) et la migration a ralenti sa progression depuis 2007 en raison de la crise financière (OCDE, 2013a et 2014). Depuis 2000, le nombre total de migrants a augmenté plus rapidement dans les pays du Sud que dans ceux du Nord.
La migration économique est l’une des cinq composantes de la mondialisation avec le commerce des biens et les services, les investissements étrangers et les délocalisations, la finance et les mouvements de capitaux, les flux internationaux de technologies et de connaissances (Mouhoud, 2005). Le nombre de migrants diplômés universitaires supérieur a augmenté de 70 % en dix ans dans les pays de l’OCDE pour atteindre 27 millions en 2010/2011 (OCDEa, 2013) ; le phénomène de l’exode des cerveaux étant particulièrement sensible dans les pays d’Afrique, d’Amérique latine et des Caraïbes. La diaspora haïtienne, par exemple, représente un cas type de cet exode. Et pourtant en 2010/2011, le taux de chômage des travailleurs immigrés était de 11,6 % dans les pays de l’OCDE (OCDEa, 2013).
Une autre catégorie importante concerne les personnes déplacées ; elle comprend les réfugiés (15,4 millions), les personnes déplacées à l’intérieur même de leur pays (27,5 millions), les demandeurs d’asile (près de 850 000) et les personnes apatrides ; soit au total quelque 43,7 millions d’individus en 2010 (Castels, 2012 et 2014). En 2013, les réfugiés ne représentent que 7 % des migrants internationaux (environ 15,7 millions) (OCDEa, 2013 et 2014), sans compter les migrations forcées et clandestines. En 2015, 38 millions se sont vus contraints de se déplacer. Or, en dépit des craintes inspirées par les réfugiés dans les pays industrialisés, 80 % des réfugiés aujourd’hui vivent dans des pays « pauvres », car les plus pauvres n’émigrent pas, faute de ressources matérielles et de réseaux dits « cosmopolites ».
L’immigration internationale des dernières décennies résulte de divers types de changements : les déséquilibres structurels entre régions et nations du système monde et l’accroissement des inégalités, l’effondrement de l’Union soviétique, les conflits armés dans plusieurs régions du monde (Irak, Nigeria, Soudan, Afghanistan, Syrie, etc.), les avancées technologiques en matière d’information et de communication, les désastres environnementaux, l’action des sociétés multinationales qui supplantent les petits producteurs locaux, les accords de libre-échange, le recrutement planifié de travailleurs temporaires par les gouvernements et les employeurs, le trafic et la traite des migrants, la généralisation progressive des passeports, le droit d’asile, les réseaux transnationaux des migrants (Castels, 2013 et 2014 ; Whitol de Wenden, 2009). Les migrations correspondent à des logiques différentes de la mondialisation et se font dans toutes les directions, Sud-Nord, Sud-Sud, intra régionales, alors que d’anciens pays de départ sont devenus des pays de destination ou de transit (Italie, Portugal, Irlande, etc.) (Audebert et Doraï, 2010 ; OCDE, 2014).
Le niveau de concentration des migrants est révélateur. Certaines régions du monde sont profondément touchées par les flux d’émigration à grande échelle alors que d’autres le sont par de larges flux d’immigration. Or, s’il est vrai que les facteurs de départ et les facteurs d’appel ont subi des changements continus, faut-il pour autant parler de « nouvelle mobilité » ou de circulation migratoire généralisée ? Il semble que le cas particulier des migrants hautement qualifiés, qui n’aspirent pas à la sédentarisation et qui jouissent de titres de séjour à entrées multiples ou de la double nationalité, ait inspiré ce qui est présenté comme un nouveau paradigme. À telle enseigne que ce cas, parmi d’autres, nous obligerait à repenser les notions de citoyenneté et de souveraineté de l’État, jugées obsolètes dans un monde globalisé.
Et pourtant, les États-nations aspirent à contrôler l’immigration selon leurs intérêts démographiques, économiques, politiques et culturels. D’une part ils doivent assurer la sécurité et l’ordre public, le contrôle de la légalité des travailleurs migrants, le rapatriement, la réunification des familles, la gestion des dépenses publiques et des problèmes urbains, l’intégration des minorités dans les institutions sociales et politiques, le maintien de l’identité nationale, et ce, dans le respect des conventions internationales sur les droits de l’homme. Ces objectifs entraînent des contradictions : un accès différencié à la résidence et à la citoyenneté qui retarde l’intégration, des contrôles policiers aux frontières et dans les pays d’immigration (le profilage basé sur l’ethnicisation et la racialisation), le recours aux biotechnologies, la tolérance par rapport à l’embauche des illégaux qui sabote les politiques de main-d’œuvre et provoque la xénophobie et le racisme, des réactions contradictoires chez les immigrants eux-mêmes et le repli dans le communautarisme et l’intégrisme. De telles contradictions se sont accentuées au cours des dernières décennies par la multiplication des réglementations nationales et régionales régissant les flux migratoires, l’orchestration des politiques d’immigration étant de plus en plus subordonnée aux politiques de l’emploi et aux politiques de sécurité (Atak, 2011 ; Atak et Crépeau, 2013). Comme nous l’avons écrit :
- Il faut reconnaître que la mondialisation n’est pas (encore) venue à bout des États, des sociétés qui les composent et des divers problèmes que pose la cohabitation au sein de leurs institutions traditionnelles. Bien au contraire, la mondialisation a souvent contribué à enclencher en série des situations qui se répercutent au niveau social et étatique et qui de ce fait appellent un accroissement du rôle traditionnel des États, de leurs institutions et de leurs citoyens (Labelle, Couture et Remiggi, 2014 : 2).
Dans ce texte, je tenterai d’abord de situer les courants de pensée qui ont mené par des voies diverses aux théories de la mobilité dont on observe l’effet de mode actuel. Je traiterai ensuite des frontières et du transnationalisme, ainsi que du nationalisme méthodologique. Ces questions ont conduit à mettre l’accent sur de nouvelles inégalités en matière de mobilité internationale. Je conclurai en explicitant ce qui m’apparaît insuffisant dans les approches de la mobilité et j’expliciterai les niveaux analytiques à prendre en considération pour une théorisation critique et intégrée.
D’où vient le paradigme de la mobilité
dans les études migratoires ?
Le thème de la mobilité s’est imposé dans diverses disciplines et porte sur divers objets de recherche. Dans le domaine de la sociologie, le concept n’est pas nouveau. Traditionnellement, il concerne le changement social dans une société bien délimitée : mobilité résidentielle, mobilité occupationnelle, ascendante, descendante, etc. Il s’inscrit dans le vaste champ de la sociologie des strates sociales qui nie les rapports de classe. Cette sociologie assume que la société est constituée d’individus ayant en principe accès à la hiérarchie des récompenses, du prestige et du pouvoir dans la société, à condition qu’ils aient les bonnes dispositions et les bonnes valeurs, plutôt que de cibler les obstacles inhérents aux rapports de pouvoir entre classes sociales constituées.
Le tournant de la mobilité en sociologie n’est pas essentiellement lié aux études migratoires. Il s’agit d’un paradigme qui traverse diverses disciplines et traite de façon générale du point de vue du mouvement et de l’absence de mouvement dans des espaces différenciés. Ainsi, le sociologue des mobilités, John Urry, publie en 2005 un texte édifiant dans Les Cahiers internationaux de sociologie. Pour Urry, le monde entier semble en mouvement : demandeurs d’asile, terroristes, touristes, diasporas, étudiants internationaux, entrepreneurs, sportifs, randonneurs, prostituées. Qu’il s’agisse de parcourir le globe ou de transiter par les villes globales, ces groupes se croisent au hasard des moyens de transport et de communication : train, courriel, bus, avion, etc. (Urry, 2005 : 5). Le sociologue reproche aux sciences humaines d’avoir négligé le phénomène de la mobilité et d’avoir jusqu’ici insisté plutôt sur les structures sociales figées au sein de la société ou de l’État-nation (Urry, 2005 : 3). Il en appelle à une « reformulation de la sociologie dans sa phase post-sociétale », dont l’objet majeur ne serait plus les sociétés, mais « les diverses mobilités des peuples, des objets, des images, des informations et des déchets » (Urry, 2005 : 15).
- Le paradigme des mobilités serait susceptible de transformer la science sociale en produisant “un paysage théorique et méthodologique alternatif”. Le terme mobilités réfère à ce vaste projet d’établir une science sociale dans laquelle le mouvement, le mouvement potentiel, le mouvement bloqué, aussi bien que les immobilités volontaires et involontaires, les pratiques nomadiques sont conceptualisés comme constitutifs des relations économiques, sociales et politiques (Büscher et Urry, 2009 : 100. Je traduis).
Cinq types de mobilités, interdépendants, produisent de la vie sociale organisée selon la distance : le déplacement physique des personnes pour diverses fins ; le mouvement physique des objets ; le voyage imaginaire ; le déplacement virtuel ; le déplacement communicationnel (Büscher et Urry, 2009 : 100. Je traduis [1] ).
Alain Bourdin, sociologue de l’urbain, s’avoue critique de ce projet. Il s’agit, dit-il, d’une évolution tendancielle du monde sociologique :
- l’art devient de découper des niches de plus en plus petites (beaucoup plus que nos traditionnelles sociologies de la famille, de la religion et du travail), rassemblées autour de quelques auteurs et de quelques concepts aussi incontournables qu’intransférables [...]. On peut également y lire les stigmates d’une sociologie « post-moderne » prête à tout pour faire du spectacle et de la nouveauté (Bourdin, 2005 : 5).
D’autres souligneront la difficulté d’énumérer les objets que cette « sociologie mobile » désigne tant ses champs d’application sont vastes (Dureau et Hily, 2009).
Dans le domaine des études migratoires plus précisément, la mobilité jouit aujourd’hui d’un véritable effet de mode et s’inscrit dans des perspectives fort variées, des perspectives « post » de tous genres qui remettent en cause les frontières politiques ou symboliques des États-nations, ainsi que les significations de la citoyenneté et de l’appartenance. La mobilité serait, selon les Nations Unies, un moteur du développement humain. Ainsi, peut-on lire dans un document de l’Organisation internationale pour la migration, datant de 2006 :
- À l’heure actuelle […], la migration internationale présente de plus en plus un caractère temporaire, circulaire et multidirectionnel. Il est possible d’aller à l’école, de travailler, d’élever ses enfants et de prendre sa retraite dans des pays différents. Cette mobilité a conféré un nouveau sens à l’identité individuelle et suscité, chez nombre de migrants, un sentiment d’appartenance à plus d’une société ; elle constitue, avec la possibilité d’avoir des nationalités duelles ou multiples (modèle transnational), une des dimensions de l’intégration des migrants (OIM, 2006).
Selon l’OIM, la mobilité est dictée par les disparités en termes de démographie, de revenus et d’opportunités d’emploi entre les régions et en leur sein (OIM, 2008, cité dans Pellerin, 2011 : 58). L’OCDE s’aligne également sur l’idée d’un nouveau système de la mobilité (Dayton-Johnson et al., 2007). Louée dans les années 2000, elle est devenue un « référentiel de l’idéologie dominante » (Borja, Courty et Damatier, 2015 : 3).
Les théories de la mobilité se situent dans la mouvance et le prolongement de plusieurs courants analytiques précédents : les cultural studies, les postcolonial studies, les transnational studies, les border studies qui ont mis l’accent, depuis les années 1980, sur les notions de voyage, de déplacement, de nomadisme, de créolisation, de fluidité des appartenances et des identités ; autrement dit de production et de circulation des agents sociaux dans la société des réseaux (Castells, 1998 ; Smith et Guarnizo, 1999) ou encore d’obstacles au passage des frontières (Rea, 2014). Certaines acceptions concernent les frontières en tant qu’espaces territoriaux réels et concrets ; d’autres, comme des métaphores et des espaces politiques de contestation qui se glissent dans les interstices des discours essentialistes sur la nation, la « race », le genre, et qui permettent de les subvertir par la perspective de l’hybridité rhizomique (Cunningham et Heyman, 2004 : 290 ; Greenblatt, 2009).
Les frontières sont au cœur de l’attention des anthropologues et des sociologues familiers avec les réseaux transnationaux des immigrants et des diasporas (Labelle et Midy, 1999 ; Labelle et Rocher, 2004 ; Laguerre, 2006 et 2013). Dès la fin des années 1990, Linda Bash, Nina Glick Schiller et Christina Szanton Blanc définissaient le transnationalisme comme
- l’ensemble des processus par lesquels les immigrés tissent et entretiennent des relations sociales de nature multiple reliant leurs sociétés d’origine et d’accueil. Nous appelons ce processus transnationalisme pour insister sur le fait que, de nos jours, beaucoup d’immigrés construisent des espaces sociaux qui traversent les frontières géographiques, culturelles et politiques. Un élément essentiel en est la multiplicité des activités auxquelles s’adonnent les immigrés à la fois dans leurs sociétés d’origine et d’accueil (Bash, Glick Schiller et Szanton-Blanc, 1994 : 7 ; Glick Schiller, Bash et Szanton-Blanc, 1992. Je traduis).
Cette perspective devait mener à des changements majeurs dans la façon de concevoir le passage de l’immigration au semi-settlement (Heisler, 2001 : 230), à la déconstruction des appartenances nationales des migrants et à la célébration de nouvelles « sociabilités cosmopolites » (Glick Schiller et Salazar, 2013).
On le constatera, ce paradigme de la mobilité accorde prédominance à l’idée de circulation de différents types de migrants particulièrement mobiles (investisseurs, travailleurs temporaires, touristes, retraités, étudiants), catégories en augmentation, mais qui ne constituent pas pour autant l’essentiel de la migration internationale et s’articule avec la critique du nationalisme méthodologique.
Le nationalisme méthodologique
remis en question
Le nationalisme méthodologique est « un biais cognitif » qui consiste à « comprendre le monde social en prenant l’État-nation pour unité d’analyse » (Dumitru, 2014 : 9). Selon Speranta Dumitru qui en analyse la genèse, le terme n’est pas nouveau. Il a été forgé en 1974 par Herminio Martins, la signification ou l’expression étant reprises par Anthony Giddens et Anthony Smith afin d’en commenter les limites dans l’analyse des phénomènes sociaux (Dumitru, 2014 : 12). Selon Immanuel Wallerstein, les sciences sociales ont été construites par et autour de l’État-nation (Dumitru, 2014 : 9).
Des sociologues en appellent aujourd’hui à la création d’un nouvel espace intellectuel pour les sciences sociales. La mondialisation oblige « à lire l’histoire, et l’histoire qui se fait, la politique, la géopolitique, la guerre, aussi bien que la religion, les phénomènes migratoires, la justice, les nouveaux mouvements sociaux ou la poussée des identités en adoptant des perspectives qui cessent d’être ethnocentriques, occidentalo-centrées, qui ramènent tout à l’État-nation » (Calhoun et Wieviorka, 2013 : 12 ; Beck, 2004), stato-centrées ou encore qui ont infiltré les concepts d’intégration, d’adaptation, etc. (Wieviorka, 2014).
Mais dans le domaine précis de l’immigration, des diasporas et des études postcoloniales, ce travail de doute méthodologique est bien antérieur à l’injonction du Penser global actuel. L’idée de « communautés transnationales », différemment inscrites et articulées dans les espaces locaux, nationaux et internationaux, visait à briser le discours convenu sur la dichotomie majorité/minorités dans les pays d’accueil, à s’extraire du seul contexte de l’État-nation et à contrer l’essentialisme et la stigmatisation qui président à l’altéro-définition de certains groupes, sous le couvert de l’origine nationale, de l’ethnicité, de la racisation.
Débusquer le « biais sédentaire » (Castles, 2010:1567) ou le nationalisme méthodologique qui a longtemps dominé dans les sciences humaines et politiques, plaider en faveur d’un transnationalisme méthodologique, est devenu un leitmotiv cohérent avec l’air du temps. Essentiellement, la critique porte sur le fait que la plupart des chercheurs postulent que l’État-nation constitue le contexte central et déterminant pour étudier la migration internationale et les modes d’incorporation des migrants. Les États-nations ont été trop longtemps présentés comme des entités naturelles qui structurent le cadre des relations sociales, alors que les études transnationales cherchent à sortir de cette limitation territoriale (Faist, 2013). La dépendance des chercheurs aux subventions de l’État-nation explique également que la recherche empirique sur l’immigration soit contrainte de se borner aux frontières des États (Wimmer et Glick-Schiller, cités dans Amelina et Faist, 2012 : 1713). Cohérente avec une telle charge critique, il n’est donc pas étonnant que la démarche de recherche se soit transposée sur les avantages et les obstacles à la mobilité dans un monde globalisé.
De nouvelles thèses sur les inégalités
en matière de mobilité internationale
Le paradigme des mobilités a amené certains auteurs à expliquer les inégalités en termes de droit à la circulation transfrontalière. Ainsi, pour Ulrich Beck, le principal facteur qui détermine une position dans la hiérarchie des inégalités demeure l’opportunité de pouvoir traverser les frontières ou non. La non-mobilité dans un monde globalisé est « un signe de privation sociale et de dégradation » affirme aussi Zigmund Bauman (cité dans Faist, 2013 : 1639).
Les tenants de la « nouvelle mobilité » opposent deux catégories de transfrontaliers : les travailleurs étrangers qualifiés (highly skilled mobiles) et les non qualifiés (labour migrants). Les pays de destination cherchent à attirer les migrants hautement qualifiés dans la course acharnée aux talents qui caractérise l’économie mondiale ; d’où le développement ou le renforcement de leurs programmes sélectifs de migration temporaire. La mobilité de ces travailleurs est vue comme un signe d’ouverture du pays d’accueil. On la juge efficace et souhaitable sur le plan économique. Ici, il n’y a pas d’enjeux d’intégration. Dans cette perspective, la chasse aux cerveaux est de bon aloi pour les États qui ont besoin de professionnels et d’étudiants internationaux pour favoriser l’investissement, la recherche et l’innovation (Castels, 2010). Ce cas serait un exemple de win win win situation pour les pays de départ, les pays de destination et les migrants eux-mêmes (Piché, 2014).
Au contraire, les mouvements de la main-d’œuvre à bon marché sont associés à la migration qu’il faut contrôler pour ne pas provoquer un sentiment d’invasion dans la société d’accueil (Castles, 2010 : 1567). Les travailleurs non qualifiés font l’objet d’un débat public constant sur la naturalisation, l’intégration civique et les exigences linguistiques. Leurs liens avec les pays d’origine leur permettent de faire des transferts de fonds ou de trouver des emplois dans des niches d’opportunité pour leurs compatriotes au moyen de réseaux, mais certains estiment que ces liens transnationaux les conduiront éventuellement à a social mobility trap et à la marginalisation (Faist, 2013 : 1642). Et pourtant les pays de l’OCDE y recourent de plus en plus (Castels, 2006 ; OIT, 1997 ; OCDE, 2013b), ce qui illustre bien les contradictions des politiques d’immigration dont il a été question précédemment.
Ces positions sont à mettre en relation avec le discours utilitariste du ministère du Patrimoine canadien selon lequel l’immigration qualifiée jouera un rôle important dans la stratégie d’innovation du Canada. L’État canadien prend acte de la rentabilité des réseaux transnationaux des immigrants ; l’immigration étant une des composantes de la mondialisation qu’on ne sous-estime plus. Un document intitulé Élaboration de l’analyse de rentabilisation du multiculturalisme, destiné à la Direction de l’action directe et promotion et à la Direction générale du multiculturalisme et des droits de la personne du ministère du Patrimoine canadien, précise que les transilient immigrants font partie d’une nouvelle « classe créative », apte à mobiliser leurs réseaux internationaux en vue d’investissements et de bonnes pratiques commerciales. L’immigration engendre une source de capital humain en réponse aux pénuries de main-d’œuvre qualifiée :
- Les immigrants et les minorités visibles constituent un réservoir de compétences culturelles et linguistiques auquel les industries canadiennes peuvent faire appel pour leurs opérations à l’étranger ou pour prendre de l’expansion sur les marchés internationaux. Les décideurs commencent à porter davantage attention au lien (ou au lien possible) entre l’immigration et le commerce international et les investissements. Ils envisagent plus particulièrement de mettre à profit les compétences des immigrants et leur connaissance des conditions du marché local ainsi que d’accéder aux réseaux transnationaux auxquels ils appartiennent dans le but de développer des marchés d’exportation et des possibilités d’investissement. Pour tirer profit du capital humain, les obstacles structurels et la discrimination devront être obligatoirement éliminés. Par ailleurs, de nouvelles stratégies seront nécessaires pour développer le capital social et tirer profit des réseaux sociaux auxquels appartiennent les diverses collectivités du Canada (Burstein, 2004 : 10).
Le multiculturalisme est donc rentable. Les liens que les diverses « communautés culturelles et raciales […] entretiennent avec presque tous les pays du monde sont synonymes de prospérité économique et ont contribué à susciter l’intérêt du gouvernement du Canada à l’égard du multiculturalisme » (Canada, Patrimoine canadien, 2005).
Le Québec tient un discours analogue et estime que l’immigration contribue « au développement durable du Québec et de ses régions, dans le respect des valeurs communes » (MICC, 2011). Il s’agit maintenant de mobiliser la diversité, car l’immigration a un impact sur l’innovation: élargissement de l’expertise québécoise sur la scène internationale, accès aux marchés étrangers, source importante de capitaux d’investissement, contribution au dynamisme entrepreneurial québécois, apport de main-d’œuvre dans des secteurs de pointe et dans les services, etc. (MIDI, 2014).
À un autre niveau d’analyse, la problématique de la mobilité remet en question d’autres types de rapports sociaux inégalitaires: entre ceux qui ont accès à la citoyenneté et ceux qui en sont exclus. Dans cette optique, les notions de citoyenneté globale, post-nationale ou cosmopolitique, qui pourraient laisser croire à l’efficacité des institutions internationales de défense des droits de l’homme, coexistent de façon contradictoire avec le resserrement des régulations étatiques portant sur la citoyenneté nationale (Bauder, 2008 ; Shachar, 2014 : 116).
Pour une perspective critique et intégrée
dans le champ de l’immigration
Le paradigme de la mobilité (ou la nouvelle doxa de la mobilité ?) dans les études migratoires m’apparaît limité comme théorie de substitution globale, bien qu’il soit pertinent dans certains types de recherche empirique sur le passage des frontières matérielles, des murs de séparation et des aéroports ; par exemple dans les travaux d’Andrea Rea qui définit les frontières-réseaux comme
- des unités d’espace-temps (aéroport, port maritime, l’espace public par exemple) où des humains (bureaucrates dans les consulats, les gardes-frontières, les agents de liaison, des voyageurs, etc.) et des non-humains (bases de données, des lois, des procédures) interagissent pour objectif de produire des pratiques de souveraineté étatique (Rea, 2014).
Car, de façon plus générale, l’idéologie mobilitaire « ne met en avant, et au-dessus de tout, que des vertus. Elle est devenue une caractéristique personnelle nouvelle définie par des choix rationnels en rapport avec la réalisation de soi » (Borja, Courty et Damatier, 2015 : 3). Elle propose une vision cosmopolite selon laquelle les immigrants se déplacent de plus en plus librement à l’échelle internationale pour vendre et négocier leur capital humain, là où les avantages économiques et sociaux sont les plus grands.
Comme le souligne Stephen Castles, cette position ne rend pas compte de l’expérience concrète de millions de migrants durant la phase du néolibéralisme triomphant de 1970 à ce jour :
- Le rêve cosmopolite de la libre mobilité dans un marché du travail global et compétitif habituellement associé à l’idée d’ouverture culturelle et d’acceptation croissante de la diversité semble loin de l’expérience de la plupart des travailleurs. Il peut tenir pour une petite élite bien que même les travailleurs les plus qualifiés subissent également de la discrimination , mais ce n’est certainement pas le cas pour des millions de travailleurs migrants. La privation de droits humains et de droits du travail pour des groupes qui n’ont pas de statut légal et de pouvoir de négociation sur le marché semble être un aspect intégral de la plupart des économies industrielles, avancées et émergentes, comme c’était le cas à travers l’histoire du capitalisme (Castels, 2012 : 1850. Je traduis).
En effet, on généralise lorsqu’on affirme l’émergence d’une conscience mondiale, d’une sociabilité ou d’une sensibilité cosmopolite que développeraient les migrants, thèse en vogue véhiculée par des anthropologues comme Nina Glick Schiller selon lesquels l’État-nation est obsolète alors que les citoyens s’acheminent vers une citoyenneté mondiale. On peut aussi détecter dans l’idéologie mobilitaire une version moderne de la théorie libérale classique de l’équilibre entre les facteurs push et pull explicatifs de l’immigration internationale, une vision qui correspond à l’idéologie du néolibéralisme et de la globalisation, qui encourage fortement le contrôle des États sur la migration temporaire (Dauvergne et Mardsen, 2014) et qui ne tient pas compte des déséquilibres historico-structurels à l’œuvre dans les pays d’émigration, ainsi que des causes d’appel dans les pays d’accueil [2].
Or les opportunités de travail pour les travailleurs migrants ne dépendent pas seulement de leurs qualifications. D’autres facteurs jouent comme le statut d’entrée, le processus de régularisation de ce statut, la demande de travail très variable selon l’économie des pays de destination, ainsi que l’acceptation d’une possible déqualification. Dans le contexte de la crise économique mondiale, les travailleurs migrants sont essentiels pour l’économie des pays industriels, anciens et nouveaux. Mais rien ne garantit qu’ils bénéficieront de plus d’égalité et seront mieux protégés dans un monde multipolaire marqué par les changements de la nouvelle économie depuis une vingtaine d’années : dérégulation, délocalisation, utilisation du travail informel ou illégal, augmentation du travail temporaire, sous-traitance, une nouvelle économie qui, comme par le passé, est basée sur l’ethnicité, mais ne fournit plus la protection de la solidarité et de la syndicalisation (Castels, 2012 : 1580).
Tout compte fait, le débat migration-mobilité repose sur une utopie postmoderne d’un monde sans frontières et d’un délitement de la citoyenneté nationale. Or, la mobilité n’est pas le cadre théorique le plus approprié pour analyser les manifestations de la discrimination et de l’inégalité, ou encore le contrôle exercé par les États (Castels, 2010 : 1567).
J’ajouterai que le courant de la mobilité renvoie, dans l’histoire de la pensée sociologique, aux théories fonctionnalistes et néo-fonctionnalistes, ou encore strictement empiristes, avec un discours basé sur les notions de hiérarchies, de strates et d’agrégats inégalitaires ; ou encore un discours qui fonctionne de façon binaire (highly skilled mobiles/cheap labor ; citoyens/non citoyens ; mobilité/immobilité, sédentarisme/nomadisme), sans rendre compte de la complexité et de la diversité des modes d’incorporation dans les pays de départ et dans les pays d’accueil ; un discours qui sous-estime ou passe sous silence les analyses basées sur les rapports de domination et d’exploitation à l’œuvre dans les pays de départ et dans les milieux de travail des pays d’accueil.
Les analyses paradigmatiques de l’immigration devraient être liées ou intégrées à une théorie sociale plus large, capable d’analyser les rapports de pouvoir aux échelles internationale, nationale et locale ; une théorie critique inspirée des approches du système monde et des nouvelles figures de la division internationale du travail qui produisent de nouvelles formes de discrimination et d’inégalités. Les théories du transnationalisme et des réseaux s’avèrent aussi essentielles à condition qu’elles puissent également expliquer les rapports de pouvoir attachés à la différenciation sociale et fournir autre chose que des considérations utopiques sur le cosmopolitisme. Cet ensemble intégré devrait pouvoir rendre compte des variations des divers processus migratoires qui se produisent au sein de constellations socio-économiques et historiques particulières.
Plusieurs niveaux d’analyse s’avèrent ici indispensables, à mon avis. À un premier niveau macrosociologique, il y a lieu de démontrer et d’expliquer les déséquilibres historico-structurels, d’ordre économique, politique et culturel, qui incitent à l’émigration dans les pays de départ, au cours de telle période et dans telle conjoncture donnée (Labelle et Midy, 1997 ; Portes et al., 1981 ; Waldinger, 2003 : 357). L’attention doit aussi porter sur les structures économiques et politiques qui connectent les aires et les systèmes régionaux de migration (ex. : au sein de la Caraïbe), ainsi que sur les liens coloniaux et postcoloniaux qui s’inscrivent dans la durée (par exemple, entre la France et l’Algérie ; l’Angleterre et l’Inde).
Un second niveau également macrosociologique concerne la caractérisation des forces structurelles d’appel dans les pays de destination. Il s’agit ici de facteurs tels que les politiques d’immigration (qui facilitent ou non la résidence, l’intégration et la citoyenneté), la structure du marché du travail et la conjoncture économique, le rôle de l’industrie de l’immigration, dans ses aspects légaux et illégaux, celui des agences de placement, ainsi que la réceptivité des sociétés d’accueil.
Un troisième niveau mésociologique examine comment les immigrants établis génèrent des réseaux et des chaînes migratoires, familiales et communautaires, susceptibles de faciliter l’ancrage temporaire ou permanent. On sait qu’en Amérique du Nord, pour un immigrant indépendant jouissant du statut de résidence, on compte une cinquantaine d’immigrants parrainés. Les réseaux transnationaux informels dirigent souvent de façon non aléatoire les migrants vers des niches ethniques et genrées dans les pays d’accueil (Waldinger 2003 ; Shrover, van der Leun et Quispel, 2007). Enfin, la structuration des associations communautaires dans les pays d’accueil influe sur l’appel d’immigration pour des raisons économiques, politiques, culturelles et religieuses.
À un quatrième niveau microsociologique, l’analyse porte sur les motivations individuelles et familiales des personnes qui répondent aux forces structurelles d’émigration et d’immigration et qui induisent des mobilités différenciées. Or, les études sur la migration ne reflètent pas toujours la diversité des statuts juridiques au sein d’une même « communauté » recomposée en terre d’immigration et ne tiennent pas toujours compte de la différenciation sociale (genre, âge, confession religieuse, etc.) qui caractérise le groupe ou la « communauté ». Ainsi, le sociologue Alejandro Portes insiste depuis longtemps sur l’importance de la structure de classe à laquelle s’intègrent les immigrants dans les pays de destination (Portes et al., 1981). En effet, les modes d’incorporation diffèrent profondément selon qu’il s’agit, selon sa terminologie, d’immigrants grands capitalistes, de rentiers, d’elite workers, de common workers, de petits entrepreneurs ou de redundant workers, (Portes, 2000 : 270), autrement dit de groupes sociaux dont les intérêts économiques, politiques et culturels divergent.
Au-delà du binôme travailleurs hautement qualifiés/main-d’œuvre bon marché, il existe aussi des flux migratoires mixtes qui peuvent créer des enclaves ethniques institutionally complete. Il s’agit d’enclaves dans lesquelles les migrants qualifiés ou possédant un capital de risque créent des entreprises qui offriront des biens et des services à leurs compatriotes tout en favorisant l’embauche de co-nationaux. Ces enclaves représentent l’une des manifestations les plus visibles du changement social induit par la migration dans les pays d’accueil (Portes, 2011 : 1546). Ces concepts de classe, de niche, d’enclave suscitent de riches débats dans la littérature spécialisée et ont le mérite de déconstruire encore une fois les représentations homogénéisantes et réductrices que l’on se fait des groupes sociaux et des rapports entre majorités et minorités (Labelle, 2015). Il y a lieu d’approfondir encore l’impact des idéologies racistes et sexistes qui se manifestent à tous les niveaux précédents, en tant qu’éléments indissociables de la culture géopolitique du système monde (Wallerstein, 1990).
Enfin, la perspective du droit et de l’éthique est essentielle quand il s’agit de proposer les formes politiques de la justice et de la dignité, d’assurer le respect des conventions internationales sur les droits des migrants et de contester les modes de gouvernance utilitaristes et sécuritaires (Crépeau, Nakache et Atak, 2009 ; Nakache et Kinoshita, 2010). Selon Agemben, « [p]uisqu’il est vain et coûteux de gouverner les causes, il est plus utile et plus sûr de gouverner les effets. Cet axiome régit nos sociétés de l’économie à l’écologie, de la politique étrangère et militaire jusqu’aux mesures internes de sécurité et de police» (2014 : 22). Une autre préoccupation concerne le recours aux tests ADN qui a cours dans 21 pays en vue du regroupement familial de différentes catégories de migrants (Murdock, 20008 ; Weiss, 2011 ; Heinemann, Naueb et Tapaninenc, 2013). Ces tests sont utilisés pour prévenir la fraude et le trafic d’enfants. Mais ils soulèvent des enjeux théoriques, méthodologiques et éthiques tels que la définition et la démonstration rigoureuse de la discrimination, la définition de la famille, le relativisme culturel et le rapport nature/culture, l’inter normativité du droit, le respect de la vie privée, etc. Comme le souligne le juriste Edward Dove :
Dans le sillage du 11 septembre, et avec la croissance toujours plus économique, plus rapide et plus précise de la technologie de l’ADN, nous assistons à l’émergence d’un nouvel ordre de bio-surveillance que j’appellerai l’homonomie, soit un système socialement construit de lois et de règles de catégorisation vérité/fraude, autorisé/non autorisé, sécurité/insécurité qui impose littéralement un «droit du sang» établi par le biais des tests d’ADN (2013 : 472) [3].
Par contre, il ne suffit pas de restreindre les problématiques aux obstacles à la mobilité ou encore d’affirmer que réduire les restrictions à l’immigration et assurer que les gens puissent se déplacer de façon sécuritaire « ne peut que renforcer les droits de l’homme, et aussi conduire à une plus grande égalité économique et sociale » (United Nations Development Programm, 2009, cité dans Castels 2012 : 192. Je traduis). Dans cette vision idéale, voire idéaliste, on néglige l’examen des mécanismes sous-jacents au système monde qui ne cesse de se recomposer et d’induire les déséquilibres planétaires et violents que l’on connaît.
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Pour citer cet article : Référence électronique
Micheline Labelle, « Le paradigme de la mobilité propose-t-il une perspective adéquate de l’immigration internationale ? », Éthique publique [En ligne], vol. 17, n° 1 | 2015, mis en ligne le 18 juin 2015, consulté le 16 novembre 2015.
URL : http://ethiquepublique.revues.org/1751 ;
Auteure
Micheline Labelle
Ph. D. en anthropologie (Université de Montréal), Micheline Labelle est professeure associée de sociologie à l’Université du Québec à Montréal. Première titulaire du Prix Thérèse-Casgrain, CRSH (1989), elle a été titulaire de la Chaire Concordia-UQAM en études ethniques (1993-1996 ; 2006-2008), titulaire de la Chaire de recherche en immigration, ethnicité et citoyenneté de l’UQAM (2008-2014) et obtenu la création du nouveau Centre de recherche en immigration, ethnicité et citoyenneté (2014-2017) à l’Université du Québec à Montréal. Auteure de plusieurs ouvrages, elle a été membre du Conseil des relations interculturelles du Québec (2002 à 2004) ; du conseil d’administration de l’Association internationale des études québécoises (2003 à 2009) ; membre institutionnel du Conseil de l’Institut d’études internationales de Montréal, UQAM (2008-2014). Elle est membre du comité de rédaction de Canadian Ethnic Studies, Quebec Studies, Cahiers de recherche sociologiques et de la Commission sectorielle, Sciences naturelles, sociales et humaines, de la Commission canadienne pour l’UNESCO.
Article du même auteur
· Tolérance, racisme et sondages [Texte intégral]
Paru dans Éthique publique, vol. 9, n° 1 | 2007
[1] The corporeal travel of people for work, leisure, family life, pleasure, migration and escape, organized in terms of contrasting timespace modalities (from daily commuting to once-in-a-lifetime exile); the physical movement of objects to producers, consumers and retailers, the sending and receiving of presents and souvenirs, as well as the assembly and (re-)configuration of people, objects, and spaces as part of dwelling and place-making; the imaginative travel effected through talk, but also the images of places and peoples appearing on and moving across multiple print and visual media; the virtual travel, often in real time, that enables presence and action at a distance, transcending geographical and social distance (e.g. Internet bank transfer, or attending conferences ‘in’ ‘Second Life’); the Communicative travel through person-to-person contact via embodied conduct, messages, texts, letters, telegraph, telephone, fax and mobile (Büscher et Urry, 2009 : 101). Voir aussi le Manifesto de Greenblatt (2009).
[2] Pour la théorie libérale classique, la migration est le résultat net de l'action de deux ensembles de forces s'exerçant en sens contraire. Les forces d'expulsion sont l'ensemble des facteurs qui poussent les individus à migrer ou à quitter leur communauté d'origine. Les forces d'attraction sont les facteurs qui incitent les individus à émigrer vers un lieu donné. La migration restaure l'équilibre entre des unités spatiales différentes: elle est un facteur d'ajustement économique tant dans la zone de départ que dans la zone d'accueil.
[3] In the wake of 9/11, and with the rise of ever-cheaper, ever-faster, evermore-accurate DNA technology, we are witnessing the emergence of a new order of bio-surveillance and what I call a “hemonomy,” a socially constructed system of laws and rules of categorizationtruth/fraud, permitted/denied, secure/insecurethat literally interposes a “right of blood” established through DNA testing (Dove, 2013 : 472).
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