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Denise LEMIEUX et Lucie MERCIER
Respectivement chercheure à l’Institut québécois de recherche sur la culture d’une part,
et doctorante en sociologie à l’Université Laval, d’autre part.
“Familles et destins féminins.
Le prisme de la mémoire, 1880-1940.”
in revue Recherches sociographiques, vol. 28, no 2-3, 1987, pp. 255-271.
- Introduction [255]
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- Les autobiographies : des archives de la vie privée [256]
- Les apprentissages [258]
- Les départs de la maison [261]
- Le travail des jeunes filles [262]
- Le temps des fréquentations [263]
- Les récits de mariage [264]
- La maternité [265]
- La naissance [267]
- Conclusion [268]
- Bibliographie [270]
- La littérature personnelle permet de retracer certains aspects de la dynamique familiale au début du siècle, à travers la description du cycle de vie des femmes et l'interprétation qu'elles donnent aux situations qui les concernent. Les propos sur l'apprentissage, le départ de la maison, les fréquentations, le mariage, la maternité... illustrent le fonctionnement et les variantes de l'ancienne culture de solidarité, ainsi que l'imbrication des itinéraires féminins dans les objectifs de reproduction du groupe. L'étude est basée sur une trentaine de récits ou mémoires publiés, en provenance de différents milieux.
Introduction
Les historiens ont contribué largement à l'accumulation des connaissances et au renouvellement de la pensée théorique concernant les phénomènes familiaux. [1] La prise en considération de la grande diversité des mécanismes de reproduction sociale, de la plasticité des formes familiales et des règles de transmission des héritages semble inciter à des renversements de perspectives qui mettent l'accent sur la famille comme dynamisme et invitent à l'examen des destinées individuelles. [2] En centrant l'investigation sur les acteurs, d'abord l'enfant, la femme, et bientôt l'aïeul, le mari et le père, on redécouvre la complexité des conduites familiales du passé. Ainsi, en observant le jeu des rapports de parenté chez des ouvriers du textile franco-américains, Tamara K. Hareven a démontré le rôle actif de la famille dans l'immigration aux États-Unis, la recherche d'emplois et les apprentissages de travail aux temps de l'industrialisation, et ce jusque vers les années 1930. [3] En interrogeant les migrants qui revinrent s'installer au Québec, Jacques [256] Rouillard obtient des résultats similaires, tant sur le travail aux États-Unis que sur l'importance des rapports de parenté dans l'émigration et l'adaptation au milieu américain. [4]
C'est à partir d'une documentation qui recoupe à peu près la période de ces études, ici les années 1880 jusqu'à 1940, que nous avons observé des phénomènes relevant de modèles familiaux très proches de ceux des études précédentes, bien qu'il s'agisse ici de familles québécoises se rattachant à une diversité de milieux et non plus uniquement aux ouvriers du textile. Davantage axée sur la vie quotidienne que sur les milieux de travail, notre recherche ajoutera peut-être quelque lumière sur un sujet encore mal connu, la famille québécoise du tournant du siècle. [5] Notre objet étant non pas la famille mais le cycle de vie des femmes et les changements culturels qui y sont associés, nous examinerons, par-delà les phénomènes qui impliquent la famille, les interprétations données par des individus aux situations qui les concernent. Comment les femmes s'insèrent-elles dans cette dynamique familiale ? Leur identité sexuelle, leur appartenance au groupe féminin influent sans doute sur leurs itinéraires. Comment l'interprètent-elles ? Il s'agit de leur existence, de leurs désirs et de leurs sentiments. À cette exploration de zones combien obscures, les sentiments, mais aussi la vie privée, nos sources se prêtent admirablement.
Les autobiographies : des archives de la vie privée
L'analyse s'appuie sur une trentaine de documents biographiques publiés, en majeure partie écrits par des femmes mariées avant les années 1940, et dont la plupart sont des autobiographies et des mémoires. À cause du petit nombre et de la précarité des sources, il est apparu utile d'élargir le corpus avec des ouvrages qui se rattachent partiellement au genre autobiographique tout en étant centrés sur un autre personnage que l'auteur : sa mère, son père, sa famille entière. Quelques autobiographies d'hommes ont été aussi ajoutées, certaines largement utilisées parce qu'elles traitent abondamment de la vie privée, la plupart constituant surtout une documentation d'appoint.
Nos documents sont hétérogènes tant par la diversité des milieux représentés que par le genre de l'ouvrage, la date de parution et le type d'écriture. Des périodes s'y chevauchent, parfois dans le même document, ce qui rend difficile, rarement impossible, la datation approximative des faits remémorés. Le corpus [257] rassemble côte à côte ruraux et urbains, bourgeois et petits bourgeois, artisans et ouvriers. Les embûches que cette diversité présente pour l'analyse nous semblent largement compensées par la capacité du corpus à représenter la multitude et la complexité des parcours individuels qui sous-tendent des catégories habituellement définies sans ambiguïtés mais de façon statique. Si l'urbanisation propre à cette période peut se traduire en indices (on y passe en quelques décennies du tiers au deux tiers d'urbains), on ne saurait en comprendre les processus sans évoquer la mobilité sociale et géographique vécue par de grands nombres, dont cette documentation fait état, incluant dans plus d'un cas des allers et retours entre villes et campagnes. Plus encore, par-delà les ruptures opérées par ces déplacements, les autobiographies gardent la trace de ce qu'on a quitté, le pire et le meilleur.
Ce qui confère une certaine homogénéité à ces documents, c'est qu'ils constituent, à des degrés divers, des expressions d'une mémoire familiale. C'est souvent à la sollicitation de ses enfants que le mémorialiste prend la plume. Ainsi, Théodora Dupont entreprend de rédiger la vaste chronique où sont consignés tous les mariages de ses frères et sœurs, des enfants, sans oublier ses deux unions et les naissances et baptêmes multiples qui suivirent. Son récit s'inscrit dans un rôle déjà établi, celui de majordome des fêtes de famille, qui l'amène à composer les adresses et à confectionner les gâteaux de mariage. Bien qu'il concerne parfois les gens de sa région, le livre s'adresse en premier lieu aux proches que l'on interpelle directement dans un langage familier, tout comme on parle à l'occasion à ses défunts ou aux divinités tutélaires. [6]
La publication de correspondances est le fruit d'un semblable désir de communication au fil des générations. Celle des Gravel en est un bon exemple, puisqu'elle avait été conservée par le fils prêtre qui voulait la publier sous le titre Journal de ma mère. C'est la belle-fille de Jessie Gravel, la mère au centre de ces échanges épistolaires, qui préparera l'édition des papiers de famille, en gage de fidélité à la fille de Jessie, nouvelle gardienne de l'esprit de famille. [7] La solidarité des familles est donc au cœur même de la production des ouvrages que nous avons utilisés. On la retrouve même déguisée sous le manteau de l'anthropologie ou de l'historiographie. [8] Si certains livres s'appuient sur la recherche en archives et empruntent aux modèles littéraires plutôt qu'à des formes plus anciennes de récits populaires, la plupart rejoignent la vie privée par le souvenir, la tradition orale, mais aussi par la mise en forme du subjectif.
Participant à la construction d'une mémoire familiale, mais aussi à la mémoire d'un village, d'une classe sociale, d'un métier, les écrits autobiographiques [258] procèdent à des degrés divers à la construction d'une identité personnelle. [9] Le projet est explicite dans la démarche de Ghislaine Meunier-Tardif, qui retrace l'existence de sa grand-mère et de sa mère pour étayer les remises en question qui l'assaillent au milieu de sa vie. [10] Qu'on idéalise le passé ou qu'on le critique, la reconstruction des souvenirs individuels part toujours du présent des auteurs, qui évoquent vie adulte, retraite et vieillesse sous un jour contemporain, ce qui éclaire les contextes et les intentions qui président à une multiplication récente de cette production littéraire.
C'est en tenant compte de ces effets de conjonctures sur la mémoire, mais en cherchant le mieux possible à situer les faits évoqués dans la période dont ils relèvent, que nous avons procédé à une analyse qualitative des sources. Ce qu'on en tire demeure tributaire de la nature du document et particulier à ce corpus.
Les apprentissages
Aux confins de la mémoire, entre des plages d'oubli et ces bribes de souvenirs qui affleurent à la conscience, l'enfance exerce une fascination évidente chez les auteurs, qui ramènent à la surface maintes anecdotes et recréent en quelques cas de véritables mondes disparus. Certes, on reconnaîtra dans les modes de vie des familles bourgeoises, parfois même de familles à peine à l'aise, l'adoption d'éléments divers qui permettent d'identifier, tout au long de la période, les indices d'un statut déjà moderne des enfants. À titre d'exemple, un Paul L'Anglais assistant à Québec en 1911 aux spectacles pour enfants inspirés des imprimés américains, une Jeannette Vekeman isolée dans une île perdue du Saint-Laurent et lisant un éphémère Journal des enfants publié par ses parents pendant l'année 1914.
Dans une période de transitions majeures, on pourrait mettre l'accent sur les nombreuses innovations, tant dans les modes de vie que dans les techniques, que ces mémoires rappellent d'ailleurs comme à plaisir. Tout en intégrant tant bien que mal dans son univers l'école, la médecine, la manufacture et des déplacements considérables qui disloquaient les frontières même de cet univers, la famille semble avoir, dans un premier temps, transposé ses modèles traditionnels et tiré parti des ressources de chacun de ses membres pour s'adapter et survivre. Le phénomène a été bien décrit par Hareven et par Rouillard, pour ce qui est des ouvriers du textile. On retrouve bien sûr de nombreuses manifestations de la transposition des modèles traditionnels dans ces familles rurales qui constituent encore, au tout début du XXe siècle, le milieu de vie prédominant, largement [259] représenté dans les souvenirs, du moins à l'étape de l'enfance. Mais les milieux urbains semblent recourir à des modèles identiques dans nombre de circonstances. L'existence même de cette solidarité dans de nouveaux contextes renvoie à de multiples facettes de la vie des familles, en particulier tout le domaine de l'affectif et bien sûr de la socialisation. Parmi les mécanismes psychosociologiques susceptibles d'avoir favorisé l'attachement au groupe familial, le lien mère-enfant apparaît essentiel, mais l'importance qu'on y accorde a peut-être éclipsé cet autre phénomène culturel, la diffusion du maternage dans une multiplicité de relations sociales. [11] Alors que nombre de souvenirs du début du siècle s'attardent à des personnages autres que les parents, selon les cas tante ou grand-mère, oncle ou grande sœur, une diversité d'exemples révèlent que les enfants eux-mêmes, mais en particulier les fillettes, sont conviés fréquemment à adopter ce rôle de mère d'emprunt.
Les jeux de la petite enfance, en plus de s'inspirer du spectacle de la vie des adultes, s'entremêlent à leurs activités quotidiennes. Selon les schèmes propres aux sociétés préindustrielles, de menus travaux sont exécutés par des enfants en bas âge dont les mères vantent les prouesses. Ces exploits, envisagés du point de vue de l'enfant qu'on a été, laissent des souvenirs mitigés, tantôt heureux et fiers, tantôt amers. Quelques personnes rappellent leur désarroi devant une responsabilité trop lourde pour un enfant. Tout en avouant que les services rendus étaient parfois au-dessus de ses forces, Marguerite Tremblay décrit dans quel contexte d'échanges et de rapprochements entre les générations se déroule son apprentissage des travaux domestiques. Ces activités débordent l'enclos du foyer puisque son père l'envoie, à huit ans, déposer de fortes sommes à la banque. Héritière des tours de main en pâtisserie, elle reçoit également les confidences de sa mère et de sa grand-mère. Cette aînée d'une famille urbaine bénéficie d'un statut privilégié qui l'associe aux adultes et son rôle de substitut maternel s'accentuera avec la maladie de sa mère, qu'elle remplace à son décès alors qu'elle-même a seize ans. [12] De tels rôles, dont presque chaque famille est tributaire mais qui peuvent n'être que temporaires et faire l'objet d'une sorte de rotation, sont identifiés par une expression consacrée, le « bras droit » de la mère.
Les décisions des parents jouent un rôle majeur dans l'attribution de tâches qui conduisent certains enfants à s'instruire, d'autres à travailler plus intensément au sein de la famille ou à l'extérieur pour un salaire. En particulier, la mère semble assurer, dans plusieurs familles, l'orchestration des activités et des départs à des fins d'étude ou de travail. Si les travaux des enfants suivent en [260] général les clivages de sexes, en l'absence de soeurs plus âgées à la maison, un garçon aidera sa mère. [13] De la même façon, l'aînée d'une famille de filles dans une région de colonisation fait parfois des travaux de garçon. [14] Outre le sexe, le rang d'âge, les aptitudes et les besoins du moment orientent précocement les enfants vers des destins différents.
Plusieurs filles se prêtent facilement aux requêtes de leurs parents, mues par les valeurs d'entraide, un sentiment de pitié ou d'obligation, mais parfois par un désir d'autonomie. Jeannette Vekeman affirme s'être sentie valorisée par la responsabilité qui lui échoit de surveiller ses frères et sœurs et d'accomplir des travaux requérant une force physique ou une habileté particulière. [15] C'est volontairement et avec le sentiment d'accéder à la vie adulte que Monique Leyrac quitte l'école à treize ans pour prendre charge de la famille, tandis que sa mère et sa sœur aînée vont travailler à l'extérieur. [16] Lorsqu'une fille se marie, lorsque la mère est malade ou pour exécuter des travaux saisonniers sur une ferme, on retire une fille du couvent, on lui fait quitter son emploi, avec parfois des compensations telles que ce voyage à New York offert par un père commerçant à la fille parce qu'elle a sacrifié l'année de sa graduation pour remplacer sa mère décédée. [17] Ces formes de solidarité, soutenues par des modèles tôt inculqués, demeurent en usage dans les familles bourgeoises bien qu'on puisse les supposer moins fréquentes puisque l'aide salariée y prévaut davantage.
Dans quelques cas, on raconte avoir résisté à l'assignation au travail domestique, s'obstinant à poursuivre des études par goût ou pour obtenir un diplôme. Il est cependant difficile d'isoler, à partir de ces textes, ce qui relève des circonstances, des décisions parentales et des volontés individuelles. Car la poursuite des études au-delà du primaire demeure elle aussi tributaire d'interventions originant dans la famille et la parenté. Il n'est pas rare que l'on mentionne, à côté de l'intérêt pour l'étude, l'existence d'une tante ou d'une sœur institutrice, d'un père ou d'une mère favorables à l'instruction. Il arrive qu'une écolière aille vivre avec sa sœur à l'école de rang, qu'une nièce y seconde sa jeune tante, laissant presque entrevoir l'existence d'une forme d'apprentissage artisanal du métier. Bien sûr, les couvents sont les premiers dispensateurs des connaissances et des diplômes mais, là encore, quelques livres mentionnent [261] l'intervention d'une religieuse de la famille recrutant des élèves ou facilitant leur passage au pensionnat.
On trouve d'ailleurs des familles d'institutrices, tout comme en d'autres milieux on trouvait des familles d'ouvrières du textile. Il semble donc exister des stratégies familiales qui relèvent plutôt d'une sorte d'adaptation ponctuelle aux situations que d'une planification rationnelle des effectifs. [18] Derrière une mobilité qui touche quelques individus se profilent souvent d'autres personnes qui se sont sacrifiées ou ont dû retarder leurs propres cheminements, départs, profession ou mariage, pour apporter l'aide requise. D'où une certaine inégalité au sein d'une même famille ; du moins est-ce ainsi que certains perçoivent rétrospectivement cette division du travail, où celles qui étudient ou enseignent sont dispensées des travaux ménagers. [19] Plusieurs auteurs s'apitoient sur le sort de ceux qui se sont ainsi sacrifiés, tandis que Marguerite Tremblay, à travers le personnage de sa grand-mère dont elle peint le Beau règne, rappelle discrètement qu'elle fut, comme elle, la mère de tous ses frères et soeurs.
Les départs de la maison
Bien que nous ne puissions qu'effleurer ici la diversité des conduites en regard de la scolarisation, soulignons la nature souvent complexe des liens entre les familles et l'école. À une époque où le système scolaire était encore embryonnaire et desservait inégalement les régions, maintenir ses enfants à l'école semble avoir signifié, dans beaucoup de cas, des départs, même s'il s'agissait simplement d'aller en pension dans une famille du village. À côté du recours de quelques familles à l'enseignement à domicile, ces sources révèlent aussi l'utilisation des pensionnats et des orphelinats pour faire face aux difficultés temporaires du cycle de vie familiale. Les maladies, les décès des parents et les grossesses de la mère semblent jouer un rôle dans les décisions de mettre en internat quelques enfants, comme l'avait observé Bettina Bradbury pour les familles ouvrières montréalaises du XIXe siècle. [20] Bien qu'elles recourent à des institutions distinctes, les familles à l'aise semblent avoir utilisé elles aussi ces institutions dans les périodes difficiles.
Mais c'est surtout à l'adolescence que l'on assiste à plusieurs départs. Départs des unes pour la mise en service ; départs des autres pour le couvent, où [262] l'on va chercher, selon les milieux, brevet d'enseignement, vocation religieuse ou culture générale, sans oublier les manières raffinées susceptibles de faciliter le choix du conjoint.
Si les jeunes travailleuses accèdent plus immédiatement à l'étape intermédiaire de la jeunesse qui les met en contact avec certaines réalités de la vie adulte, les couventines semblent vivre un temps d'attente ou de prolongement de l'enfance qui définira peu à peu l'adolescence moderne. Le petit nombre d'années alors consacrées aux études secondaires sépare encore peu, au plan de l'âge, celles qui vont travailler à domicile ou en usine vers quatorze, quinze ou seize ans, qui « n'ont pas le temps d'avoir une adolescence », [21] et celles qui vont enseigner à seize ou dix-sept ans, comme c'est le cas dans plusieurs récits d'institutrices. Quant aux jeunes bourgeoises, elles rentrent sagement à la maison aider leur mère et s'initier à la vie mondaine des débutantes en quête d'un mari.
Le travail des jeunes filles
La famille semble servir d'intermédiaire dans le recrutement des domestiques mais aussi des institutrices. Du moins en milieu rural, ces dernières succèdent à leur sœur, à leur belle-sœur, obtiennent un emploi par l'intermédiaire de la tante ménagère au presbytère. Bien qu'il existe des agences de placement et que l'on recoure aussi aux annonces journalistiques, la famille et la parenté constituent des réseaux intermédiaires dans l'emploi, qui semble se faire souvent au sein même de la parenté sous forme d'entraide ou contre salaire. Des étrangers s'adressent eux aussi à la famille pour engager une jeune servante, et Lina Madore mentionne que sa mère ne l'avait pas consultée lorsqu'on l'envoya à treize ans prendre charge d'une famille où la femme était alitée par un accouchement. [22] Marie-Adéla Bouchard est placée par sa belle-mère dans une famille de sa parenté où elle reçoit un salaire dérisoire. Plusieurs vont noter, par ailleurs, le climat familial dans lequel s'opèrent ces emplois habituellement de courte durée et qu'on fait par nécessité ou en attendant le mariage.
Si plusieurs textes font état de l'usage personnel d'une partie du salaire pour l'achat de vêtements et la préparation d'un trousseau, certaines filles donnent une portion de leurs revenus à leur famille, bien que les pratiques semblent diversifiées à cet égard. Les remises d'argent peuvent constituer des dons, des cadeaux ou se faire par une pension. On devine ici et là les possibilités d'autonomie que pouvait représenter un salaire.
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Le temps des fréquentations
La jeune fille qui travaille ou qui quitte le couvent acquiert le statut de fille à marier ou de débutante, et pourra recevoir des prétendants à la veillée. Bien que la sociabilité de la jeunesse présente une grande diversité selon les milieux sociaux, dans presque tous les souvenirs on rappelle, parfois avec humour, plus rarement avec ressentiment, de quelle façon la famille oriente les rencontres de jeunes gens et s'immisce dans les fréquentations. Au-delà d'une surveillance étroite et de codes assez stricts qui régissent les rencontres entre les sexes, la famille exerce une influence, la plupart du temps indirecte, sur le choix des conjoints. Comme l'avait noté Miner à Saint-Denis, [23] c'est le rôle important des liens de parenté dans la structuration des rapports sociaux et dans les sociabilités de loisirs qui accentue sa présence dans la formation des alliances. [24] Bien que les loisirs de cette époque fassent appel à une variété étonnante d'activités et facilitent les rencontres de conjoints, la maison est le cadre principal des fréquentations plus assidues et permet aux parents, parfois même à toute la famille, d'en influencer le cours. L'Église exerce aussi une influence et son action n'est pas toujours concertée avec celle des parents, à moins qu'il ne s'agisse des prêtres de la famille, tel le grand vicaire Gravel qui devient un véritable entremetteur lorsqu'il s'agit de marier sa petite-nièce. [25] Si notre documentation fait état de quelques cas d'interventions assez obvies pour qu'on parle d'entremetteurs, de plusieurs mariages endogames et de renchaînements d'alliance, les témoignages font voir la latitude assez grande des individus, les ruses des jeunes filles et les recours aux complices pour se soustraire aux fréquentations non désirées ou se marier contre le gré de ses parents. Plusieurs textes témoignent de la part des sentiments amoureux dans les mariages, mais quelques écrits soulignent que des liens formés trop rapidement ou suivant les interventions d'autrui laissaient peu de place au romantisme. Les notions de destinée et de Providence sont évoquées à quelques reprises pour désigner ces facteurs enclenchant la formation des alliances. « La Providence change le cours du destin », « le mariage est un coup de dé », « on marche vers sa destinée ». Qu'elles soient positives ou néfastes, ces figures du destin renvoient au changement majeur de statut qui suit le mariage. Derrière ces notions se profilent aussi, en quelques cas, l'action décisive des familles, dont la présence multiforme se confond avec les jeux de l'amour et du hasard. Mais peu importe son rôle actif ou effacé, la famille se retrouve dans les préparatifs du mariage, la mère secondant sa fille ou sa nièce dans la confection d'un trousseau ou dans les achats que suscitent la noce.et l'installation du jeune ménage.
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Les récits de mariage
Par ses aspects cérémoniels et les préparatifs, auxquels la parenté des deux lignées participe, le mariage constitue un temps fort de l'existence, marquant éloquemment l'attribution d'un nouveau statut et l'accession à une étape majeure de l'existence féminine. Il est peu de souvenirs qui ne s'attardent, avec plaisir semble-t-il, à ce rite de passage où même la température est un signe qu'on interprète. Peu importe le degré de richesse de leurs parents, la plupart des femmes en soulignent les aspects festifs, avec cette recherche de l'extraordinaire, toutefois contenue par des normes enjoignant de ne pas outrepasser son statut social. Les changements de modes dans les robes de mariées, qui passent du noir au blanc avec une gamme de couleurs, de tissus et d'ornements, viennent nous rappeler que le corpus couvre une assez longue période et concerne plusieurs milieux. De même, la petite histoire de ces rituels révèle à la fois de nombreuses survivances des noces traditionnelles qui signent le départ d'une famille et l'entrée dans une autre, mais aussi le bouleversement de ces rites par l'adoption d'une coutume des temps modernes : le voyage de noce. Dès le XIXe siècle pour les bourgeois et au tournant du XXe pour les couples de milieu populaire, on commence à adopter cette pratique. Beaucoup accomplissent ces voyages en suivant la route de la parenté, qui, en ces temps de migration, pouvait mener aussi bien dans les terroirs d'origine que chez les voisins des États-Unis. À mesure qu'on se rapproche des années 1930 et 1940, les couples opteront plutôt pour un séjour à l'hôtel, ce qui révèle l'importance accrue, à la fin de la période, de la notion de conjugalité.
Pour un grand nombre de femmes et d'hommes, les débuts de la vie conjugale se déroulent encore dans un contexte qui favorise peu la solitude du couple et les exclusives de la vie à deux. Ces sujets relevant de la vie intime ne sont abordés qu'indirectement. Par ailleurs, le silence généralisé entourant la sexualité avant le mariage, un silence particulièrement marqué entre mères et filles mais moins absolu concernant les pairs, laisse encore place peut-être à la socialisation du groupe dans la vie du jeune couple, selon des modèles traditionnels utilisant le rire et les facéties. Certains textes y font allusion. D'autres laissent entendre que l'apprentissage de l'amour pouvait se faire avec agrément une fois qu'on échappait à la tutelle de la famille.
Un certain nombre de témoignages révèlent ce phénomène bien mal connu des débuts du mariage, lorsqu'il s'agissait d'« entrer dans une famille », et laissent deviner que les adaptations pouvaient concerner, en plus d'un lien conjugal à créer, une belle-mère à amadouer sinon toute une famille à séduire. « Je rentrais dans une famille », écrit Théodora Dupont. « À cela Maman m'avait préparée. » [26] Celles qui évoquent cette situation sont surtout les nouvelles [265] mariées qui vivront en milieu rural, mais la rareté des logements et des difficultés particulières à l'époque de la crise multiplient les cas de cohabitation des générations ainsi que les ménages complexes jusque dans les années 1940. Bien sûr, ce modèle de mise en ménage semble moins répandu chez les jeunes bourgeois ou chez les ouvriers, même si la parenté habite souvent la porte à côté.
Pour la plupart, c'est de façon temporaire qu'on s'installe chez un beau-frère, chez les parents de son mari. On mentionne la gêne inhérente à ces situations, les tensions et parfois les conflits dramatiques qui surgissent au sein des familles et des couples. Si certaines femmes en soulignent des avantages pour ce qui concerne l'apprentissage du travail ménager et l'entraide (des liens harmonieux sont alors créés entre la belle-mère et sa bru), celles qui quittent ce contexte communautaire après quelques mois aimeront se retrouver dans un logis où l'on est « enfin seuls ». Cette vie à deux est de courte durée, car le premier enfant ne tarde habituellement pas à s'annoncer et la famille s'apprête à venir à la rescousse.
La maternité
La première grossesse, dans un contexte où le mariage est associé à la procréation au point où l'union stérile constitue presque une anomalie, semble être accueillie avec plaisir et même désirée. L'enfant s'annonce habituellement dans l'année qui suit le mariage et le moindre retard suscite l'anxiété des femmes et les commentaires de l'entourage. Est-ce, comme on l'a cru, le puritanisme très répandu qui explique le silence recouvrant ces événements ou serait-ce également le désir d'échapper à la surveillance du groupe sur une vie intime mal protégée ? Souvent le couple taira un certain temps l'état de grossesse. D'autres se font un plaisir d'en répandre la nouvelle. À l'égard des enfants, le silence et les explications données au sujet de la naissance laissent transparaître cette aura de mystère propre aux choses sacrées ainsi que des dimensions d'angoisse et de peur devant l'inconnu et les souffrances de l'accouchement. Un tel silence demeure malgré tout étonnant dans un contexte où la maternité était socialement acceptée sinon glorifiée.
Nombre d'exemples font voir jusqu'à quel point la socialisation de la fillette et de la jeune fille était axée vers le maternage. Les rites du mariage lui attribuent solennellement les rôles de femme mariée. Toutes les femmes s'attendent de prendre en charge les tâches ménagères et de s'occuper du bien-être du mari et des enfants à naître. À cet égard, le mariage constitue un véritable rite d'institution qui leur signifie publiquement leur identité. [27] Mais la maternité semble constituer le nœud de l'existence des femmes et c'est le premier enfant qui les confirme dans [266] leur identité de femme adulte. [28] La grossesse les rapproche de leur mère et le processus de la naissance resserre les liens de la communauté féminine autour de l'enfant, les gestes de l'entourage constituant une véritable socialisation de la jeune femme à son rôle maternel.
Signe des sentiments de joie associés à l'attente du premier-né, la plupart des souvenirs détaillent les pièces du trousseau auquel les plus pauvres trouveront moyen d'ajouter quelques vêtements plus luxueux, qu'elles ornent d'un point de broderie ou d'une fine dentelle. Les femmes de la parenté immédiate, mais en particulier la mère de celle qui attend un enfant, apportent leur aide à la confection de ce trousseau, qu'il s'agisse de le coudre ou, comme les sœurs de Marie Asselin-Proulx, d'en faire cadeau à leur sœur et à leur mère à même leurs minces revenus d'ouvrières. [29]
À l'égard des naissances subséquentes, les attitudes semblent moins uniformes, l'enthousiasme moins unanime, bien que les souvenirs des mères avouent peu de rejets explicites ni même de réserves sur le nombre de leurs enfantements. Agnès Larin rappelle que, malgré les fatigues liées à la naissance, sa mère paraissait toujours heureuse de sortir le linge du bébé. Tout avait l'air d'une fête car on sortait le linge le plus précieux de la grande armoire rouge de la cuisine. [30] Les femmes dont la famille est tôt interrompue font peu de commentaires à cet égard. Dans quelques cas, on invoquera alors des raisons de santé pour expliquer la taille réduite de la famille. Les mères de famille nombreuse adhèrent habituellement aux discours d'une Église qui leur intimait de peupler le ciel mais se défendent bien de n'avoir fait que leur devoir. Rétrospectivement, ce rôle qui fut le leur semble valorisé, les enfants tendrement aimés.
À une époque où la contraception en est à ses premiers balbutiements et fait l'objet de réprobation cléricale, les enfants naissent selon un processus qui apparaît à certaines inéluctable. La mère de Renée Morin, mariée en 1896, aurait avoué tard dans sa vie « que les maternités répétées [...] avaient été au début de son mariage un sujet de découragement ; mais en bonne catholique elle s'était bientôt résignée à sa condition de femme et de mère telle qu'on la concevait à l'époque. Une femme devait être soumise à son mari et accepter les enfants que le bon Dieu lui envoyait. » [31] Si plusieurs autobiographies font écho à cette conception de la vie où la procréation est affaire de destinée, qu'on l'envisage en [267] termes de bénédictions divines ou de devoir à poursuivre, des allusions à l'usage de la contraception ainsi que le recours à des moyens draconiens : chirurgie ou abstinence, lorsque la santé de la mère est menacée, laissent entrevoir le début d'une nouvelle façon d'envisager la procréation. [32] Les récits concernant les maternités nombreuses révèlent par ailleurs les situations souvent dramatiques auxquelles sont confrontées certaines femmes, et leurs réactions, en particulier dans les cas de maladies personnelles ou lorsque des épidémies décimaient leur famille. Si quelques textes révèlent que les naissances et les maladies alimentaient des sentiments résignés ou dépressifs ainsi qu'une notion fataliste de la Providence, ces récits font surtout apparaître à quel point l'enfant qui naît est pris en charge par tout l'environnement familial.
La naissance
Le processus est inauguré dès l'accouchement. En cette époque de transition, et ce jusque vers la fin des années 1930, les naissances se déroulent à la maison mais avec l'assistance habituelle d'un médecin. Jusqu'à ce que l'hôpital prenne la relève, il semble encore d'usage que la mère de l'accouchée se rende assister sa fille (ou que celle-ci se rende chez sa mère surtout lors d'une première naissance). Lorsqu'une autre femme la remplace, on notera qu'elle agit comme une mère. Le mari est parfois présent, comme le suggèrent quelques commentaires révélant une situation analogue à celle observée aux États-Unis à la même époque. [33] Outre cette assistance, la parenté ou le voisinage accueille le reste de la maisonnée, en particulier les enfants à qui on cache les détails de l'événement, leur expliquant la naissance et la maladie de la mère par des récits symboliques sur la visite des « sauvages ». Ces fables, aussi répandues à la ville qu'à la campagne, trahissent peut-être, comme l'avait suggéré Miner, des réticences inconscientes concernant le désir d'enfant et la crainte des dangers encourus par les femmes en couches. [34]
Peu importe les difficultés qu'il suscite, l'enfant semble bien accueilli par sa mère et par toute la maisonnée. Il est rare, en ce début du siècle, qu'une femme se [268] retrouve sans aide au lendemain d'une naissance. Si elle ne peut recourir à une domestique salariée, elle reçoit l'aide de sa mère, d'une jeune belle-sœur ou d'une nièce pendant le mois qui suit. Ces soutiens à l'accouchée créent des liens intenses entre celles qui y participent et il arrive que la jeune fille devienne la marraine de l'enfant. Laurette Bouchard, venue secourir sa belle-sœur, repartira même avec son filleul, lorsque la mère devenue veuve est incapable d'en prendre soin. [35]
La prise en charge des enfants par des familles autres que les parents naturels est un phénomène fréquent en cette fin du XIXe et au début du XXe siècle. Tous les récits fourmillent d'exemples où de jeunes enfants quittent le foyer d'origine pour être éduqués et entretenus par les grands-parents, oncles et tantes, parfois des amis ou des voisins. Ces déplacements sont ordinairement justifiés par le décès du père ou de la mère ou par la maladie de l'un des deux. De tels gardiennages, s'ils se prolongeaient, pouvaient donner lieu à des adoptions de fait ou encore à des drames et même à des litiges aboutissant devant les tribunaux. Du côté des parents, à travers l'évocation des sentiments ressentis lors de tels événements (culpabilité, dépossession), on saisit un versant négatif de cette vie communautaire, qui constituait par ailleurs un soutien essentiel aux maternités répétées.
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CONCLUSION
Les écrits autobiographiques mettent en évidence la diversité des sentiments individuels qui se greffent sur des modèles de vie familiale que des études précédentes avaient déjà identifiés. Documentant à nouveau l'existence de ces modèles, ces écrits permettent d'en analyser le fonctionnement et le retentissement sur les itinéraires féminins. En particulier, notre documentation contient maintes variantes de cette « culture de la solidarité », comme l'appelle Gérard Bouchard dans un article récent, culture à laquelle il attribue en partie la survivance d'une dynamique communautaire dans les régions marginales, dans les zones de migrations et présumément dans la société globale au cours des premières étapes de modernisation du Québec. [36]
À cette culture de la solidarité, il faut supposer pourtant divers mécanismes d'inculcation et de transmission des valeurs et des modèles qui en maintiennent l'usage au-delà des avantages relevant d'une logique utilitaire. Surtout centrée sur l'existence des femmes et laissant sans doute de côté des dimensions [269] importantes du phénomène, notre étude fait apparaître à quel point les itinéraires féminins sont imbriqués dans ces objectifs de solidarité et de reproduction du groupe, depuis la tendre enfance, où les fillettes sont socialisées à prendre en charge les plus petits, jusqu'à leur adolescence, où plusieurs sont déléguées au chevet des accouchées, en attendant de se marier et de devenir à leur tour des mères dévouées à leur progéniture. Les naissances et les maladies qui ponctuent l'existence des femmes apparaissent comme autant d'occasions de vivifier les liens de parenté. Les enfants qu'on s'échange dans ces circonstances sont autant d'intermédiaires de cette affectivité qui circule au sein des réseaux de familles apparentées. La procréation apparaît donc comme un facteur essentiel de la cohésion du groupe, avant même qu'on n'examine les méthodes d'éducation pouvant susciter des habitudes d'entraide et que nous n'avons ici abordées qu'à travers la socialisation précoce au travail.
Si la mère apparaît importante dans le maintien d'une culture de la solidarité au sein de chaque famille, toutes les femmes, en tant qu'elles jouent le rôle de mère, entretiennent cette solidarité. Quant aux effets de ces comportements, il y aurait peut-être lieu d'examiner davantage l'influence de la diffusion du rôle maternel sur l'attachement au groupe.
Du point de vue des femmes et de leurs parcours individuels, la lecture de leurs témoignages contient des analyses lucides des situations complexes de ce mode de vie, avec ses éléments de générosité et son organisation intelligente et souvent créatrice du quotidien, mais aussi avec ses aspects de contraintes, de conflits et de peines. Dans l'ensemble, on ne saurait imaginer système plus cohérent de socialisation à un rôle presque unique, depuis la formation de la petite fille jusqu'à l'ignorance de la sexualité et des aléas de la reproduction pour ce qui est des adolescentes, sans compter les légitimations religieuses auxquelles plusieurs des autobiographies font référence. Pourtant, à côté des contraintes idéologiques à la procréation, force est de constater que les rapports familiaux observés facilitaient singulièrement l'exercice de la maternité et l'élevage d'enfants dont s'occupaient plus d'un adulte.
Malgré des différences inhérentes aux appartenances sociales comme à la singularité des vies individuelles, les étapes de l'existence des femmes semblent en général vécues à l'intérieur d'une vision du monde qui relève d'un temps destin plutôt que d'un temps géré. [37] Pourtant, au sein même de ces écrits, on voit l'émergence d'une autre vision du monde qui plante ses racines en plus d'un endroit. La contraception, qui semble en usage dans quelques familles bourgeoises dès le début du siècle, trouve des adeptes en plusieurs milieux à mesure qu'on se rapproche des années 1940. L'accouchement à l'hôpital apporte une sécurité [270] appréciée de plusieurs, même si les solidarités en sont rétrécies. Les enfants engendrés en petit nombre continuent de rapprocher les générations et c'est souvent à leur intention qu'on rédige ses souvenirs.
Denise Lemieux Lucie Mercier
Institut québécois de recherche sur la culture.
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[1] Glen H. Elder, Jr., « History and the family : The discovery of complexity », Journal of Marriage and the Family, XLIII, 3, août 1981 : 489-519.
[2] Gérard Bouchard, « L'étude des structures familiales pré-industrielles : pour un renversement des perspectives », Revue d'histoire moderne et contemporaine, XXVIII, octobre-décembre 1981 : 545-571.
[3] Tamara K. Hareven, « The dynamics of kin in an industrial community », dans : John Demos et Sarane Spence Boocock (eds), Turning Points, Historical and Sociological Essays on the Family, Chicago, The University of Chicago Press, 1978 : 151-182.
[4] Jacques Rouillard, Ah les États ! Les travailleurs canadiens-français dans l'industrie textile de la Nouvelle-Angleterre d'après le témoignage des derniers migrants, Montréal, Boréal Express, 1985, 155p.
[5] La famille québécoise avant 1940 est surtout connue par des monographies rurales qui, de Léon Gérin à Horace Miner, constituent des études de cas précieuses mais peu nombreuses pour dégager une vue d'ensemble de ses transformations.
[6] Théodora Dupont, Mes mémoires, La Pocatière, Musée François-Pilote, 1980, 712p.
[7] Les Gravel, correspondance recueillie par Lucienne Gravel, Montréal, Boréal Express, 1979. Voir la dédicace.
[8] Julienne Barnard, Les mémoires Chapais, tome III, (1875-1888), Montréal, Fides, 1964. Voir la préface de Marcel Trudel qui souligne l'originalité du genre de l'ouvrage.
[9] Nicole Gagnon, « Données autobiographiques et praxis culturelle », Cahiers internationaux de sociologie, LXIX, 1980 : 291-305.
[10] Ghislaine Meunier-Tardif, Vies de femmes, Montréal, Libre expression, 1981, 198p.
[11] Pour une interprétation psychanalytique des effets de ce maternage sur l'appartenance au groupe, voir l'interprétation donnée par E.H. Erikson au sujet de la société russe dans Enfance et société, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1959, p. 242.
[12] Marguerite Tremblay, Un beau règne. Prix du quatrième concours du mensuel « Le troisième âge », Montréal, Libre expression, 1983, pp. 79-80.
[13] Jos-Phydime Michaud, Kamouraska, de mémoire. Souvenirs de la vie d'un village québécois, recueillis par Fernand Archambault, Montréal, Boréal Express, 1981, pp. 38-42.
[14] Pionnières de chez nous, Fédération des femmes canadiennes-françaises de la paroisse Saint-Jacques de Hanmer, Hanmer, L'Ami du peuple, 1982, p. 143.
[15] Jeannette Vekeman-Masson, Grand-maman raconte la Grosse île, Québec, La Liberté, 1981, pp. 135-137.
[16] Monique Leyrac, Mon enfance à Rosemont, Montréal, Domino, 1980, pp. 159-160.
[17] Lucille Drolet-Roy, Tous ces souvenirs... qui me rajeunissent, Québec, Roy-Richard, 1982, p. 33.
[18] Sur la notion de stratégie familiale et son application à des situations similaires, voir l'interprétation de Louise Tilly, « Individual lives and family strategies in the French proletariat », Journal of Family History, été 1979 : 137-151.
[19] Jos-Phydime Michaud, op. cit., p. 177. Marie-Anna A. Roy, Le miroir dupasse, Montréal, Québec/Amérique, 1979, pp. 73-74.
[20] Bettina Bradbury, « The fragmented family : Family strategies in the face of death, illness and poverty, Montreal 1860-1885 », dans : Joy Parr (éd.), Childhood and Family in Canadian History, Toronto, McClelland and Stewart, 1982 : 109-128.
[21] Jos-Phydime Michaud, op. cit., p. 142. Lina Madore, Petit coin perdu, 2e édition, Rivière-du-Loup, Castelriand, 1979, chapitre 17. Les domestiques, comme les employées d'usine, ont parfois moins que quatorze ans.
[22] Lina Madore, op. cit., p. 80.
[23] Horace Miner, Saint-Denis, A French-Canadian Parish, Chicago, The University of Chicago Press, 1963, p. 211. [La version française est disponible dans Les Classiques des sciences sociales sous le titre : Saint-Denis : un village québécois. JMT.]
[24] Voir aussi : Daniel Fournier, « Consanguinité et sociabilité dans la zone de Montréal au début du siècle », Recherches sociographiques, XXIV, 3, 1983 : 307-323.
[25] Les Gravel, op. cit., pp. 140-141.
[26] Théodora Dupont, op. cit., p. 90.
[27] Selon la conception de Pierre Bourdieu, « Les rites comme actes d'institution », Actes de la recherche en sciences sociales, 43, juin 1982 : 58-63.
[28] Yvonne Verdier, Façons de dire, façons défaire. La laveuse, la couturière, la cuisinière, Paris, Gallimard, 1979, p. 59.
[29] Marie Asselin-Proulx, Confidences d'une Abitibienne, Val d'Or, MEERA, 1986, p. 75, p. 87. (« Jean L'Houmeau ».)
[30] Agnès Larin, D’où viens-tu, Agnès ? Montréal, Bergeron, 1980, p. 46.
[31] Renée Morin, Un bourgeois d'une époque révolue. Victor Morin, notaire, 1865-1960, Montréal, Jour, 1967, pp. 139-140.
[32] Marie Lavigne met l'accent sur la diversité des comportements que laisse supposer une diminution graduelle des taux de natalité amorcée dès la fin du XIXe siècle. (« Réflexions féministes autour de la fécondité des Québécoises », dans : Nadia Fahmy-Eid et Micheline Dumont, Maîtresses de maison, maîtresses d'école, Montréal, Boréal Express, 1985 : 319-338.)
[33] J. Jill Suitor, « Husbands' participation in childbirth, a Nineteenth-Century phenomenon », Journal of Family History, VI, 3, automne 1981 : 278-293. Jean-Philippe Gagnon note la présence occasionnelle du mari dans son enquête sur Les rites de la naissance à Charlevoix, Montréal, Leméac, 1979, p. 76. Selon Suitor, le recours au médecin (peu généralisé à Charlevoix mais majoritaire dans nos sources, même pour le XIXe siècle) aurait favorisé la présence du mari dont le rôle de réconfort révèle de nouvelles formes de conjugalité.
[34] H. Miner, op. cit., p. 170.
[35] Laurette Bouchard, Courtepointe d'une grand-mère, Hull, Asticou, 1981, p. 20.
[36] Gérard Bouchard, « La dynamique communautaire et l'évolution des sociétés rurales québécoises aux 19e et 20e siècles. Construction d'un modèle », Revue d'histoire de l'Amérique française, XL, 1, été 1986 : 51-71.
[37] Louis Roussel et Alain Girard, « Régimes démographiques et âges de la vie », Les âges de la vie, 1, Paris, PUF, 1982 : 14-23. (« Cahiers de l'INED », 96.)
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