CE PETIT OUVRAGE trouve son origine dans un cours professé à l'Université de Lausanne durant l'année académique 1960-61. Tout en laissant subsister l'appareil bibliographique, je me suis appliqué à alléger l'exposé des inévitables lourdeurs et répétitions de la présentation scolaire. Mais le poids des habitudes acquises rend une telle transposition difficile.

Je voudrais dire un mot des raisons qui me conduisirent à donner ces leçons et me poussent à en livrer les éléments au public. Nous assistons actuellement à la pénétration dans l'analyse sociale de notions auxquelles leur apparente nouveauté vaut un prestige certain : société opulente, néo-capitalisme, « américanisation » de la classe ouvrière, « relations humaines, », « dépolitisation », fin des idéologies... Or, en se reportant aux sources, on constate souvent la fragilité des concepts ainsi utilisés et des imposantes déductions qui en sont tirées.

Le but premier de cet essai est de procéder à un examen critique de ces conceptions qui laissent des traces dans la pensée des hommes même si leurs promoteurs, satisfaits d'un effet de surprise, tendent assez vite à les abandonner. Il s'agit de ramener ces spéculations à une juste échelle et de restituer à la polémique quotidienne ce qui n'appartient pas à la recherche scientifique.

Pendant les séminaires qui ont accompagné le cours, mes étudiants lausannois m'ont aidé, par leurs critiques et suggestions, à réaliser cette tentative d'évaluation : j'ai conscience de m'acquitter d'une dette en leur dédiant ces pages.

Lausanne, juillet-août 1961