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Collection « Les sciences sociales contemporaines »
Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Pascal Millet, Don et accompagnement professionnel dans l’action sanitaire et sociale. Université de Franche-Comté, cours EPSSEL sur le deuil et les soins palliatifs, 2006. [Autorisation accordée par l'auteur le 16 septembre 2005.] Introduction Marcel Mauss a initié avec « Essai sur le don » la recherche sur l’importance du don dans la société. Toutefois, à cette date, la démarche était surtout anthropologique et portait sur les manifestations du don dans des sociétés particulières (le titre complet était : Essai sur le don, forme et raison de l’échange dans les sociétés archaïques), et notamment autour de pratiques spécifiques comme le potlatch ou le kula (voir en annexe 1 -Lexique- la signification de ces mots). Ce n’est que plus récemment que des auteurs ont montré que le mécanisme du don était un mécanisme social universel et d’usage quotidien dans toutes les cultures, y compris notre culture occidentale moderne, notre culture « marchande ».(toutefois on peut consulter en Annexe 4 la conclusion de l’article de M Mauss qui montre qu’il était bien conscient de cet aspect). Comme nous le verrons le mécanisme du don est surtout attaché à la sphère privée, familiale, en opposition avec la sphère publique, où prédominerait la relation rationnelle d’intérêt et de recherche de maximisation de cet intérêt personnel (socialité primaire versus socialité secondaire). Or, les soignants sont souvent à l’interface de ces deux sphères, publique pour le service rendu, technique, et privée dans tout ce qui est accompagnement, relation interpersonnelle avec les patients. C’est pourquoi leur pratique est marquée par une interpénétration des mécanismes commerciaux et de ceux du « don de soi », interpénétration souvent mal analysée par les protagonistes eux-mêmes, et par-là menant à une confusion relationnelle. Ce texte court, trop court certainement, se propose de résumer rapidement ce que l’on sait actuellement de cette problématique. Il propose quelques pistes supplémentaires (et personnelles) tirées de ma pratique des techniques de psychothérapie dans le deuil et le soin aux toxicomanes. À vrai dire, les idées qui seront exposées devraient être des banalités, tant le mécanisme du don est apparent dans nos sociétés. Toutefois l’expérience montre que ces idées sont encore mal connues dans le public général et même spécialisé. Quelques exemples : Votre mère (femme, sœur, amie...) vous offre un CD de votre chanteur préféré. Vous la remerciez. Quelques temps après, vous trouvez une reproduction d’une peinture qu’elle aime, vous lui offrez. Elle vous remercie. Dans les deux cas, il ne viendrait pas à l’esprit du destinataire du cadeau de proposer immédiatement un remboursement du prix d’achat. De même le prix de la peinture n’est pas a priori comparable à celui du CD. Simplement, comme on dit, « les petits cadeaux entretiennent l’amitié ». Votre vendeur habituel de CD vous signale un nouveau CD de votre chanteur préféré. Vous lui achetez. Comme vous êtes un bon client, pour vous « fidéliser », il vous fait une ristourne de 10%. À quelques temps de là, vous trouvez un vendeur de CD moins cher. Vous changez sans scrupule de fournisseur habituel. Après tout votre relation avec le premier vendeur n’était que « commerciale ». Votre vendeur habituel de CD vous signale un nouveau CD de votre chanteur préféré. Comme c’est aussi un fan de ce chanteur et que vous faites tous deux partie de son fan-club, il vous l’offre gratuitement. Vous le remerciez. A quelques temps de là, vous trouvez un vendeur de CD moins cher mais vous continuez à acheter chez votre premier vendeur, parce que votre relation avec lui « dépasse le commercial ». Ces trois histoires banales illustrent bien trois situations différentes : le don/contre-don, la relation rationnelle d’échange (commerciale, juridiquement établie etc..), la relation mixte. Examinons les l’une après l’autre.
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