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Collection « Les sciences sociales contemporaines »
Une édition électronique réalisée à partir de l'article d'Alvaro Pires, “La recherche qualitative et le système pénal. Peut-on interroger les systèmes sociaux ?” Un article publié dans Sociologie pénale: système et expérience. Pour Claude Faugeron. Textes rassemblés et présentés par Dan Kaminski et Michel Kokoreff, pp. 173-198. Les Éditions Erès, 2004, 334 pp. Collection Trajets. [Autorisation formelle accordée par l'auteur le 2 août 2006 de diffuser ce texte dans Les Classiques des sciences sociales.] Introduction Le but de cet essai est de faire une réflexion exploratoire sur la question suivante : l'entrevue peut-elle contribuer d'une façon plus directe à la connaissance des organisations et des systèmes sociaux ? Peut-elle, plus précisément, contribuer à la connaissance des systèmes de pensée des organisations et des systèmes plus larges (comme le système pénal), aussi bien qu'à celle de leur autoportrait identitaire ? Par « une façon plus directe », je veux indiquer, comme nous le verrons, une autre manière de construire l'objet de recherche, d'interpréter les résultats et de concevoir l'entrevue. L'approche épistémologique, théorique et méthodologique présentée ici s'inspire, d'une part, de la théorie des systèmes communicationnels (Luhmann, De Giorgi, Teubner, etc.) et, d'autre part, des contributions de Foucault. Écartons d'emblée un malentendu. En ce qui me concerne, il ne s'agit pas de proposer l'abandon des autres objets ou perspectives, Il s'agit plutôt de signaler qu'il y a certaines dimensions des organisations et des systèmes sociaux que nous ne ciblons pas - ou que nous ne connaissons pas - encore assez bien lorsque nous les approchons par des entrevues (ou par l'observation in situ) telles qu'elles sont conçues présentement. L'objectif est alors d'attirer l'attention sur une alternative ou sur un ajout possible par rapport au choix des objets d'étude. Cette approche n'est utile que si le sociologue veut observer comment les systèmes sociaux observent et s'auto-observent, pensent et construisent leur monde et leur propre identité, modèlent et envoient des « signaux de sortie » (Born et Goldschmidt, 1997) qui peuvent être repris dans une grande variété de pratiques communicationnelles. J'invite alors à explorer, du point de vue d'une recherche qualitative par entrevues, l'« hypothèse absurde » posée par la théorie des systèmes communicationnels selon laquelle les systèmes sociaux sont, eux aussi (et non seulement les individus), des « systèmes observateurs » (Observing Systems ; von Foerster). À maints égards, mes réflexions ici sont encore tâtonnantes et en cours d'élaboration à proprement parler. C'est la préparation de cet hommage à mon ancienne professeure Claude Faugeron qui m'a, pour ainsi dire, catapulté « accidentellement » sur ce sujet. En effet, j'ai décidé d'apporter ma contribution en traitant des entrevues de recherche appliquées à la justice pénale. Au début, ce choix n'avait rien à voir avec le thème retenu ; il avait été fait spontanément parce que je dois à Claude ma formation en recherche par entrevues non directives. Elle m'a aussi accompagné dans mes premières réflexions épistémologiques sur le rapport entre le qualitatif et le quantitatif. Ce n'est pas tout. Encore aujourd'hui, au début de la section consacrée aux entrevues dans mes cours de méthodologie, je rappelle aux étudiants que l'enseignement qui suivra reprend, à maints égards, mes notes écrites dans le cadre de la formation qui m'a été donnée par Claude. D'où mon choix de revenir à ce thème en son hommage. Mais il y avait un hic. Comment pouvais-je rendre hommage à ma professeure d'entrevues en écrivant un texte sur les entrevues ? Rien de plus embarrassant, puisque j'avais la nette impression qu'après 25 ans je n'avais rien appris de plus par moi-même sur les entrevues au plan théorique ou pratique. Que faire alors ? Devais-je rappeler à Claude ses notes de cours dans le vague espoir qu'elle les ait oubliées et puisse en tirer un plaisir nostalgique ? Or, je travaillais à ce moment sur la théorie des systèmes pour résoudre certaines énigmes trouvées dans le cadre d'une recherche socio-historique sur le système pénal. Vous pouvez deviner la suite : une association d'idées et la décision de mettre sur pied une recherche par entrevues sur l'autoportrait identitaire du système pénal. Et cet article doit être lu d'autant plus comme un work in progress que les entrevues n'ont pas été encore entièrement confectionnées et moins encore empiriquement testées. Mais le pari me paraît prometteur.
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