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Luc Racine
Sociologue, Département de sociologie, Université de Montréal
“Accès différentiel au matériel de jeu
chez des enfants d’âge scolaire.”
Un article publié dans la revue Sociologie et sociétés, vol. 10, no 1, avril 1978, pp. 65-86. Numéro intitulé: “Le développement des relations sociales chez l'enfant”. Montréal, département de sociologie de l'Université de Montréal. Les Presses de l'Université de Montréal.
- I. Introduction
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- II. Protocole d'observation ?
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- A) Conditions d'observation
B) Les groupes observés
- C) Transcription des données
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- III. Mode de présentation et d'analyse des données
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- A) Les relations dyadiques (Sa)
B) Distribution des crayons entre les membres du groupe (Sb)
- C) Les crayons pris sur la table (Pn)
- D) Fréquences
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- IV. Résultats
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- A) Fréquences et écarts hiérarchiques
B) Corrélations de rang
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- V. Interprétation et conclusion
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- Bibliographie
- Annexe: la relation entre les prises de crayons et le temps
- Résumé / Summary / Resumen
I. INTRODUCTION
Jusqu'à aujourd'hui, la plupart des études consacrées à l'analyse des rapports hiérarchiques dans la vie sociale enfantine s'attachent à démontrer l'importance des hiérarchies de dominance (Gellert, 1961 et 1962; Hollis et Gunnell, 1965; Price, 1967; Paluck et Esser, 1971 et 1972; McGrew, 1972; Smith, Connolly et Fleming, 1972; Edelman et Omark, 1973; Smith, 1974; Omark, Omark et Edelman, 1975; Omark et Edelman, 1975 et 1976; Abramovitch, 1976; Strayer et Strayer, 1976; Savin-Williams, 1976 et 1977; Sluckin et Smith, 1977).
Cette notion de dominance est la plupart du temps directement empruntée à l'éthologie des primates : on considère les diverses modalités des comportements d'attaque, de menace, de fuite, d'évitement et de soumission entre deux individus, le dominant étant celui qui l'emporte le plus souvent dans de telles interactions «agonistiques» (Kaufmann, 1967; Kummer, 1967; Sade, 1967; Gartlan, 1968; Berstein, 1970; Jolly, 1972; Simonds, 1974). Les rapports agonistiques peuvent avoir comme enjeux principaux la place occupée, les partenaires sexuels, la nourriture, l'arbitrage des querelles entre membres du groupe (Wilson, 1975).
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L'épouillage mutuel et le rôle directeur dans la conduite des déplacements de la troupe (leadership) sont aussi des phénomènes qui revêtent une dimension hiérarchique, bien qu'ils ne puissent aisément être classés comme agonistiques (Kummer, 1971; Hinde, 1974).
La notion de hiérarchie de dominance a été récemment fort critiquée, on a remis en cause aussi bien l'homogénéité des phénomènes sous-jacents que leur explication en termes adaptatifs (Benedict, 1969; Callan, 1970; Crook, 1970; Richards, 1974; Rowell, 1974; Syme, 1974).
Quand, par exemple, dans une troupe, l'animal qui dirige les mouvements des autres vers les points d'abri et d'approvisionnement n'est pas le même que celui qui se situe au sommet de la hiérarchie agonistique, cela laisse croire que le phénomène hiérarchique ne se laisse pas réduire à sa seule facette agonistique. Il en va de même lorsque l'animal qui est en premier rang pour l'épouillage n'est ni le leader ni l'animal le plus souvent vainqueur dans les rencontres agonistiques (Kummer, 1971; Hinde, 1974).
Quant aux explications du comportement agonistique et hiérarchique en termes d'adaptation, elles ne sont pas entièrement convainquantes. Le plus souvent, on pose que les dominants sont mieux adaptés puisqu'ils tendent à avoir de meilleures chances de survie. Cela se vérifie parfois, mais pas toujours. Même si cela était, il resterait à expliquer pourquoi les dominants ne finissent pas, du point de vue génétique, par éliminer complètement les dominés (Hinde, 1974; Rowell, 1974; Wilson, 1975).
Une autre explication veut que l'organisation hiérarchique ait comme fonction de diminuer et de régulariser l'agressivité intra-spécifique - et d'assurer ainsi de meilleures chances de survie pour le groupe en évitant que ne se consomment trop de temps et d'énergie dans les querelles internes. Bien qu'elle ait l'indéniable avantage de ne pas rendre les dominés à la limite inutiles, cette explication n'est pas plus solidement établie que la précédente (Hinde, 1974; Rowell, 1974; Savin-Williams, 1977). Dans le cas des primates, on est allé jusqu'à suggérer que les hiérarchies observées étaient presqu'entièrement le produit artificiel des conditions de captivité ou de semi-captivité (Rowell, 1974), ce qui permet de s'interroger sur leur soi-disant valeur adaptative.
Il demeure toutefois incontestable que, dans la plupart des espèces, certains individus ont une priorité d'accès aux ressources essentielles : espace pour la reproduction et les soins aux petits, partenaires sexuels, abri et nourriture (Wilson, 1975). Même si les explications courantes du phénomène d'accès différentiel aux ressources essentielles à la survie ne sont pas encore pleinement satisfaisantes, le fait en lui-même ne saurait être négligé. Il semble toutefois à peu près certain que les rapports de dominance ne représentent qu'une modalité parmi d'autres de l'accès différentiel aux ressources, surtout dans les espèces socialement les plus évoluées. Chez l'homme, en particulier, ce fait semble indéniable, même s'il ne saurait être question de prétendre à l'inexistence des rapports de dominance à connotation agressive (Corning et Corning, 1972; Eibl-Eibesfeld, 1975 et 1976; Strayer et Strayer, 1976).
Essentiels aux activités de subsistance et de protection, les outils et autres objets fabriqués représentent chez l'homme une part importante des ressources [67] indispensables à la survie (Childe, 1963; Hall, 1963; Leroi-Gourhan, 1964 et 1965; Oakley, 1965; Mounoud, 1970; Connolly et Elliott, 1972; Meyer, 1974; Jolly et Plog, 1976; Ruffié, 1976).
À la différence de ce qui se passe dans la plupart des autres espèces de primates, les rapports sociaux humains sont constamment imbriqués dans des rapports aux objets fabriqués, la circulation et la production sociales des objets représentent une part importante de l'activité des membres de l'espèce (Gruber, 1969; Goodall, 1964 et 1970; Davenport et Rogers, 1970; Racine, 1973; Richard, 1975).
Pour être produits et utilisés, la plupart des objets fabriqués exigent un minimum de coopération, les rapports sociaux qui s'y rattachent ne peuvent avoir une dimension exclusivement agonistique. De plus, l'accès différentiel aux objets fabriqués varie beaucoup d'un type de société à un autre : l'inégalité d'accès semble bien s'accroître au cours de l'évolution sociale de l'espèce humaine (Childe, 1963; Jolly et Plog, 1976; Fabre, Moukhtar et Racine, 1977). Enfin, comme nous l'avons mentionné, les rapports agonistiques sont loin de représenter la seule modalité qui puisse rendre compte de l'accès différentiel aux objets fabriqués; l'habileté, la ruse, l'information détenue, etc., entrent aussi en ligne de compte (Montagner, 1974; Eibl-Eibesfeld, 1976).
Si on veut étudier chez l'homme le processus d'accès différentiel aux ressources, il n'est pas possible de se restreindre aux seules hiérarchies de dominance, il faut prendre en considération aussi bien l'aspect non-agonistique du phénomène hiérarchique que cette ressource fondamentale pour l'espèce humaine : les objets fabriqués.
Très peu d'études éthologiques de la vie sociale enfantine ont abordé ce phénomène autrement que par le biais des interactions agonistiques concernant le matériel de jeu [1]. On y constate que les interactions concernant les objets ne peuvent être globalement classées dans la catégorie des rapports agonistiques (Blurton Jones, 1972b; Smith et Connolly, 1972; Montagner, 1974). Très souvent, plusieurs enfants manipulent le même objet, dans un rapport manifestement amical et coopératif, dès le plus jeune âge (Bronson, 1975; Lewis et al., 1975; Mueller et Lucas, 1975; Flament, 1976 et 1977).
Par ailleurs, la structure hiérarchique fondée sur les victoires dans les querelles concernant les jouets est loin d'être aussi stable, linéaire et rigide que celle fondée sur les autres types d'interactions agonistiques (McGrew, 1972; Montagner, 1974; Strayer et Strayer, 1976; Abramovitch, 1976; Sluckin et Smith, 1977).
À notre connaissance, une seule étude d'inspiration éthologique, déjà ancienne, a été consacrée à l'étude de l'accès différentiel aux objets sans réduire le phénomène à sa dimension agonistique. Cette étude portait sur des enfants souffrant d'un retard mental prononcé. Elle concernait l'accès différentiel [68] à des friandises, dans un contexte ou furent observés les mêmes enfants, en groupe et en dyades. La structure hiérarchique obtenue était très prononcée, mais les résultats de groupe et les résultats dyadiques ne coïncidaient pas rigoureusement (Hollis et Gunnell, 1965).
Dans l'étude du développement des rapports sociaux entre enfants, l'articulation entre les phénomènes coopératifs et l'accès différentiel aux ressources n'est pratiquement jamais étudiée (Piaget, 1932; Parten et Newhall, 1943; Nielsen, 1951; Montagner, 1974; Racine, 1977).
D'un point de vue éthologique, cet aspect des relations entre rapports agonistiques et rapports coopératifs pose des questions importantes quant à la fonction des comportements altruistes dans l'évolution sociale (Crook, 1970a et b; Tiger et Fox, 1971; Wilson, 1975a et 1975b).
C'est pour apporter quelque lumière sur cette question que nous avons décidé d'observer les rapports sociaux que les enfants peuvent entretenir entre eux, quant à un matériel de jeu, que ces rapports soient agonistiques ou altruistes (coopératifs). Plutôt que de réduire les rapports sociaux aux objets à leur seule modalité agonistique, nous avons considéré toutes les façons possibles d'établir une hiérarchie fondée sur l'accès différentiel aux objets.
Ce genre de travail n'étant pas courant, nous allons exposer, avec tous les détails requis, la procédure de cueillette et d'analyse des données...
II. PROTOCOLE D'OBSERVATION [2]
Nous voulions observer une activité familière, pratiquée aussi bien en maternelle qu'au terme du cours élémentaire, activité qui favoriserait la circulation d'objets entre les enfants, qui ne les forcerait pas à choisir entre compétition ou coopération, travail individuel ou travail de groupe.
Nous avons effectué nos observations dans une école où se pratiquent les méthodes de l'éducation nouvelle, où l'on favorise beaucoup le développement social autonome et l'expression créatrice. Le dessin collectif, sur une grande feuille de papier, est une activité qui correspondait bien à nos souhaits, et que les enfants pratiquent fréquemment et spontanément, quelque soit leur âge.
Un certain nombre d'observations préliminaires et informelles nous a permis de dégager les aspects les plus caractéristiques de l'activité choisie.
- a) généralement, ce n'est pas avant sept ou huit ans que les enfants font vraiment un dessin collectif, chaque membre du groupe dessinant alors un certain nombre d'items intégrés à une thématique d'ensemble (paysage, ville, etc.); avant cet âge, chaque membre du groupe se délimite une partie de la feuille commune et fait un dessin qui ressemble généralement beaucoup à ceux [69] des autres : on obtient ainsi autant d'arbres, de soleils, de maisons, etc., qu'il y a d'enfants à dessiner sur la feuille. Cela confirme les observations de Piaget et de Nielsen sur l'évolution des rapports coopératifs, et aussi la distinction de Parten entre le jeu parallèle et le jeu de groupe (Piaget, 1932; Parten et Newhall, 1943; Nielsen, 1951; Racine, 1977).
- b) L'activité varie entre une vingtaine de minutes et une heure, les plus vieux travaillant d'habitude plus longtemps que les plus jeunes.
- c) Les enfants se mettent rarement à plus de quatre pour ce genre de tâche; ils se choisissent par affinités, les mélanges d'âge et de sexe étant communs.
- d) Peu de crayons circulent, chaque enfant ayant en général tout l'équipement dont il peut avoir besoin de ce point de vue. Les crayons sont souvent tirés d'une boite commune au groupe.
C'est à partir de ces conditions naturelles, en n'y introduisant que les modifications indispensables, que nous avons élaboré les conditions de notre observation.
- A) CONDITIONS D'OBSERVATION
1. Pour l'observation au magnétoscope, les enfants étaient installés dans une pièce qu'ils connaissaient déjà, y ayant régulièrement accès pour les périodes d'activités libres. Dans cette pièce, de grandeur moyenne, nous avions installé une table couverte d'une grande feuille de papier. Cette feuille était assez grande pour que les enfants qui voulaient dessiner seuls puissent le faire avec assez de distance entre eux pour ne pas se gêner mutuellement.
2. Les enfants pouvaient dessiner aussi longtemps qu'ils le désiraient. La seule consigne était de faire un dessin, nous n'interrompions jamais une activité avant que les enfants ayant eux-mêmes cessé (voir l'appendice). Avant que le dessin commence, nous laissions les enfants satisfaire leur curiosité quant à l'équipement audio-visuel : regarder, manipuler, poser des questions, etc.
En cours de tournage, nous interagissions le moins possible avec les enfants, selon la procédure définie par McGrew (McGrew, 1972). Règle générale, les enfants oubliaient assez vite notre présence et celle du matériel, l'activité de dessin les absorbant énormément. Dans les quelques cas ou un groupe était gêné ou faisait un spectacle pour la caméra, nous n'avons pas retenu la bande pour la transcription des données.
3. Nous avons fixé à trois le nombre d'individus pour chaque groupe. Fréquent dans les conditions naturelles du dessin collectif, ce nombre nous permettait de filmer dans les meilleures conditions (il est à peu près impossible de maintenir continuellement quatre enfants dans le champ de la caméra). Trois membres pour un groupe permet aussi d'observer des interactions plus complexes que les seuls rapports dyadiques.
4. Les enfants constituant un groupe se choisissaient toujours entre eux, selon leurs affinités et leur disponibilité du moment. Le directeur de l'école passait à l'avance dans les classes pour informer les enfants de la possibilité de se faire filmer en train de faire un dessin à trois, il ne fixait jamais àl'avance la composition d'un groupe.
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5. Nous avons limité à quatre le nombre de crayons disponibles, pour chaque groupe. Il s'agissait de crayons feutres de couleurs différentes, que nous pouvions reconnaître ensuite à vue d'œil par des motifs distinctifs que nous avions tracés sur chacun.
Le nombre limité de crayons accroit la fréquence des circulations de ces derniers entre les enfants. Le fait qu'il y ait quatre crayons pour trois enfants évite d'imposer à l'enfant qui veut changer de couleur une interaction avec ses partenaires : il peut choisir le crayon en surplus, qui se trouve le plus souvent posé sur la table (un enfant monopolise rarement deux crayons).
- B) LES GROUPES OBSERVÉS
Des vingt groupes que nous avons observés, nous en avons retenu quinze, après élimination des cas douteux (voir plus haut, II-A-2). Nous avons regroupé ces quinze groupes par stades d'âges, selon les définitions de ces derniers par Piaget : égocentrique (5-7 ans), opératoire concret (8-10 ans), opératoire abstrait (11-12 ans) (Piaget, 1932 et 1949; Racine, 1977).
Nous ne nous servirons pas systématiquement de ce regroupement par âges, le nombre d'observations étant bien trop faible pour permettre une analyse statistiquement valable. Il est toutefois intéressant de noter que ce n'est qu'à partir du stade Il (voir Tableau 1) que nous avons assisté à la création de dessins vraiment collectifs (Piaget, 1932; Nielsen, 1951; Racine, 1977).
Les choix affiliatifs des enfants ont produit quelques résultats intéressants à signaler, dans la constitution des groupes (voir Tableau 1). Les membres d'un même groupe ont souvent un écart d'âge d'un ou de deux ans entre eux. Pour ce qui est de la composition selon le sexe, on trouve toutes les combinaisons possibles : Fille-Fille-Garçon (5 cas), GGF (6), FFF (2), GGG (2). Cette distribution, jointe au petit nombre d'observations, ne permet pas de faire l'analyse significative selon le sexe.
- C) TRANSCRIPTION DES DONNÉES
En filmant, nous ne prenions aucune note, notre souci était de toujours maintenir les trois enfants dans le champ de vision de la caméra, de manière à pouvoir retenir toutes les prises et circulations de crayons (entre qui elles s'effectuaient et de quelle manière).
La transcription consistait ensuite essentiellement, en visionnant la bande, à noter toutes les prises et les circulations, et leurs modalités, dans le cas de chaque membre du groupe. Voici la procédure suivie.
Le début d'une prise se détermine par l'établissement du contact physique entre la main de l'enfant et le crayon; la fin d'une prise se détermine par la rupture de ce contact.
Pour établir la durée d'une prise, ou temps de détention du crayon concerné, nous relevions les nombres indiqués au compteur du magnétoscope, au début et à la fin de la prise. Soustrayant le premier nombre du second, nous obtenions la durée voulue.
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Tableau 1
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G: garçon; F: fille.
a Age moyen, pour le stade.
b Age moyen, pour les trois stades réunis.
c Nombre de garçons et nombre de filles pour le stade.
d Nombre de garçons et nombre de filles pour les trois stades réunis.
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Pour obtenir le nombre de prises d'un individu pendant toute l'observation, nous n'avions alors qu'à additionner toutes ses prises. En faisant de même avec les durées de chaque prise, nous calculions le temps global pendant lequel l'individu avait détenu les crayons tout au long du dessin.
Voici un exemple simplifié, pour un individu :
Prise
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Temps de détention
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début
|
fin
|
0
|
100
|
100 - 0 = 100
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102
|
130
|
130 - 102 = 28
|
130
|
235
|
235 - 130 = 105
|
250
|
500
|
500 - 250 = 250
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Dans ce cas, le total des prises de l'individu est 4, et la durée de détention pour l'ensemble des crayons concernés est de 483. Quand le nombre marquant [72] la fin d'une prise ne coïncide pas avec celui qui débute la prise suivante, le décalage représente un temps pendant lequel l'individu n'a détenu aucun crayon (entre la prise 3 et la prise 4, par exemple, ce laps de temps est de 15).
La sommation des prises totales de chaque individu donne les prises totales du groupe, la sommation du temps total de détention de chaque individu donne le temps total de détention pour l'ensemble des crayons dans le groupe.
Prises faites aux partenaires
Un crayon peut être obtenu de Y par X de deux manières différentes a) à la suite d'une demande réussie de X à Y; ou b) parce que X a réussi à enlever son crayon à Y sans le consentement de ce dernier.
Les demandes, réussies ou pas, ont presque toujours une composante non verbale : X regarde alternativement le crayon et le visage de Y, tend vers lui le bras, doigts ouverts à demi ou complètement, paume vers le haut, le bas ou le côté. La main de X peut se rendre très près du crayon de Y avant de s'arrêter, ou même toucher légèrement le crayon et se retirer. Ce comportement est fréquemment accompagné d'une demande verbale : «passe», «j'en ai besoin», etc. L'enfant sollicité consent si : a) il tend à X le crayon demandé; b) il pose devant X le crayon demandé.
Les crayons peuvent être enlevés à Y par X selon deux modalités principales : a) X prend le crayon des mains de Y; b) X arrache le crayon des mains de Y.
L'arrachage est facile à reconnaître, bien que peu fréquent dans nos observations : X avance le bras rapidement vers le crayon de Y, paume vers le côté ou vers le bas, doigts qui se referment, il saisit le crayon et le ramène brusquement vers lui (poitrine ou côté du corps). La brusquerie du geste peut surprendre Y et lui enlever l'occasion de résister. S'il résiste, ce qui peut conduire à une chamaille, chacun tirant le crayon de son bord, le prenant, le perdant, le reprenant, il faut que finalement X réussisse a rompre définitivement le contact entre le crayon et la main de Y pour que cela soit considéré comme une prise.
La prise dans la main, sans arrachage, ne suppose aucune brusquerie, ni de geste de ramener le crayon vers soi : la main s'avance vers le crayon et le saisit dans les mains de Y. Il y a rarement chamaille dans ce contexte et le cas se présente comme intermédiaire entre la demande et l'arrachage.
Prises faites sur la table
On considère qu'il y a eu prise sur la table quand X y prend un crayon qui n'y a pas été posé à la suite d'une demande faite de X à Y.
Fiabilité de la transcription
Deux personnes ont chacune visionné les quinze bandes dans leur totalité, transcrivant les prises et les durées, les individus impliqués à chaque occasion [73] et les classant selon les modalités que nous venons de décrire (prise sur table, demande, arrachage, prise dans la main). Ces deux transcriptions ont ensuite été comparées, pour chaque observation, par les deux transcripteurs. Les ajustements suivants étaient alors effectués:
1) Si une prise n'avait pas été notée par l'un des transcripteurs, ou une durée mal calculée, on corrigeait en revisionnant le passage concerné. Même procédure pour une erreur sur l'identité du destinataire ou de l'émetteur. 2) dans certains cas, les deux transcripteurs ne s'entendaient pas sur la classification des prises selon la dichotomie faite au partenaire/faite sur la table. On élimina alors tous les cas où, après discussion et revisionnement, il ne fut pas possible de s'accorder. L'élimination ne concerne que moins de 1% du matériel (ensemble de toutes les prises pour les quinze observations).
III. MODE DE PRÉSENTATION
ET D'ANALYSE DES DONNÉES
Nous prendrons ici comme exemple le cas du groupe Il-2, composé de deux filles et d'un garçon qui, pendant une heure environ (1 000 unités au compteur du magnétoscope), ont dessiné collectivement. Ces enfants avaient entre 8 et 10 ans. On trouve les données, pour ce groupe, au Tableau 0 (a et b). Ces données seront traitées de plusieurs manières différentes.
- A) LES RELATIONS DYADIQUES (Sa)
Le graphe de la Figure 1 indique les circulations de crayons au sein de chacun des trois couples (AB, AC et BC) : A a obtenu 6 crayons de B et B en a obtenu 5 de A; B a obtenu 2 crayons de C qui en a obtenu 15 de B; A a obtenu 6 crayons de C, qui en a obtenu 3 de A.
On obtient le graphe de la Figure 2 en faisant, pour chaque couple, la différence entre le nombre de crayons obtenus par X de Y et le nombre de crayons obtenus par Y de X. Le nombre entier près de la flèche allant de X à Y indique combien de fois X a réussi à obtenir, sans contre partie, un crayon de Y. Ainsi, pour ce qui est de la relation entre A et B, A ayant obtenu six fois un crayon de B et B cinq fois un crayon de A, on a ici une supériorité de 1 dans le rapport de A à B.
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Pour établir l'écart maximal du groupe et son écart moyen, on exprime les écarts dyadiques en rapportant la valeur absolue de chacun au total des circulations de crayons au sein du groupe. Dans le groupe que nous analysons, il y a eu 37 circulations de crayons (Tableau 0) : en rapportant la valeur absolue de l'écart CB, soit 13, à ce total, obtient .35. La supériorité de C sur B, en termes de crayons obtenus sans contrepartie, représente plus du tiers de la circulation totale des crayons entre les membres du groupe.
L'écart maximal est celui qui, selon le calcul précédent, a la valeur la plus proche de 1.00. Dans notre cas, il s'agit de .35 entre C et B.
L'écart moyen s'obtient en divisant par trois la somme des écarts du groupe. On a ici : écart AB (.03) + écart AC (.08) + écart BC (.35) = .46 / 3 = .15.
La hiérarchie qui découle des circulations de crayons au sein de chaque dyade du groupe doit pouvoir être comparée aux hiérarchies fondées sur d'autres aspects de l'accès du matériel (voir plus loin, Sb, Pt et Pn). Dans le cas de la hiérarchie fondée sur les rapports dyadiques, une mesure comparative simple est le coefficient de corrélation de Pearson. Pour calculer ce coefficient, dans le cas de Sa, il n'y a qu'une façon de présenter les données : pour chaque dyade, on rapporte le nombre de crayons obtenus de Y par X au total des crayons obtenus de Y par X et de X par Y. Dans le groupe que nous analysons, les données seront alors:
- AB : 6 crayons obtenus par A de B, et 5 crayons obtenus par B de A.
- Total des crayons obtenus par A de B et par B de A : 11 ; 6 ÷11 = .55
-
- AC : 6 crayons obtenus par A de C et 3 crayons obtenus par C de A.
- Total des crayons obtenus par A de C et par C de A : 9; 6 ÷ 9 = .66
-
- BC : 2 crayons obtenus par B de C et 15 crayons obtenus par C de B.
- Total des crayons obtenus par B de C et par C de B : 17; 2 ÷ 17 = .12
Tableau 0
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A
|
B
|
C
|
|
|
|
pn
|
pt
|
d
|
|
A
|
0
|
6
|
6
|
12
|
|
A
|
82
|
94
|
735
|
(a)
|
B
|
5
|
0
|
2
|
7
|
(b)
|
B
|
78
|
85
|
663
|
|
C
|
3
|
15
|
0
|
18
|
|
C
|
52
|
70
|
499
|
|
|
8
|
21
|
8
|
37
|
|
|
212
|
249
|
1897
|
a) En lisant le chiffre à l'intersection de la ligne X et de la colonne Y, on obtient le nombre de fois où X a obtenu un crayon de Y. Le nombre en fin de ligne représente le total des crayons obtenu par X, Y ou Z. Le chiffre à l'intersection de la 4e ligne et de la 4e colonne représente le nombre de crayons ayant circulé dans le groupe (s : crayons obtenus par prises faites aux partenaires).
b) Pn : prises faites sur la table; pt : prises totales (s + Pn); d : durées de détention des crayons; la quatrième ligne donne les totaux, pour l'ensemble du groupe, des Pn, pt et d.
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- B) DISTRIBUTION DES CRAYONS
ENTRE LES MEMBRES DU GROUPE (Sb)
Dans ce cas, la hiérarchie ne s'établit plus à partir des circulations de crayons au sein des dyades, mais à partir du résultat de cette circulation quant au nombre de crayons obtenus par chaque individu de l'ensemble des deux autres. Les données de base sont alors :
- crayons obtenus par A (de B et de C) : 6 + 6 = 12
- crayons obtenus par B (de A et de C) : 5 + 2 = 7
- crayons obtenus par C (de A et de B) : 3 + 15 = 18
Le total des crayons obtenus est évidemment le même que dans le cas Sa, soit 37.
La structure hiérarchique à laquelle nous avons affaire ici peut s'exprimer par une distribution de pourcentages dont la somme est 100%. Le coefficient de dissimilarité de Duncan et le coefficient de corrélation de rang (Pearson) peuvent donc être directement calculés à partir des données suivantes :
- A : 12 ÷ 37 = .32
- B : 7 ÷ 37 = .19
- C : 18 ÷ 37 = .49
Afin de pouvoir comparer la hiérarchie Sb à la hiérarchie Sa, toutefois, il est nécessaire d'exprimer Sb de manière à ce que le coefficient de Pearson puisse aussi être calculé à partir des données dyadiques. On obtient alors :
- AB : nombre de crayons obtenus par A (de B et de C) : 12; nombre de crayons obtenus par B (de A et de C) : 7; nombre de crayons obtenus par A + nombre de crayons obtenus par B : 19; 12 ÷ 19 = .63
- AC : crayons obtenus par A (12) + crayons obtenus par C (18) = 30; 12 ÷ 30 = .40
- BC : : crayons obtenus par B (7) + crayons obtenus par C (18) = 25; 7 ÷ 25 = .28
- C) LES CRAYONS PRIS SUR LA TABLE (Pn)
On considère ici les crayons obtenus par prise sur la table, sans que le crayon pris par X soit précédemment demandé ou enlevé à Y ou à Z. Contrairement aux cas Sa et Sb, les crayons obtenus ici par X ne supposent pas d'interaction directe entre les membres du groupe.
Les données de bases sont :
- nombre de crayons pris sur la table par A: 82
- nombre de crayons pris sur la able par B: 78
- nombre de crayons pris sur la table par C: 52
- nombre total de crayons pris sur la table : 212
Pour le calcul des coefficients de Duncan et de Pearson sur la distribution des prises entre les membres du groupe, les données sont : A (.39), B (.37), C (.24). Pour le coefficient de Pearson sur les données dyadiques, on a : AB (.51), AC (.61), BC (.60).
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Les données pour les Pt, qui sont la sommation des Pn et des Sb, sont traitées de la même manière que les données pour Pn. Les écarts moyens et maximaux sont traités de la même manière que pour Sa, dans le cas Pn, dans le cas Pt et dans le cas Sb.
- D) FRÉQUENCES
On calcule les fréquences suivantes, pour les totaux du groupe (et pas des membres).
1) fréquence Pn: Pn/D :
|
|
2) fréquence Sb: Sb/D :
|
|
3) fréquence pt: Pt/D :
|
|
On calcule aussi la part des Pt représentée par les Sb :
|
4) Sb/Pt : 37/249 : .15
|
|
IV. RÉSULTATS
- A) FRÉQUENCES ET ÉCARTS HIÉRARCHIQUES
Du point de vue de la fréquence des différents types de prises, le Tableau Il permet de constater que les prises aux partenaires sont considérablement moins nombreuses que les prises faites sur la table, et que les prises aux partenaires ne représentent en moyenne que 20% des prises totales, pour l'ensemble des quinze groupes.
Du point de vue des écarts hiérarchiques introduits entre les membres d'un groupe par les différents types de prise, le Tableau III permet de constater que l'écart moyen est plus considérable dans le cas des prises aux partenaires que dans le cas des prises sur la table, ceci étant particulièrement clair si l'on compare les Sb aux p.. L'écart moyen des prises sur la table est proche de celui induit par les prises totales, ce qui s'explique facilement si l'on tient compte que les Pn représentent, en moyenne, 80% des Pt.
On constate enfin que l'écart moyen et l'écart maximum induits en tenant compte de la durée de détention des crayons par chaque membre du groupe sont faibles, ce critère n'ayant pas, semble-t-il, de signification hiérarchique très marquée.
- B) CORRÉLATIONS DE RANG
Du point de vue de l'accès différentiel aux crayons, les Tableaux IVa et IVb permettent de constater que ce n'est que dans un cas, soit la relation entre l'ordre hiérarchique induit par les prises sur la table et celui induit par les prises
[77]
Tableau II
|
(1) D
|
(2) sb/D
|
(3) pn/D
|
(4) pt/D
|
(5) sb/pt
|
I-15
|
267
|
.03
|
.07
|
.10
|
.33
|
I-5
|
567
|
.02*
|
.12*
|
.15*
|
.17
|
I-8
|
607
|
.01
|
.11
|
.13
|
.10
|
I-6
|
877
|
.04
|
.19
|
.23
|
.17
|
I-1
|
235
|
.00
|
.08
|
.08
|
.00
|
x
|
510.6
|
.02
|
.11
|
.14
|
.15
|
II-4
|
590
|
.03
|
.22
|
.25
|
.14
|
II-3
|
373
|
.02
|
.08
|
.10
|
.17
|
II-17
|
940
|
.04
|
.14
|
.18
|
.21
|
II-2
|
1006
|
.04
|
.21
|
.25
|
.15
|
II-1
|
653
|
.06
|
.11
|
.17
|
.31
|
X
|
712.4
|
.04
|
.15
|
.19
|
.21
|
III-18
|
841
|
.01
|
.10
|
.12
|
.12
|
III-12
|
943
|
.03
|
.09
|
.12
|
27
|
III-9
|
1030
|
.04
|
.14
|
.19
|
.25
|
III-14
|
670
|
.03
|
.07
|
.09
|
.28
|
III-13
|
1030
|
.03
|
.10
|
.13
|
.22
|
x
|
902.8
|
.03
|
.10
|
.13
|
.23
|
X
|
708.6
|
.03
|
.12
|
.15
|
.20
|
D: durée de l'observation, en unités de bande.
Sb: nombre total de prises de crayons faites aux partenaires, pour chaque groupe.
pn: nombre total de prises faites sur la table, pour chaque groupe.
Pt: Sb + Pn
x: moyenne, pour chaque stade.
X: moyenne, pour les trois stades réunis.
* Les données sont arrondies, ce qui explique que la fréquence des Sb + la fréquence des pn ne donnent qu'approximativement la fréquence des pt.
|
totales, que la corrélation de rang est forte, et le cœfficient de dissimilarité faible, pour l'ensemble des groupes observés.
Dans le cas des Pn et des Pt, l'individu qui a fait le plus de prises sur la table est presque toujours aussi celui qui a fait le plus de prises totales, le même phénomène tendant à se reproduire pour les individus en seconde et en dernière positions. Le cœfficient de dissimilarité de Duncan n'est jamais supérieur à .10 pour l'ensemble des groupes; le cœfficient de corrélation de rang de Pearson n'est qu'une fois inférieur à .89 (données dyadiques) et deux fois inférieur à .85 (distribution). Par contre, dans le cas Sb/Pt, la corrélation n'est supérieure à.60 que dans 7 (distribution) ou 8 cas (données dyadiques); et elle n'est supérieure à .60 que dans six (distribution) ou sept cas (données dyadiques), pour Sb/Pn (Tableau IVa)
Il est assez surprenant de constater que, dans le cas des prises aux partenaires, l'ordre des individus calculé à partir des relations dyadiques ne concorde [78] pas clairement avec l'ordre calculé à partir du rapport de chaque individu aux deux autres : entre S., et Sb. la corrélation n'est plus forte que .60 que dans huit cas (Tableau IVb). D'autre part, entre Sa et Pt, comme entre Sa et S., la corrélation n'est supérieure à .60 que dans quatre cas.
À cause du petit nombre de groupes examinés, ces résultats n'ont qu'une valeur exploratoire, qu'il sera nécessaire de vérifier sur un plus vaste échantillon. Certaines conclusions peuvent néanmoins être tirées de ces résultats, à titre d'hypothèses.
V. INTERPRÉTATION
ET CONCLUSION
Manifestement, du point de vue hiérarchique, les phénomènes observées ne sont pas homogènes. Il est évidemment possible d'éluder le problème
TABLEAU III
|
(1) sa
|
(2) sb
|
(3) pn
|
(4) pt
|
(5) d
|
|
|
|
|
|
|
I-15
|
.11 (.11)
|
.44 (30)
|
.38 (.25)
|
.33 (.22)
|
.13 (.08)
|
I-5
|
.36 (.24)
|
.36 (.24)
|
.07 (.05)
|
.03 (.02)
|
.08 (.05)
|
I-8
|
.75 (.25)
|
.87 (.58)
|
.35 (.23)
|
.40 (.27)
|
.12 (.08)
|
I-6
|
.23 (.15)
|
.32 (.21)
|
.25 (.17)
|
.24 (.16)
|
.05 (.03)
|
I-1
|
*
|
*
|
.16 (.11)
|
.16 (.11)
|
.09 (.06)
|
x
|
.29 (.15)
|
.39 (.27)
|
.24 (.16)
|
.23 (.16)
|
.09 (.06)
|
II-4
|
.18 (.09)
|
.23 (.15)
|
.17 (.11)
|
.18 (.12)
|
.01 (.01)
|
II-3
|
.50 (.22)
|
.50 (.33)
|
.20 (.13)
|
.17 (.11)
|
.01 (.01)
|
II-17
|
.27 (.20)
|
.47 (.31)
|
.14 (.09)
|
.21 (.14)
|
.06 (.04)
|
II-2
|
.35 (.15)
|
.30 (.20)
|
.14 (.09)
|
.10 (.07)
|
.12 (.08)
|
II-1
|
.19 (.10)
|
.27 (.18)
|
.18 (.12)
|
.04 (.03)
|
.02 (.01)
|
x
|
.29 (.15)
|
.35 (.23)
|
.16 (.10)
|
.14 (.09)
|
.04 (.03)
|
III-18
|
.50 (.33)
|
.58 (.39)
|
.32 (.21)
|
.31 (.21)
|
.02 (.01)
|
III-12
|
.13 (.11)
|
.16 (.11)
|
.17 (.11)
|
.13 (.09)
|
.10 (.07)
|
III-19
|
.08 (.04)
|
.21 (.14)
|
.09 (.06)
|
.12 (.08)
|
.06 (.04)
|
III-14
|
.11 (.07)
|
.27 (.18)
|
.26 (.17)
|
.13 (.09)
|
.10 (.07)
|
III-13
|
.35 (.14)
|
.29 (.19)
|
.17 (.11)
|
.19 (.13)
|
.04 (.03)
|
x
|
.23 (.14)
|
.30 (.20)
|
.20 (.13)
|
.17 (.12)
|
.06 (.04)
|
X
|
.27 (.15)
|
.35 (.23)
|
.20 (.13)
|
18 (.12)
|
.06 (.04)
|
Sa : écarts induits entre les membres du groupe sur la base des prises aux partenaires, cas des dyades où l'effet du troisième partenaire n'est pas calculé.
sh : écarts induits entre les membres du groupe par les prises faites aux partenaires, tenant compte de l'effet du troisième partenaire sur chaque dyade.
pn: écarts induits entre les membres du groupe sur la base des prises faites sur la table.
pt: écarts induits entre les membres du groupe sur la base des prises totales (Pn + S).
x: moyenne du stade.
X: moyenne pour les trois stades réunis.
Les chiffres entre parenthèses donnent l'écart moyen, les chiffres sans parenthèses donnent l'écart maximal.
* Aucune prise aux partenaires dans ce groupe.
|
[79]
en posant en principe que l'accès différentiel aux crayons est donné par l'étude des prises totales, sans tenir compte de leur différentiation interne en prises aux partenaires et prises sur la table. Même en se tenant à ce point de vue, le résultat obtenu est intéressant : pour l'ensemble des observations, l'écart hiérarchique moyen n'est supérieur à .15 que dans quatre cas, ce qui donne aux hiérarchies fondées sur les prises un caractère bien atténué (Tableau III). De plus, la forte corrélation de rang (Tableau IVa) entre l'ordre induit par les prises sur la table et celui induit par les prises totales n'est guère surprenant si l'on tient compte du fait que les premières représentent en moyenne 80% des secondes (Tableau II).
Mais il demeure plus intéressant d'analyser les raisons possibles de la différentiation interne du phénomène Pi.
Si les groupes observés avaient eu des conditions de travail différentes, comme trois feutres au lieu de quatre, il est bien possible que nous aurions alors obtenus des résultats sensiblement différents. Car s'il n'y a pas de crayon en surplus, il devient plus souvent nécessaire d'entrer en contact avec un par
Tableau IVa
|
Sb/Pt
|
Sb/Pn
|
Pt/Pn
|
1
|
2
|
3
|
1
|
2
|
3
|
1
|
2
|
3
|
I-15
|
.8724
|
.9372
|
.11
|
.6996
|
.8633
|
.17
|
.9596
|
.9851
|
.06
|
I-5
|
-.1273
|
-.8085
|
.21
|
-.8788
|
-.9875
|
.25
|
.5852
|
.8910
|
.05
|
I-8
|
.9833
|
.9750
|
.28
|
.9652
|
.9774
|
.32
|
.9967
|
.9999
|
.04
|
I-6
|
.4778
|
-.5513
|
.18
|
.3359
|
-.6684
|
.21
|
.9874
|
.9891
|
.03
|
x
|
.5516
|
.1381
|
.195
|
.2805
|
.0462
|
.2375
|
.8824
|
.9663
|
.045
|
II-3
|
.5000
|
-.5000
|
.27
|
-.0304
|
-.7107
|
.33
|
.9504
|
.9646
|
.045
|
II-4
|
.8951
|
.9817
|
.05
|
.8645
|
.9770
|
.06
|
.9979
|
.9997
|
.01
|
II-17
|
.9738
|
.9975
|
.18
|
.9015
|
.9886
|
.23
|
.9763
|
.9967
|
.05
|
II-2
|
-.6559
|
-.6466
|
.21
|
-.8420
|
-.9069
|
.25
|
.9595
|
.9078
|
.04
|
II-1
|
-.3416
|
.5610
|
.18
|
-.9256
|
-.9189
|
.27
|
.6719
|
-.1890
|
.09
|
x
|
.2743
|
.2787
|
.178
|
.0064
|
-.1142
|
.228
|
.8912
|
.7360
|
.047
|
III-18
|
.6922
|
.7724
|
.24
|
.5574
|
.6674
|
.27
|
.9850
|
.9885
|
.03
|
III-12
|
-.0524
|
.7636
|
.12
|
-.3500
|
.6025
|
.16
|
.9538
|
.9754
|
.04
|
III-9
|
.9924
|
1.000
|
.05
|
.9854
|
.9762
|
.07
|
.9989
|
.9762
|
.02
|
III-14
|
-.4058
|
-.8863
|
.20
|
-.7794
|
-.9603
|
.30
|
.8889
|
.9803
|
.10
|
III-13
|
.9636
|
.9453
|
.07
|
.9158
|
.9054
|
.09
|
.9898
|
.9944
|
.02
|
x
|
.4380
|
.5190
|
.136
|
.2658
|
.4382
|
.178
|
.9633
|
.9830
|
.105
|
X
|
.4213
|
.3119
|
.16%
|
.1796
|
.1234
|
.2145
|
.9123
|
.8951
|
.0656
|
Sa.: hiérarchie fondée sur les prises faites aux partenaires.
Sb.: hiérarchie fondée sur les prises faites aux partenaires.
Pn. hiérarchie fondée sur les prises faites sur la table.
Pt: hiérarchie fondée sur l'ensemble des prises.
x moyenne pour le stade. Dans le cas du stade I, le groupe I-1 n'a connu aucune prise aux partenaires : pour tous les cas, nous lui avons attribué la moyenne du stade I.
X moyenne pour les trois stades réunis.
1 coefficient de corrélation de rang de Pearson, calculé sur les distributions.
2 cœfficient de Pearson calculé sur les données dyadiques.
3 cœfficient de dissimilarité de Duncan, calculé sur les distributions.
|
[80]
Tableau IVb
|
Sa/Sb (a)
|
Sa/pt (a)
|
Sa/pn (a)
|
I-15
|
.4757
|
.1391
|
-.0333
|
I-5
|
-.1055
|
-.5000
|
-.0524
|
I-8
|
1.00
|
.9750
|
.9774
|
I-6
|
.9982
|
-.5000
|
-.6223
|
xb
|
.5921
|
.0285
|
.0674
|
II-3
|
.9286
|
-.7857
|
-.9211
|
II-4
|
.9366
|
.9862
|
.9898
|
II-17
|
.8943
|
.8604
|
.8165
|
II-2
|
.6239
|
.1927
|
-.2365
|
II-1
|
.7182
|
-.1731
|
-.9345
|
xb
|
.8203
|
.2161
|
-.0572
|
III-18
|
.9083
|
.9672
|
.9177
|
III-12
|
.4314
|
-.2531
|
-.4600
|
III-9
|
.1111
|
.1111
|
-.1070
|
III-14
|
.5907
|
-.8972
|
-.7924
|
III-13
|
.0446
|
.3679
|
.4645
|
xb
|
.4172
|
.0592
|
.0046
|
Xc
|
.6098
|
.1012
|
.0049
|
a Voir le Tableau IVa.
b Moyenne pour le stade. Le cas du groupe I-1 est traité comme pour le Tableau IVa.
c Moyenne pour les trois stades réunis. Les coefficients de corrélation sont ceux de Pearson, sur les données dyadiques.
|
tenaire, pour en changer. Il est probable que la part des prises aux partenaires représenterait alors une proportion plus considérable des prises totales. Sachant que la structure hiérarchique fondée sur les prises aux partenaires introduit entre les individus de plus grands écarts que celle fondée sur les prises faites sur la table, il est alors à prévoir que la hiérarchie fondée sur les prises totales serait plus accentuée que celle que nous avons observée.
À l'inverse, on peut supposer que chaque enfant a quatre crayons à sa disposition, ce qui est analogue aux conditions naturelles. Les prises aux partenaires perdent alors leur nécessité, la part des prises sur la table devient presque identique aux prises totales. Cela donnerait des résultats analogues à ceux que nous avons obtenus, sauf que la hiérarchie fondée sur les prises totales reflèterait encore plus celle fondée sur les prises sur la table.
Les déductions qui précèdent pourraient aisément être soumises au contrôle expérimental, ce qui permettrait de voir si la quantité de matériel disponible affecte le mode d'obtention et l'ampleur des écarts hiérarchiques [3].
Quant à la différence que nous avons constatée entre la hiérarchie Sa et la hiérarchie Sb, elle met bien en évidence un phénomène structurel de portée plus générale. En effet, la relation dyadique entre deux individus peut toujours être profondément altérée par l'intervention d'un tiers. Ce phénomène a été mis en évidence pour ce qui concerne la théorie des rôles et de la structure [81] sociale (Nadel, 1957). Plus récemment, Hinde a insisté sur son importance dans l'analyse des relations sociales (Hinde, 1976a, 1976b, 1976c et 1976d).
Sur le plan hiérarchique, l'ampleur et le sens de l'écart intradyadique peuvent être altérés par la présence d'un tiers qui interagit avec chaque membre de la dyade. Ainsi, dans un trio, les phénomènes sociaux ne sauraient se réduire à la simple sommation des effets des trois relations dyadiques. Il faut prendre en considération l'effet de chaque couple de dyade sur la troisième i.e. l'effet de BC et de AC sur AB, celui de AB et AC sur BC, celui de AB et BC sur AC.
Si on veut étudier la hiérarchie comme principe de fonctionnement et d'organisation sociale, il n'est pas approprié de réduire l'analyse aux seuls rapports intradyadiques. Malheureusement, c'est ce qui se passe dans la plupart des études éthologiques consacrées aux hiérarchies enfantines. Les rares auteurs qui ont pris le phénomène en considération n'arrivent d'ailleurs pas a des résultats nets quant au plus ou moins grand degré de concordance entre la hiérarchie de groupe et celle fondée sur les seules dyades (Gellert, 1961 et 1962; Hollis et Gunnell, 1965).
Bien que nos observations soient en nombre relativement limité, elles permettent de voir assez nettement que les interactions entre les relations dyadiques elles-mêmes doivent être prises en considération pour se faire une image fidèle de la hiérarchie d'un groupe. Tant que ce point n'aura pas été plus amplement étudié, il faudra être très prudent face aux conclusions des études qui n'examinent les hiérarchies enfantines que sous l'angle dyadique.
Notons enfin que les mécanismes qui permettent aux individus un accès différentiel aux ressources (objets fabriqués) ne sauraient se réduire aux seuls rapports de dominance, comme nous l'avons déjà souligné. En plus des rapports de dominance, il faut prendre en considération
- a) les comportements sociaux à base coopérative : demander un objet plutôt que de le prendre, le prendre doucement plutôt que de l'arracher au partenaire, établir le tour de rôle plutôt que la stricte compétition, etc.,
- b) les comportements qui assurent la saisie de l'objet sans exiger d'interaction avec les partenaires : prendre un objet au moment où les autres ne s'en servent pas, etc.
Dans nos observations, une part presqu'insignifiante des prises de crayons relève des rapports de dominance, tels l'arrachage, la lutte pour l'objet (Strayer et Strayer, 1976). De plus, ce sont les prises qui ne supposent pas d'interaction directe avec les partenaires qui sont de loin les plus fréquentes, et ce sont elles qui déterminent la hiérarchie fondée sur l'accès différentiel aux objets.
Par ailleurs, même si les dessins collectifs que nous avons observés représentent un processus coopératif, les individus participant à cette activité se classent néanmoins selon une hiérarchie très nette quant à l'accès différentiel aux crayons. Du point de vue hiérarchique fondé sur l'accès différentiel, les processus coopératifs sont probablement aussi importants àanalyser que les processus compétitifs, agressifs et de dominance : il n'est pas possible d'opposer de ce point de vue hiérarchie et coopération (Racine, 1977).
[82]
BIBLIOGRAPHIE
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[85]
ANNEXE:
LA RELATION ENTRE LES PRISES
DE CRAYONS ET LE TEMPS
Dans les quinze observations que nous avons analysées, les données concernent toujours une période correspondant au déroulement complet de la tâche. Les diverses structures hiérarchiques que nous avons examinées se rapportent aux relations qui se sont manifestés du début à la fin du dessin effectué par un groupe.
Les membres du groupe décidant eux-mêmes de la fin de la tâche, les durées d'observation varient en passant d'un groupe àun autre. On peut alors légitimement se demander de quelle nature est la relation entre le nombre de prises et le temps.
L'analyse de régression des divers types de prises sur le temps donne les résultats suivants
|
r
|
r2
|
Pt
|
.6647
|
.4418
|
Pn
|
.6018
|
.3621
|
Sb
|
.7692
|
.5916
|
Dans le cas de chaque type de prises, le r de Pearson permet de voir que la relation entre le nombre de prises et le temps présente une assez claire tendance à la linéarité, cette tendance étant toutefois plus marquée dans le cas des prises aux partenaires (Sb = .7692) que dans celui des prises sur la table (Pn = .6018). On retrouve d'ailleurs le même phénomène en considérant le pourcentage de variance expliquée (r2) : il est de 36% pour les pn et de 60,70 pour les Sb.
La tendance générale semble donc que les prises de crayons sont d'autant plus nombreuses que la durée de la tâche est grande.
RÉSUMÉ
Quinze groupes de trois enfants chacun ont été observés et filmés au magnétoscope. Chaque groupe avait la possibilité de faire un dessin collectif ou trois dessins individuels sur une grande feuille de papier, et disposait de quatre crayons de couleurs différentes. Les enfants avaient entre cinq et douze ans, aucun groupe ne présentant un écart d'âge de plus de deux ans. Les enfants se choisissaient mutuellement, indépendamment du sexe, et dessinaient aussi longtemps qu'ils le désiraient. L'analyse des prises de crayons, pour chaque membre de chaque groupe, a donné les résultats suivants : a) les prises faites aux partenaires sont moins nombreuses que les prises sur la table, et induisent plus d'inégalités; b) la hiérarchie fondée sur les prises sur la table ne corrèle pas avec la hiérarchie fondée sur les prises aux partenaires; c) dans le cas des prises aux partenaires, la hiérarchie établie à partir des écarts diadiques ne concorde que faiblement avec la hiérarchie établie à partir des écarts qui tiennent compte de l'influence du tiers sur chaque dyade.
SUMMARY
Fifteen groups of three children each were observed and videotaped. Each group was free to make either one collective drawing or three separate individual drawings on a large sheet of paper. At their disposal were four crayons of different colors. The children ranged in age from five to twelve years old, the variation in any one group being not greater than two years. The composition of the groups was based on mutual selection, independant of sex. The children were to draw for as long as they wished. The analysis of crayon selection for each group member gave the following results : a) crayons taken from partners were less numerous than those taken from the table and induced more inequality; b) there was no correlation between the hierarchy established on the basis of crayons taken from the table and the hierarchy established on the basis of crayons taken from partners; c) in the case of crayons taken from partners, there is only a slight correlation between the hierarchy established on the basis of the differences between two members of a dyad [86] and the hierarchy established on the basis of differences which take into account the influence of the third group member on the dyad.
RESUMEN
Quince grupos de tres niños cada uno han sido observados y filmados con un magnetoscopio. Cada grupo tenía la posibilidad de hacer un dibujo colectivo o tres dibujos individuales en una gran hoja de papel, y disponían de cuatro lápices de colores diferentes. Los niños tenían entre cinco y doce anos, ningún grupo presentaba una difèrencia de edad de más de dos anos. Los ninos se elegían mutualmente, independientemente del sexo, y dibujaban todo el tiempo, que ellos querian. El análisis de la manera de tomar los lápices, para cada miembro de cada grupo, ha dado los siguientes resultados: a) las tomas de los lápices hechas a sus compañeros son menos numerosas que las tomas de lápices sobre la mesa, e inducen a una mayor desigualdad; b) la jerarquía fundada en la toma de lápices sobre la mesa no es correlativa con la jerarquía fundada en la toma de los lápices de sus compañeros; c) en el caso de la toma de los lápices de sus compañeros, la jerarquía establecida a partir de diferencias binarias (dyadiques) tiene una débil correlación con la jerarquía establecida a partir de difèrencias que toman en cuenta la influencia de un tercero sobre cada binomio (diada).
[1] Dans une optique plus ou moins directement piagétienne (Piaget, 1932), un certain nombre d'études existent, qui portent sur les rapports entre coopération, répartition égalitaire ou inégalitaire, et compétition dans la vie sociale enfantine (Kagan et Madsen, 1971 et 1972; Avellar et Kagan, 1976; Dreman, 1976; Peterson, Peterson et Mc Donald, 1975; Olejnik, 1976; Skarin et Moely, 1976; Streater et Cheittkoff, 1976).
[2] Les observations ont été faites à l'École nouvelle Querbes, à Montréal, de février à mars 1976, grâce à une subvention de recherche de l'Université de Montréal (CAFIR, #52). Je tiens à remercier M. André Nantel, directeur de l'École, pour son aide et son soutien; Diane Moukhtar, qui était assistante pour le projet; et Pierre Chesnard, qui m'a aidé pour l'analyse statistique.
[3] Certaines études ont été faites sur cette question (Huit et Vaizey, 1966; Smith, Connolly et Fleming, 1972).
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