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Haïti et ses femmes.
Une étude d’évolution culturelle.
Avant-propos
Cet ouvrage a pour but d'examiner la condition de la femme dans la société haïtienne. La première partie est consacrée à une discussion de ses origines historiques, la seconde étudie l’évolution de l’éducation en Haïti, et la troisième examine le statut actuel, économique, social et politique de l'haïtienne. La seconde partie a été publiée en 1944 dans une brochure intitulée « Education des Femmes en Haïti. » [1]
Cette étude est forcément incomplète à cause du petit nombre de sources authentiques. On trouve peu de renseignements sur la femme dans les livres d'histoire et dans les récits de voyage. Un grand nombre de documents ont été consultés en vain et d'autres ne consacrent qu'une ou deux lignes à notre sujet.
La partie traitant de la condition de la femme est basée sur les observations de l'auteur qui pendant plus de quinze ans fut inspectrice, puis chef de service à l’Enseignement Rural, et en même temps présidente de la plus importante association nationale de femme : haïtiennes « La Ligue Féminine d'Action Sociale. » Ces doubles fonctions lui ont permis d'entrer en contact avec les femmes de toutes les classes et de toutes les régions du pays. Les observations générales ont été approfondies par des monographies individuelles. Les résultats d'autres recherches individuelles et collectives ont [vi] fourni des renseignements complémentaires sur la situation du peuple et de la petite bourgeoisie [2].
De plus, une enquête a été faite par l’auteur sur les conditions de vie de 597 femmes et fillettes des bourgs et communautés rurales. Cette enquête est basée sur des questionnaires remis à un certain nombre d'institutrices du pays. Celles-ci devaient répondre à quelques questions concernant les femmes qu'elles connaissaient de très près. Ces réponses ont pu être contrôlées par des visites personnelles. Les questionnaires incomplets et de véracité douteuse ont été éliminés et l’auteur a procédé elle-même à des enquêtes supplémentaires. Le nombre restreint de cas étudiés ne permet pas de tirer des conclusions statistiques, mais donne une idée exacte des conditions de vie d'un certain nombre de femmes habitant les bourgs et les communautés rurales.
Il nous a été souvent difficile d'obtenir des renseignements importants à cause de l'insuffisance des statistiques sociales. Les recherches ayant été faites en Haïti et aux Etats-Unis, il a été impossible de consulter les archives des bibliothèques de Paris et de Séville qui contiennent les meilleures collections d'ouvrages et de manuscrits traitant de la période coloniale. L'auteur espère néanmoins que cette étude, bien que brève et incomplète, servira de point de départ à d'autres discussions plus approfondies sur /a situation de [vii] la femme haïtienne, sujet entièrement négligé jusque présent.
Ceux qui s'intéressent au problème de révolution culturelle trouveront aussi dans cet ouvrage une illustration intéressante de l'histoire d'un peuple transplanté dans un nouveau milieu et soumis à des influences variées. Ce sujet a été plus spécialement traité par Herskovits [3] et l’auteur de cette étude ne prétend pas arriver à des conclusions originales et définitives, mais a jugé intéressant de présenter les origines de la femme haïtienne et d'analyser les facteurs qui ont contribué à la formation de sa personnalité.
Cet ouvrage est basé en partie sur des recherches faites pour soutenir une thèse de doctorat à l’Université de Bryn Mawr (Etats-Unis d'Amérique) en 1941, il a été terminé à l'occasion de la Célébration du Cent Cinquantième Anniversaire de notre Indépendance afin de faire apprécier la contribution de la femme à la formation de la nation haïtienne.
Pour terminer, l'auteur désire exprimer ses sentiments de reconnaissance envers tous ceux qui ont rendu possible l'achèvement de cette œuvre, particulièrement son mari, Max Bouchereau et ses sœurs Suzanne, Jeanne et Yvonne G. Sylvain, qui l'ont aidé de leurs conseils ; aux instituteurs et institutrices qui ont rempli les questionnaires et participé aux enquêtes, aux docteurs Herbert Miller, Mildred Fairchild et lise Forest de Bryn Mawr Collège et enfin à tous ceux qui Vont assisté d'une façon ou d'une autre.
Août 1953
[viii]
[1] Sylvain Bouchereau, Madeleine G., Éducation des Femmes en Haïti. Imprimerie de l'Etat, Port-au-Prince, Haïti 1944.
[2] Bulletin Trimestriel de Statistiques, No. 1 à 7. Institut Haïtien de Statistiques, Port-au-Prince 1951-52 :
Comhaire-Sylvain, Suzanne et Jean. Loisirs et divertissement dans la région de Kenscoff, Haiti. Bruxelles 1938.
Comhaire-Sylvain, Suzanne. « Loisirs des Fillettes de Port-au-Prince. » « Voix des Femmes » No. 46 Port-au-Prince, Fév. 1940.
Comhaire-Sylvain, Suzanne « Ce que font nos fillettes en dehors des heures de classes « Voix des femmes, Nos. 51 à 54, Port-au-Prince, 1940.
Département de Travail. Revue du Travail, Vol. II No. II. Port-au-Prince, Mai 1952.
Herskovits, M. J., Life in a Haitian Valley, New-York 1937.
Métraux, Alfred. L'Homme et la terre dans la vallée de Marbial, Haïti, UNESCO, Paris 1951.
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