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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Christian Bromberger, De barattes en pressoirs à olives. Pour une ethnologie des techniques dans le monde iranien en général et au Gilân en particulier.” Un article publié dans Nouvelle Revue des Études Iraniennes, Vol. I, no 1, 2008, pp. 139-167. [Autorisation accordée par l'auteur le 17 février 2012.]

Christian Bromberger
(IFRI)

De barattes en pressoirs à olives.
Pour une ethnologie des techniques
dans le monde iranien en général
et au Gilân en particulier
.” [1]

Un article publié dans Nouvelle Revue des Études Iraniennes, Vol. I, no 1, 2008, pp. 139-167.


L’ethnologie de l’Iran a été fortement influencée par l’école française d’ethnologie, non pas tant par celle de Claude Lévi-Strauss, mais par celle d’André Leroi-Gourhan et de ses disciples qui ont formé plusieurs chercheurs iraniens à partir des années 1960 [2]. Une des originalités de Leroi-Gourhan et de son école est d’avoir prêté une attention particulière à l’étude des techniques, un domaine négligé par l’anthropologie anglaise et américaine contemporaine, plus préoccupée par l’étude des structures sociales, politiques et symboliques. Un des risques d’une ethnologie des techniques est cependant de se borner à une simple description, un travail déjà très complexe, et de ne pas dépasser le stade de l’archivage monographique. Je voudrais ici esquisser, par quelques exemples, différents prolongements possibles d’un indispensable inventaire des artefacts.

 

S’interroger sur les processus de diffusion

La répartition géographique des faits techniques invite à s’interroger sur les processus historiques de diffusion et sur la distribution des gestes et des styles techniques qui contribuent à façonner la personnalité culturelle d’une région ou d’un plus vaste ensemble. Pour illustrer, sinon résoudre, les questions que pose ce genre d’étude spatiale de la répartition des techniques, je prendrai un seul exemple, celui de la distribution des techniques de barattage dans le monde iranien (incluant l’Afghanistan) [3]. Plusieurs types d’objets et de gestes opératoires sont utilisés pour la  transformation du  yaourt en beurre : des outres (mashk) suspendues à un tripode et agitées horizontalement, des outres également suspendues à un tripode mais en position verticale et où le yaourt est agité à l’aide d’un bâton, des poteries globulaires ou oblongues, les premières agitées horizontalement, les secondes verticalement, des poteries encore où un mouvement rotatif est transmis à un bâton par une courroie, des barattes cylindriques en bois où le yaourt est remué à l’aide d’un bâton (figure 1). La carte de répartition de ces techniques (figure 2) pose des problèmes de diffusion : l’outre suspendue correspond aux zones nomades, à l’aire des tentes noires, qui se prolonge en Arabie et jusqu’en Afrique du nord ; les barattes en poterie, jadis plus répandues, correspondent à de vieux noyaux de population persane ; les barattes cylindriques en bois, qui prédominent dans l’Alborz, comme dans le Caucase et le plateau anatolien, sont attestées dans une grande partie de l’Eurasie, du Tibet à l’Europe occidentale ; quant aux outres suspendues verticalement où le yaourt est remué à l’aide d’un bâton, elles constituent des formules intermédiaires entre les barattes en bois et les outres suspendues horizontalement. Elles sont surtout répandues aux frontières entre les zones de répartition de ces deux types : chez les Turkmènes du nord de l’Iran et de l’Afghanistan, chez les Sangesari, en bordure du Kavir, etc. Quant aux barattes en poterie où le yaourt est remué à l’aide d’un bâton entraîné par une courroie, elles se rattachent au vaste ensemble de l’Inde du nord-ouest et du Népal. La carte fait apparaître un autre type d’opposition entre, d’une part, des techniques où c’est le contenant qui est agité par un mouvement régulier, et, d’autre part, des techniques où le yaourt est remué à l’aide d’un bâton agité verticalement. Le premier type de technique, qui requiert moins d’énergie, est toujours féminin, le second, plus productif, en général masculin. Ces deux mouvements rappellent d’autres gestes, caractéristiques, le premier du registre féminin (tel que balancer le berceau d’un enfant), le second, avec ses gestes saccadés, du registre masculin. Mais ce schéma structural doit être nuancé. Il y a des régions (la steppe turkmène, le Khorasan, le nord-ouest de l’Afghanistan) où le barattage est exclusivement féminin et où les femmes utilisent verticalement le bâton pour remuer le yaourt. Mais, là où les deux techniques coexistent, les femmes utilisent la première (remuer le contenant), les hommes la seconde (agiter le contenu avec un bâton), cette différence d’usage correspondant aussi alors à une différence de destination de la production, la production féminine étant destinée à la consommation domestique, la production masculine à la commercialisation.

Du sexe des gestes et des postures techniques :
du corps debout au corps courbé


Nous voici sur la deuxième voie où je souhaite m’aventurer, celle qui mène aux techniques comme révélatrices des relations de genre. La situation du Gilân [4] présente ici une certaine originalité, mais pas dans le domaine de la riziculture où la répartition du travail correspond aux principes qui régissent habituellement la division sexuelle des tâches (voir Tabet, 1979, Testart, 1986). Aux hommes les opérations qui sont effectuées debout avec des outils employés en percussion lancée (serpe, hache, bêche…) ou encore celles qui sont pratiquées avec des engins complexes (araire et herse tractée par un animal, motoculteurs, batteuses mécaniques…). Aux femmes, les tâches effectuées le plus souvent sans outil, le corps courbé.  Ces travaux féminins (le repiquage - neshâ -, les désherbages - vijin et dobare -) sont particulièrement pénibles ; ils sont effectués les pieds nus dans la boue, le dos courbé et sous un soleil brûlant (photo 1). Alors que plusieurs tâches masculines ont été mécanisées (introduction du motoculteur puis, depuis quelques années, du tracteur pour les défrichages, les labours et le hersage, et plus récemment encore, et de façon très minoritaire, la moissonneuse), les travaux féminins demeurent manuels : les repiqueuses mécaniques, jugées coûteuses et inefficaces par les hommes, n’ont pas été adoptées et les désherbants chimiques, également coûteux,  sont  peu utilisés.

Mais cette règle générale de division des activités comporte ou comportait quelques exceptions significatives. Souvent de durs travaux masculins, effectués avec des outils simples ou complexes, étaient confiés aux femmes. Pour le battage des gerbes de riz, les hommes employaient traditionnellement, dans la plaine centrale du Gilân, un outil en percussion lancée, le fléau (jâku), mais cette tâche pouvait  être aussi féminine (Rabino et Lafont, 1911 : 19-20) ; le décorticage et le blanchiment du riz au pilon à pied (pâdang) était une tâche généralement masculine confiée à des travailleurs saisonniers, venant des hauteurs de Khalkhâl qui surplombent, au nord, la plaine du Gilân. Mais quand les Khalkhâli manquaient, on confiait ces travaux aux femmes ! Ce « jeu » avec les principes de répartition des tâches bénéficiait le plus souvent aux hommes mais la situation pouvait s’inverser quand la situation économique l’exigeait. C’est non sans une certaine gêne que des paysans confient qu’ils ont dû participer au repiquage des plants de riz, faute d’aide familiale ou d’avoir pu payer des ouvrières. Enfin, à de rares occasions, hommes et femmes effectuent les mêmes gestes en parfaite harmonie, quand il s’agit, par exemple, de recouvrir  d’une toile en plastique la pépinière des jeunes plants de riz (photo 2)

C’est un même schéma (une large participation des femmes aux tâches de production, excédant, en temps, celle des hommes, leur moindre équipement technique) que l’on retrouve dans la culture du thé. Les femmes cueillent courbées les feuilles des plants de thé, que les hommes ont préalablement labourés à la bêche (bil) (photo 3) et taillés.

Mais voici, en revanche, quelques exemples qui illustrent l’originalité de la division des tâches techniques au Gilân. Contrairement  au modèle prédominant dans la plupart des régions séricicoles à travers le monde, ce sont les hommes qui nourrissent, au Gilân, les vers à soie dans la magnanerie (telembâr) avec des branches de mûrier garnies de feuilles qu’ils ont préalablement coupées (photo 4). Pour ce faire, ils se déplacent en rampant sur un plancher à claire-voie (le « pont », pord) situé au-dessus du « lit » (ket) où se trouvent les vers.  Les tâches précédant et suivant l’élevage dans la magnanerie sont, à l’inverse, surtout prises en charge par les femmes : l’éclosion des graines et le premier nourrissage des chenilles dans une pièce chauffée de la maison, le décoconnage (pilecini), le tirage de la soie et la filature de la filoselle, le tissage domestique, sur un métier (pâcâl) à deux rangs de lisses, du câdershâb, une étoffe à motifs géométriques que les femmes nouent autour de la ceinture quand elles repiquent ou sarclent et au-dessous des épaules pour y porter un enfant. Comment expliquer cette participation importante des hommes à la sériciculture, une activité modelée par les paradigmes du nourrissage et de l’élevage, et généralement dévolue, avons-nous dit, aux femmes ? Plusieurs raisons - techniques, économiques, symboliques - peuvent rendre compte de cette configuration singulière. L’élevage dans la magnanerie coïncide dans le calendrier avec le repiquage et le sarclage du riz, des activités mobilisant les femmes en avril et en mai. Rappelons-nous également que la soie a longtemps été la principale production commerciale du Gilân (voir Bromberger, 1989 et infra) et, à ce titre, un secteur  particulièrement valorisé dans l’économie des exploitations. Enfin, on imagine mal dans la société gilâni une femme qui ramperait dans une installation en hauteur, alors que les hommes sont habitués dès leur plus jeune âge à grimper (aux arbres ou dans les parties élevées de la maison) (Bromberger, 1986 : 14). C’est donc aussi une conception du corps qui est sous-jacente à cette spécialisation masculine.

Voici un autre exemple de l’originalité de la division des tâches dans le monde caspien. Dans les zones pastorales (gâlesh et tâlesh), le traitement du lait donne lieu à une répartition inhabituelle  des travaux. Les hommes traient les chèvres et les brebis, une activité généralement dévolue  aux femmes. On retrouve cette même rupture par rapport aux schémas généraux quand on examine la répartition des tâches de fabrication. Sans doute, ici comme ailleurs, revient aux hommes le travail des matières dures avec des outils complexes (la menuiserie et la charpenterie…), les arts du feu (la forge, la cuisson des poteries…), aux femmes le travail des matières souples  (la filature de la laine au rouet, le tissage des nattes en jonc et des étoffes, le crochet…)  dans le cadre domestique. Les hommes ne s’emparent du travail du textile que dans un cadre professionnel (une structure d’atelier ou un artisanat itinérant, tel celui du feutre, namad, voir Bazin et Bromberger, 1982 : 64). Mais, ici aussi, dans le domaine  du travail artisanal, ressort l’originalité de la société gilâni. Les femmes utilisent, dans le Tâlesh et généralement à l’est du Sefid Rud, des métiers à pédales à deux rangs de lisses qui sont souvent l’apanage  exclusif  des hommes au Proche-Orient (Bazin et Bromberger, 1982 : 71-72). La poterie fabriquée à l’aide d’un tour est, ici comme ailleurs, une activité masculine, les femmes se contentant de façonner leurs produits (jattes : gamaj, barattes : nerkhe…)  à l’aide d’une tournette. Mais, fait rare dans le monde, des femmes, dans quelques  centres potiers, utilisent le tour, pour façonner des mortiers (nimkâr) (voir Achouri, 1977).

Ces quelques exemples illustrent, mieux que des discours, le statut singulier et paradoxal des femmes du Gilân et la complémentarité asymétrique des travaux masculins et féminins. La large participation des femmes aux tâches de production à l’extérieur de la maison (leur temps de travail dans la riziculture est supérieur d’un tiers à celui des hommes), la parité de leur salaire journalier dans le secteur agricole avec celui des hommes incitent, à juste titre, à souligner les tendances égalitaires de la société rurale du Gilân, mais, en même temps, quand on considère la pénibilité des tâches accomplies par les femmes, la surexploitation du travail féminin.

De l’« ethnicité » des techniques :
de la serpe au filet de pêche


La société du Gilân forme un ensemble polyethnique stratifié, cette hiérarchisation entre les groupes résidant dans la province tendant cependant aujourd’hui à s’atténuer et à se brouiller. Chaque groupe se distinguait naguère par une activité, voire par un outil, par un  animal ou par une plante emblématique. Aux Gil-e mard, les paysans gilak de la plaine, la culture du riz, l’élevage des vers à soie, les bœufs de labour (le varzâ jang, le combat de taureaux - voir Bromberger, 1997 - étant le symbole de cette culture bovinophile - photo 5). Aux Gâlesh et aux Tâlesh, les migrations pastorales du bétail des piedmonts forestiers (qeslâq) aux prairies alpines (yeylâq, giriya); leur outil de base est une serpe (dâs, dâz) (figure 3 a et b) qui leur sert à se frayer un chemin dans les forêts, à couper les branches qu’il donnent en fourrage aux animaux ou qu’ils utilisent pour la construction de leurs huttes (pargâ, pori). Aux Turcs, migrant saisonnièrement de la région de Khalkhâl, les travaux de force dans le domaine agricole (défrichages, labours des rizières, abattage des arbres, naguère, on l’a dit, battage du riz au pilon à pied) ; l’outil emblématique des travaux de force des Khalkâli est la bêche (khelik, gerbâz, celâru, bil, figure 4 a, b, c), même si elle n’est pas leur apanage, les Gilak l’utilisant aussi. Autre spécialité technique des Khalkhâli, et d’autres Azeri migrant saisonnièrement, la pêche maritime (au mâhi sefid, une variété de surmulet, à l’esturgeon, dont le traitement a longtemps été le monopole d’une minorité azeri originaire de Transcaucasie [5]…). La senne de rive, un filet tracté de la plage, et le kereji, un ancien bateau à voile démâté servant de pont pour mettre  les filets à la mer, symbolisent cette activité. Autres gens de la mer, les Turkmènes Ja’afarbay, maîtres de la navigation commerciale sur la Caspienne dans la première moitié du XXème siècle, dont les ports d’attache et les chantiers navals étaient Gomishân ou Bandar-e Torkoman (sur la rive orientale de la mer) ; le qâyeq-e torkomani ou naw (une embarcation à voile à la coque à fond voûté et constituée de bordés bombés disposés à franc bord, était leur emblème (voir Rabino, 1917, illust. : 63, Bazin et Bromberger, 1982 : 91-93, de Planhol : 371-372). Quant aux Kurdes de la plaine littorale du Gilân, installés dans cette zone, au début du XXème siècle, pour former un rideau défensif contre la menace russe, ils ont le monopole de l’élevage du buffle (gâvmish), une spécialité pastorale dont se désintéressent avec dédain leurs voisins gilak. Parmi ces groupes minoritaires et dévalorisés, il faut aussi mentionner les sârebân (chameliers) et les cârvâdâr (muletiers) le plus souvent ‘arâqi (appellation lapidaire, héritière d’anciens découpages territoriaux de l’époque abbasside - voir Le Strange : 24-25 et 185-186 -, par laquelle on désigne les habitants du plateau intérieur, le ‘arâq ‘ajami) qui assuraient, avant la motorisation,  le transport interrégional (de Qazvin à Anzali et vice-versa).

Dans cette société polyethnique, quelques minorités non autochtones urbaines se distinguaient par leurs activités spécifiques. Outre le traitement et la commercialisation de la soie qu’ils contrôlaient en partie au XIXème siècle et au début du XXème siècle (Bromberger, 1989 : 74 et 85), les Arméniens avaient la maîtrise de l’élevage du porc, apparu dans les années 1920 à l’initiative d’émigrés de Transcaucasie, et récupéraient par ailleurs, pour les transformer en produits de charcuterie, des sangliers abattus par les paysans à proximité des rizières. Les Grecs (originaires de Brousse, de Smyrne, d’Istanbul) formaient également une minorité active au XIXème siècle et au début du XXème siècle. Ils faisaient valoir leurs talents commerciaux et techniques dans trois principaux domaines : la soie (l’agent de la maison Pascalidis de Brousse donna même son nom – Bezanos – à une variété de cocon dans les années 1890), la production d’huile d’olive dans la région de Rudbâr (la compagnie Koussis et Theophilaktos, placée sous la protection russe, la contrôlait à la fin du XIXème siècle, voir infra) et l’exploitation du buis.

Dans un article célèbre, Marcel Mauss (1904-1905) écrivait que « Là où il y a des phoques, il y a des esquimaux ». On pourrait donc ici prolonger la parallèle, en égrenant les spécialités techniques, les emblèmes animaux et végétaux caractéristiques de chacun des groupes ethniques coexistant ou ayant coexisté au Gilân : du Gâlesh avec sa serpe au Turc avec sa bêche ou son filet de pêche, du Kurde avec ses buffles à l’Arménien avec ses porcs… Encore faut-il souligner que ces spécialisations ethniques ne sont le plus souvent que le reflet d’inégalités économiques. Si certaines sont directement liées à des facteurs culturels (naguère l’élevage des porcs par les Arméniens ou le traitement des esturgeons par des Azeris venus de Transcaucasie…),  la plupart d’entre elles sont le fait de la nécessité, et non de quelque prédisposition culturelle ou histoire singulière. Rien ne prédispose culturellement les Khalkhâli à venir accomplir de durs travaux agricoles dans la plaine. Ce sont avant tout de pauvres montagnards, accessoirement turcs. A l’est de la province d’ailleurs, ce sont des Gâlesh et des habitants de Tâleghân, aux ressources également limitées, qui viennent traditionnellement accomplir les mêmes tâches pendant la saison froide. La notion de division « ethnique » du travail, qui s’impose au premier regard,  risque donc dans bien des cas d’occulter la nature réelle des rapports sociaux sous-jacents (voir Bromberger, 1988 : 103). Ces spécialisations, qui semblent ancrées dans la durée contre vents et marées, évoluent, au demeurant, en fonction des contraintes et des contextes. Exemple parmi d’autres, un décloisonnement des activités de la pêche s’est amorcé depuis une vingtaine d’années : les Gil-e mard y participent en plus grand nombre. De façon plus générale, la hiérarchie des activités, des outils, des animaux, toujours repérable objectivement et fortement perçue subjectivement, tend aujourd’hui à s’estomper.

Techniques de base, techniques en symbiose,
techniques en contraste : vers la notion de système


Malgré la grande diversité des activités de production dans la plaine du Gilân et dans ses digitations montagneuses, on peut cependant parler d’un système technique [6] gilâni. D’une part, plusieurs outils et moyens originaux d’action sur la matière sont communs à divers types d’activités ; de l’autre, les techniques mises en œuvre dans les différents secteurs de la production entretiennent d’étroites relations entre elles. 

On a déjà fait allusion à l’équipement de base du paysan du Gilân : la bêche, utilisée pour le nettoyage des canaux d’irrigation (photo 6), pour la réfection des diguettes des rizières, pour le labour des champs de thé ou pour celui, en profondeur, des jardins, la serpe, mais aussi la faucille dentée à lame courte (dâre) (figure 5) utilisée pour la moisson du riz, mais aussi pour couper les joncs, les laîches et les roseaux. L’outil de base des paysannes, c’est le hoyau, bulu(k), petite houe à manche court, employé aussi bien pour la préparation et l’entretien du jardin potager que pour le sarclage des champs de thé.

Outre des outils, un système technique inclut des moyens d’action sur la matière, comme l’eau, l’air, le feu.  Une des originalités de la culture technique du Gilân est de réserver à la fumée une place privilégiée et originale dans le monde iranien. On y recourt traditionnellement pour sécher le riz, le thé, les feuilles de tabac, pour étouffer les cocons formés par les vers à soie mais aussi pour conserver le poisson,  pour protéger la maison des moustiques en allumant dans la cour un feu de balles de riz, particulièrement fumigènes, jadis pour punir un contrevenant ou un enfant désobéissant que l’on enfermait dans le dud otâq (littéralement « la pièce de la fumée » où l’on faisait sécher les gerbes de riz et où l’on étouffait les cocons). Ce châtiment s’appelait fal-e dud (« la fumée des balles de riz »)…

Un système technique, c’est aussi un ensemble dont les différents éléments sont liés entre eux. Au Gilân, la riziculture et la sériciculture, véritables matrices de la culture technique locale, ont ainsi fourni de nombreux modèles à d’autres secteurs d’activités techniques. Par exemple, le premier bâtiment ayant fait fonction d’usine de traitement du thé, un nouveau venu en pays caspien, introduit en 1902 par Kâshef-os Saltâne, consul de Perse en Inde, était un telembâr, une magnanerie. De même, le telembâr a été utilisé comme local pour le premier séchage des feuilles de tabac, une culture introduite au Gilân en 1875. Le pilon à pied (pâdang) employé pour le décorticage et le blanchiment du riz était employé naguère, dans la région de Rudbâr-e zeytun, pour écraser les grignons des olives d’où l’on extrayait une huile de ressence. Notons, par ailleurs, pour donner un autre exemple de remploi de cet engin, que le verre qui entre en composition dans la glaçure (la’ab) verte recouvrant les jattes (gamaj) est pilé par les potiers à l’aide de ce même pâdang. Et c’est avec un âsiâb, moulin à main utilisé pour moudre le riz, que l’on broie ce verre pilé, mélangé à de l’eau,  du plomb, de l’étain et des déchets de cuivre, préalablement chauffés et réduits en poudre. Le tout donne une pâte qui est appliquée sur les jattes entre la première et la deuxième cuisson.

Un système technique c’est aussi un ensemble dont les différentes techniques dépendent les unes des autres. Au Gilân, par exemple, le type de toit des maisons dépend  étroitement des procédés utilisés pour le séchage du riz. Dans la plaine, soit on place, avant le battage, les gerbes de riz à cheval sur des perches qui relient  les différents pans de la toiture (fig. 6) (c’est la formule dominante dans le delta du Sefid Rud); soit on sèche, après le battage, le paddy dans des récipients posés sur des claies ou sur des étagères (c’est le procédé généralement employé dans la plaine intérieure) (fig. 7). Dans les deux cas de figure, le riz est chauffé par un mélange fumigène de bois et de balles de riz mais, dans la première formule, on doit ménager une distance importante entre le foyer et les gerbes, pour éviter les risques d’incendie et une trop forte dessication du riz qui entraînerait une brisure des grains lors des opérations suivantes de décorticage et de blanchiment. À cette technique de séchage des gerbes avant le battage correspondent, en général, des maisons au toit élevé à quatre pans égaux (fig. 8). Le second procédé, le séchage des grains de paddy dans des récipients placés sur des étagères ou des claies à mi-hauteur de la pièce, est moins consommateur d’espace, et correspond à des maisons plus basses, à toit à croupes (photo 7). Le « choix » pour l’une ou l’autre formule de séchage a des incidences sur les usages de la paille et est à mettre en relation avec les techniques de couverture des toits des maisons. Le séchage après battage permet de garder les tiges (kulash) intactes et d’en recouvrir la charpente du toit. Les deux techniques coïncident (voir Bazin et Bromberger, 1982 : cartes 14 et 23). À l’inverse, le séchage avant battage rend inutilisable la paille pour la couverture ; mais dans la zone du delta du Sefid Rud où l’on emploie ce procédé on recouvre les maisons de jonc (gâli), abondant dans les marais et plus résistant que la paille ; celle-ci, noircie et brisée, est utilisée pour fumer les pépinières et pour chausser les arbres pendant l’hiver. Ces techniques différentes de séchage du riz et de couverture des toits sont aussi à mettre en relation avec les formes d’élevage. Dans la plaine intérieure, les bœufs étaient utilisés pour le labour et le hersage des rizières (Bromberger, 1997 : 122-124) et on leur donne de la paille de riz comme fourrage. Dans la zone du delta, aux terres plus profondes et humides, ce sont les chevaux que l’on employait pour les mêmes tâches ; on les nourrissait d’orge, de paddy de qualité inférieure, et, en faible proportion seulement, de paille de riz. Les variantes dans les techniques de séchage du riz, les formes des toits des maisons, les types d’élevage apparaissent ainsi associés fonctionnellement et forment des systèmes cohérents de différences.

Un système technique, ce sont aussi des concepts, des manières de voir le monde. La culture du riz dans de petits casiers, une pratique qui s’apparente à l’horticulture, le jardinage, pourvoyeur d’herbes et de légumes, dans l’enclos domestique, le nourrissage des vers à soie dans la magnanerie, l’élevage d’un ou deux bovins ou d’un cheval dans une étable située sous ou derrière la maison… sont des activités délicates, minutieuses qui contrastent avec la culture plus impersonnelle du blé et du seigle, et encore davantage avec la conduite de grands troupeaux d’ovins, caractéristiques de l’Iran du plateau. La moisson du riz est ici effectuée, on l’a dit, avec une faucille à lame courte (dâre), par poignées (moshte), et non par larges brassées avec une faucille à lame longue, comme c’est le cas pour le blé. Ne faut-il pas voir dans cette manière délicate de traiter les plantes et les animaux une des sources des comportements sociaux singuliers des hommes du Gilân, moins enclins à la violence et aux relations de domination que les hommes du plateau, cultivateurs de blé et éleveurs de troupeaux d’ovins sur de grands espaces? Ce n’est là bien sûr qu’une suggestion, prolongeant une puissante hypothèse d’André-Georges Haudricourt (1962).

À l’intérieur d’un même système technique, coexistent enfin diverses techniques plus ou moins efficaces ayant la même fonction, correspondant à une production tournée vers la consommation locale ou vers la vente à plus grande échelle. La préparation du filé de soie (Bromberger, 1989) offre l’exemple le plus patent de cette contiguïté entre techniques domestiques rudimentaires et traitement industriel, ici particulièrement précoce. Jusqu’à la fin du XIXème siècle, les représentants des compagnies commerciales, en majorité étrangères, n’exportaient du Gilân que de la soie grège filée par les paysans locaux. A partir de 1893, les différentes opérations suivant l’élevage des vers à soie (l’étouffage, le déblazage, le tri des cocons, la filature) furent progressivement industrialisées. Ainsi, en 1908, on compte, au Gilân, une centaine d’établissements industriels, appartenant, pour la plupart, aux négociants grecs d’Asie mineure,  arméniens, russes, ou aux grandes maisons de Lyon ou de Marseille (voir Lafont et Rabino, 1910 : 145-146). Ces opérations sont aujourd’hui concentrées dans une grande usine, à Rasht, qui dépend de l’Administration de la sériculture (Edâre-ye noqân va kerm-e abrishâm). Mais, parallèlement, ont subsisté, surtout dans le Gilân oriental, des techniques domestiques de traitement des cocons et de filature : étouffage des cocons dans un local chauffé (dud otâq) par un mélange de bois et de son de riz, dévidage de la soie sur une roue actionnée à la main ou à l’aide d’une pédale ou encore filature de la filoselle, provenant des cocons avariés, à l’aide d’un fuseau. C’est avec cette filoselle que les femmes tissent, à Qâsem Âbâd, les câdorshâb, sur des métiers (pâcâl) à deux rangs de lisses et à pédales. 

Le traitement du thé connaît aussi deux filières différentes, domestique et industrielle, qui coexistent souvent à l’échelle d’une même localité. Pour leur propre consommation ou quand leur exploitation est très éloignée d’une usine, des  théiculteurs traitent eux-mêmes les feuilles de thé qu’ils ont récoltées. Ils les font d’abord sécher et flétrir (palâsidan), puis les roulent et les découpent dans un plateau en bois (lâk) ; ils les laissent ensuite évaporer (tabkhir) et fermenter (takhmir) dans un endroit frais puis procèdent à leur  dessication soit en les faisant chauffer sur un plateau en métal soit en les plaçant dans les tiroirs grillagés d’un meuble chauffé à sa base par un foyer (kure) rempli de cendre chaude. Le nom de ce meuble (form) atteste qu’il s’agit là d’un emprunt, sans doute un vestige des techniques pré-industrielles importées au moment de l’introduction du thé par Kâshef-os Soltâne.

Mais l’essentiel des feuilles de thé est traité industriellement dans les nombreuses usines  (la première date de 1932) qui parsèment le paysage des régions productrices (Lâhijân, Langarud, Fuman…). 

Pour le traitement des olives dans la région de Rudbâr, ont aussi coexisté, jusqu’à un proche passé,  des procédés rudimentaires et des installations dotées de machines perfectionnées, la plupart importées de l’étranger. Comparées à celles attestées dans le monde méditerranéen (voir Casanova, 1990), les techniques traditionnelles de fabrication de l’huile présentent une forte originalité, fruit d’essais et de bricolages successifs, dont la complexité, issue de ces tâtonnements, nécessite quelques précisions.

Le procédé le plus fréquemment répertorié était celui de la pression entre deux poutres horizontales, l’une fixe, l’autre mobile, ce procédé étant signalé dès le XVIème siècle (d’après le manuscrit « Persan 727 » de la Bibliothèque nationale de Paris cité par Mohebbi [7], 1996 : 222). Cette technique générique de pressoir à levier a connu plusieurs variantes et évolutions. Le procédé le plus simple consistait à placer le sac bourré d’olives, préalablement broyées et attendries, sur une planche et d’y abaisser une grosse poutre (alvâr) horizontale dont une des extrémités était fichée dans un mur. Quelques hommes s’asseyaient sur cette poutre supérieure pour exercer la pression nécessaire. L’huile s’écoulait dans un récipient (lâk) placé sous le sac. Une variante plus élaborée, combinant les principes du levier et du serrage, consistait à rabattre une poutre verticale (cânecu, taram), encastrée dans un épais banc en bois (pil-a cu : littéralement « grand bois »), sur la planche mobile de l’étau qui venait presser le sac d’olives coincé contre la planche fixe, cette dernière étant elle aussi assujettie dans le banc. Un individu, juché sur un bloc de bois où était fiché le banc, tirait avec une corde (lâfen) la poutre verticale ; il était maintenu par une sellette en bois (kun-a taxta : littéralement « planche du cul ») jouant le rôle de sangle.

Ces deux techniques rudimentaires ont connu au cours du XXème siècle de sensibles évolutions (l’adoption de la vis ou du cabestan dans les petites huileries à partir de 1940) qui ont permis d’importants gains de productivité.

Dans le premier cas, à la pression du poids des corps se substitua celle exercée par une vis métallique traversant les planches fixe et mobile. La première était fixée sur deux poutres verticales adossées au mur (d’où le nom du dispositif : divârku) et ancrées dans le sol et dans le plafond, la seconde était, à l’une de ses extrémités, assujettie à la première par une grosse cheville en bois qui traversait aussi la poutre verticale ; à l’autre extrémité les planches étaient percées d’un trou qui permettait le passage et le serrage de la vis (fig. 9).

Quant au pressoir où la traction d’une poutre verticale, venant se rabattre sur la planche mobile, était assurée par la seule force humaine, on y adapta un cabestan (fig. 10). Un système de relais, assurés par des pièces de bois (katreki), permettait la démultiplication et l’orientation vers le bas de la force transmise à la corde par la rotation de la manivelle. Autre innovation, les deux planches (dastelat)  étaient rendues solidaires à l’une de leurs extrémités par une pièce en fer, seul élément métallique de l’ensemble.

         Mais, dès la fin du XIXème siècle, des installations plus efficaces avaient été mises en place dans les grandes huileries de la vallée. En 1890 avait été concédé le monopole de l’achat et du traitement des olives à MM. Kousis et Theophilactos, deux commerçants grecs de Bakou sous protection russe (Churchill, 1891: 1) qui établirent une usine à Rudbâr et y installèrent des pressoirs à vis centrale importés de Marseille (Townley, 1896 : 2).

L’exemple des pressoirs illustre la complexité paradoxale du système technique du Gilân, marqué par la coexistence de techniques rustiques  locales et de machines importées. Cette province a été le théâtre, depuis les années 1850, d’expérimentations et d’innovations industrielles en milieu rural, tandis que se maintenaient des formes simples d’acquisition et de transformation des produits vivriers ou destinés à une commercialisation restreinte. Cette diffusion précoce de techniques étrangères dans la région a eu des conséquences : le façonnage d’une paysannerie tournée vers l’innovation, sensible aux mouvements nationaux et internationaux des choses et… des idées.

De barattes en pressoirs, le propos était de rappeler l’importance de l’étude des techniques comme voie d’accès à des thèmes centraux de la recherche en anthropologie sociale, qu’il s’agisse des relations entre les genres, des identités vécues et perçues, des rythmes divers et contradictoires de l’évolution d’une société. À une époque où fleurit en anthropologie la subjectivité, où l’analyse du discours éclipse celle des pratiques, ces considérations laborieuses  ne sont peut-être pas inutiles.

Références citées

Achouri, T. 1977. La poterie artisanale au Gilân, Thèse d’ethnologie, Aix-en-Provence,  Université de Provence.

Bazin, M., 1980. Le Tâlech. Une région ethnique au nord de l’Iran, Paris, ADPF, 1980 (2 vol.).

Bazin M. et C. Bromberger, Gilân et Âzarbâyjân oriental. Cartes et documents ethnographiques, Paris, ADPF, 1982.

Bazin M. et C. Bromberger, 1991. “Churns and churning”, Encyclopaedia Iranica (vol. V, fasc. 5), Costa Mesa (California), Mazda, (pp. 551-557).

Bromberger, C., 1986. Habitat, architecture et société rurale dans la plaine du Gilân (Iran septentrional), Paris, UNESCO (« Etablissements humains et environnement socio-culturel » 36).

Bromberger, C., 1988. « Comment peut-on être Rashti ? Contenus, perceptions et implications du fait ethnique dans le nord de l’Iran », in J.-P. Digard, éd, Le fait ethnique en Iran et en Afghanistan, Paris, CNRS, 1988 (pp. 89-108).

 Bromberger, C., 1989 « Changements techniques et transformations des rapports sociaux. La sériciculture au Gilân » in Y. Richard, éd, Entre l’Iran et l’Occident, Paris, 1989, Maison des sciences de l’homme (pp. 71-89).

Bromberger, C., 1997. « La guerre des taureaux n'aura pas lieu. Note sur les infortunes d'un divertissement populaire dans le nord de l'Iran » in Dire les autres. Réflexions et pratiques ethnologiques. Textes offerts à Pierre Centlivres (J. Hainard and R. Kaehr eds), Lausanne, Payot.

Casanova,  A., 1990.Paysans et machines à la fin du XVIIIème siècle: essai d'ethnologie historique, Besançon, Presses de l’université de Franche-Comté.

Churchill, H.L. 1896. “Report on the Cultivation of Olives in the District of Gilân”, Reports on Subjects of General and Commercial Interest, N° 407, London, Foreign Office.

Gille, B. 1978., Histoire des techniques, Paris, Gallimard (coll. « La Pléiade).

Haudricourt, A.-G. 1962. « Domestication des animaux, culture des plantes et traitement d'autrui », L'Homme, II, 1, (pp. 40-50).

 Lafont F. et H.-L. Rabino, L'industrie séricicole en Perse, Montpellier, Coulet et fils, 1910.

Lemonnier, P., 1983. «  A propos de Bertrand Gille: la notion de système technique », L’Homme, XXIII, 2 (pp. 108-115).

Le Strange, G., 1966. The Lands of the Eastern Caliphate, London, Franck Cass (1ère éd.1905).

Mauss, M., 1904-1905. « Essai sur les variations saisonnières des sociétés Eskimos. Étude de morphologie sociale. », L'Année Sociologique,  IX (pp. 39-132).

Mohebbi, P., 1996. Techniques et ressources en Iran du 7ème au 19ème siècle, Téhéran, Institut français de recherche en Iran.

Planhol (de), X., 2000. L’islam et la mer. La mosquée et le matelot. VIIème-XXème siècle, Paris, Librairie académique Perrin.

Rabino, H.-L. et D.-F. Lafont, 1911, « La culture du riz au Guilân (Perse) et dans les autres provinces du sud de la Caspienne », Annales de l’École nationale d’agriculture de Montpellier, XI (pp. 1-52).

Tabet, P., 1979. « Les mains, les outils, les armes », L'Homme , XIX (3-4) juil.-déc. (pp.5-61).

Testart, A., 1986. Essai sur les fondements de la division sexuelle du travail chez les chasseurs-cueilleurs , Paris, Les Cahiers de L’Homme, 25.

Townley, W., 1891, "Report on the Cultivation of Olives in Northern Persia", Reports on Subjects of General and Commercial Interest, N° 191, London, Foreign Office.



[1] Ce texte reprend dans ses grandes lignes une communication faite au congrès « 70 ans d’anthropologie de l’Iran » qui s’est tenu à Kerman en février 2007 à l’initiative du Laboratoire d’ethnologie de l’Organisation du patrimoine culturel, du tourisme et de l’artisanat d’Iran (Pazhueshgâh-ye mardomshenâsi-ye Sâzemân-e mirâs-e farhangi, gardeshgari va sanâye dasti-ye Irân). La transcription des termes vernaculaires adoptée est celle de G. Lazard dans sa Grammaire du persan contemporain, Téhéran, IFRI, 2006 (1ère édition 1957). Pour éviter cependant l’usage de matériel diacritique, sh (français : chez) et  zh  (français : je) sont employés à la place de signes uniques. Les noms de personnes et de lieux sont transcrits selon l’usage le plus courant dans les langues occidentales.

[2] Sur l’influence de Leroi-Gourhan sur l’ethnologie de l’Iran , voir l’article de Jean-Pierre Digard dans ce même volume.

[3] Voir Bazin et Bromberger (1991) où sont mentionnées les références bibliographiques sur lesquelles se fonde le présent aperçu.

[4] Pour une présentation générale, voir Bromberger (1986).

[5] Les cadres et les employés permanents du centre des pêcheries, situé à Ghâziân près d’Anzali, descendent, dans leur majorité, d’Azeri de Transcaucasie, vestige d’un temps où la pêche des poissons sans écailles (considérés comme harâm en islam shiite) était sous le contrôle des Russes, puis d’une société mixte irano-soviétique (voir Bazin, 1980,II : 130).

[6] Sur la notion de « système technique », voir B. Gille (1978, en particulier p. 19) et P. Lemonnier (1983).

[7] La seule étude des textes n’a pu permettre à  cet auteur (1996 : 167-168) de comprendre le fonctionnement de ces pressoirs. On n’insistera jamais assez sur la nécessaire complémentarité entre histoire et ethnographie des techniques.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le samedi 29 juin 2013 19:32
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie retraité du Cégep de Chicoutimi.
 



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